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Enquête OZP. L’évaluation de la refondation de l’éducation prioritaire (142 p.)

10 octobre 2020

Le texte intégral (142 p) est consultable sous trois formats :
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 2. Ci-dessous sous format htlm (non paginé) avec les 10 éléments successifs regroupés sur une seule page web ;
 3. En 10 fichiers séparés sous format htlm, ce qui permet de consulter au choix l’analyse de l’un ou l’autre des 6 axes du référentiel. Pour une première approche des résultats, voir la Première partie : "L’enquête et ses résultats" (Elément 2).
Les notes du texte sont placées à la fin des éléments concernés.

 

 

ELEMENT 1

ENQUÊTE SUR LA MISE EN ŒUVRE
DE LA REFONDATION DE L’ÉDUCATION PRIORITAIRE

RÉALISÉE PAR L’OZP
(OBSERVATOIRE DES ZONES PRIORITAIRES)

MAI 2019 – MAI 2020

Liste des membres du comité scientifique et des contributeurs

Anne Armand
Marc Bablet
Viviane Bouysse
Marc Douaire
François-Régis Guillaume
Martine Husson
Françoise Lorcerie
Jean-Yves Rochex
Jean-Michel Zakhartchouk

Directeur de la publication : Marc Douaire

Table des matières
Liste des membres du comité scientifique et des contributeurs 3
Introduction 8

PREMIÈRE PARTIE : L’ENQUÊTE ET SES RÉSULTATS 10
PRÉSENTATION DE L’ENQUÊTE 11
1. Nature de l’enquête 11
2. Organisation du questionnaire 13
3. Dépouillement des réponses 15

BILAN SYNTHÉTIQUE DE LA MISE EN ŒUVRE DU RÉFÉRENTIEL 16
1. Résumé des réponses concernant les six axes du référentiel 16
1.1 « Lire, écrire, parler » et enseigner plus explicitement 16
1.2 Bienveillance et exigence 17
1.3 La coopération avec les parents et les partenaires 18
1.4 Le travail collectif de l’équipe éducative 19
1.5 L’accueil, la formation, le soutien des personnels 20
1.6 Le pilotage et l’animation des réseaux 20
2. Bilan des acquis 21
3. Bilan des obstacles 24
4. Bilan des leviers 25
CONCLUSION : QUEL BILAN DE L’EXPÉRIENCE DE LA REFONDATION ? 26

DEUXIÈME PARTIE : ANALYSE DÉTAILLÉE DES RÉPONSES CONCERNANT LES AXES DU RÉFERENTIEL 30
AXE 1 : GARANTIR L’ACQUISITION DU « LIRE, ÉCRIRE, PARLER » ET ENSEIGNER PLUS EXPLICITEMENT 31
1. Les évolutions positives concernant les pratiques de classe et le travail collectif 31
1.1 Deux attentes du référentiel massivement mentionnées 31
1.2 Des évolutions moins souvent nommées qu’espéré 32
1.3 Une prise en compte plus collective des apprentissages langagiers 33
2. Les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 1 33
2.1 Les obstacles sociétaux et culturels 33
2.2 Les obstacles qui relèvent des acteurs 34
3. Les leviers pour améliorer la situation 35
3.1 Les leviers dépendants d’une décision extérieure aux acteurs 35
3.2 Les leviers dépendants des acteurs eux-mêmes 36
3.3 Les leviers « mixtes » alliant initiatives des acteurs et ressources extérieures 36
Conclusion 37
Axe 2 : Conjuguer bienveillance et exigence dans le REP/REP+ 39
1. Les évolutions positives 39
1.1 Regard d’ensemble sur les réponses 39
1.2 Des concepts mal cernés, le référentiel mal connu 40
1.3 Pourtant, une transformation professionnelle bien réelle 41
2. Les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 2 43
2.1 Contresens sur les notions de bienveillance et d’exigence 44
2.2 Les obstacles imputés aux fonctionnements institutionnels 45
2.3 Les obstacles relevant des personnels 46
2.4 Les obstacles imputés aux familles 47
3. Les leviers 48
3.1 Les leviers relevant de décisions aux niveaux supérieurs 48
3.2 Les leviers dépendant de l’initiative des réseaux 49
3.3 Des leviers comme autant de critiques implicites 50
Conclusion 50
Axe 3 : Coopérer utilement avec les parents et les partenaires 52
1. Les évolutions positives concernant les pratiques de classe et le travail collectif 52
2. Les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 3 55
2.1 Du côté de l’École 55
2.2 Du côté des partenaires 56
2.3 Du côté des parents d’élèves 56
3. Quels leviers pour améliorer la situation ? 57
Conclusion 58
Axe 4 : FAVORISER LE TRAVAIL COLLECTIF DE L’ÉQUIPE ÉDUCATIVE 60
1. Les questions portant explicitement sur le travail collectif 60
1.1 L’expression du collectif dans les réponses aux questions fermées 61
1.2 Collectif réalisé et collectif souhaitable dans les réponses rédigées 63
2. Collectif, dédoublements et Maîtres+ 64
2.1 Rappel de l’histoire récente et contexte de l’analyse 64
2.2 Les dédoublements des CP et CE1 65
2.3 Les maîtres+ ou Plus de Maîtres que de Classes 66
2.4 Les dédoublements intéressent-ils les collèges des réseaux ? 68
3. Le travail collectif et les cycles 68
3.1 Ce qu’on dit des cycles 68
3.2 Pour quels besoins et selon quelles modalités le travail collectif s’est-il développé ? 69
3.3 Descriptions d’un ou deux temps de travail collectifs significatifs 70
3.4 Les obstacles au travail collectif 71
3.5 Le réseau : un lieu du travail collectif encore à consolider 71
Conclusion 72
AXE 5 : Accueillir, accompagner, soutenir les personnels 73
1. Quelles réussites concernant l’accueil et la formation des personnels ? 73
1.1 L’accueil des nouveaux arrivants 73
1.2 La formation et la question du temps dédié 73
2. Quelle élaboration collective pour dégager les priorités de formation ? 74
3. Quels obstacles à l’efficacité des formations ? 74
3.1 Un consensus autour de trois obstacles 74
3.2 D’autres obstacles moins souvent mentionnés 75
4. Quelle formation pour répondre aux besoins des professionnels et des élèves ? 75
4.1 Des exemples de formations réussies 75
4.2 Caractérisation d’une formation réussie 76
4.3 Des formations non réussies 77
Conclusion 77
AXE 6 : RENFORCER LE PILOTAGE ET L’ANIMATION DES RÉSEAUX 79
1. Qui sont les pilotes ? Quelles instances ? 79
1.1 Qui pilote ? 80
1.2 Quelles instances ? 82
1.3 Positions différentes des répondants dans le réseau 83
2. Quel projet ? Quel pilotage ? Quel réseau ? 84
2.1 Pilotage et projet de réseau 85
2.2 Manque de pilotage ou faible sentiment d’appartenance au réseau 85
2.3 Coupure entre premier et second degrés 86
2.4 Pilotage national, académique, départemental et « verticalité » 86
3. Quels leviers pour améliorer le pilotage et l’animation du réseau ? 87
3.1 Le temps 87
3.2 Formation des pilotes, profil et recrutement 88
3.3 Le rôle du coordonnateur 88
3.4 Le contenu du pilotage et du projet 88
Conclusion 89

TROISIÈME PARTIE : LES RÉPONSES AUX AUTRES QUESTIONS 93
QUESTIONS 0 : CONTEXTE SCOLAIRE ET CONNAISSANCE DU REFERENTIEL 94
1. Évolution du contexte d’enseignement 94
1.1 Amélioration de la situation 94
1.2 Dégradation de la situation 97
2. Connaissance du référentiel 100
2.1 Connaissance déclarée (Q 0.3 – 0.4 – 0.5) 100
2.2 Connaissance constatée, appropriation et transmission du référentiel 104
QUESTION 7 : LES RÉSULTATS DES ÉLÈVES 106
1. Les évolutions jugées positives ou négatives 106
1.1 Analyse numérique des réponses 106
1.2 Caractérisation des évolutions 106
2. Explications des évolutions positives 107
3. Explications des évolutions négatives ou nulles 108
QUESTIONS 8 ET 9 : ÉTAT DES LIEUX 2014 – 2019 - ÉVOLUTION DES MOYENS HUMAINS 110
1. La situation sociale des écoles, collèges ou réseaux (questions 8.1 - 8.2) 110
2. État des lieux relatif aux « ressources humaines » (questions 8.3 - 8.9 et 9) 112
2.1 Enseignants du premier degré 112
2.1 Enseignants du second degré 113
2.2 Encadrement, formateurs et coordonnateurs 115
2.3 Évolutions des ressources humaines 116
3. La question des ressources humaines dans l’ensemble de l’enquête 117
QUESTIONS 10 ET 11 : RÉACTIONS DES RÉPONDANTS 118

QUATRIÈME PARTIE : QUESTIONS EN DÉBATS 120
Évaluation des élèves, évaluation du réseau 121
Projet et pratiques de classes 125
Autonomie pédagogique et prescriptions pédagogiques 128
Politique nationale / politiques académiques 131
Cités éducatives, partenariat et cœur de la classe 135
L’éducation prioritaire et ses personnels 137
INDEX DES SIGLES 140


Introduction

La circulaire ministérielle de 2014 refondant l’éducation prioritaire précisait que l’ensemble des projets de réseaux ainsi que la carte de la géographie prioritaire devaient être évalués au terme d’une période de cinq ans, soit en 2019. Il s’agit là d’une étape importante pour améliorer et renforcer cette politique afin qu’elle puisse mieux contribuer à la réussite des élèves des quartiers défavorisés.

L’OZP, association indépendante fondée en 1990, constatant l’absence d’initiative ministérielle, a décidé de prendre ses responsabilités en proposant une évaluation publique de l’éducation prioritaire sur la période 2014/2019.

L’actualité politique de ces derniers mois a replacé au premier plan la question des inégalités sociales, des fractures territoriales et de l’efficience des politiques publiques censées y répondre. La question sociale est centrale dans le traitement des inégalités en particulier concernant la politique scolaire. « L’École est le moment où les différences des enfants deviennent des inégalités. Les écarts, aujourd’hui, sont entérinés plus que contrebalancés » (Bernard Lahire). Le système éducatif français prend mal en compte les élèves qui, du fait de leur origine sociale, ne sont pas en connivence avec les codes et la culture scolaires. Pour beaucoup d’entre eux, cette école n’apparaît pas comme une école émancipatrice par les savoirs et les cultures mais comme une machine qui classe, trie et conduit à l’échec et à la perte de l’estime de soi. Pour qui refuse l’idéologie libérale de sélection naturelle dès l’enfance s’impose la nécessité d’une politique scolaire en rupture avec ce modèle afin que l’école publique soit vraiment l’école de tous et en particulier pour les élèves qui vivent dans les quartiers populaires.

En réalité, cette politique de rupture existe depuis 1981, elle se nomme « politique de l’éducation prioritaire ». Une telle affirmation se trouve confirmée dans le rapport de la Cour des comptes publié en octobre 2018. Le rapport reconnaît que « cette politique, placée au cœur des enjeux sociaux et territoriaux, a réussi à contenir les écarts de réussite scolaire dans un contexte de dégradation de son environnement social et territorial. Cette politique constitue le principal outil pour répondre aux failles du système scolaire en termes d’équité et d’efficacité ».

Tout a été dit par la Cour des comptes et la responsabilité du ministre de l’Éducation nationale est bien de tout mettre en œuvre pour améliorer et conforter cette politique prioritaire. Or, ce n’est pas le choix qui a été fait. L’OZP, reçue le 20 avril 2018 par le cabinet du ministre, a rappelé l’engagement ministériel pris en 2014 de procéder en 2019 à une évaluation des projets des réseaux et de la carte de l’éducation prioritaire. Le ministre a décidé de ne pas respecter cet engagement et, depuis plusieurs mois, se succèdent différents rapports qui, sans aucun bilan précis de ce qui est réellement réalisé dans les réseaux ni prise en compte de l’expérience des professionnels engagés, préconisent des remises en cause radicales de la politique et de la carte de l’éducation prioritaire (notamment rapport du CNESCO sur les collèges parisiens, de France Stratégie, du Sénat et enfin rapport Azéma / Mathiot remis début novembre 2019 au ministre).

Ce dernier rapport a suscité de nombreuses réactions d’inquiétude dans le monde de l’éducation prioritaire. Il se place dans le cadre fixé préalablement par la politique ministérielle : celui des politiques territoriales visant à englober sous cette appellation fourre-tout les questions relevant de la ruralité, de l’éloignement scolaire, de l’outre-mer et de l’éducation prioritaire. Le risque est grand de confondre des politiques publiques très spécifiques, de remettre en cause leurs légitimités et de n’atteindre aucun objectif de réduction des inégalités.

Ce rapport apparaît hors sol, ne prenant pas en compte le travail engagé par de nombreux réseaux depuis la refondation de l’éducation prioritaire, les projets pédagogiques et les transformations professionnelles à l’œuvre qui font que l’éducation prioritaire constitue un ensemble vivant en pleine évolution.

Enfin, le souci de continuité des politiques publiques affiché par les auteurs aurait dû les conduire à préconiser une évaluation de l’éducation prioritaire refondée. Faute de quoi, en concentrant leurs propositions sur ce qui apparaît comme un dynamitage de la carte de l’éducation prioritaire, les auteurs prennent le risque d’effacer le contenu même de cette politique.

C’est dans ce contexte que l’OZP a décidé de prendre ses responsabilités et de construire une évaluation publique de l’éducation prioritaire refondée afin de mesurer ses effets à partir des expériences des professionnels engagés. Décider et entreprendre cette évaluation c’est vouloir rompre avec le pilotage national discontinu de l’éducation prioritaire depuis presque 40 ans. C’est vouloir permettre la visibilité et la capitalisation des transformations pédagogiques, éducatives et professionnelles engagées par de nombreux réseaux d’éducation prioritaire. C’est vouloir identifier les réussites et les blocages de cette politique qui est historiquement la seule à porter le principe de la lutte contre les inégalités sociales dans le domaine scolaire.

Pour construire et mener ce travail, l’OZP a constitué un conseil scientifique réunissant des personnalités reconnues pour leur expertise et leur engagement professionnel en faveur de l’éducation prioritaire. Le séminaire de travail du 9 février 2019 a permis d’élaborer des premiers documents d’évaluation régulatrice à destination des réseaux d’éducation prioritaire. Le conseil scientifique de l’OZP a construit à partir des travaux du séminaire un document d’auto-évaluation proposé sous la forme d’une enquête collaborative et adressée aux réseaux. La journée nationale de l’OZP du 18 mai 2019 a permis une première présentation des résultats de cette enquête. La tenue du séminaire du 30 novembre 2019 (le douzième séminaire national de l’OZP) a permis de prolonger et d’approfondir ce travail. Intitulé « Bilan et perspectives pour l’éducation prioritaire », il s’est situé dans la continuité du travail collectif engagé un an auparavant, et présenté publiquement le 7 novembre 2018.

 

 

ELEMENT 2

PREMIÈRE PARTIE : L’ENQUÊTE ET SES RÉSULTATS

PRÉSENTATION DE L’ENQUÊTE

1. Nature de l’enquête

L’enquête porte sur des questions majeures pour la réussite de la refondation de l’éducation prioritaire : l’usage du référentiel de 2014 et le renforcement d’un enseignement exigeant et bienveillant des connaissances et compétences qui creusent le plus les écarts sociaux, le climat scolaire, la formation des personnels, le travail collectif dans le réseau, le pilotage à tous les niveaux, la gestion des ressources humaines et des moyens engagés.

L’enquête OZP ne s’apparente pas à une enquête officielle conduite par un service ministériel : elle n’en a pas les moyens et elle repose sur le volontariat et non sur l’injonction. L’enquête se présente de manière à permettre ou faciliter les échanges au sein des équipes de réseaux. Comme c’est, en outre, une enquête qui pouvait être renseignée de manière parfaitement anonyme, elle bénéficie du fait de ne pas s’inscrire dans la logique du conformisme à l’ordonnateur de l’enquête dont souffrent les enquêtes officielles, qui recueillent parfois des réponses convenues qui ne sont pas toujours en phase avec la réalité.

Dans les territoires où le service public d’éducation n’assure pas de facto sa mission de façon attendue (territoires qui ont été choisis selon une méthode rigoureuse (1) validée par la Cour des comptes dans son rapport de 2018), au-delà de l’attribution de moyens pour faire baisser le nombre d’élèves par classe, pour développer la co-intervention et les concertations entre professionnels, l’éducation prioritaire refondée se traduit par :
  des mesures d’organisation : un fonctionnement en réseau pour rapprocher les cultures professionnelles du premier et du second degré, le cycle 3 rassemblant CM1, CM2 et 6ème et des instances assurant ce fonctionnement,
  du temps et des moyens pour développer la formation à l’intérieur des réseaux,
  des fonctions spécifiques : coordonnateurs, formateurs éducation prioritaire (FEP), professeurs référents,
  un recentrage sur les pratiques professionnelles et des préconisations pédagogiques : le référentiel de l’éducation prioritaire.

Il s’agit en effet de faciliter l’évolution des pratiques pédagogiques et éducatives à travers la formation de collectifs professionnels inscrits dans une perspective d’amélioration de leurs pratiques pour mieux répondre aux besoins des élèves des milieux populaires.

La question posée devient : où en sont aujourd’hui ces évolutions nécessaires de tous les métiers et de toutes les pratiques de l’éducation ?

L’initiative de l’OZP ne pouvait avoir pour objet d’évaluer les performances scolaires des réseaux. Une telle évaluation demanderait, outre des outils d’évaluation des connaissances et des compétences dûment validés, une recherche lourde clarifiant quatre séries de données :
  Quelle évolution de la difficulté sociale et des tendances ségrégatives (enseignement privé, dérogations notamment) ?
  Au-delà des moyens budgétaires, quelle évolution réelle des moyens humains : contractuels, remplacements, instabilité des personnels ?
  Quelle mise en œuvre effective des préconisations pédagogiques de la refondation de l’éducation prioritaire et de l’école ?
  Quelles évolutions des savoirs et compétences des élèves à l’échelle des réseaux ?

L’enquête porte sur une auto-évaluation de la mise en œuvre par les équipes et les pilotes locaux des préconisations de la refondation visant le travail des acteurs. Elle tente de répondre à trois questions précises :
  Qu’est-ce qui a été effectivement vérifié dans le diagnostic de départ de la refondation ?
  Qu’est-ce qui a été effectivement mis en œuvre par les réseaux, surtout avec quelle continuité ?
  Qu’est-ce que les acteurs de terrain ont adopté ou essayé dans ces préconisations ?

Il s’agissait de répondre à ces questions, non en faisant conduire des observations par des personnes extérieures aux réseaux ou en étudiant les données d’un appareil statistique élaboré (perspectives qui auraient certainement pu être mises en œuvre en complément si le ministère avait maintenu les orientations de la refondation ou avait décidé de l’évaluer avant d’envisager de modifier les orientations pour l’éducation prioritaire), mais en écoutant les acteurs (enseignants et personnels vie scolaire, directeurs, pilotes, inspecteurs, principaux essentiellement, coordonnateurs, formateurs de tous statuts) considérés comme les premiers experts de l’action à conduire dans leurs réseaux et parfaitement capables d’auto évaluation. Personnels qui ne sont malheureusement pas actuellement invités à une concertation sur les évolutions à venir.

