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« Devoirs faits » hors la classe au collège Evariste GALOIS à Sevran (93)
Au collège [REP+] Evariste Galois de Sevran (93), pour la deuxième année, les élèves ont la possibilité de faire leurs devoirs en plein air et d’explorer plus largement de nouvelles pratiques au service de leurs apprentissages.
Au collège Evariste GALOIS de SEVRAN (93), le dispositif est proposé tout au long de l’année, en plein air ou sous le préau selon les périodes.
Enseignantes impliquées (en co-intervention) :
GOSSELIN Marine : enseignante de physique-chimie et professeure principale de 6e.
KHERNANE Nidal : enseignante en SVT et professeure principale de 6e.
Un retour sur la chronologie du projet.
Initié au printemps 2024, ce projet a pour objectif de permettre aux élèves de parcourir une multitude de modalités d’apprentissages dans un environnement extérieur, en s’appuyant sur les besoins et les demandes des élèves, actualisés à la lumière de leur progression. Des points d’étape en concertation avec les élèves sont prévus pour affiner les priorités de travail et rendre visible les bénéfices pour les élèves.
L’année dernière, la mise en œuvre s’est faite à la suite d’un temps d’échange avec une classe de 3e, où les besoins recensés pour travailler ont fait état d’une volonté de bouger et d’interagir avec les pairs dans un espace ouvert. La salle de classe étant trop petite et la salle polyvalente occupée, il a été décidé de migrer vers la cour, disponible lors du créneau « devoirs faits » de l’emploi du temps des élèves.
Une nouvelle approche de travail en plein air, habituellement réservée certaines disciplines (ex : EPS…), l’utilisation de supports variés, ainsi qu’une valorisation explicite de l’erreur ont contribué à renforcer les bienfaits des essais multiples et des améliorations successives dans la production d’écrits.
Une fiche de matériel fut mise à disposition pour les élèves, le professeur s’engageant à apporter les objets demandés pour la séance suivante. La ligne de conduite du groupe était de se mettre en démarche d’apprentissage, l’espace d’évolution étant la cour de récréation.
La mise au travail du groupe classe s’est faite rapidement, les élèves ont tout de suite fait la différence entre être dehors pour s’amuser et être dehors pour travailler.
Les besoins et les envies des élèves ont permis de naviguer à travers une multitude de modalités de travail, qui ont abouti au final à un transfert de compétence lors de situations d’apprentissages plus conventionnelles, dans une salle de classe.
Exercices en mathématiques (niveau 3e) : calculs impliquant des puissances
Mémorisation de la leçon en physique-chimie (niveau 3e) : histoire des sciences (les conceptions passées de l’atome)
Certains groupes ont spontanément migré vers le jeu et les défis lancés pour tester la mémorisation. Au fur et à mesure des séances, les demandes de matériel émergeaient (des craies pour écrire au sol, des balles à se lancer pour favoriser les mémorisations de leçons, des timers pour quantifier la durée d’accès à la leçon avant une mini-évaluation par les camarades de classe).
Le rôle de l’enseignant était d’accompagner chaque élève dans le parcours d’apprentissage choisi à chaque séance (identification du travail à faire, aide à la gestion du matériel, vérification de la mémorisation, conseils et feedbacks pour la suite de la séance ou la prochaine séance).
En 3e, les élèves ont émis le souhait de travailler des thématiques spécifiques à la fin de cycle 4, telles que l’orientation, la préparation de l’oral du DNB et la gestion du stress lié aux examens de fin d’année.
Ces conclusions ont nourri la volonté des enseignantes de poursuivre cette action pour l’année 2024-2025.
Cette année, le dispositif est proposé pour les classes de 6e.
Une séance s’articule en trois grandes étapes :
Le début de séance concerne la mise en place du cadre de travail (espace et durée), la récupération du matériel nécessaire et la projection des actions à mettre en œuvre au cours de la séance pour effectuer le travail. Un point rapide est fait sur la disponibilité pour les apprentissages via l’outil des lignes de ressentis (émotions, énergie et disponibilité).
Les questions que les élèves se posent sont :
« Ce que j’ai à faire ? » Démarrer, poursuivre, terminer, révisions, exercices, leçons, aider, être aidé.e ou aider, discipline(s), comprendre les consignes, métacognition (fiches, journal des apprentissages…)
« Et si je n’ai pas de travail à faire ? » Soit l’élève reprend ce qu’il a appris le jour même (journal des apprentissages), soit des ressources sont proposées pour l’élève (exercices, proposition de tutorat entre pairs…).
Le corps de séance est la phase de mise au travail et d’utilisation des ressources. Ce travail se fait en groupe, individuellement, sur une ou plusieurs disciplines et selon les envies des élèves.
Les dernières minutes sont consacrées à la récolte des ressentis (et comparaison avec le début de séance). Puis, les élèves discutent de la prochaine séance (améliorations à apporter et nouvelles demandes).
Le travail d’équipe et la communication au sein de la classe se traduisent par de l’entraide sur les processus d’apprentissages ayant fonctionné afin d’aider le/la camarade, puis un partage de conseils. Certains élèves ayant terminé leurs devoirs se placent en posture de tutorat pour aider les camarades de classe à avancer également. Une cohésion plus forte du groupe est visible.
