> III- INEGALITES (Généralités) : Mixité sociale, Pauvreté, Ethnicité, Laïcité... > Inégalités sociales > Concepts d’Egalité des chances, Discrimination, Intégration...... > Les faux-semblants de la méritocratie (Luc Cédelle dans Le Monde)

Voir à gauche les mots-clés liés à cet article

Les faux-semblants de la méritocratie (Luc Cédelle dans Le Monde)

1er septembre 2022

Les faux-semblants de la méritocratie
L’idée d’une hiérarchie fondée sur le mérite est un des fondements de l’école républicaine, mais une compétition équitable exigerait que tous les enfants bénéficient des mêmes conditions culturelles et socio-économiques.

Histoire d’une notion. « Je suis un pur produit de la méritocratie républicaine dont l’école est le pilier. » Prononcée le 20 mai lors de sa passation des pouvoirs avec Jean-Michel Blanquer, cette phrase fut l’une des premières de Pap Ndiaye en tant que ministre de l’éducation nationale. Selon Le Robert, la méritocratie désigne la « hiérarchie sociale fondée sur le mérite ». Son invocation semble couler de source : qui peut être contre les efforts à fournir pour acquérir un savoir et contre le mérite qui en découle ?

Mais la mesure de ce mérite se dérobe. Comment, dans les résultats scolaires, distinguer ce qui relève de l’effort fourni, de dispositions personnelles ou du contexte familial et relationnel ? A résultat égal, un enfant sera immensément méritant et un autre n’aura eu qu’à s’acquitter d’une formalité. D’autres complexités surgissent lorsque l’on passe d’une situation ponctuelle (untel a bien travaillé, bravo) à une caractérisation durable (untel travaille toujours bien, c’est un « bon élève »), et du registre individuel à la dimension politique signifiée par la notion de « méritocratie ».

De ce fait, elle est associée à celle de « l’égalité des chances » : une compétition équitable exigerait que tous soient placés dans les mêmes conditions culturelles et socio-économiques. Ce n’est évidemment pas le cas et c’est pourquoi le système scolaire s’assigne un devoir de compensation : dans son article 1, le code de l’éducation stipule que le service public de l’éducation « contribue à l’égalité des chances ». Il précise que, « dans le respect de l’égalité des chances, des aides sont attribuées aux élèves et aux étudiants selon leurs ressources et leurs mérites ». Garante de la méritocratie et au cœur des discours sur l’école, l’égalité des chances a donc le statut ambivalent d’un principe de fonctionnement proclamé et d’un idéal toujours à atteindre.

Lire aussi la tribune : Article réservé à nos abonnés « La croyance selon laquelle le mérite détermine la réussite est fausse »
La méritocratie, note le sociologue François Dubet à propos des paroles « rituelles » de Pap Ndiaye, est qualifiée de « républicaine », en référence à l’école de Jules Ferry. Pourtant, celle-ci « pratiquait plutôt l’élitisme républicain, consistant à sélectionner “les meilleurs des enfants du peuple’’, susceptibles de suivre une scolarité longue, sans se soucier d’organiser une quelconque “égalité des chances’’ pour les autres », rappelle le sociologue qui, d’un ouvrage à l’autre, appelle depuis plus de vingt ans à davantage d’attention pour les vaincus de la compétition scolaire. Les faux-semblants de la méritocratie
L’idée d’une hiérarchie fondée sur le mérite est un des fondements de l’école républicaine, mais une compétition équitable exigerait que tous les enfants bénéficient des mêmes conditions culturelles et socio-économiques.

Extrait de lemonde.fr du 01.09.22

 

Voir :
la sous-rubrique Concepts d’Egalité des chances, Discrimination, Intégration......
les mots-clés Mérite, Excellence (gr 5)/
et Concepts : Educ. prior, Discrimin. positive, Egalité des chances...

 

Voir aussi Un dossier du Monde sur la pénurie d’enseignants : - "Un problème qui existe presque partout en Europe" - un entretien avec Xavier Pons (Lyon I) + - 4 ouvrages de la rentrée présentés par Luc Cédelle

Répondre à cet article