En conséquence cette enquête n’est ni une recherche, ni un rapport des inspections générales, ni une évaluation d’impact. Elle constitue en revanche une ressource pour mettre en évidence un état de la pensée pédagogique actuellement à l’œuvre dans l’éducation prioritaire, une identification des obstacles rencontrés par les professionnels pour mettre en œuvre les préconisations reconnues de la refondation et une ouverture sur ce qu’il conviendrait de faire pour améliorer encore les pratiques favorables à la réduction des écarts de résultats entre l’éducation prioritaire et hors éducation prioritaire. L’enquête a reçu 268 réponses. Si nous pouvons considérer que ce nombre justifie une étude globale grâce au fait que nos répondants sont des personnes engagées dans leurs réseaux qui prennent le temps de répondre à une enquête de plus (non obligatoire), en revanche ces réponses ne nous permettront pas de rentrer dans des considérations locales au niveau de chaque académie. Car même si les résultats laissent parfois penser que les pilotages académiques sont hétérogènes, nous préférons ne pas risquer des erreurs d’interprétations compte tenu de la faiblesse du nombre de réponses concernant certaines d’entre elles. Cela ne nous empêchera pas parfois de tenter des comparaisons globales. De la même manière, compte tenu de la faible représentation de certains métiers dans les réponses, nous ne ferons qu’exceptionnellement référence aux réponses par catégorie professionnelle. Il faut enfin préciser que les lieux d’exercice ne nous ayant pas été toujours donnés, nous ne pouvons distinguer les réponses venant de REP ou de REP+. Toutefois, certains répondants nous disent parfois clairement dans quel type de réseau ils exercent et nous ne manquerons pas de signaler certains problèmes propres à ces différences.

Même s’il n’est plus alimenté par le ministère depuis septembre 2019, le site maintenu par CANOPE (2) est une ressource pour toute personne qui souhaite des précisions sur les différents items du référentiel. Chacun peut y trouver des exemples d’actions conduites en éducation prioritaire, des références théoriques. Le centre Alain Savary a suivi cette même démarche en organisant une partie de ses ressources autour du référentiel (3). Enfin le site de l’OZP est particulièrement riche pour repérer l’ensemble des discussions suscitées par l’éducation prioritaire et tous les discours politiques et pédagogiques et de recherche tenus à son endroit. Il est également porteur de nombreux exemples d’actions ou de projets qui présentent ce que les réseaux de l’éducation prioritaire veulent donner à voir de leur activité.

2. Organisation du questionnaire

L’enquête a été construite en croisant plusieurs approches professionnelles et militantes mais avec une grande cohérence de point de vue articulée de façon systématique sur le référentiel de 2014.

• Le référentiel de l’éducation prioritaire - Rappel historique

Le référentiel de l’éducation prioritaire (4), outil repère pour les équipes d’éducation prioritaire, est organisé en six grandes thématiques qui ont vocation à être travaillées toutes ensemble dans les réseaux d’éducation prioritaire et qui engagent tant les enseignants que les pilotes locaux académiques ou nationaux. Il ne pouvait être diffusé sans accompagnement, soutien et valorisation des équipes. C’est la raison pour laquelle plusieurs sessions de formations de formateurs ont été conduites pour développer un accompagnement des réseaux au plus près de leurs besoins.

Le référentiel diffusé à partir de janvier 2014, élaboré pour les acteurs de l’éducation prioritaire, a pour ambition de donner des repères fondés sur ce que l’on sait des déterminants de la réussite des apprentissages en milieu populaire grâce aux travaux de la recherche, aux inspections générales et à l’expérience cumulée des acteurs de l’éducation prioritaire. Ce n’est pas un texte circulaire injonctif : c’est un document de référence qui fait appel à l’intelligence des acteurs qui choisissent de s’en emparer pour conduire leur action.

Le référentiel tire son origine du diagnostic établi en juillet 2013 dans le cadre de la modernisation de l’action publique (5) à la demande du ministre. Ce rapport discutait l’efficacité de l’éducation prioritaire en pointant notamment l’absence d’objectifs opérationnels suffisamment précis donnés à cette politique : « Ainsi, l’éducation prioritaire s’est-elle progressivement vu assigner des objectifs opérationnels très divers tant en ce qui concerne les élèves que leurs familles (objectifs sociaux, de santé, culturels, éducatifs, pédagogiques, d’orientation, d’insertion professionnelle...) sans que ceux-ci aient été vraiment formalisés, ni toujours suivis dans leur mise en œuvre, ni véritablement évalués quant à leurs résultats. » Il mettait donc en cause l’absence de repères donnés aux enseignants, les illusions de l’innovation et de la spontanéité du terrain, alors que dans le même temps il constatait qu’il existait de nombreux travaux de recherche ou des inspections générales qui permettaient de savoir quelles étaient les pistes qu’il était souhaitable de partager. Il constatait aussi que l’on faisait trop peu de cas des pratiques mises en œuvre dans les réseaux qui obtenaient de très bons résultats, c’est-à-dire qui parvenaient à réduire les écarts de réussite des élèves de milieux populaires par rapport aux autres. Il insistait en particulier sur la qualité de la continuité école collège dans nombre de réseaux, continuité qui favorisait un meilleur suivi des élèves, plus efficacement en éducation prioritaire que dans le reste du système éducatif.

A l’issue de ce diagnostic, il a été décidé de consulter largement les acteurs de l’éducation prioritaire sur les objectifs, moyens et modalités de l’éducation prioritaire à partir de la rentrée 2013. Une démarche en deux temps a permis d’abord l’expression de chacune des écoles et de chacun des collèges sur les questions posées par le diagnostic, sur les fruits de leur expérience et sur des propositions à faire (lors de demi-journées banalisées). Ensuite des assises régionales ont permis de faire une synthèse des propositions qui sont remontées au ministère. Les thèmes posés initialement furent : éducation et pédagogie, accompagnement et formation, usage des moyens disponibles, travail en équipe, réseau et pilotage, conformément aux remarques portées par le diagnostic. Trois groupes de travail constitués au ministère de professionnels aguerris (tant de l’administration centrale que des académies et des réseaux) se sont emparés du même questionnement avec des appuis universitaires, des données de la recherche et des travaux des inspections générales et des premières remontées de terrain pour élaborer le référentiel. Ce fut un exemple de travail collectif durable, étayé en inter-métiers.

C’est à partir des grandes perspectives tracées par le diagnostic que les acteurs et les groupes de travail ont constitué les orientations proposées par le référentiel. Ils se sont appuyés sur les données des rapports des inspections générales, notamment celui de 2006 dit « Armand Gille » mais aussi d’autres rapports qui font référence relativement aux questions pédagogiques comme celui de 2005 qui concerne l’évaluation des acquis des élèves (6). Ils ont aussi travaillé à partir de nombreuses données de la recherche qui depuis les travaux du CRESAS dans les années 80 en passant par ceux de l’équipe ESCOL des années 90 (équipe de recherche toujours active aujourd’hui sur ces thématiques) portent sur les publics concernés par l’éducation prioritaire. Mais ils ont aussi consulté les données de la recherche relatives aux apprentissages scolaires et pris appui sur des comparaisons internationales.

Enfin les visites de terrain dans les réseaux en réussite et les travaux des équipes de terrain lors des demi-journées banalisées et des assises ont alimenté l’écriture du référentiel en cohérence avec les autres travaux ministériels en cours à ce moment-là, relativement notamment aux orientations pédagogiques (scolarisation des moins de trois ans, « plus de maîtres que de classes », relations avec les parents).

La politique éducative qui en a porté l’élaboration se distingue des politiques qui prétendent qu’il suffit de changer un élément du système pour obtenir des résultats. Il s’agit au contraire qu’un ensemble de mesures, cohérentes entre elles, soit pris pour pouvoir espérer faire bouger les lignes. C’est en ce sens que l’on a pu dire que le référentiel est porteur d’une approche systémique.

• Organisation et modalités de questionnement

Dans tous les cas, le référentiel continue de constituer pour les équipes un ensemble de repères sur lesquels appuyer un travail pour le réseau. C’est la raison pour laquelle le comité scientifique de l’OZP a décidé d’organiser le questionnaire autour des six axes qui le constituent (questions 1 à 6, qui sont rappelées en tête de chaque analyse détaillée dans la deuxième partie de cette publication).

Pour mesurer le degré d’appropriation du référentiel par les acteurs, on aurait pu leur adresser une suite de questions fermées, et leur demander en regard de cocher par une simple croix la réponse choisie parmi deux ou trois propositions pré rédigées. Un tout autre choix a été fait, celui d’adresser dans la majorité des cas des questions ouvertes autour de trois interrogations dont l’esprit est globalement résumable ainsi : dans tel domaine, avez-vous le sentiment d’une amélioration ? quels obstacles demeurent ? quels leviers pouvez-vous envisager ? Un tel choix laisse aux répondants la possibilité d’utiliser les mots qui leur viennent, les mots de leur quotidien professionnel, sans que les mots d’une question induisent les mots de la réponse. Et si dans leurs réponses, ils ont utilisé des termes du référentiel, c’est que ces termes sont présents dans leur horizon de réflexion. On peut ainsi mesurer ce qui, de toutes les formations qui ont accompagné la mise en œuvre du référentiel, s’est désormais inscrit dans la mémoire professionnelle des acteurs.

De plus, les questions permettent de faire remonter du terrain des informations que d’autres enquêtes ne permettent pas de saisir. Ainsi, à propos de la formation par exemple, au-delà de savoir si oui ou non des formations ont lieu, on peut percevoir à travers les réponses librement rédigées si les formations répondent à une demande spécifique du réseau / de l’école / du collège, quels en sont la durée et le calendrier, quel est l’ancrage professionnel du formateur et comment a été appréciée la qualité de son intervention, quelle place est faite à la formation au sein du réseau …

Aux questions correspondant aux six axes du référentiel se sont ajoutées des questions sur l’identité des répondants (question 0), sur les résultats des élèves (question 7), sur un état des lieux 2014 – 2019 relatif aux personnels (question 8) et sur les moyens (question 9), et les répondants pouvaient ajouter toute remarque qu’ils souhaitaient (question 10) ou alimenter leurs réponses avec des documents de travail.

3. Dépouillement des réponses

Le dépouillement des réponses aux dix questions principales qui comportaient chacune au moins quatre sous-questions, dont une grande majorité de questions ouvertes, a donc été long. Chacun des lecteurs s’est contraint à lire l’intégralité des réponses, classées par académie (mais les répondants avaient le choix de ne pas renseigner leur lieu géographique d’exercice, ce qui a ajouté à la liste des académies un trente-et-unième groupe de réponses « non identifiées »). Des comptages ont été faits, mais aussi des relevés de citations ; il est en effet intéressant de savoir combien de réponses évoquent une évolution positive ou un obstacle, mais il est tout aussi intéressant de noter avec quels mots précisément cette évolution ou cet obstacle sont formulés, car cela permet de comprendre comment les répondants conçoivent et portent les orientations étudiées.

Les réponses ont été reçues de mai à juillet 2019. 308 réponses ont été dépouillées, qui se répartissent ainsi selon les catégories professionnelles et les niveaux d’enseignement :

Les résultats de ce dépouillement sont présentés, d’abord, sous la forme d’un bilan rapide (première partie). Le lecteur trouvera dans la deuxième et troisième partie de cette étude l’analyse détaillée des réponses concernant la mise en œuvre des six axes du référentiel ainsi que l’analyse détaillée des réponses concernant les questions plus générales sur l’identité professionnelle des répondants, leur contexte d’enseignement, leur utilisation du référentiel, leurs réactions et commentaires libres. En guise de conclusion et d’ouverture, les membres du conseil scientifique rédacteurs de ces pages proposent une série de « questions en débat » qui sont autant de points appelant élucidation, critiques, et constituant des pistes de travail une fois l’évaluation des effets de la refondation présentée.

 

BILAN SYNTHÉTIQUE DE LA MISE EN ŒUVRE DU RÉFÉRENTIEL

Sont présentés ci-dessous, sous forme de six résumés correspondant aux axes du référentiel et de trois bilans synthétiques (bilan des acquis, bilan des obstacles, bilan des leviers), les enseignements majeurs tirés du dépouillement des réponses reçues.

1. Résumé des réponses concernant les six axes du référentiel

1.1 « Lire, écrire, parler » et enseigner plus explicitement

Plus de 80 % des répondants notent une évolution positive au regard de l’axe 1 concernant les pratiques de classe et le travail collectif dans leur réseau. C’est en particulier l’émergence du collectif qui apparaît comme évolution positive majeure. Mais il est intéressant de croiser ces réponses avec celles des deux autres questions concernant cet axe : pour la question des obstacles, les réponses pointent le manque de temps pour travailler ensemble, la disparition du maître supplémentaire qui permettait la co-intervention, mais aussi le manque de culture commune entre premier et second degrés, autant de manifestations du manque de collectif. Le collectif est à nouveau très présent dans les réponses à la question des leviers, pour ceux qui dépendent de l’initiative des acteurs : se doter d’outils communs et de méthodes communes, travailler ensemble sur un domaine, un cycle, se former entre pairs. La question de la dynamique collective est donc centrale dans les réflexions des répondants pour favoriser une dynamique professionnelle relative au « lire, écrire, parler et enseigner plus explicitement ».

La question du lire – écrire – parler est désormais bien inscrite dans une perspective partagée entre tous les acteurs de l’éducation prioritaire, que ce soit déjà une réalité, ou un obstacle identifié. On note l’émergence nouvelle du travail sur l’oral et la préoccupation largement exprimée, aussi bien dans les évolutions positives que dans les obstacles rencontrés, concernant l’acquisition du lexique. Ces deux perspectives représentent une avancée didactique et pédagogique majeure. Par contre, l’idée d’un enseignement plus explicite dont les chercheurs font une des clés de la progression dans les apprentissages pour les élèves de l’éducation prioritaire, est beaucoup moins présente, et n’est jamais ou presque jamais évoquée dans les réponses venant de certaines académies.

26 % des réponses citent comme évolution positive le dédoublement des CP et CE1, 30 % la présence de personnels supplémentaires. Dans les deux cas, ce sont des moyens humains qui permettent la mise en œuvre de l’axe 1. Ces réponses croisent celles qui sont apportées à propos des obstacles (manque de moyens humains) et à propos des leviers (souhait de personnels supplémentaires). Pour réduire le nombre d’élèves, et le réduire réellement dans toutes les classes sans faire peser le dédoublement des CP et CE1 sur les autres niveaux, pour prendre en charge les élèves dans leurs besoins particuliers, il faut du personnel. Le manque de temps partagé est le deuxième obstacle mentionné et le deuxième levier envisagé pour progresser dans la mise en œuvre de l’axe 1.

Les répondants évoquent peu la formation comme moteur des évolutions positives qu’ils mentionnent (12 % des réponses exprimées), et ils ne sont pas plus nombreux à voir dans l’absence de formation un obstacle à la mise en œuvre de l’axe 1 (13 % des réponses exprimées). Ils sont au contraire 30% à citer la formation comme un levier. Et c’est à nouveau sous le signe du collectif, de la formation vécue en commun, de la formation par les pairs, des échanges et des analyses partagées qu’est dessinée la formation attendue.

Les conditions socioculturelles et socioéconomiques dans lesquelles vivent les élèves ne sont pas systématiquement ni également invoquées comme obstacle. Les réponses qui chercheraient à dédouaner les acteurs de leurs difficultés à mettre en œuvre l’axe 1 au prétexte que ce « type d’élève » (venant d’une famille qui ne parle pas le français, qui ne le motive pas, lui-même ayant des difficultés de concentration, voire étant non motivé et perturbateur…) sont quasi inexistantes. Dans le contexte scolaire spécifique de l’éducation prioritaire, les obstacles sont clairement identifiés par les acteurs : ils sont d’ordre structurel (manque de personnels supplémentaires, spécialisés ou non ; manque de temps de travail collectif, turnover des pilotes et des enseignants) mais ils sont également imputés aux acteurs eux-mêmes (absence de culture commune inter cycles donc absence de continuité dans les méthodes et de cohérence dans les progressions, résistance au changement didactique et/ou pédagogique, non adhésion au collectif de travail).

On constate l’intérêt de la réflexion des acteurs à propos de la question sur les leviers qui pourraient améliorer la situation. On note en effet un équilibre entre les leviers qui dépendent d’une décision politique, nationale ou académique, nécessitant des moyens humains (40 %), ceux qui dépendent de l’initiative du terrain (35 %), et ceux qui dépendent de l’une et de l’autre (32 %). Bien évidemment les acteurs espèrent des aides venues de l’extérieur, mais ils comptent aussi sur leur propre dynamique.

En contrepoint, quelques réponses, pour peu nombreuses qu’elles soient, font entendre que tous les acteurs ne sont pas également impliqués, ne partagent pas l’esprit de l’éducation prioritaire, ni même peut-être n’en partagent la lettre. C’est la question du recrutement et des nominations qui est ainsi posée.

1.2 Bienveillance et exigence

Le fort taux de réponses aux questions propres à l’axe 2 traduit l’adhésion des acteurs de l’éducation prioritaire aux recommandations de bienveillance et d’exigence. Ces deux concepts sont bien partagés ; le référentiel a conforté les convictions des équipes qui disent souvent qu’ils les portaient déjà dans leur exercice professionnel avant la refondation. C’est en particulier le cas pour le développement d’une évaluation dite « plus positive » et pour le climat scolaire qui sont au centre de la question de la bienveillance.

Si les démarches propres aux organisations pédagogiques et aux pratiques de classe capables de porter la bienveillance et l’exigence sont peu souvent évoquées par les répondants, leurs réponses traduisent des améliorations incontestables en matière de bienveillance notamment : les orientations les plus souvent entreprises concernent les relations avec les familles, les pratiques d’évaluation (voir à ce sujet ci-dessous, « questions en débat » p. 121), le climat scolaire et ce qui s’y apparente, dont le bien-être des élèves et la gestion des comportements, au point que, chez certains répondants, la question de la bienveillance se confond avec celle du climat scolaire ou de l’empathie. Cette avancée trouve sa source dans l’apparition de fortes dynamiques collectives au sein des écoles, des collèges et des réseaux. Ces nouvelles postures professionnelles garantissent un suivi plus fin du parcours des élèves, des décisions communes d’explicitation des attendus de l’école ; elles permettent aussi d’harmoniser chez tous les acteurs la relation à l’élève.

Il est donc logique que les obstacles que citent en tout premier lieu les répondants relèvent de tout ce qui peut menacer ces dynamiques collectives et les initiatives dont ils décident en commun : postures individualistes de quelques-uns, malentendus sur le sens des concepts de bienveillance et d’exigence, nouvelles injonctions institutionnelles (dont les évaluations nationales), présence d’acteurs trop débutants ou mal motivés pour maîtriser les postures professionnelles chevronnées qui soudent le collectif.

Les répondants disent aussi la difficulté réelle, et aggravée par des politiques inconstantes, de conjuguer constamment bienveillance ET exigence : la conscience qu’ils ont de cet obstacle, d’ordre essentiellement didactique et pédagogique, leur fait souhaiter des politiques pérennes et une plus grande confiance de l’institution dans leurs initiatives ; elle les conduit aussi à vouloir être mieux entendus lors de la définition des plans de formation, qui, à les lire, ne font pas assez cas par exemple de l’hétérogénéité, du travail personnel de l’élève et de la place de l’erreur dans les apprentissages.

1.3 La coopération avec les parents et les partenaires

Le taux des réponses décrivant une ou plusieurs formes d’amélioration relative à la coopération utile avec les familles et les partenaires est élevé : 80 %. Ce score témoigne d’une avancée perceptible dans les actions entreprises et dans la forte adhésion des réseaux aux différentes recommandations du référentiel déclinées au titre de cet axe 3.

Manifestement l’identité des parents d’élèves est de mieux en mieux appréhendée : le travail conduit par les différents acteurs s’engage en faveur des parents, au regard de la meilleure connaissance que l’on en a progressivement construit tout au long de ces dernières années. Ce travail affirme une authentique détermination à faire connaître aux parents d’élèves le respect et la confiance des différents acteurs ; et réciproquement, il réussit souvent à faire connaître aux acteurs de l’École la grande confiance des parents.