Les élèves sont également motivés pour utiliser la surface du sol et les craies afin de mémoriser certaines notions et de s’entrainer en réalisant les exercices proposés. La cour constitue alors une surface d’écrit préparatoire, semblable à un “cahier de brouillon géant” qui accueille le cheminement de pensées et corrections d’un élève ou d’un groupe de pairs. Écrire sur le sol rend perceptible les processus d’apprentissage souvent invisibilisés, « cachés dans la tête des élèves ». La discussion se fait plus rapidement en prenant pour appui les démarches mobilisées par l’élève. Le groupe constate la progression ce chacun et la montée en compétence de toutes et tous.
Les compétences liées à la formation du citoyen telles que le travail en équipe, l’exercice de l’esprit critique mais aussi la maîtrise de l’expression de ses opinions et sentiments sont travaillées lors de ces séances. En effet, le travail peut être fait à plusieurs pour mieux comprendre les attendus des consignes ou encore réfléchir de manière collective et donner lieu à des débats autour de notions implicites convoquant ainsi des compétences transversales liées à la posture d’élève.
L’oral devient un moyen d’étayer avec méthode son point de vue, tout en accueillant celui des autres (à égale valeur). Même en situation de désaccord, les élèves profitent de l’espace pour se sentir libre de bouger, s’isoler, accueillir et réguler des émotions parfois désagréables, puis revenir au sein du groupe quand la disponibilité émotionnelle pour travailler avec les pairs est de retour.
Pour les élèves en difficulté, ayant un besoin de travailler par mimétisme, le dispositif offre des exemples plus concrets de mise en œuvre (et une modalité alternative de travail) tout en enrichissant un carnet des apprentissages illustré par les productions photographiées des élèves. Garder une trace des réflexions et processus facilitent le retour métacognitif pour la classe et l’enrichissement de la culture commune du groupe-classe et un affinage des indicateurs de progressions disciplinaires et transversaux.
Laisser place à l’imagination des élèves pour animer la pensée.
Carte blanche et créativité étant les seules consignes données pour faire ses devoirs, les élèves s’engagent plus facilement dans les apprentissages car ils ont la possibilité de travailler selon une modalité de leur choix. Il n’y a pas de marche à suivre qui prévaut pour se mettre en action. Travailler dehors n’exige aucune contrainte, si ce n’est celle de laisser libre court à son imagination pour répondre aux attendus.
Lors de la séance proposée à une classe de 6e, le travail à faire portait sur la création de calligrammes en français, autour d’un objet inspirant. Voici des exemples de productions d’élèves : une pomme, un nuage, des notes de musique, un loup, un cartable…
Chez certains élèves, la concentration passe par un état statique, assis sur un banc ou même sur le sol. Chez d’autres, la nécessité de mouvement se fait sentir et s’en suivent des balades autour de la cour où l’on mémorise en répétant inlassablement le vocabulaire d’anglais ou les dates importantes de la leçon d’histoire. Ce constat devient une évidence au fil des séances : le corps en mouvement accompagne l’esprit en mouvement, le tout en autonomie.
La pratique par le mouvement a clairement permis à certains élèves d’améliorer leur bien-être et d’aborder les évaluations avec plus de sérénité (droit à l’erreur, réactivation mnésique au travers de stimuli environnementaux, gestion plus sereine des émotions, canalisation lors des interventions à l’oral en classe avec adaptation du volume de la voix). Ce dispositif vient en appui du projet « bien-être et CPS » en 6e où des ateliers sont proposés pour outiller les élèves.
L’erreur comme source d’amélioration.
Les élèves craignent moins l’erreur et essaient plus facilement de résoudre des problèmes. Ils conscientisent que l’erreur est une étape de l’apprentissage et non un frein. Cela leur permet également de faire plusieurs essais et de comprendre leurs erreurs passées ce qui renforce l’apprentissage. Lorsque le travail est fait sur le sol, il est également rendu plus visible par les camarades qui vont pouvoir aider quelqu’un qui a commis une erreur ou qui est en difficulté. L’entraide se fait alors instinctivement.
Les enseignantes ont remarqué qu’écrire sur le sol dérangent moins les élèves que d’écrire sur le cahier, ils s’engagent plus facilement dans la tâche et ne craignent pas le regard porté sur leur travail. Le sentiment d’efficacité et la liberté que cela apporte ont généré des corrections mutuelles autonomes et spontanées entre pairs avec beaucoup de suggestions pour améliorer le travail de l’autre (maîtrise de la langue, processus réflexif). Le sol constitue un cahier commun, support de bienveillance et de réussites partagées y compris les plus petites.
La production d’écrits dans ces conditions était rassurante pour certains élèves car une fois la pluie venue, ce brouillon s’effaçait naturellement, ce qui matérialise symboliquement un droit à l’erreur comme étape d’un processus d’apprentissage.
Travail en autonomie seul(e) ou par petits groupes
Exercices en mathématiques (niveau 3e) : calculs impliquant des puissances
Mémorisation de la leçon en SVT (niveau 6e) : les composantes du paysage