Les actions se multiplient et se diversifient. Elles illustrent bien la professionnalité avec laquelle elles s’élaborent et se mènent : engagement, réflexion, lectures professionnelles, répartition des tâches, posture éthique, partages, retours sur soi, exploitation de dispositifs nationaux, création de dispositifs spécifiques à un réseau, structuration, voire auto-évaluation. Au-delà du sérieux et du temps qu’y consacrent les acteurs, les réponses font le plus souvent connaître la sincérité avec laquelle les différentes coopérations s’édifient peu à peu.

L’évolution majeure que laissent entendre les réponses concerne la dimension collective dans laquelle s’inscrit l’immense majorité des actions engagées. Décidées dans les différentes instances de pilotage, y compris celles qui accueillent les partenaires, elles réussissent peu à peu à faire partie de la mission de chacun, y compris pour des professionnels entrant récemment dans le réseau. Cette dimension collective renforce vertueusement la confiance de chacun en ses propres compétences professionnelles : comment expliquer autrement la capacité, si peu fréquente ailleurs qu’en éducation prioritaire, à ouvrir régulièrement sa classe à des parents ? À les inviter dans des séances d’APC (activités pédagogiques complémentaires en école primaire) ou de « Devoirs faits » ? À faire suivre ces séances de démarches d’explicitation ? À valoriser les compétences des parents en leur confiant l’animation d’ateliers pédagogiques ?

Les objectifs qui inspirent de telles actions visent tous une plus solide réussite scolaire : quand il s’agit de nouer une alliance avec les familles (par exemple dans des partages de temps culturels), c’est pour mettre fin au conflit de loyauté où peuvent s’enliser les élèves de l’éducation prioritaire. Quand ils relèvent plus précisément du domaine scolaire, c’est pour donner aux parents les codes de l’École et les leur rendre compréhensibles, faire connaître les acquis de leurs enfants (« carnets de progrès » et « carnets de réussite »). Souvent l’objectif majeur consiste à permettre d’échapper à des attitudes prescriptives au profit de postures d’écoute et de compréhension.

Rien ne se fait sans devoir surmonter de nombreux obstacles : par exemple le temps qui manque, la mobilité des familles, leur passé scolaire, leur méconnaissance de la langue française ; le manque d’expérience d’une majorité des acteurs, la complexification des missions, les locaux inadaptés, la formation qui néglige les compétences de communication, les ressentis sur le manque de confiance de l’institution, la difficulté de faire réseau, la multiplicité des partenaires et/ou leur indisponibilité. Les actions les surmontent le plus souvent. D’autres se sont essoufflées, et les répondants expriment leur découragement de ne pas en voir le résultat.

Du point de vue de l’OZP, les actions décrites par les répondants invitent à encourager et à mutualiser leur travail. Elles appellent aussi à poursuivre leur accompagnement, en entendant les besoins de formation exprimés, en rendant plus lisibles les accompagnements déjà en place, en précisant encore le sens de l’adjectif « utile » dans l’expression « coopération utile ».

Dans les remarques des répondants à l’enquête, les partenaires sont le plus souvent absents. Il est très peu question des collectivités territoriales et de leurs services, très peu question des associations, très peu question des autres partenaires sportifs scientifiques ou culturels. Ce n’est sans doute pas qu’ils n’existent pas mais ce peut sans doute être lu comme le fait que ce n’était pas la priorité de la refondation et que ces partenariats déjà le plus souvent installés en éducation prioritaire n’ont pas été particulièrement développés ces dernières années contrairement à beaucoup d’autres procédures de travail évoquées dans le cadre de cette évaluation.

1.4 Le travail collectif de l’équipe éducative

Modalité de travail encouragée en éducation prioritaire de longue date, le travail collectif s’est développé avec les réseaux ambition réussite en 2006 et a été conforté par le temps libéré par la refondation en 2014. Il est porté par l’axe 4 du référentiel qui détaille certaines de ses modalités.
L’enquête montre à l’évidence que les temps de concertation des REP+ sont plébiscités tant pour le développement du travail collectif que pour la formation et le développement des relations avec les parents. Les personnels en REP regrettent souvent de ne pas en bénéficier. Dans l’enquête, le travail collectif n’est pas seulement évoqué lors des questions posées sur l’axe 4. Il est très présent dans les questions relatives aux initiatives positives et aux résultats obtenus. Il est également rappelé dans les réponses à chacun des autres axes du référentiel. Cela montre qu’il est largement reconnu et souhaité comme perspective favorisant des solutions aux difficultés des élèves de l’éducation prioritaire.
Les réponses montrent qu’aujourd’hui, on a moins peur d’accueillir un collègue dans sa classe, que la co-intervention n’est plus une utopie, qu’une réflexion commune sur les pratiques est perçue comme une nécessité pour la réussite par beaucoup. Les projets inter degrés, la mise en place du nouveau cycle 3, les observations croisées signifient que les réseaux commencent à acquérir une légitimité qui permet à leurs instances de conduire les évolutions pédagogiques. Il apparaît, en effet, une demande insistante de prise en compte des problèmes professionnels, formulés par les acteurs eux-mêmes, qui souhaiteraient être davantage écoutés dans leurs demandes de concertation et de formation sur des objets de travail précisés localement en fonction des circonstances particulières du travail à conduire pour la réussite de tous. Du point de vue de l’OZP, cela demanderait en retour aux pilotes, tant locaux qu’académiques ou nationaux, d’une reconnaissance mieux ajustée des collectifs professionnels en voie de formation. Le collectif professionnel devient une référence à partir de laquelle on discute les prescriptions nationales et les mises en œuvre de formations descendantes qui sont le plus souvent peu en prise avec les problèmes réels du métier.
Le travail collectif et ses modalités importantes, la co-intervention, le travail inter degrés, sont aujourd’hui perçus favorablement. Le travail conduit pour « Plus de maîtres que de classes », l’intérêt pour des démarches partagées concernant la mise en œuvre des dédoublements, le cycle 3 témoignent de l’importance de ces perspectives. Un appel est lancé par les répondants pour qu’il y ait davantage de formations afin d’accompagner cette évolution des représentations qui rendra possible des progrès futurs dans la mise en œuvre pratique.

1.5 L’accueil, la formation, le soutien des personnels

Les réponses montrent que la question de la formation demeure au centre des préoccupations des acteurs de l’éducation prioritaire et qu’il reste, en ce domaine, bien du chemin à parcourir pour répondre aux attentes et aux besoins.

37 % des répondants ne renseignent pas la question sur les évolutions positives concernant l’accueil et la formation des personnes, ou disent qu’il n’y en a pas eu, et la moitié des réponses exprimées traitent de l’accueil (en citant des exemples précis d’actions) et non de la formation.

Pour la formation, l’évolution majeure est celle d’un temps supplémentaire dédié, avec une confusion fréquente entre temps de formation et temps de concertation. Cette confusion ou assimilation est significative de l’idée que, pour certains répondants, la formation se ferait seulement ou principalement entre pairs. La formation en tant que telle est caractérisée dans les réponses par la présence d’un formateur, chercheur, partenaire associatif, mais l’inspecteur n’est jamais mentionné dans ce cadre.

Dans la moitié des réponses exprimées, les priorités de formation ne sont pas dégagées collectivement dans le réseau (un quart des répondants disent ne pas pouvoir répondre à la question du choix des priorités de formation).

Ce qui rend inefficace la formation est, d’abord, l’excès d’apports théoriques, au détriment de construction de séquences ou de séances, d’exemples d’activités, d’élaboration d’outils. Le deuxième obstacle est la non adéquation entre les besoins des acteurs et la formation suivie. Les répondants regrettent des formations décidées d’en haut et la qualité pas toujours avérée des formateurs. Le troisième obstacle tient au temps accordé à la formation, avec quatre caractéristiques négatives : saupoudrage, appropriation rendue impossible, décalage temporel entre le moment de la formation et le ressenti du besoin, absence d’un temps pour transmettre et conserver la mémoire du réseau.

Les réponses permettent ici et là de lister des thèmes de formations qui ont répondu aux besoins, de saisir des modalités de formation et d’intervenants qui aboutissent à la caractérisation d’une formation réussie : un formateur compétent, une formation inscrite dans la durée, commune aux acteurs (écoles, cycle, inter-degrés, réseau), qui permet la construction d’outils ou de séances, la mutualisation entre pairs, la mise en œuvre en classe, son observation et un retour réflexif.

On retiendra pour conclure le fort désir des répondants d’être associés à la définition des priorités de formation, alors qu’ils ont le sentiment aujourd’hui d’être étouffés par le choix imposé de formations en français et mathématiques.

1.6 Le pilotage et l’animation des réseaux

Une réalité nouvelle émerge dans les réponses concernant l’axe 6 : aujourd’hui la majorité des écoles et collèges en éducation prioritaire est engagée dans la construction de réseaux. Réseaux, pilotes, projet de réseau, travail collectif, concertation : ces termes sont la marque d’une gouvernance qui se développe en éducation prioritaire. Ils fédèrent écoles et collèges sur la base d’un projet de réseau, élaboré collectivement. Deux pilotes, le principal du collège et l’IEN, souvent un troisième, l’IA-IPR référent et, parfois, un quatrième, le coordonnateur, assurent le pilotage du réseau en s’appuyant sur le comité de pilotage ou COPIL, réuni deux fois par an et surtout sur le conseil Écoles-Collèges (le CEC) ou le comité du cycle 3.

La fonction de coordonnateur est centrale. Il apporte aux pilotes une indispensable force de travail, d’initiatives et de relations. Il s’identifie souvent à l’éducation prioritaire, avec des exigences fortes. Ils sont la cheville ouvrière du réseau. Pour les professeurs des écoles et leurs directeurs, ils sont le visage du réseau. Certains répondants évoquent l’idée qu’ils soient reconnus et recrutés comme animateurs pédagogiques. Dans certains réseaux, le principal adjoint (et/ou un conseiller pédagogique de circonscription - CPC) se consacrent en priorité aux actions spécifiques de l’éducation prioritaire, donnant plus de consistance à l’équipe de pilotage.

Le choix et la formation comme pilotes d’éducation prioritaire de l’IEN et du principal et de l’IA-IPR référent sont encore plus décisifs : aucun ne devrait se retrouver par hasard en éducation prioritaire. L’instabilité des pilotes est considérée par les répondants comme une des plaies de l’éducation prioritaire. Elle est le signe d’une absence de pilotage académique. Ces pilotes ont aussi besoin d’un accompagnement, car le pilotage d’un réseau est une fonction récente, étrangère à la culture professionnelle dominante dans le système éducatif. Tous les pilotes de réseau devraient savoir susciter et faire vivre une concertation entre les acteurs de terrain, reconnaître et appuyer la qualité des initiatives prises par des équipes d’enseignants. Du point de vue de l’OZP, pour que le pilotage national et académique ne soit pas seulement « vertical » et ne se traduise pas en « injonctions », les pilotes de réseau devraient aussi pouvoir faire reconnaître la qualité du travail de ces collectifs.

Quelques réseaux engagés de longue date dans ce travail commun donnent une idée de ce qu’il est possible d’y réussir avec la formation de collectifs professionnels : les actions communes à tous les niveaux sur des objectifs pédagogiques, la fréquence des observations croisées, les co-interventions, l’évaluation par compétences généralisée à l’ensemble du réseau, etc.

Deux domaines ont été plus souvent investis par les pilotes des réseaux. L’ouverture aux familles, fréquente dans les écoles, se pratique maintenant dans de nombreux collèges d’éducation prioritaire. Et le rapprochement des cultures professionnelles du premier et du second degré est décisif pour la réussite du public de REP et REP+. Il a motivé la création du cycle 3. Le travail commun s’est développé à la charnière des deux degrés. Les professeurs référents, créés en 2006, ou les maîtres+ dans le premier degré, avaient contribué au développement de ce travail collectif. Du point de vue de l’OZP, l’évolution récente, depuis la rentrée 2017, pose des questions auxquelles l’enquête ne permet pas de répondre : comment l’éducation prioritaire pourra-t-elle s’approprier les dédoublements de classes et faire réussir ce dispositif coûteux ? Comment y développer le travail collectif ? Pourra-t-on l’intégrer au projet de réseau et à son programme de formation ?

Certes, l’enquête montre le chemin parcouru par rapport aux relances de 1998 et de 2006, ou au lancement de la refondation, elle montre aussi tout le chemin à parcourir par les pilotes de tous niveaux.

2. Bilan des acquis

Ce qui frappe au premier abord, c’est la liberté de parole et la sincérité qui ont présidé aux réponses reçues. On a pu percevoir que les répondants prennent les questions comme une occasion sérieuse d’auto évaluation de leur travail expert dans les réseaux.

Ce qui peut être plus ou moins acquis ce sont des conceptions et représentations de l’éducation prioritaire et de ses enjeux, des dispositifs et des pratiques mises en œuvre ou à encourager tels que ceux qui nous répondent les voient aujourd’hui cinq ans après la refondation de 2014.

Une première remarque consiste à dire que beaucoup des répondants considèrent que rien n’est vraiment acquis car les ministres changent sans cesse les bases du travail (exemples : la disparition du dispositif PDMQDC, l’abandon d’une politique systématique d’accueil des deux ans, les changements des repères des programmes, de nouveaux dispositifs comme CP et CE1 à 12, des instructions nouvelles…). Il y a aussi des sujets sur lesquels on trouve des réponses partagées : 53 % pensent que le référentiel est connu dans ses grandes lignes par les enseignants, 62 % pensent que le référentiel a été utile, 62 % pensent que le travail collectif s’est développé. Il y a de forts taux de non réponses (plus de 30 %) à certaines questions qui manifestent sans doute la difficulté à prendre du recul et à faire des propositions dans le cadre d’une enquête comme celle-là.

Et en même temps, les propos très riches de réponses bien renseignées témoignent que certains fondamentaux ne sont pas remis en cause en éducation prioritaire : les cycles (en particulier le cycle 3 très souvent cité), le travail d’un collectif professionnel, l’importance primordiale du pédagogique, les relations avec les parents, les projets et en particulier le projet de réseau, l’importance d’une formation adaptée qui réponde aux besoins et constitue un véritable accompagnement de la pratique professionnelle.

Les acquis de l’axe 1

Quand on leur demande ce qui est le plus important pour la réussite des élèves, les répondants privilégient largement la priorité 1 du référentiel (favoriser l’acquisition du « lire, écrire, parler » et enseigner plus explicitement) mais en rappelant aussi qu’elles sont toutes importantes et en parlant plus particulièrement de l’exigence et de la bienveillance nécessaires pour bien répondre à la priorité « écrire, lire, parler » citée dans 46 % des réponses. Si les enseignements de la langue sont proposés en priorité, la question des mathématiques et des sciences n’a pas encore fait son chemin. Les conceptions d’apprentissages exigeants et d’un enseignement plus explicite ne sont pas encore suffisamment clarifiées, même si des formations sont évoquées à cet égard.

Quand on regarde les évolutions positives par axe du référentiel, on voit que pour l’axe 1 du référentiel, on en appelle à l’institution pour faire évoluer le recrutement ou la formation ; les besoins de formation entre pairs et de constitution d’outils communs sont mentionnés. La question de la co-intervention et des croisements de regards qu’elle permet (PDMQDC – cités dans 15 % des réponses à l’ensemble des questions) et des CP CE1 à 12 (cités dans 26 % des réponses concernant cet axe) comme modalité de travail pour mieux mettre en œuvre l’axe 1 sont vus positivement.

Les acquis de l’axe 2

Pour l’axe 2, la manière dont a été compris « conjuguer bienveillance et exigence » est notable. Il est particulièrement fait mention des élèves en difficulté lorsque l’on en parle. Il s’agit d’abord d’une modification des « attitudes » et « regards » et du souci de l’estime d’eux-mêmes des élèves dans le cadre d’un climat scolaire favorable. Souvent les répondants voient à cet égard une continuité entre ce qu’ils faisaient déjà avant et les propositions du référentiel. Il s’agit aussi d’une modification des pratiques d’évaluation avec en particulier la remise en question des chiffres et de la notation au profit de l’évaluation des compétences selon d’autres modalités considérées comme « plus positives ».

Les acquis de l’axe 3

S’il y a bien un champ dans lequel on peut percevoir un ensemble structuré d’acquis c’est celui qui concerne les relations avec les parents d’élèves qui sont détaillées dans divers dispositifs et diverses pratiques. C’est une belle avancée portée par les actions décrites (authenticité, investissement des équipes, inscription dans la durée, dimension collective) et par les valeurs portées (respect, confiance, reconnaissance de compétences des parents). La question des partenaires (les associations, les municipalités, les services sociaux sont cités) est beaucoup moins travaillée. Les Cités éducatives là où elles existent vont amener une ré interrogation de cette question (voir ci-dessous, « questions en débat, p. 134).

Les acquis de l’axe 4

A propos du travail collectif de l’équipe éducative, seulement 10 % des réponses obtenues le sont d’un groupe de personnes de plusieurs écoles ou établissements ou de l’équipe de pilotage du réseau. Cela rappelle s’il en était besoin que le travail collectif n’est pas systématique en éducation prioritaire. Il est difficile à mettre en œuvre surtout pour une question de disponibilité des uns et des autres. La question du temps est centrale. Il y a bien, à plus de 60 %, l’idée que le travail collectif s’est développé au cours de la refondation. Le travail collectif est une référence commune. Il sert principalement à des actions ou projets communs qui s’élaborent en concertation (celle-ci est largement plébiscitée), l’harmonisation de pratiques, des mises en cohérence, des progressions communes notamment sur le cycle 3, l’analyse des difficultés, l’établissement des diagnostics, la progression attendue des pratiques pédagogiques.

Les acquis de l’axe 5

En ce qui concerne le premier point de l’axe 5, l’accueil, les procédures et dispositifs sont décrits de manière assez précise : on évoque des temps dédiés, des formations, du tutorat ou des découvertes de l’environnement au moment de l’accueil des professionnels entrant dans le réseau. On perçoit nettement moins de satisfactions sur les formations développées qui sont parfois décrites comme imposées d’en haut et théoriques, même si le temps donné pour la formation est plébiscité. Une formation réussie c’est pour nos répondants une formation qui répond à des besoins spécifiques locaux et qui est menée par des formateurs et intervenants de qualité. Elle s’inscrit dans la durée et permet de construire des réponses aux problèmes rencontrés. Si des formations locales se sont développées sur la base d’analyses conjointes dans 55 % des réponses, ce qui rejoint les données relatives au travail collectif qui s’est développé pour 62 % des répondants, il reste à consolider une politique de formation qui fasse plus de place à l’appui à l’analyse des besoins par les acteurs eux-mêmes.

Les acquis de l’axe 6

En ce qui concerne l’axe 6, le réseau apparaît essentiellement comme le lieu de l’élaboration du projet qui se développe en axes et en actions. Il est le niveau du pilotage local en appui sur le référentiel et sur des données recueillies localement. Mais le comité de pilotage du réseau apparaît second par rapport au conseil de cycle 3 ou au Conseil école-collège. La pertinence des autres niveaux de pilotage est interrogée. Le pilotage est mené par des groupes constitués de manières diverses selon les réseaux. L’IA-IPR référent est plus rarement mentionné (particulièrement dans les réponses des enseignants du premier degré qui ne le connaissent pas) que l’IEN et le Principal. Le coordonnateur apparaît comme une figure centrale qui se sent parfois en porte-à-faux. Deux problèmes sont particulièrement posés aux pilotes : le problème de la verticalité et de l’injonction, le problème du rapprochement des cultures du premier et du second degré qui semble fragile.

En conclusion, on a des raisons de cultiver un certain pessimisme face à la fragilité des acquis. Ceux-ci restent à consolider par un pilotage résolu et respectueux des professionnels qui sont les premiers experts de leur action individuelle et collective. Pour l’instant on ne voit pas émerger ce pilotage, on peut même craindre le départ sur de fausses pistes. Mais on a aussi des raisons d’être optimistes en voyant l’engagement raisonné des répondants qui demandent à être davantage responsables de leur action locale sans se défausser du fait de difficultés reconnues mais considérées comme surmontables dès lors que l’on est soutenu dans un collectif professionnel.

3. Bilan des obstacles

Les obstacles à la mise en œuvre du référentiel de l’éducation prioritaire relèvent de trois catégories : ce que les acteurs ne veulent pas faire, ce qu’ils ne savent pas faire, ce qu’ils ne peuvent pas faire. Ces catégorisations ne sont pas toujours étanches, mais elles permettent de donner une vision claire des obstacles recensés.

Pour les obstacles dépendant de la bonne ou mauvaise volonté, les répondants en mentionnent peu pour ce qui concerne les équipes enseignantes. Certains ne sont, toutefois, pas disposés à faire évoluer leurs pratiques, à les adapter aux besoins de leurs élèves, à partager la réflexion et les mises en œuvre collectives, et ils représentent un frein dans les équipes. Mais ces mentions sont peu nombreuses (9 mentions dans l’axe 1 par exemple). On note également une absence de volonté chez certains enseignants à propos de la relation école – famille (est-ce bien le cœur du métier, se demandent-ils), mais là encore ce constat est très minoritaire. Il est plus prégnant dans deux domaines, celui de la formation et celui du pilotage. Un des obstacles mentionnés est le manque de volonté de l’institution (parfois aussi des formateurs) d’associer les acteurs à la définition des plans de formation ; on regrette une formation décidée d’en haut, qui ne répond pas forcément aux besoins du terrain, qui confond ou mêle injonction et formation. Mais c’est du côté du pilotage que le manque de volonté est nettement mentionné : mauvaise volonté des pilotes à partager informations et décisions entre eux, à partager tout simplement le pilotage, selon les répondants qui « subissent » sans doute le pilotage.

D’autres obstacles, plus nombreux que dans la catégorie précédente, relèvent du « ne pas savoir ». Si les répondants ont noté quelques manques de savoir ou de savoir-faire, obstacles présents dans l’axe 1 (principalement dans la prise en charge des élèves non francophones dans l’axe 1) comme dans l’axe 2 (à propos de bienveillance et d’exigence, difficultés à se faire comprendre des familles, manque de connaissances sur les facteurs de décrochage), c’est surtout à propos de la relation école – familles que le manque de savoirs et de savoir-faire est exprimé. C’est un des chantiers urgents à travailler, manifestement. Mais on relève également une critique claire visant le manque de savoir et de savoir-faire en termes de formation (axe 5) : les formateurs ne sont pas tous aptes à répondre aux attentes des acteurs, ou aptes à favoriser les transpositions didactiques qui rendraient les formations rapidement efficaces sur le terrain.

On trouve à la croisée entre « ne pas savoir » et « ne pas pouvoir », dans les axes 1, 2 et 3, la confrontation des acteurs avec la masse des difficultés scolaires, culturelles, sociales, économiques, médicales accumulées dans un même lieu (réseau, département, académie).

Les obstacles les plus souvent mentionnés, et de très loin, relèvent de la catégorie « ne pas pouvoir ». Les obstacles dus au manque de moyens sont très peu mentionnés, pas plus que ceux liés à la situation socioéconomique des élèves de l’éducation prioritaire (les acteurs n’en prennent pas prétexte pour dire qu’ils ne pourraient pas mettre en œuvre le référentiel). Par contre, les obstacles liés à un pilotage institutionnel vertical et injonctif reviennent dans bon nombre de réponses (ainsi à propos de la disparition des maîtres supplémentaires, des dédoublements qui surchargent les autres niveaux, des évaluations, par exemple). Mais c’est essentiellement le manque de personnels spécialisés ou simplement supplémentaires qui fait dire aux répondants qu’ils ne peuvent pas mettre en œuvre le référentiel comme ils le souhaiteraient.

Une catégorisation nouvelle est à mentionner, lorsqu’on veut bien mais qu’on ne peut pas. On lit le découragement de répondants qui ne peuvent pas réaliser ce qui leur est demandé ; sont ainsi soulignés le manque de réalisme des autorités, le fossé entre le pilotage national et/ou académique et la réalité du pilotage d’une circonscription ou d’un réseau).

Un obstacle particulier mérite d’être examiné à l’aune des trois entrées « ne pas vouloir / ne pas savoir / ne pas pouvoir », celui du manque de culture commune au premier et second degré.

En conclusion, les obstacles mentionnés pourraient être levés grâce à une meilleure considération des acteurs, à une relance de la dynamique des équipes pour que les nouveaux arrivés depuis la refondation puissent s’approprier la culture professionnelle et les valeurs de l’éducation prioritaire, à une politique publique qui continuerait d’abonder les moyens humains, à de meilleures conceptions du pilotage, et à un effort de recherche et de formation concernant, entre autres, la relation école–famille.

4. Bilan des leviers

Le taux de réponses aux questions sur les leviers varie d’un axe à l’autre (de 50 % pour l’axe 6 à 76 % pour l’axe 1). Et selon la thématique de chaque axe, une thématique y prend plus ou moins d’importance : ainsi on parle beaucoup plus de formation à propos de l’axe 5 que des autres. Mais on peut dégager des grandes lignes communes à l’ensemble des réponses.

Concernant les leviers dépendant d’une décision institutionnelle, on note que dans chaque axe les répondants évoquent la question des ressources humaines, en lui accordant plus ou moins d’importance : pour améliorer le lire – écrire – parler et enseigner plus explicitement, 40 % des répondants souhaitent une augmentation des personnels spécialisés ou non (69 % des réponses exprimées à propos des ressources humaines) et évoquent la question du recrutement (31 %). A propos de l’école bienveillante et exigeante, 32 % des répondants mentionnent comme levier des moyens accrus, des effectifs réduits, et des personnels spécialisés plus nombreux. On ne retrouve cette question que rarement à propos de la relation avec les familles et les partenaires. Par contre, elle l’est souvent à propos du travail collectif (29 % des réponses évoquent le dédoublement CP CE1, 40 % le rétablissement des maîtres+). Pour les axes 5 et 6, la question des ressources humaines se pose en d’autres termes, qualitativement et non quantitativement : on envisage comme levier une meilleure qualité des formateurs, un accompagnement plus suivi des équipes par des chercheurs, des formateurs, des conseillers pédagogiques de circonscription ; on évoque également la qualité des pilotes, donc la question de leur recrutement, et la présence de coordonnateurs à temps plein, chevilles ouvrières des réseaux.

Le deuxième levier évoqué de façon presque aussi centrale est celui du temps supplémentaire dont les acteurs ont besoin : 11 % des répondants aux questions de l’axe 1 l’évoquent, 11 % aux questions de l’axe 2, 16 % à celles de l’axe 3. Les réponses de l’axe 4 mentionnent ce besoin de temps dans toutes les facettes du travail collectif : à propos de l’animation des équipes, à propos des concertations en général, et plus particulièrement concernant l’élaboration d’outils communs, de progressions cohérentes pour assurer les orientations de l’axe 1. Le besoin de temps supplémentaire est systématiquement associé aux cycles, « lieux-temps de travail collectif ». Les réponses aux questions de l’axe 5 offrent une réflexion sur la question du temps en formation : temps long pour éviter le saupoudrage des apports, temps nécessaire à l’appropriation des contenus de formation, temps de mise en œuvre en classe, de visites croisées et de retour réflexif. Enfin dans l’axe 6 le temps supplémentaire est le premier levier mentionné pour améliorer la qualité du pilotage du réseau.

L’augmentation des moyens financiers (dont matériel numérique, mobilier, outils pédagogiques) occupe peu de place dans les réponses.

D’autres leviers mentionnés dépendent des acteurs eux-mêmes. C’est particulièrement le cas pour l’axe 1 (dans presque 35 % des réponses exprimées) : pour travailler ensemble, construire des outils et des méthodes communes, se former entre pairs, améliorer la relation école-famille, c’est presque autant de mentions que pour augmenter les ressources humaines. Il y a équilibre entre ce qui dépend de décisions externes et ce qui dépend de l’initiative locale. Les répondants aux questions de l’axe 2 accordent également de l’importance au travail collectif sur l’évaluation des élèves (décision d’abandonner la notation chiffrée, mise en place de carnets de progrès, par exemple). Dans l’axe 3, les répondants évoquent, pour 32 % d’entre eux, des actions diverses en direction des parents qui ne dépendent que de leur propre initiative (en particulier la qualité de l’accueil et de la communication). L’accueil et la formation des personnels, dans l’axe 5, font la part belle à la formation entre pairs, à la mutualisation inter écoles et inter cycles au sein du réseau.

Enfin, au titre des leviers mixtes dépendant à la fois de l’institution et de l’initiative des acteurs, les répondants à l’ensemble des questions ont évoqué la formation : 30 % des répondants en font un levier pour la mise en œuvre de l’axe 2, 21 % la mentionnent à propos de l’école bienveillante et exigeante, presque 13 % au sujet de la relation avec les familles et les partenaires. Les questions de l’axe 4 (les priorités de formation sont-elles décidées collectivement ?) et de l’axe 5 dans son ensemble conduisent les répondants à faire une large place à cette thématique. Quelques chiffres sont à retenir : pour 22 % seulement des répondants les priorités de la formation sont dégagées collectivement (dans 29 % elles le sont par les pilotes seuls, le taux de réponse « je ne sais pas » est ici très important), pour 28 % des répondants le levier envisagé est que les formations répondent aux besoins des acteurs, et pour 15 % que les formateurs soient compétents. Enfin la formation est le deuxième levier évoqué dans l’axe 6 pour améliorer la qualité du pilotage. On constate donc que la formation est bien un levier envisagé, dans une proportion sans doute moindre qu’on pouvait l’attendre. La formation représente certes un levier mais tout dit en même temps sa fragilité actuelle (priorités de formation non définies collectivement et donc ne répondant pas nécessairement aux besoins des acteurs, qualité critiquée des formateurs, manque de formation des pilotes).

Il est très peu question des partenaires dans la réflexion sur les leviers : ils sont évoqués dans 2 % des réponses aux questions de l’axe 1, dans 3 % à celles de l’axe 2, et 8 % de l’axe 3.

 

CONCLUSION : QUEL BILAN DE L’EXPÉRIENCE DE LA REFONDATION ?

En novembre 2018, l’OZP avait annoncé publiquement sa décision de procéder à une évaluation de la politique de l’éducation prioritaire refondée. Aujourd’hui, avec la présentation de cette enquête, l’engagement est tenu.

Ce travail constitue, à ce jour, la seule tentative d’auto-évaluation par les acteurs de l’éducation prioritaire des effets de la refondation. Elle met en lumière l’expérience de la refondation qu’ont les acteurs qui ont souhaité répondre à l’enquête de l’OZP.

En choisissant de procéder largement par des questions ouvertes portant notamment sur les différents axes du référentiel, cette enquête permet de mettre en évidence ce qui apparaît pour les personnels des réseaux comme des acquis d’une part, d’autre part des difficultés mais aussi des leviers d’actions pour le futur.

Cette enquête a ses propres limites, celles d’un travail porté par les seules ressources d’une association indépendante, et ne saurait donc s’apparenter à ce que pourraient produire les services du ministère de l’Éducation nationale, des moyens dédiés ou une recherche universitaire. Cette enquête a été élaborée à partir des travaux conduits dans le cadre d’un séminaire de travail en février 2019 et de la journée nationale de l’OZP en mai 2019. La lecture et la synthèse de l’ensemble des réponses ont été réalisées par le conseil scientifique de l’OZP composé de personnalités reconnues depuis longtemps pour leur engagement et leurs compétences professionnelles concernant l’éducation prioritaire.

Quels enseignements ?

Au regard de l’histoire faite de près de quarante années de décisions, de ruptures et de relances, de glissements assumés ou insidieux de son orientation politique, une évidence s’impose : l’éducation prioritaire existe et structure de nombreux réseaux sur l’ensemble du territoire national, ses principes fondateurs continuent de susciter l’adhésion de la très grande majorité des acteurs de terrain : principe d’éducabilité de chaque enfant et de chaque jeune ; volonté de renforcer l’action pédagogique et la maîtrise des savoirs afin de conduire à la réussite les élèves dont les origines sociales et culturelles, les conditions de vie sont éloignées des codes et des ressources d’une école qui se prétend l’école de tous ; construction de la continuité et de la cohérence de l’action éducative dans le cadre d’un projet inter-degrés prenant en compte les partenariats locaux.

L’enquête s’est articulée autour des six axes du référentiel. Même s’il n’est pas connu de tous les acteurs, ce référentiel apparaît bien comme une référence commune pour l’élaboration des projets des réseaux et la réflexion collective pour conduire les actions locales. Ce référentiel constitue donc une pièce maîtresse dans la stratégie de développement de l’éducation prioritaire. À cette fin, il doit être mieux porté par l’institution, y compris comme support dans le cadre de la formation initiale, et il doit être approfondi. L’enquête montre bien quels sont les principaux enjeux du travail à approfondir.

• Principaux enjeux

Pour les six axes du référentiel de l’éducation prioritaire publié pour la refondation de cette politique en 2014, il a été demandé de structurer les réponses en termes d’acquis, de difficultés et de leviers d’amélioration. A la lecture des réponses, on peut faire le constat d’un nombre important de convergences et de lignes de force d’un axe à l’autre permettant de dégager les principaux enjeux de l’éducation prioritaire. Quels sont-ils à la lecture des réponses ?

  La priorité donnée à une meilleure acquisition des savoirs au sein de la classe en particulier du « lire, écrire, parler » dans la perspective de l’ensemble des savoirs disciplinaires, la construction bienveillante et exigeante d’une culture scolaire indispensable à la réalisation d’apprentissages solides et qui ne délaisse aucun domaine disciplinaire.

  La prise en compte de l’évolution des pratiques enseignantes dans le cadre de collectifs professionnels construisant des articulations cohérentes entre le premier et le second degré notamment dans le cadre du cycle 3 et qui se centrent sur l’analyse et la prise en charge des difficultés d’apprentissage que rencontrent les élèves. Devenu une référence centrale pour la majorité des répondants, le travail collectif requiert du temps, de la formation, des postes spécifiques et des moyens supplémentaires.

  L’accompagnement et la formation des équipes : pour que l’action pédagogique dure et puisse porter ses fruits, il faut des personnels … qui durent, c’est-à-dire qui soient reconnus, accompagnés et formés par l’institution à tous les niveaux.

  Le resserrement des liens entre l’école et les familles, ce qui passe souvent par l’élucidation de ces liens et par un travail avec les familles prenant en compte le souci qu’elles ont de la scolarisation et de l’avenir de leurs enfants.

  La construction de relations claires entre le réseau et ses partenaires dans lesquelles l’école se voit reconnaître l’importance de ses missions spécifiques mais ne s’exonère pas de ses propres responsabilités.

  La question du pilotage à tous les niveaux, national, académique et local, ce qui pose aussi la question des articulations à construire entre les objectifs et la conduite d’une politique définie nationalement et la nécessité, pour la réussite même de cette politique, d’emporter l’adhésion des acteurs de terrain en suscitant, favorisant, accompagnant la réflexion et les projets des réseaux.

• Leviers pour la réussite

L’ensemble de ces enjeux sont traités dans les réponses à travers le prisme acquis / obstacles / leviers. Les réponses recueillies permettent de mettre en évidence ceux qui relèvent de la responsabilité des échelons centraux de l’institution (changements fréquents de pilotes, PDMQDC et professeurs référents supprimés brutalement sans évaluation de leurs missions, problèmes récurrents de remplacement, mauvaise gestion des ressources humaines…), ce qui relève de la responsabilité et des initiatives des acteurs de terrain et enfin ce qui nait de la combinaison des deux. Ainsi :

  La pérennisation des orientations, des dispositifs et des moyens engagés tout au long de la durée du projet de réseau doit être garantie nationalement.

  La question de la formation doit être traitée en prenant en compte à la fois les besoins exprimés par les équipes de terrain et les apports renouvelés de la recherche. Il s’agit de faire de la formation une politique de réseau en s’appuyant sur des formateurs de qualité solidement professionnalisés et un instrument de pilotage à tous niveaux hiérarchiques.

  Le travail en collectif professionnel requiert du temps de concertation compris dans les obligations de service, des moyens stables de remplacement et un pilotage efficace.

  L’amélioration des acquis concernant les savoirs repose en grande partie sur la cohérence et la continuité du travail mené tout au long des cycles, sur l’analyse des difficultés des élèves et le souci de rendre plus explicite le travail qui est attendu d’eux et non seulement sur des mesures structurelles ou quantitatives (baisse des effectifs, dispositifs de dédoublement de classes etc…) lesquelles ne sauraient produire les effets attendus si elles ne sont pas accompagnées dans leur mise en œuvre.

  L’exercice professionnel en réseau d’éducation prioritaire requiert d’en partager les valeurs et les exigences de travail collectif, ce qui ne peut être sans conséquence sur les modalités de nomination des personnels.

  La mise en œuvre d’une politique prioritaire ne saurait se réduire à une appellation et à quelques dispositifs appliqués de façon mécanique mais devrait conduire l’administration académique ou locale à la considérer comme réellement prioritaire à tous les niveaux et dans tous les actes de son action institutionnelle.

Des questions en chantier

Les réponses à l’enquête mettent en évidence plusieurs questions qui doivent être approfondies, débattues, retravaillées collectivement pour consolider le travail engagé dans le cadre de la refondation :
  la formation des équipes de réseaux,
  les dédoublements et la continuité pédagogique,
  l’approfondissement du référentiel,
  le pilotage à tous les niveaux,
  les liens entre l’école et les familles ; la question du partenariat et les Cités éducatives,
  la gestion des ressources humaines dans son ensemble.

Dans les mois à venir, l’ensemble de ces questions fera l’objet d’un travail spécifique de l’OZP dans le cadre de ses rencontres publiques et des séminaires de travail.

Assurer la continuité d’une action de fond collective et résolue

Ce travail d’enquête va être publié et adressé à l’ensemble des réseaux d’éducation prioritaire. Il sera remis au ministre de l’Éducation nationale, aux organisations syndicales ainsi qu’aux associations éducatives, pédagogiques et professionnelles qui interviennent dans le champ de l’école. Il doit permettre à l’ensemble des acteurs de l’éducation prioritaire de s’approprier les fruits de l’enquête et les éléments des débats qu’elle initie.

La politique d’éducation prioritaire refondée en 2013 n’est pas parfaite mais pour autant elle ne saurait se décliner désormais uniquement en de simples mesures de dédoublements de classes et de petits déjeuners. Elle a fait émerger une conscience collective de responsabilisation dans la réussite des élèves. Il faut désormais passer de succès localisés remarquables à une réduction significative des écarts de réussite. À l’heure où certains ne rêvent que de dynamitage de la géographie prioritaire et d’effacement de cette politique, il est nécessaire de rappeler l’urgence de la lutte contre les inégalités sociales et territoriales en s’appuyant notamment sur une politique d’éducation prioritaire inscrite dans le temps, engageant la responsabilité de l’État et bénéficiant de l’ensemble des décisions et des moyens appelés par son évaluation.

NOTES

1. Dans le numéro 164 de la revue Administration et Éducation, Bernard Lejeune, ancien directeur de Cabinet au ministère décrit les enjeux et la méthode de la révision de la carte de 2014.
2. https://www.reseau-canope.fr/education-prioritaire/accueil.html
3. http://centre-alain-savary.ens-lyon.fr/CAS/education-prioritaire/ressources/referentiel-les-ressources-du-centre
4. https://www.reseau-canope.fr/education-prioritaire/fileadmin/user_upload/user_upload/accueil/Referentiel_de_l_education_prioritaire.pdf
5.http://cache.media.education.gouv.fr/file/08_Aout/15/9/Rapport_de_diagnostic_sur_l_evaluation_de_la_politique_de_l_education_prioritaire_266159.pdf
6. Rapport n°2005-079 (juillet2005)

 

 

ELEMENT 3

DEUXIÈME PARTIE : ANALYSE DÉTAILLÉE DES RÉPONSES CONCERNANT LES AXES DU RÉFERENTIEL


AXE 1 : GARANTIR L’ACQUISITION DU « LIRE, ÉCRIRE, PARLER » ET ENSEIGNER PLUS EXPLICITEMENT

Q. 1.1 Pouvez-vous décrire une évolution positive au regard de l’axe 1 concernant les pratiques de classe et le travail collectif dans votre réseau ?
Q. 1.2 Quels sont les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 1 du référentiel qui vous semblent persistants ?
Q. 1.3 Quels sont les leviers qui vous sembleraient efficaces pour améliorer la situation ?

1. Les évolutions positives concernant les pratiques de classe et le travail collectif

81% des répondants ont répondu à cette question. Les non réponses, dont on ne peut connaître le motif (pas le temps, pas l’envie de répondre à cette question ? ou bien pas d’évolution positive à décrire ?) sont au nombre de 19 %. 5 % des répondants écrivent explicitement qu’il y a eu peu ou qu’il n’y a pas eu d’évolution positive : on lit soit un « non » sans appel, ou commenté d’un regret, « hélas non », soit une réponse argumentée, « aucun travail collectif dans le réseau n’est mis en place. Mise à part la rédaction d’un projet de réseau qui impose les grandes lignes des projets d’école. » On lit également un commentaire précis : un répondant liste toutes les formations qui ont eu lieu dans le réseau et conclut à l’impossibilité, « pour autant, de décrire une évolution ».

Par deux fois, l’absence de réponse est expliquée par une arrivée trop récente dans le réseau qui empêche l’appréciation d’une évolution (par exemple, « je n’ai donc un recul que d’une seule année. De plus les pilotes sont nouveaux. ») Pour rares qu’elles soient à propos de l’axe 1 – elles le sont beaucoup moins dans les réponses à la question 7 -, ces deux réponses alertent sur une absence de mémoire du réseau, d’archives sur ce qui s’est fait depuis quelques années, privant ainsi les acteurs de la capacité à lire le chemin parcouru. Quelle meilleure façon de ne pas voir les progrès accomplis et d’être sensible au découragement ?

1.1 Deux attentes du référentiel massivement mentionnées

51 % des réponses exprimées mentionnent une évolution positive au regard de l’axe 1 par des termes relevant du collectif (tous / tout – du cycle 1 au cycle 3 – du CP au collège – du cycle 1 au cycle 4 - nous a réunis – nous avons profondément fait évoluer nos pratiques – commun – aller voir les collègues – observations croisées – échanges – partage – collectif – mutualisation – le réseau a été formé …, etc.). C’est un acquis pour l’éducation prioritaire, c’est la réponse la plus massive pour l’ensemble de la question 1. On note deux mentions particulières : un répondant exprime son refus de devoir travailler en commun avec d’autres ; un autre répondant témoigne d’une absence de collectif, de collaboration entre le collège et les écoles du réseau.

L’enquête telle qu’elle s’est déroulée ne permet pas de tirer des interprétations d’un nombre non représentatif de répondants par académie, ni de réponses qui peuvent être motivées par différentes causes : envie de partager son expérience, être chargé de répondre alors qu’on ne le souhaite pas (c’est ainsi qu’on peut lire les non réponses à l’ensemble des questions), exprimer son hostilité à l’esprit de l’éducation prioritaire (refus de l’obligation de travailler en réseau avec d’autres), ou à l’égard de la hiérarchie, refus d’exercer en éducation prioritaire (un répondant a répété comme un leitmotiv tout au long du questionnaire « je n’ai pas lu le référentiel »). Pour autant, on peut remarquer des effets de masse, possible reflet des animations et formations académiques. Ainsi, dans une académie, cinq des six répondants citant le terme « fluence » à propos des évolutions positives concernant l’axe 1 ; ou encore, deux académies dans lesquelles les réponses évoquant le collectif sont particulièrement nombreuses quand elles le sont beaucoup moins ailleurs. De tels constats, pour fragiles qu’ils soient, pourraient éclairer le pilotage local en matière de formation.

Le repérage de mots clés employés de façon récurrente fait apparaître que le « lire – écrire – parler » vient en deuxième position pour le nombre de mentions dans les réponses : 46 % des réponses exprimées y font référence, ce qui témoigne d’une présence centrale et précise dans la réflexion des acteurs.

Dans le détail, et sans surprise, la mention majoritaire concerne la lecture (34 mentions explicites, par contraste avec l’expression globalisante « maîtrise de la langue »). Vient ensuite la mention de l’oral (31 mentions) ce qui représente une véritable avancée, eu égard à la lenteur avec laquelle l’importance du travail sur l’oral a été reconnue et prise en compte. Le travail du lexique est mentionné 18 fois, et 14 fois celui de la production d’écrit.

Qu’est-ce qui a généré les évolutions positives concernant les pratiques de classe et le travail collectif ? 26 % des répondants citent une cause relevant du structurel (ce qui dépend de décisions ministérielles). Les effets de structure porteurs d’une évolution positive concernent soit la structure de classe, soit la présence de personnel enseignant supplémentaire, soit celle de personnel spécialisé, soit un dispositif.

Sans surprise, arrive en tête des mentions dans la réponse à cette question le dédoublement des CP et CE1 (51 % - auxquels on peut ajouter sans forcer la lecture une réponse moins précise, « baisse des effectifs »). Vient ensuite la présence de personnels supplémentaires (30 %), dont celle du maître supplémentaire (8 mentions), de personnels ou de structures spécialisés (2 mentions du RASED, 1 de l’UPE2A, 1 d’un personnel « lutte contre l’illettrisme »), de stagiaires bénévoles pour participer aux actions engagées (1), de « co-présence » (1). On note encore une mention d’une structure (TPS) et 7 mentions de dispositifs (AP – 3, devoirs faits – 2, EPI, PPRE). Enfin deux répondants mentionnent simplement le fait d’avoir du temps supplémentaire pour remédier aux difficultés.

1.2 Des évolutions moins souvent nommées qu’espéré

L’enseignement explicite est mentionné, sous une forme ou sous une autre (« l’enseignement explicite n’est pas une découverte, nous nous efforçons depuis plusieurs années à être les plus explicites possible avec les élèves. Comment faire autrement ? » - « transformation du travail enseignant vers l’explicitation » - « les enseignants tentent d’enseigner plus explicitement », etc.) dans 19 % des réponses. Cette modalité pédagogique, dont les chercheurs font une des clés de la progression dans les apprentissages pour les élèves de l’éducation prioritaire, n’a pas percé autant qu’on pourrait l’espérer. Sans compter que la simple mention d’un terme (explicite, explicitation, explicitement) ne renseigne pas sur la façon dont le concept est compris et mis en œuvre.

Mais ce n’est pas tant le faible pourcentage qui retient l’attention que l’éparpillement des réponses selon les académies : les répondants de 6 académies ne citent jamais un de ces termes, dans 11 autres ils ne le citent qu’une seule fois ; dans 6 académies ils le citent deux fois ; dans 2 académies ils le citent trois fois ; il existe également 3 mentions parmi les réponses dont l’origine géographique n’est pas identifiée. Seules les réponses venant de trois académies permettraient de penser que la notion se diffuse.

On aurait pu attendre, à propos des évolutions positives des pratiques de classe et du travail collectif, que les répondants citent la formation comme moteur de ces évolutions. Or le terme « formation » ou la mention des travaux de tel ou tel chercheur n’apparaissent que dans 12 % des réponses. Si la DGESCO, les inspecteurs, les chercheurs, pensent que la formation est ce qui fait évoluer les pratiques, le terrain ne l’exprime pas ainsi.

A propos des « autres disciplines que le français », les répondants n’ont mentionné que dans moins de 10 % des cas des activités scientifiques (14 mentions des mathématiques et/ou des sciences), ou l’implication de toutes les disciplines (8 mentions), ce qui au total est très peu.

Si les réponses venaient des enseignants de collège, on pourrait s’inquiéter du risque de voir l’axe 1 demeurer le champ d’intervention des seuls enseignants de lettres. Mais elles proviennent essentiellement du premier degré. Cependant, référées aux mentions des activités de lecture de supports littéraires, d’oralisation et de théâtralisation, force est de constater la sous-représentation des activités liées au domaine scientifique dans les réponses concernant l’axe 1.

1.3 Une prise en compte plus collective des apprentissages langagiers

Les réponses à la question Q 1.1 donnent à lire un dernier constat. Quelques réponses évoquent d’autres champs de réflexion et d’action que le lire – écrire – parler comme signes d’une évolution positive concernant l’axe 1 : le travail de différenciation et l’organisation d’ateliers de besoin, d’ateliers individuels d’inspiration Montessori, la mise en place de tutorat en classe entre les bons élèves, ainsi valorisés, et les élèves en difficulté, ainsi rassurés, la mise en place de tâches complexes au cycle 3, le travail plus personnalisé, l’enseignement explicite des méthodes pour mémoriser et apprendre, la mise en œuvre d’une évaluation positive, la prise en compte de la grande difficulté scolaire… On peut interpréter cette liste comme le signe d’une conscience nouvelle que les difficultés dans les apprentissages linguistiques et langagiers ne sont pas traitables uniquement dans le cadre de l’enseignement du lire – écrire, mais en variant les méthodes pédagogiques, et en prenant en compte l’élève « globalement » et non dans la seule dimension de ses apprentissages « techniques » du lire – écrire.

2. Les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 1

23 % des répondants n’ont pas renseigné cette question.

2.1 Les obstacles sociétaux et culturels

Sur l’ensemble des réponses exprimées (77 %), les obstacles les plus souvent cités concernent le milieu défavorisé des élèves de l’éducation prioritaire (41 %). Le détail de ce que les répondants citent comme obstacles s’organise ainsi :
 difficultés spécifiques du lire – écrire – parler : 26 mentions ; Retour ligne manuel
 difficultés spécifiques aux élèves non francophones : 12 mentions. On note à ce propos la mention de leur famille, avec lesquelles les enseignants ont du mal à interagir ;
 conditions de vie socioéconomiques des élèves : 7 mentions ; Retour ligne manuel
 pauvreté culturelle de leur quartier : 7 mentions.

Y a-t-il en dehors de ces quatre points un portrait type de l’élève d’éducation prioritaire ? Non. On ne note que 4 mentions d’élèves perturbateurs, 1 seule mention de violence dans les couloirs. Par contre, deux caractéristiques émergent : leurs familles ne les motivent pas, ne soutiennent pas le travail personnel (9 mentions). On peut s’interroger sur le bien-fondé de ces réponses sachant que la recherche dans le domaine de la co-éducation fait entendre un point de vue inverse. N’y aurait-il pas une sorte de vision idéalisée du parent de classe moyenne, ce que ne sont pas les parents des élèves de l’éducation prioritaire. Pour mémoire, on retiendra cette étonnante réponse : l’obstacle à la mise en œuvre de l’axe 1 tiendrait à « la non implication des familles et leur méconnaissance – des mères principalement – des pratiques pédagogiques de base ».

Enfin, le milieu défavorisé des élèves explique sans doute que le « trop grande hétérogénéité des classes » soit mentionnée 5 fois comme l’obstacle à la mise en œuvre de l’axe 1 ; plus qu’une question de savoir faire pédagogique (gérer l’hétérogénéité), il s’agit sans doute là de la traduction d’une situation spécifique : la présence dans une même classe d’un trop grand nombre d’élèves en très grande difficulté, de familles non francophones, d’enfants du voyage, d’élèves qui devraient relever d’une prise en charge extérieure (3 mentions).

Viennent ensuite comme obstacle à la mise en œuvre de l’axe 1 du référentiel les causes structurelles (38 %). Malgré leur formulation variée, elles permettent d’établir le catalogue suivant :
 ressources humaines (36 mentions) dont
o manque de personnel enseignants, exprimé à travers la mention des effectifs trop lourds (dont alourdis par le dédoublement des CP et CE1) : 13 mentions,
o manque de personnel spécialisé (RASED, personnels extérieurs, prise en charge des élèves allophones) : 7 mentions,
o disparition du maître supplémentaire (PMQC) : 6 mentions,
o personnel supplémentaire (pour travail en petits groupes, dispositifs) : 3 mentions ;
o personnel de remplacement : 3 mentions,Retour ligne automatique
o turnover enseignant : 4 mentions
 manque de temps (par exemple, manque de temps de concertation, besoin de temps pour échanger et construire, pour évoluer …) : 17 mentions
 manque de moyens (en heures postes, en locaux, en BCD, en matériel numérique, en support numérique d’apprentissage) : 10 mentions
 effectif enseignants trop important ou trop peu nombreux (autrement dit, problème lié à la taille des écoles) : 3 mentions.

2.2 Les obstacles qui relèvent des acteurs

Mais, et c’est plus inattendu, 29 % des répondants mettent en avant des obstacles relevant des enseignants eux-mêmes, dont la liste s’établit ainsi :
 absence de culture commune dans l’école, entre les écoles du réseau, absence de continuité inter cycles : 17 mentions. On retiendra une formulation qui éclaire la difficulté à travailler autour d’un collectif, dans un collège, entre collège et écoles : « l’acceptation par tous d’une mise en œuvre commune. La liberté pédagogique au service de l’individualisme plutôt qu’au collectif... ». Au niveau du pilotage, cette difficulté est traduite par le manque de circulation des informations et le manque de concertation.
 frilosité des enseignants (25 mentions), qui se décline par exemple en
o réticence, résistance au changement, manque d’implication (9 mentions),
o manque d’adhésion à des notions didactiques et/ou à des pratiques pédagogiques (9 mentions) – par exemple, prévention plutôt que remédiation, enseignement par niveau et non par cycle, méthodes traditionnelles non adaptées aux besoins des élèves, manque d’investissement sur l’axe 1 … -,
 manque de savoir-faire professionnels éprouvé dans la mise en œuvre de l’enseignement explicite (4 mentions), dans la production d’écrit (2 mentions), dans la résolution de problèmes (1 mention).

Il est intéressant de constater qu’on ne lit pas dans les réponses de toutes les académies cette analyse critique portant sur les acteurs, sans doute très utile car porteuse de progrès.

Comme quatrième obstacle à la mise en œuvre de l’axe 1 vient l’absence de formation (12,5 % des réponses exprimées). Sous ce terme globalisant sont rassemblées les réponses qui pointent le déficit en formation mais également l’absence d’accompagnement par les formateurs, les conseillers pédagogiques, les inspecteurs, les chercheurs.

NB. La hiérarchie est très peu mentionnée de façon négative : un répondant cite comme obstacle le manque de soutien de la hiérarchie, un autre le « flicage perpétuel de la hiérarchie ».

3. Les leviers pour améliorer la situation

24 % des répondants n’ont pas renseigné la question.

La tentative d’organiser les 76 % de réponses exprimées, qui envisagent des leviers très variés, permet de déterminer trois grands ensembles de leviers :
 ceux qui dépendent d’une décision institutionnelle ou une instance extérieure à l’École : 46 % des réponses exprimées
 ceux qui dépendent des acteurs eux-mêmes : 35 % des réponses exprimées
 ceux qui dépendent à la fois de l’institution et de l’initiative des acteurs : 32 % des réponses exprimées

3.1 Les leviers dépendants d’une décision extérieure aux acteurs

Les leviers liés à la question des ressources humaines sont les plus nombreux (40 %). Dans cet ensemble, 69 % des leviers concernent une augmentation de personnels :
 12 mentions de personnels supplémentaires non spécialisés (par exemple, l’affectation d’un P.E. en collège, des collaborateurs pour venir en appui du directeur, la création d’un poste LEC – liaison école collège -),
 13 mentions de personnels spécialisés (RASED complet, maître E, maître G, AVS, ASH, UPE2A, personnel de vie scolaire, personnel de santé, assistante sociale, traducteur, ATSEM).
 11 mentions exprimant le souhait d’un retour du maître supplémentaire.

31 % des leviers référés aux ressources humaines concernent des questions de recrutement : poste à profil et son corolaire, une affectation choisie ; pérennité des acteurs (dont les équipes de direction) ; mais aussi information des candidats sur les difficultés du poste, les besoins spécifiques en formation, et réflexion sur les primes (pas de primes si des acteurs ne s’investissent pas).

Le remplacement n’est évoqué que deux fois, dont une fois à propos des personnels médicosociaux.

À ces réponses s’ajoutent celles qui voient dans la réduction des effectifs les leviers espérés pour améliorer la situation, puisqu’une réduction des effectifs se traduirait automatiquement par une augmentation des personnels. Elles sont au nombre de 8 % des réponses exprimées. On retiendra en particulier la mention particulière « en petite section, pour faciliter l’appropriation de la langue ».

À côté de l’augmentation des moyens humains, un autre levier est évoqué, la mise à disposition de temps et de moyens supplémentaires :

 Outre les expressions attendues (temps pour des visites croisées, pour des analyses de pratiques, pour travailler ensemble) on notera que s’exprime le souhait que ces temps soient obligatoires pour tous les membres d’un réseau. On retient qu’un répondant souhaiterait que soit accordé du temps pour qu’un enseignant anime un site ouvert aux parents.
 Pour 7 % des répondants, c’est l’augmentation des moyens du réseau qui est vue comme un levier. Ces mentions concernent le premier degré (par exemple, « moyens dédiés au premier degré ») et peuvent concerner la dotation en numérique, en supports numériques d’apprentissage, le mobilier d’une bibliothèque.

3.2 Les leviers dépendants des acteurs eux-mêmes

Par opposition aux leviers qui dépendent de l’institution ou d’instances extérieures à l’École, 27 % des répondants envisagent des leviers d’amélioration qui ne dépendent que de leur propre initiative.

On peut classer les leviers selon trois grandes perspectives :
 se doter d’outils communs, de méthodes communes, en particulier travailler sur les progressions ; à la différence de la perspective suivante, ces réponses laisseraient entendre que de tels outils ou de telles méthodes existent (un répondant souhaite ainsi « des formations sur les outils testés et évalués qui font leur preuve, ou bien une réflexion de la part de notre ministère et la mise en place d’un groupe de recherche en didactique des mathématiques pour nous créer une méthode qui serait infaillible ») ;
 travailler ensemble sur un domaine, un cycle (cycle 3 et parcours individuels des élèves - charte de l’enseignement explicite du réseau à se réapproprier ; statut de l’erreur ; groupes de réflexion sur le vocabulaire …) ;
 se former entre pairs, par exemple : échanges partagés en inter-degrés sur des pratiques de métier ou sur des thématiques transversales (travailler par compétence, l’explicitation...) ; s’essayer à plusieurs sur une action innovante en terme de pédagogie avec un chapeautage hiérarchique : mise en place de certaines équipes pédagogiques pour projets test à présenter ensuite aux autres ; favoriser les observations croisées entre enseignants et entre écoles pour permettre un retour sur les stratégies et favoriser les échanges de pratiques ; échanges de service, etc.

Le levier le plus souvent envisagé est celui de la progression collective grâce aux échanges entre pairs, reposant sur des observations croisées, des analyses de pratiques, des échanges de service.

La relation école – famille est apparue comme un levier dans 8 % des réponses exprimées. Les leviers envisagés peuvent être actionnés par les acteurs, sauf dans deux cas, quand le levier dépend d’une décision institutionnelle (disposer de plus de temps pour rencontrer les parents) ou d’une décision de la collectivité (disposer d’un traducteur).

On retiendra donc un total de 35 % réponses exprimées envisageant des leviers dépendants de l’initiative du terrain.

3.3 Les leviers « mixtes » alliant initiatives des acteurs et ressources extérieures

Les réponses mentionnant la formation (des réponses exprimées) sont classées dans cette rubrique « mixte » car la formation dépend certes de la volonté des acteurs de se former mais également de l’offre de formation.

Presque aussi importants en nombre que les leviers liés aux ressources humaines, les leviers envisagés du côté de la formation témoignent d’une conscience vive de l’importance du collectif : on parle de temps de formation communs au premier et au second degré, de formation obligatoire pour tous les membres du réseau (et on précise enseignants, équipe de direction, personnels non enseignants), de prise en compte des besoins du réseau (auxquels peuvent ne pas correspondre des formations décidées nationalement), de concertation pour le plan de formation entre le collège et les écoles. On parle surtout de temps longs, pour échanger, connaître ce que les autres font, réfléchir ensemble, approfondir (une thématique sur une année, par exemple), évoluer et changer ses pratiques. Et dans ce temps long, le suivi par l’inspection, un CPC, un chercheur est souhaité (5 fois précisément pour cette dernière figure). On évoque enfin la formation des pilotes.

Enfin, dans 6 réponses, ce sont les partenaires qui apparaissent comme des leviers : associations travaillant avec les familles, associations intervenant sur la lecture, ateliers mis en place par la mairie, infrastructures culturelles. Ces leviers relèvent de la catégorie « mixte » car il ne dépend pas des acteurs que ces partenaires existent, mais il dépend d’eux de collaborer avec eux.

On retiendra donc un total de 32 % réponses exprimées envisageant des leviers dépendants à la fois de l’initiative du terrain et de ressources extérieures.

Conclusion

L’axe 1 est connu dans ses grandes lignes, et les répondants ont très volontiers renseigné les trois questions, fait part des évolutions positives qu’ils constatent, et montré dans leur réflexion sur les obstacles rencontrés et les leviers envisagés qu’ils comptent sur leurs propres initiatives autant que sur des aides structurelles pour poursuivre la mise en œuvre de l’axe 1.

L’acquisition du « lire, écrire, parler » est placée en tête des priorités de la refondation. Les réponses au questionnaire témoignent de façon massive de sa place centrale dans l’enseignement au quotidien, et d’une évolution positive des pratiques de classe et du travail collectif le concernant. Au lieu de l’expression traditionnelle « maîtrise de la langue », les répondants évoquent la lecture, la production écrite, le travail sur l’oral, sur le lexique, ce qui témoigne d’une réflexion précise sur des apprentissages spécifiques, pris en charge collectivement. Les évolutions positives sont permises par la présence d’adultes en plus grand nombre, dans le cadre du dispositif PDMQDC, devoirs faits, dédoublements CP / CE1, mais aussi de personnels spécialisés face à des difficultés spécifiques (RASED, UPE2A, CASNAV). L’accueil des moins de trois ans, l’AP, les APC, les EPI, les PPRE, favorisent également la mise en œuvre de l’axe 1.

Le milieu défavorisé des élèves est le premier obstacle mentionné à la mise en œuvre de l’axe 1. Le deuxième obstacle est structurel : manque des moyens humains supplémentaires ou spécialisés qui sont autant d’atouts là où ils existent, manque de temps pour se concerter, construire ensemble, évoluer, manque d’accompagnement (formateurs, CPC, inspecteurs, chercheurs). Mais les réponses renvoient aussi les obstacles aux acteurs eux-mêmes : absence de culture commune entre premier et second degrés, mauvaise circulation des informations du côté du pilotage, résistance au changement, manque d’adhésion à des notions didactiques et/ou à des pratiques pédagogiques.

Logiquement donc, le premier levier envisagé concerne les moyens humains, le deuxième est la mise à disposition de temps, permettant en particulier des visites croisées, des analyses de pratique, du travail en commun. Mais les leviers ne dépendent pas seulement de décisions structurelles : de l’initiative des équipes elles-mêmes peuvent naître des leviers essentiels, comme la progression des apprentissages favorisée par des outils et des méthodes pédagogiques communes, la construction d’une culture commune autour d’objets de travail partagé, la relation école – famille.

On retiendra des analyses ci-dessus qu’on retrouve dans les trois questions les mêmes sujets : le « lire – écrire – parler » est à la fois le domaine où les évolutions positives sont nombreuses, où les équipes s’investissent, et celui qui pose des problèmes majeurs compte tenu du public de l’éducation prioritaire. Le travail collectif est omniprésent dans les réponses évoquant les évolutions positives mais également mentionné parmi les obstacles. Les évolutions positives sont dues à la collaboration inter cycles, mais le manque de culture commune entre premier et second degré continue de peser dans les obstacles rencontrés. Les évolutions positives sont rendues possibles par la présence de personnels supplémentaires, et le manque de ces personnels constitue un obstacle dans la plupart des réseaux et un obstacle majeur dans les lieux où les difficultés scolaires, sociales, de santé, de logement se cumulent. Les évolutions positives sont le fruit du travail collectif, donc du temps partagé, et le manque de ce temps collectif figure en deuxième rang dans les obstacles. Il est donc clair que les réponses fonctionnent en miroir entre les évolutions positives, les obstacles, et les leviers : pour lutter contre les difficultés scolaires dans les milieux défavorisés concernant le lire – écrire - parler, il faut des acteurs en nombre, du temps pour réfléchir, construire ensemble une culture commune, des outils et des méthodes qui sécurisent les élèves tout au long de leur parcours d’apprentissage ; il faut aussi l’adhésion au collectif de travail que représente, déjà ou pas encore assez, le réseau et aux valeurs qu’il porte.

On retiendra également que certaines notions inscrites dans le référentiel restent dans l’ombre : l’enseignement explicite n’est pas si fréquemment mentionné qu’on pourrait l’espérer, alors qu’il est une clé essentielle de l’amélioration des résultats des élèves ; la formation et la collaboration avec les chercheurs ne l’est pas plus ; aucun des items du dernier alinéa de l’axe 1, « mettre en œuvre des stratégies éprouvées dans les enseignements » n’est mentionné de façon significative (nouvelles organisations pédagogiques, PPRE, usage du numérique, constitution de groupes pour favoriser la confrontation des démarches intellectuelles). Ce sont pourtant des clés pour dépasser les difficultés d’apprentissage dont les équipes se privent.

Mais les avancées évidentes liées à l’axe 1 sont bien là : la place de l’oral et de la production écrite dans la maîtrise de la langue, la prise en charge collective des apprentissages langagiers, la prise de conscience du levier que porte la relation école – famille dans ces acquisitions.

Il reste une question au terme de ces analyses, celle du recrutement. Elle est mentionnée plusieurs fois, sous les formulations diverses de « poste à profil », « affectation volontaire », ou encore à travers le souhait de « prévenir les candidats des difficultés spécifiques de l’enseignement, des besoins particuliers de formation ». On peut les croiser avec d’autres réponses évoquant le manque d’implication des acteurs (« pas de prime pour ceux qui ne s’investissent pas », « accompagnement effectif des enseignants en difficulté ou non impliqués »), la participation à la formation « pour tous les membres du réseau », « obligatoire », ou le jugement surprenant porté sur les familles qui ne seraient pas à la hauteur de leur mission d’éducateurs. Ces réponses, pour peu nombreuses qu’elles soient, font entendre que tous les acteurs ne sont pas impliqués, ne partagent pas l’esprit de l’éducation prioritaire, ni même peut-être n’en partagent la lettre. Peut-on être affecté en deuxième poste en éducation prioritaire sans être en accord avec ses valeurs fondamentales, dont la dynamique collective pédagogique et didactique et le travail avec les familles ?

 

ELEMENT 4

Axe 2 : Conjuguer bienveillance et exigence dans le REP/REP+

Q 2.1 Pouvez-vous décrire une évolution positive au regard de l’axe 2 dans les pratiques de classe et le travail collectif dans votre réseau ?
Q 2.2 Quels sont les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 2 du référentiel qui vous semblent persistants ?
Q 2.3 Quels sont les leviers qui vous sembleraient efficaces pour améliorer la situation ?

1. Les évolutions positives

1.1 Regard d’ensemble sur les réponses

82 % des répondants ont renseigné la question Q. 2.1. Parmi eux, 91% s’expriment à propos d’une évolution positive, 9 % constatent une absence d’avancée.

On compte 40 occurrences du terme « bienveillance » et 35 du terme « exigence » ou vocables de même racine. C’est bien davantage l’une ou l’autre de ces deux notions qui sont évoquées, plus que leur association « bienveillance ET exigence ».

L’enseignement le plus évident de l’examen des réponses tient au nombre d’occurrences des termes « famille » (15 occurrences) et « parents » (17 occurrences), soit 32 occurrences au total, presque autant que le terme « exigence ». La première caractérisation d’une école bienveillante et exigeante est d’avoir une attention particulière aux familles des élèves. On note des remarques proches de celles qui apparaissent pour l’axe 3 : par exemple, conscience plus grande qu’il faut travailler avec les familles.

Dix répondants s’en tiennent à des réponses purement déclaratives : par exemple, « nous sommes bienveillants et exigeants » ; il est difficile dans ce cas d’analyser la nature des améliorations enregistrées. Treize autres répondent que le référentiel les a trouvés « déjà bienveillants et exigeants » ; toutefois ceux-ci notent que le référentiel a alors conforté leurs pratiques.

L’examen des 19 réponses constatant l’absence d’avancées positives est intéressant :
  huit réponses sont sèchement négatives : non ; la notion de bienveillance n’est pas encore acquise ; les changements apportés n’ont pas eu d’effet ;
  deux réponses disent qu’il est impossible ou compliqué d’être exigeant « quand les fondamentaux ne sont pas acquis » ou « quand les parents ne suivent pas ».
  huit autres réponses traduisent un regret à partir d’une même identification : la volonté de conforter une école bienveillante et exigeante se heurte au manque de dynamique collective.
  Une seule réponse se confronte au cœur de la réflexion, la « conjugaison » de la bienveillance et de l’exigence, pour dire que la bienveillance est un acquis mais que « les exigences sont souvent à redéfinir ».
La moitié des réponses dressant un constat négatif expriment donc une difficulté dans la mise en œuvre de l’axe 2 plutôt que sa non prise en compte.

A contrario, on note dans la masse des réponses exprimant une évolution positive une forte présence, plus marquée que pour les autres axes du questionnaire, de formulations qui sonnent comme autant de déclarations de principe : parler de la bienveillance et de l’exigence, c’est toucher un principe fondamental de l’enseignement en éducation prioritaire. Citons parmi ces formulations :
  nous sommes réellement engagés dans une école bienveillante et exigeante, c’est notre moteur ;
  bienveillance et exigence sont les maîtres mots de notre école depuis fort longtemps ;
  pour moi, comme pour l’équipe, conjuguer bienveillance et exigence va de soi ;
  bienveillance et exigence sont deux principes indispensables pour que l’école fonctionne en REP+. »

1.2 Des concepts mal cernés, le référentiel mal connu

Si le nombre des réponses exprimant une évolution positive au regard de l’axe 2 est impressionnant, il est cependant difficile de cerner exactement ce qui conduit les répondants à ce jugement, tant le détail des réponses est varié. Cela s’explique pour deux raisons.

D’une part, contrairement aux questions de l’axe 1 qui interrogent des actes professionnels définis (par exemple, travailler l’oral, multiplier les productions écrites), l’axe 2 vise deux concepts peu ou non définis, la bienveillance et l’exigence. Ainsi la notion d’exigence est inscrite dans trois perspectives :
  notion d’exigence associée à une offre culturelle exceptionnelle : ainsi la mise en place d’une section allemand au collège avec un début d’enseignement en CM1 dans les deux écoles du réseau ; des projets ambitieux avec l’INSA et le théâtre des Deux Rives ;
  notion d’exigence mise en relation avec les objectifs des programmes : « les problématiques des contenus des programmes sont régulièrement interrogées par les équipes à la lumière des erreurs relevées lors des évaluations afin de ne jamais revenir à des exigences au rabais » ;
  notion d’exigence participant à la réflexion pédagogique centrale de l’éducation prioritaire, bienveillance / adaptation aux élèves / exigence / risque de malveillance : « les groupes de recherche essaient de définir jusqu’où peut-on aller dans les classes dans l’adaptation pour ces élèves en difficulté, maintenir une exigence sans être malveillant par rapport à leurs compétences ».

D’autre part, les termes par lesquels les répondants s’expriment renvoient peu, pour certaines rubriques, aux termes précis du référentiel. C’est surtout le titre de l’axe 2 qui est connu avec les deux notions de bienveillance et d’exigence, sans que les recommandations déclinées dans cet axe soient toutes évoquées dans les réponses, loin s’en faut.

Dans la circulaire Refondation de l’éducation prioritaire (7), l’axe 2, Conforter une école bienveillante et exigeante, est décliné en trois points : projets et organisations pédagogiques éducatives ; évaluation des élèves ; suivi des élèves.

L’intitulé du premier point n’est présent explicitement que dans une seule réponse, et les références aux six des sept items qui le déclinent sont rares : trois occurrences seulement du « principe de l’hétérogénéité », cinq du « travail personnel de l’élève », trois du « bien-être des élèves » et dix du « climat scolaire », sept de la « lutte contre l’absentéisme », aucune de la « politique d’orientation », et dix de « l’accueil des moins de trois ans ». Seule la continuité école – collège est largement citée.

Si les mots du référentiel ne viennent pas spontanément à l’esprit des répondants, il faut néanmoins remarquer que l’idée peut être exprimée de façon plus ou moins proche. Prenons le cas du « climat scolaire » : l’expression ne figure en tant que telle que dans dix réponses, mais on peut en compter huit autres qui tournent autour du concept sans le nommer. Par exemple, contractualisation qui favorise le climat de confiance, travail sur la citoyenneté et le vivre ensemble, ou encore des entrées plus étroites mais qui tendent sans doute à l’amélioration du climat scolaire comme prise en compte des émotions dans les apprentissages, pratiques coopératives pour développer l’empathie des élèves, « tutorat (amélioration du climat de classe et confiance en soi) » ou encore la mention de débats à visée philosophique qui aident à travailler l’expression du ressenti. Ce sont donc en fait vingt réponses qui évoquent une réflexion, une mise en œuvre, une action témoignant de la prise en compte de la question du climat scolaire liée aux apprentissages.

Les attentes du référentiel concernant le deuxième point de l’axe 2, l’évaluation des élèves, sont bien connues pour quatre items sur cinq, mais l’absence de ce cinquième item alerte : deux réponses seulement mentionnent le statut de l’erreur, alors que la rédaction du référentiel place en tête de cette entrée : « L’erreur est considérée comme source d’apprentissage. »

Le même constat s’impose à propos du troisième point de l’axe 2 concernant le suivi : l’idée de suivi est très largement présente dans les réponses, mais les termes précis qui déclinent cette idée sont absents : l’existence d’un groupe de prévention contre le décrochage (GPDS) n’apparaît qu’une seule fois, comme celle d’une commission de suivi ou du tutorat, et il n’y a que deux occurrences seulement d’un coordonnateur de niveau.

1.3 Pourtant, une transformation professionnelle bien réelle

Même s’il existe une très grande variété dans les termes par lesquels les répondants s’expriment à propos de la bienveillance et de l’exigence, la lecture des réponses permet de les rassembler en plusieurs ensembles caractérisant au final les deux concepts de bienveillance et d’exigence et de mesurer comment ils concourent aux évolutions positives et profondes de l’enseignement en éducation prioritaire.

• L’évaluation

27 % des réponses citent, à propos d’une évolution positive concernant la bienveillance, des formes d’évaluation, des outils d’évaluation, des réflexions sur l’évaluation.

Les pratiques s’appliquent à « valoriser les réussites ». Des répondants évoquent la mise en place d’une évaluation par compétences (14 mentions, plusieurs fois associées à l’abandon des notes) ou à tout le moins une réflexion et des formations sur cette évaluation. L’exploitation de cette évaluation sur l’ensemble du parcours des élèves semble avoir été favorisée par la réforme du collège et les formations attenantes. Les répondants pointent que cette évaluation par compétences peut peiner à se mettre en place au sein des cycles 3 et 4, mais les actions de continuité permettent néanmoins que cette évaluation soit assez souvent exploitée en classe de 6e. De nombreux répondants évoquent aussi des démarches d’évaluation positive (13 mentions, plusieurs fois avec la précision « dès la maternelle »), avec les outils correspondants (carnets de suivi, carnets et cahiers de progrès, classeur de réussite, mais aussi « prise en compte et notification des progrès des élèves en classe et dans les bulletins de notes »). Ce sont les enseignants de maternelle qui semblent avoir impulsé ces démarches d’évaluation positive.

On relève encore, associées à l’évaluation positive, les mentions des termes « auto-évaluation » (1), « évaluation diagnostique » (1), « évaluation formative » (1), « préparation et accompagnement des élèves aux évaluations » (1), organisation « d’évaluations communes », et l’expression « évaluation repensée » (4).

Enfin, liée aux questions d’évaluation, l’expression d’une dynamique collective est associée à la bienveillance dans 10 % des réponses. On mentionne ainsi le travail collectif sur l’évaluation ; l’organisation de devoirs communs ; des progressions par cycle ; le consensus sur les objectifs. C’est sous cet angle que sont mentionnés un « coordonnateur par niveau qui facilite la communication entre PLC » et « le travail en équipe et les nouvelles organisations pédagogiques avec l’appui des CPC ». Le fait de confronter les élèves à un enseignement cohérent est synonyme pour les répondants de bienveillance.

• La gestion des difficultés comportementales

D’autre part, des outils concernant le vivre ensemble sont cités en nombre comme ceinture de comportement, échelle de comportement, permis citoyen, brevet de civisme ; des conseils associent des élèves à la gestion du vivre ensemble : conseil de délégués, conseil de classe pour résoudre les conflits, conseil des élèves, conseil de recommandations intermédiaires, conseil de vie de classe, conseil coopératif. Sous cette rubrique les évolutions positives concernent essentiellement l’amélioration du climat scolaire. L’association des élèves aux projets culturels de cycle ou de classe est rangée sous cet objectif.
Des actions sont mises en œuvre pour éviter le recours aux sanctions ainsi que les exclusions (échelle de sanctions qui prend en compte la bienveillance, réponses plus adaptées et moins sources de décrochage que les exclusions, instauration d’un « médiateur). Quatre fois est mentionnée la rédaction de documents telles une charte des valeurs, une charte commune ATSEM / enseignants sur les gestes bienveillants, une mise en commun des règles de vie, une réécriture des règles communes dans des termes positifs adaptés à chaque lieu.
Au total, 13 % des réponses témoignent d’amélioration en termes de bienveillance dans le registre de l’évaluation et des règles du vivre ensemble. Ces évolutions de pratiques portent surtout sur le collège.

Par ailleurs, quinze réponses citent des formations ou groupes de recherches pour aider les équipes à cerner les concepts de bienveillance et d’exigence et à les mettre en œuvre, dont on retient plusieurs mentions de formation associant ATSEM et enseignants.

• Les changements d’attitudes professionnelles

Les réponses les plus nombreuses concernent le changement dans les attitudes professionnelles : le suivi et l’accompagnement des élèves, l’explicitation de l’univers scolaire, la pédagogie.

Le changement le plus évident évoqué dans les réponses concerne la relation école – famille. 17 % des répondants l’expriment, évoquant par exemple « l’accueil de chaque élève et de sa famille dans sa singularité » ou « la bienveillance envers les élèves mais aussi leur famille ». Il s’agit d’associer les parents à des moments conviviaux, à la vie de l’école ou du collège, en un mot de « valoriser les élèves et leur famille ». Plusieurs réponses concernent la fréquence des rencontres avec les parents, mais également les modalités de la communication des livrets ou des bulletins. On peut retenir comme illustration de cette attention nouvelle aux familles ces deux citations :
  « Au sein de notre circonscription, l’IEN a demandé à chaque école de réfléchir et de produire une charte des valeurs. Cette charte a été présentée en fin d’année à l’école aux parents d’élèves. La charte est affichée dans l’école, les nouveaux parents l’ont en début d’année. »
  « Communiquer régulièrement et accueillir, sans complexe, les familles y compris sans rendez-vous. Propager dans les familles un sentiment d’appartenance à une communauté éducative. »

Le changement touche également la relation à l’élève. La réponse concernant la charte commune ATSEM / enseignants se termine ainsi : « cette réflexion a permis de faire réfléchir chaque enseignant et ATSEM sur l’attitude de l’adulte vis à vis des enfants. » Presque 7 % des répondants évoquent une « prise de conscience », un « changement de posture », changeant la qualité du regard porté sur l’élève, par exemple : « ce terme de bienveillance a changé le regard et l’attitude des enseignants face à élèves. » Ce n’est donc pas par hasard que ce changement de regard induit un changement dans l’évaluation : « le regard des enseignants sur leurs élèves a été travaillé dans le premier degré (d’où) le développement de l’évaluation positive ». Ce changement dans la relation à l’élève se traduit par une « meilleure acceptation des différences de niveau et des difficultés de chacun », la « qualité de l’accueil offert à tous (les) élèves », la « participation active des élèves aux projets d’école ».

• Conséquences sur le suivi des élèves, la communication, l’adaptation aux élèves

La bienveillance est associée dans 17 % des réponses au suivi des apprentissages dans la classe et au passage d’un cycle à l’autre « avec une coordination premier second degré (…) et une coordination maternelle élémentaire pour suivre au mieux les élèves en difficulté ». Il est même précisé que ce suivi vise « toute la coordination entre l’identification des difficultés d’un élève et les dispositifs pour y remédier ». Ce suivi est caractérisé par des échanges d’informations ; ainsi un répondant écrit que, dans la continuité école – collège, « les professeurs ressources renforcent le lien, le transfert des informations et le suivi des élèves ». Sont mentionnés des « documents de suivi », le livret scolaire unique, plusieurs fois le conseil école – collège (CEC), ainsi que le PPRE. On retient en particulier l’association entre les petits effectifs et la possibilité d’accompagner l’élève à son rythme, d’organiser des ateliers, des îlots, de proposer le dispositif Devoirs faits.

Autre conséquence : les répondants mentionnent un effort d’explicitation et de communication. L’école manque de bienveillance quand elle n’a pas conscience que le « dit » de l’école n’est pas spontanément compris, et quand cette prise de conscience a lieu et qu’un effort de communication est fait vis à vis des élèves comme vis à vis des familles, la bienveillance se trouve confortée. Dans un peu plus de 8 % des réponses se trouvent mentionnés le travail sur les « messages clairs », par exemple pratiques des messages clairs dans toutes les écoles ; présentation des projets aux familles et explicitation des attendus aux élèves. La démarche d’enseignement explicite est référée à la bienveillance.

C’est au regard de cet effort d’explicitation qu’apparaît le plus nettement la notion d’exigence : « travail d’explicitation avec les familles sur les bénéfices pour l’élève du respect des règles et de la nécessité d’une relation de confiance entre l’école et la famille », « les programmes de la maternelle présentés en début d’année permettent de maintenir une exigence et de montrer aux parents cette exigence ». Dans tous les cas, rendre le « dit » de l’école clair se fait au bénéfice des élèves : on note une « meilleure compréhension du collège par les élèves », le fait qu’une fois les « exigences formulées, l’élève visualise son parcours », que « la description des rôles de l’école maternelle lors de rendez-vous avec chaque parent de PS ou du dispositif a permis la mise en place d’une assiduité régulière de tous les élèves. »

Enfin, répondant aux expressions relevées ci-dessus témoignant de la volonté de prendre en compte tous les élèves, de les accepter dans leurs différences et leur singularité, on relève dans presque 10 % des réponses des termes relevant de l’adaptation de la pédagogie aux élèves, qu’il s’agisse de « pédagogie différenciée » ou de « différenciation pédagogique » (11 occurrences), d’ « inclusion » (des élèves à besoin particuliers, des élèves pré-orientés en SEGPA en classe de 6ème – 5 occurrences), d’ « individualisation », de « remédiation en groupes de besoin » et autres formulations témoignant du désir de répondre au plus près et au mieux aux difficultés de chaque élève.

2. Les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 2

Il n’est pas plus aisé de rendre compte des réponses à la question 2 qu’à la question 1 : on remarque les mêmes imprécisions et le même éparpillement dans le contenu des réponses.

2.1 Contresens sur les notions de bienveillance et d’exigence

La recommandation de bienveillance peut être interprétée comme une invitation à « mêler l’affectif » à ses pratiques d’enseignement : il en résulte que les postures « bienveillantes » adoptées « ne réussissent pas tous les ans avec tous les élèves ». Dans ce cas les acteurs entendent le mot de bienveillance avec une connotation psychologique, sentimentale en quelque sorte, un synonyme de « gentillesse ». Une confusion apparaît donc entre la bienveillance dans la sphère privée et la bienveillance dans la sphère professionnelle de l’école. Cette conception psychologisante de la bienveillance conduit des répondants à exprimer « leur épuisement à répéter les règles » par exemple ; ils comprennent bienveillance comme une incitation à répéter « gentiment » les règles et de fait s’y épuisent.

Les formes, les modalités, les objectifs de la bienveillance professionnelle à l’école, dans les apprentissages, semblent largement méconnus ; sans doute n’ont-ils pas été assez clairement explicitées lors de la refondation ni assez mis au cœur des formations depuis. Cette méconnaissance constitue un potentiel de conflit entre les acteurs de l’éducation prioritaire d’un même réseau, d’une même école, d’un même collège. Les acteurs semblent très arc-boutés sur leur compréhension de la bienveillance.

Les erreurs de représentations et de définitions de ces deux notions sont évidemment dommageables aux élèves les plus en difficulté puisqu’elles affectent notamment la cohérence des postures dans les journées, les parcours d’apprentissage, la continuité des pratiques (apprentissages et évaluations) tout au long des parcours d’élèves.

Il résulte de ces possibles contresens les constats suivants à propos de la bienveillance :
  Des résistances, qui au mieux semblent à ceux qui les engagent un refus de brader la qualité de l’enseignement dispensé en éducation prioritaire. L’affirmation légitime que l’école doit être un lieu où les différences sociales s’estompent aveugle et fait considérer la bienveillance comme un renoncement à l’exigence. Il y a donc bien à clarifier la conjugaison entre les deux termes, bienveillance ET exigence.
  Des résistances, qui au pire semblent une affirmation individuelle ou collective d’autoritarisme (confondu avec la nécessaire autorité). 10 % des réponses évoquent des « replis », des « refus » de bienveillance, de la part de « personnels réfractaires » ou « récalcitrants » à la bienveillance, ce qui est une posture inadmissible pour tout enseignant, en éducation prioritaire comme hors éducation prioritaire.
  À ces 10 % s’ajoutent des réponses qui font apparaître le refus de quelques acteurs de s’engager dans les actions collectives définies au titre de la bienveillance : 4 % des réponses citent notamment un refus de la part de collègues d’évaluer par compétences quand la décision en est validée dans le réseau. Ces personnels considèrent les décisions collectives d’évaluation comme « une perte de temps », « un leurre qui cache la vérité ». Leur posture, regrettée par les répondants, fragilise manifestement l’efficacité des actions entreprises. Il peut se produire par exemple que dans les carnets de suivi, ces personnels persistent à pointer les lacunes quand manifestement il a été décidé de mettre en évidence les progrès. Selon un répondant qui fait ce contresens, la bienveillance attendue se traduit dans le laxisme relatif aux passages dans les classes supérieures. On voit comment des demandes de redoublement émanant de personnels faisant ces contresens menacent plus que la bienveillance attendue de tout enseignant.

Quant à l’exigence, on relève que :
  un répondant considère que, faute d’exigence, « on n’atteint pas le niveau attendu », « on brade l’évaluation du contrôle continu au DNB » dans son collège. Un autre répondant considère que l’on est trop exigeant dans l’évaluation du contrôle continu au DNB dans son réseau et que cela nuit aux élèves du collège par rapport à d’autres collèges du même secteur. Ce genre de réponses antithétiques montrent les dégâts occasionnés par la méconnaissance des concepts de bienveillance et d’exigence : insatisfaction des équipes et des pilotes, opacité des objectifs poursuivis ;
  on lit l’expression de reproches adressés aux élèves qui n’entrent pas dans des dynamiques d’ « efforts » qui permettraient à l’exigence d’être soutenue par les enseignants : c’est une autre interprétation psychologisante de l’exigence ;
  mais on lit également les inquiétudes d’une dizaine de répondants parmi les 189 réponses exprimées sur les excès d’exigence dans leur réseau ; la nécessité de « définir des exigences communes », « par paliers », est évoquée par trois répondants.
De plus, la mise en tension des deux notions est mal maîtrisée. Des réponses laissent penser que cette « tension » semble pouvoir être résorbée par une simple alternance des postures, dans un mouvement de balancier où se succèdent des phases, des temps de bienveillance (ou pas !) et des domaines et/ou temps d’exigence. Ainsi lit-on par exemple qu’on « réussit moins bien à être bienveillant en fin de journée ». Mais l’association bienveillance et exigence dans les apprentissages semble peu maîtrisée et ce manque de maîtrise et/ou la difficulté d’associer bienveillance ET exigence sont explicités par une douzaine de répondants.

2.2 Les obstacles imputés aux fonctionnements institutionnels

25 % des obstacles cités sont imputés à l’institution. Les demandes institutionnelles intervenues depuis la refondation accroissent l’impression de tension entre les deux notions de bienveillance et d’exigence : la refondation visait la réduction de 10 % des écarts de résultats au DNB entre EP et hors EP ; les évaluations du cycle 2 appellent à 100 % de réussite. Ce type d’injonctions, trop nombreuses et peu cohérentes à « évaluer », n’aident pas les équipes à construire les postures d’exigence attendues : les cibles sont brouillées. Ce brouillage tient sûrement un rôle dans les postures des « réfractaires » évoqués ci-dessus ; il désarme aussi les acteurs les plus convaincus de la nécessaire conjugaison de la bienveillance et de l’exigence en éducation prioritaire.

L’encadrement des personnels « réfractaires à la bienveillance » semble insuffisant à certains répondants qui pensent que « le seul accompagnement » de ces personnels ne rétablit pas bien les postures bienveillantes et exigeantes attendues.

Trois autres obstacles induits par l’institution sont mentionnés :
  les programmes et leur lourdeur, qui mettent en difficulté les postures bienveillantes ; ils feraient obstacle à la pédagogie différenciée ;
  le manque de pilotage cohérent d’un réseau ;
  le LSU souvent cité comme une contrainte très mal adaptée aux pratiques d’une évaluation positive, qui fait doublon avec les bulletins scolaires et fait finalement écran à la bonne compréhension par les familles du parcours d’apprentissage. Elles sont perdues selon plusieurs répondants entre des évaluations diverses ; les évaluations par compétences leur semblent même, selon un répondant, « les tromper » ; par voie de conséquence des familles ne comprennent pas l’absence de notes au collège.
Les autres obstacles institutionnels évoqués ne sont pas différents de ceux qui ont été mentionnés à propos de la mise en œuvre de l’axe 1. Chacun des items relevés est mentionné au moins cinq fois.
  Ils relèvent d’abord de questions de ressources humaines : affectations de personnels inexpérimentés en éducation prioritaire, et de personnels contractuels non formés ; personnels à mi-temps nombreux en EP, instabilité des affectations qui pèse sur la dynamique collective, absence de personnels enseignants chevronnés qui la fragilise également. À cela s’ajoutent les difficultés de remplacement, y compris sur des congés annoncés longtemps à l’avance ;
  ces obstacles sont aussi liés au manque de personnels spécialisés, RASED et personnels sociaux, au manque de structures capables de prendre en charge les élèves à besoins particuliers. Dans les cas de pilotage peu cohérent d’un réseau c’est la circulation des informations relatives aux élèves pris en charge sur le plan psychologique qui est interrompue ; un répondant évoque « le cloisonnement des informations de suivi des élèves » ;
  une troisième catégorie d’obstacles rassemble des questions d’organisation et de fonctionnement : rareté des échanges avec « la hiérarchie », manque de considération des enseignants, attente des dotations qui oblige à conduire les actions seulement après les congés de Toussaint, classes aux effectifs pléthoriques (un répondant cite des classes à 29 élèves), suppression du dispositif PDMQDC et suppression des maîtres+, dédoublements des CP et CE 1 qui augmentent les effectifs dans les classes de CM1 et CM2, difficulté à coordonner les équipes avec de seuls mi-temps de coordination, manque de clarté sur les paliers d’exigence possible.
Cette liste éparse renvoie à des réalités connues concernant les difficultés spécifiques de l’éducation prioritaire. Pour les illustrer, on peut retenir cette citation, isolée, mais révélatrice de l’usure des personnels et de leurs difficultés à conjuguer bienveillance et exigence : « il y a une forme de sélection naturelle qui opère : les enseignants qui n’acceptent pas la grande misère partent, ceux qui restent finissent par partir au bout de 10 ans et plus suite à un arrêt de travail important (accident du travail ou dépression) ». Ce sont donc les conditions trop difficiles de l’exercice du métier qui empêcheraient d’être bienveillant et exigeant.

Il faut ajouter, spécifiquement au regard de l’axe 2, les obstacles relevant des insuffisances dans le domaine de la formation continue (8 % des obstacles cités) : manque de formation sur les enjeux de la bienveillance ; sur la gestion de l’hétérogénéité ; rareté des formations dédiées à la psychologie des adolescents et des formations sur la différenciation pédagogique.

Enfin, un répondant avance comme obstacle la politique d’enseignement elle-même : les objectifs de l’école (faire réussir tous les élèves) et ceux du collège (tri social) ne sont pas favorables à la mise en place de pratiques continues et communes sur la bienveillance et l’exigence.

2.3 Les obstacles relevant des personnels

Le premier tient à la difficulté de faire réseau (12 % des réponses) : un répondant parle du conseil école – collège (CEC) comme d’une « usine à gaz » où la question de la bienveillance et de l’exigence n’est pas abordée ; un autre d’un CEC qui ne fonctionne pas ; un autre encore d’un CEC qui ne joue pas son rôle sur le plan pédagogique Un autre répondant pointe l’irrégularité des réunions de la commission de suivi.

Il résulte de cette discontinuité au sein des réseaux une rupture des mesures mises en place pour suivre les élèves, voire « une perte des informations essentielles » relatives à leur suivi. Les acteurs d’un réseau ne connaissent pas les projets de tous les lieux d’apprentissage du réseau ; d’autres « campent sur leurs positions ». Or le suivi des élèves tout au long de leurs parcours, le repérage et l’analyse de leurs progrès, l’attention portée aux solutions de continuité sont des postures professionnelles bienveillantes par excellence : elles sont donc très fragilisées par cette difficulté, qui peut être une difficulté de personnes, à faire réseau.

Les écarts de culture et de représentations professionnelles entre le premier et le second degré, les écarts de culture entre les écoles d’un réseau qui n’ont pas d’échanges suffisants pour mettre en cohérence leurs projets, y compris entre cycle 1 et cycle 2, concourent également à la difficulté de faire réseau. Le manque de temps dédié à la concertation, aux échanges, est souvent cité comme un facteur d’accroissement de cette difficulté.

Le deuxième obstacle tient à des difficultés didactiques et pédagogiques (8 % des obstacles cités) : les répondants évoquent les difficultés à « penser le sens de l’école », « le sens et la nature du travail demandé aux élèves en classe et hors de la classe » ; ils citent leur difficulté à gérer l’hétérogénéité ; des réponses déplorent « une mauvaise représentation des enjeux du climat scolaire trop seulement conçu comme relevant de la vie scolaire » comme si les pratiques pédagogiques ne concouraient pas à la qualité de ce climat. Quand les dynamiques collectives sont rompues par des positions trop personnelles, les dispositifs les mieux bienveillants et exigeants sont remis en cause : on renonce alors aux cahiers d’essai, de brouillon, et on perd de vue leur valeur et leur sens en termes de bienveillance et d’exigence conjuguées. Un répondant évoque que de telles postures professionnelles « récalcitrantes » peuvent être influencées par le regard actuel de la société sur l’erreur et la réussite. D’autres répondants regrettent que le turnover des projets ne permette pas de voir les résultats des actions actées : un répondant en appelle ainsi à la pérennité des actions.

Le troisième obstacle concerne la façon de s’investir dans le métier en éducation prioritaire : une petite dizaine de réponses fait état de la méconnaissance par certains personnels des véritables conditions de vie des élèves, d’une tendance à externaliser la prise en charge des difficultés des élèves ; ils dénoncent les motivations trop exclusivement financières de certains personnels affectés en éducation prioritaire : un répondant propose un entretien préalable systématique lors des affectations ; à ses yeux les échanges permettraient de mesurer la bonne connaissance et bonne compréhension du référentiel et des projets de réseau ; cette proposition rejoint la question des affectations en éducation prioritaire, mais elle a aussi le mérite de souligner combien les dynamiques collectives sont le terreau de la réussite en éducation prioritaire, comme évoqué ci-dessus.

2.4 Les obstacles imputés aux familles

8 % des réponses réfèrent les obstacles aux familles. L’éloignement de certains parents, leur difficulté à comprendre les évaluations positives ou les évaluations par compétences, sont cités parmi les obstacles. Des reproches leur sont parfois adressés : des familles acceptent les absences de leurs enfants. Dans ce cas, c’est donc le manque d’exigence des familles qui empêcherait de « conforter une école bienveillante et exigeante ».

En conclusion, il convient de noter que sur 268 répondants, 189 réponses (71 %) traitent la question des obstacles relatifs à la mise en œuvre de la bienveillance et de l’exigence en éducation prioritaire : le temps pris à les définir éclaire sur la belle et majoritaire détermination des acteurs à mettre en œuvre l’axe 2 du référentiel, à poursuivre les améliorations déjà enregistrées. Ce taux très encourageant mérite d’être pris en considération et, surtout, il appelle à la mutualisation des pratiques qui pourraient conduire une mise en œuvre aisée de la bienveillance et de l’exigence en éducation prioritaire.

La liste des obstacles qui surgissent des difficultés à coopérer avec les familles coïncide avec les réponses propres à l’axe 3 du référentiel. Elle révèle en négatif une bonne compréhension de ce que peut être la bienveillance attendue en EP, qui ne saurait s’en tenir aux seules relations avec les élèves ni au seul face à face pédagogique : la bienveillance, les répondants le font lire, passe aussi par la bienveillance avec les familles.

Les obstacles à l’axe 2 imputés à la décision centrale occupent une place majeure dans les réponses ; ils ne sont pas particulièrement différents des obstacles relatifs à d’autres axes du référentiel et méritent donc à ce titre d’être tout particulièrement entendus : l’instabilité des objectifs nationaux, la question des moyens en personnels spécifiques et des politiques d’affectation en éducation prioritaire occupent le devant de la scène pour l’axe 2 aussi.

Toutefois un obstacle spécifique surgit qui en vérité relève lui aussi du niveau institutionnel. On ne peut que regretter des décisions personnelles des acteurs qui font volontairement sécession par rapport aux actions entreprises en faveur de la bienveillance et de l’exigence dans leur réseau, qui surtout se libèrent de l’obligation d’adopter l’éthique responsable attendue de tous les professeurs et personnels d’éducation, en tous lieux d’éducation, telle qu’elle est définie par le BO du 25 juillet 2013. Mais on peut aussi s’interroger sur l’échec du pilotage, à tous les niveaux, qui ne parvient peut-être pas à détecter de telles défaillances, et qui ne parvient manifestement pas mieux à rétablir d’autres postures plus professionnelles, plus conformes aux attendus nationaux, et essentielles en éducation prioritaire au point d’avoir été nommément convoquées par l’axe 2 du référentiel.

Les formations initiales et continues, qui pourraient construire et conforter des pratiques pédagogiques et didactiques bien adaptées à cet axe 2, qui pourraient installer l’éthique responsable attendue en matière de bienveillance et d’exigence, ne sont pas suffisantes. Elles sont pourtant clairement explicitées par les répondants comme leurs besoins réels de formation et comme les moyens qui permettraient de parvenir à mieux conjuguer bienveillance et exigence. Certes un répondant déclare que de telles formations peuvent être très déstabilisantes pour les personnels dans la mesure où elles appellent à réviser des pratiques coutumières : sa remarque donne à penser que le manque de temps souvent cité comme un empêchement à suivre des formations peut aussi dissimuler cette crainte de quelques personnels à devoir remettre en cause leurs pratiques. Les dispositifs de formation doivent tenir compte de ce ressenti, qui touche sans doute à la peur de commettre des erreurs ; il serait pour le moins habile de faire de ces craintes professionnelles un point de départ pour une réflexion sur l’erreur chez les élèves. Au-delà de ces inquiétudes qui peuvent atteindre des personnels, les répondants font très majoritairement état d’une rareté ou d’une absence de formations dédiées aux pratiques dont ils pensent, à juste titre selon le point de vue de l’OZP, qu’elles favorisent la conjugaison de la bienveillance et de l’exigence : ainsi souhaitent-ils davantage de formations sur la gestion de l’hétérogénéité, la différenciation pédagogique, les enjeux de la bienveillance, la définition commune et partagée des concepts de bienveillance et d’exigence. Ces répondants font à nouveau apparaître que la participation des acteurs eux-mêmes à la définition des plans de formation n’est pas suffisante.

3. Les leviers

63 % des répondants ont renseigné la question portant sur les leviers, mais on note que le lien entre certaines réponses et la thématique bienveillance / exigence n’est pas toujours clair.

3.1 Les leviers relevant de décisions aux niveaux supérieurs

Dans un peu plus de 32 % des réponses exprimées (54 mentions), ce sont des moyens qui sont envisagés : 30 mentions de moyens accrus ou d’effectifs réduits, 14 mentions de personnels spécialisés (RASED, psychologues) ou d’interventions accrues (et efficaces) de leur part ; 4 mentions d’ATSEM, souvent assorties de demande de formation pour ces personnels ; 2 demandes de retour au dispositif PDMQDC ; 3 demandes de personnels de santé et une d’assistante sociale.

21 % des réponses exprimées citent la formation comme levier (36 mentions) ; souvent un souhait d’accompagnement est mentionné. Dans le détail, on note que 15 mentions ne précisent ni contenus ni objectifs, que 3 concernent les questions d’évaluation, 2 les neurosciences ou le fonctionnement du cerveau, 2 la gestion de classe. Chacun des thèmes suivants est évoqué une fois : formation des nouveaux enseignants, auto-confrontation, entretien d’explicitation, grande difficulté scolaire, gestion des élèves perturbateurs, climat scolaire, compétences émotionnelles, apprentissage et motivation, communication non violente et pédagogie institutionnelle, nouvelles pédagogies, gestion des malentendus, communication, réalités du quartier, apports supplémentaires sur les conséquences d’un enseignement bienveillant ou non. Deux réponses souhaitent un accompagnement ou une plus forte présence de l’équipe de circonscription (sans demande de formation). Quelques réponses insistent sur le fait que ces formations doivent avoir lieu en présentiel, ce qu’on peut sans doute lire comme critique implicite des formations en ligne.

Quatre réponses portent sur le recrutement, l’accueil et la motivation des enseignants du réseau, ce qui favoriserait la bienveillance et l’exigence si le référentiel et le projet de réseau étaient présentés, si les enseignants qui postulent étaient réellement motivés et recrutés avec un entretien professionnel (une motivation réelle compte plus que le nombre de points au barème).

La stabilité des équipes est mentionnée cinq fois, autant de fois que le travail avec les partenaires (PMI, CAF, mairie …).

Enfin, on relève des leviers mentionnés une seule fois : pas de classe à plusieurs niveaux en REP ; des maîtres à temps plein sur les écoles ; un coordonnateur REP avec CAFIPEMF ; sans doute sont-ils liés à des situations locales particulières.

3.2 Les leviers dépendant de l’initiative des réseaux

Le troisième levier envisagé (20 mentions) concerne l’utilisation de temps mis à disposition pour travailler ensemble. Les réponses évoquent comme sujets abordés la cohésion des équipes, le travail inter-cycles, le co-enseignement, l’observation et l’harmonisation des pratiques, les échanges, la pérennité des objets de travail. On retiendra cette réponse comme emblématique de ce que permettrait ce temps partagé :
  « Définir des priorités par année de travail dans le réseau et avoir une réflexion plus régulière avec des temps d’échange plus fréquents. »

Le travail sur l’évaluation des élèves (auto-évaluation, classes sans notes, LSU, évaluation par compétences, travail sur le ressenti de l’élève) est mentionné 14 fois comme levier. On relève 4 mentions des carnets de suivi des élèves, auxquelles on peut sans doute ajouter une réponse mentionnant les PPRE, une autre évoquant la différenciation (sans autre précision).

La relation aux familles (information et formation des parents, ouverture de l’école aux parents, café-parents) est mentionnée 11 fois, dont cette réponse insistant sur « la responsabilisation des parents » pour lutter contre l’absentéisme et une autre demandant des politiques locales sur la parentalité et l’alphabétisation.

Les liaisons inter-degrés sont mentionnées 5 fois (dont une fois à propos de la liaison collège – lycée).

D’autres leviers ne sont évoqués qu’une seule fois : échanges de classes avec des écoles hors EP ; différenciation, groupes de besoins ; plus de travail à l’oral ; approche pluridisciplinaire de l’enfant ; travail de l’élève et devoirs faits ; que les enseignants connaissent mieux les conditions de vie des enfants ; des actions concrètes.

On note enfin cinq expressions de leviers très généraux (améliorer la situation sociale des familles, redorer le blason de l’école auprès des parents…) dont le lien avec la thématique bienveillance / exigence n’est pas toujours clair et dont l’interprétation est difficile.

3.3 Des leviers comme autant de critiques implicites

Certaines réponses semblent avoir une dimension critique, locale ou nationale : soutien de la hiérarchie (réponse sous-entendant un manque de soutien) ; laisser les enseignants évaluer (contre-pied des évaluations nationales ?) ; faire confiance aux enseignants ; faire réellement porter les moyens sur l’EP ; harmoniser au niveau politique au sens noble du terme les objectifs de l’école ; laisser les enseignants libres de travailler en réseau ou pas ; arrêter les projets qui consistent à faire une représentation, un spectacle ; etc.

Conclusion

On retiendra comme témoignage de la dynamique ressentie globalement à la lecture des réponses, mais aussi peut-être du manque de perspectives clairement dessinées, ces quatre citations :

  « La situation est bonne, les leviers utilisés fonctionnent. » On entend là que le choix par les réseaux de leurs propres leviers, dans le cadre du référentiel, est une autonomie efficace.

  « Faire feu de tout bois : faire participer les élèves à la vie du territoire, et en tirer des enseignements (acquisition de compétences non académiques, mais participant à l’adhésion à l’école ». Par exemple, faire intervenir les entreprises qui travaillent pour et dans le collège avec les professeurs et les élèves, montrer que l’action publique est facilitatrice et encourageante. Apparaissent ici la détermination, l’inventivité et la créativité des équipes pour permettre la réussite des élèves de l’éducation prioritaire dans l’acquisition de toutes les compétences définies par le Socle commun de connaissances et de compétences.

  « Poursuivre la communication avec les parents et leurs engagements dans certains projets (projets de classe, de cycles, d’école). Faciliter les échanges au sein du cycle 3. Développer la liaison cycle 1 et 2 (projet commun à poursuivre, échanger sur le profil des élèves). Favoriser les jeux coopératifs (carte, ballon) durant la récréation, développer un système de surveillance à visée éducative durant la récréation avec harmonisation des règles dans la cour. » La qualité de la réflexion professionnelle de cette citation témoigne de la bonne maîtrise des spécificités de l’exercice professionnel en éducation prioritaire : la continuité, la cohérence des parcours d’apprentissage, le développement des valeurs en toutes occasions, la coopération avec les familles sont des actes incontournables et déterminants de la réussite des élèves.

  « Prendre vraiment des journées entières pour se poser tous ensemble, partager les difficultés, les réalités (…). Relancer une dynamique commune avec des balises claires sur les lignes à ne pas franchir pour sécuriser chacun. Et en même temps, partager toutes nos expériences positives de gestion de classe, de valorisation. » Partager, créer, décider et soutenir des dynamiques collectives en faveur de projets bien compris et mis en œuvre conjointement demande effectivement une entente entre les personnes que sont les personnels ; un pilotage clair, à l’écoute de chacun et de tous, est bien un facteur favorable à la pérennité de telles dynamiques.

NOTE
7. Circulaire n° 2014-077 du 4-6-2014 (NORMENE1412775C).

 

 

ELEMENT 5

Axe 3 : Coopérer utilement avec les parents et les partenaires

Q. 3.1 Pouvez-vous décrire une évolution positive au regard de l’axe 3 concernant les pratiques de classe et le travail collectif dans votre réseau ?
Q. 3.2 Quels sont les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 3 du référentiel qui vous semblent persistants ?
Q. 3.3 Quels sont les leviers qui vous sembleraient efficaces pour améliorer la situation ?

La bonne connaissance de l’axe 3 du référentiel « Mettre en place une école qui coopère utilement avec les parents et les partenaires pour la réussite scolaire », l’intérêt de l’éducation prioritaire en faveur de cet axe et l’adhésion des réseaux à son importance sont marqués par le très fort taux de réponses apportées au questionnaire relatif à cet axe 3 : 85 % des répondants traitent tout ou partie des 4 questions propres à l’axe 3.

1. Les évolutions positives concernant les pratiques de classe et le travail collectif

79 % des répondants abordent la première question. Même si quelques-unes des réponses décrivent un statu quo, même si un répondant exprime ses doutes – « est-ce bien le cœur du métier d’enseignant ? », même si d’autres encore pointent la grande ancienneté des projets favorables à l’alliance avec les parents et les partenaires, l’immense majorité des réponses traduisent le sentiment d’un réel et récent développement de la coopération utile avec les parents. Le taux de réponses à cette première question en fait la démonstration. En témoignent aussi les expressions récurrentes ici empruntées aux répondants : « une réflexion pédagogique plus constructive » ; « les actions touchent de plus en plus de collègues, même les nouveaux » ; « l’amélioration du nombre de votants » ; « des échanges plus constructifs » ; « de meilleures relations avec les familles » ; « la place des parents enfin légitimée », « un partenariat encore plus marqué » ; « cela a renforcé les liens de confiance » ; « la relation avec les parents est devenue plus importante au sein de l’école » ; « mieux connaître les parents », etc.

On peut à titre d’exemple donner les réponses les plus significatives (8) qui portent les actions développées dans les réseaux (les mots en majuscules sont les mots les plus utilisés dans l’ensemble des réponses à la question 3-1 sur les évolutions positives observées) :

 SEMAINE des PARENTS, CAFÉ des PARENTS, PORTES OUVERTES, REMISE des LSU / LIVRETS de progrès.
 L’OUVERTURE de nos CLASSES aux PARENTS, la REMISE en MAIN PROPRE des LIVRETS de réussites, les CAFÉS PARENTS.
 PARTENARIAT avec les FAMILLES et la PMI encore plus marqué (CAFÉS des PARENTS, REMISE des LIVRETS en MAINS PROPRES).
 CRÉATION de ” MOMENTS des PARENTS ”, ACCUEIL des FAMILLES dans les CLASSES, MISE en PLACE des APC avec les PARENTS.
 RENCONTRES festives, EXPOSITIONS du travail des élèves…) Mise en PLACE d’un CAFÉ des PARENTS avec le CENTRE SOCIAL.
 Grande CONFIANCE des FAMILLES ENVERS l’établissement, plus de DÉLÉGUÉS des PARENTS au CA et en Conseils de classe.
 Remise des LSU en MAIN PROPRE, thé à l’école, invitations RÉGULIÈRES des PARENTS LORS d’événements.
 La REMISE des BULLETINS aux PARENTS en MAIN PROPRE est un MOMENT important où nous devons faire le point.
 Mise en PLACE au sein de l’école de la ” SEMAINE ” des PARENTS où les PARENTS sont INVITÉS à VENIR dans les classes.

Cette avancée s’explique par les multiples qualités des actions décrites, comme les font apparaître les répondants dans leur ensemble :
  depuis la publication du référentiel, les projets dédiés à l’axe 3 sont plus nombreux et/ou plus diversifiés. L’inventivité avec laquelle les réseaux imaginent des actions de coopération avec les parents et les partenaires se lit jusque dans les noms donnés à leurs projets, que quelques réponses précisent : on retiendra pour exemple l’invitation « Entrez, c’est ouvert ! » ;
  les réponses en termes de « réelles dynamiques » ou « d’actions réellement engagées » traduisent l’authenticité des projets évoqués, la détermination à développer des actions en direction des parents, l’investissement des personnels et des équipes impliquées ;
  les projets veulent s’inscrire dans la durée ; ils se disent parfois « progressifs » : les acteurs ont bien compris qu’on n’installe pas une alliance dans la précipitation ;
  leur force émane de leur dimension collective – on en parle en disant « nous » ou bien « on » par exemple ; ils sont portés par ce que les répondants nomment des « dynamiques d’équipe » en les qualifiant parfois de « vertueuses » ; les projets relèvent de « décisions collégiales ». Rarissimes sont les réponses qui évoquent des actions non collectives ;
  l’élargissement et la diversification des personnels à l’origine des actions et impliqués dans leur mise en œuvre expriment la volonté très souvent explicitée d’apporter « des réponses au plus près des besoins des élèves » : on voit là apparaître une forme de professionnalité qui consiste à concevoir que la complexité des situations requiert des compétences multiples.
  la volonté d’harmonisation des projets sur l’ensemble des réseaux, du cycle 1 à la fin du cycle 4, est un chantier souvent décrit. L’ampleur de cette harmonisation est variée d’une académie à l’autre. Signe qu’il n’existe pas de modèle contraignant, elle emprunte judicieusement les deux voies, le plus souvent du premier degré vers le second, mais elle peut aussi se faire dans l’autre sens, du collège vers les écoles du réseau ;
  des projets sont structurés ou en cours de structuration. Les démarches en ce sens sont dites « récentes » ;
  les projets sont pilotés, par des instances de natures différentes : conseil de maîtres, conseil écoles-collège, comités de pilotage simples ou élargis. Les coordonnateurs de réseaux sont souvent associés à leur élaboration et à leur mise en œuvre. Des rencontres sont régulièrement programmées pour leur élaboration et leur suivi ;
  ils trouvent leur cadre dans des actions nationales bien exploitées – Semaine de la maternelle, Semaine des mathématiques par exemple, ou bien dans la vie propre aux écoles, collèges et réseaux, qui se dotent par eux-mêmes de cadres spécifiques et de temps dédiés comme la « Semaine des parents » par exemple.

Sans être pour autant strictement identiques, un grand nombre des projets décrits présente des modalités voisines : en tout premier lieu les nombreuses rencontres collectives avec les parents d’élèves, les rencontres individuelles régulières, notamment pour la remise des bulletins en mains propres, les cafés des parents, l’utilisation de la mallette des parents, l’exposition des productions des élèves finalisée par des moments conviviaux et festifs : on note ici que les répondants se sont souvent emparés des propositions du rapport de Jean-Paul Delahaye dédié à la grande pauvreté et à la réussite scolaire ; ils semblent avoir perçu que la coopération utile avec les parents passe par la communication des réussites de leurs enfants.

Conformément aux recommandations du référentiel, des classes en activité s’ouvrent parfois aux parents : un ou deux parents dans des temps dédiés tout au long de l’année ou bien des parents plus nombreux sur des temps plus limités dans le calendrier de l’année scolaire. On ne s’étonne pas de voir apparaître cet accueil des parents en classe dans des réponses où le « nous » s’affirme ; le fait de jouer collectif dans cette pratique est bien sûr un facteur favorable à cette pratique et à cette confiance professionnelle collective que la politique de refondation voulait justement encourager. Quelques répondants précisent que ces temps de classe en activité partagés avec les parents sont suivis de débriefings entre enseignants et parents, signe qu’ils ont saisi l’importance de l’explicitation : il ne suffit pas de montrer.

L’animation d’ateliers pédagogiques est assez souvent confiée à des parents d’élèves ; l’accompagnement des sorties scolaires fait souvent recruter des parents : c’est la première alliance dans de nombreuses académies.

Comme moteur de ce développement, les répondants indiquent, le plus souvent avec des formules enthousiastes, les objectifs qu’ils poursuivent, à travers des actions globalement semblables, mais déclinées parfois selon des modalités plus abouties les unes que les autres :
  la détermination à installer explicitement un respect et une estime réciproques conduit des équipes à se faire plus confiance et à faire plus confiance pour accueillir des parents dans les classes en activité ;
  la même détermination conduit à partager des temps, en classe et hors de la classe, qui donnent l’occasion de faire connaître et d’exercer les compétences de tous, personnels, partenaires, parents d’élèves : des répondants décrivent ainsi des temps de partage culturel comme « la nuit des étoiles », « la fête des histoires », « les mamans conteuses », l’action « zéro déchet » par exemple ;
  les actions sont manifestement tendues vers la réussite scolaire : aussi les paliers délicats de la scolarité obligatoire sont-ils des domaines privilégiés de la coopération avec les parents – entrée en maternelle, passage en CP et en sixième ; pour la même raison les apprentissages fondamentaux focalisent l’attention et accentuent l’implication des équipes : tel est le cas tout particulier de la lecture ;
  faire connaître aux parents les compétences construites par leurs enfants conduit des équipes à remettre en mains propres des livrets de réussite et des cahiers de réussite. On évacue dans d’autres échanges que ceux des fins de trimestre la gestion des incidents et des conflits, pour réussir à installer et/ou renforcer la confiance, en s’en tenant à remettre aux familles des évaluations qui conservent au mot son sens étymologique : dire la valeur ;
  le souci d’accompagner les parents dans la bonne compréhension des parcours d’apprentissage des élèves suscite la multiplication des rencontres, la diversification des modes de communication les mieux adaptés, sans qu’ils soient pareillement les mieux adaptés partout ;
  la conscience qu’ont les réseaux de la complexité des codes de l’École fait s’engager les équipes dans le dévoilement et l’explicitation de ces codes tels que les révèlent les lieux, les rythmes, le travail personnel des élèves, la diversité des personnes référentes, la communication, les documents administratifs, les documents d’orientation, etc. Les parents sont un appui extrêmement régulier dans cet objectif d’accompagnement des familles dans cette meilleure appréhension des codes. C’est dans cet objectif que des équipes intègrent par exemple des parents dans les activités propres aux parcours d’excellence. Plusieurs équipes se sont emparées du programme « Devoirs faits » pour alléger les difficultés suscitées par le travail personnel à la maison : plusieurs répondants notent l’engagement de plus en plus important des personnels dans ce programme ; un réseau évoque la présence des parents dans les séances « Devoirs faits ». D’autres répondants décrivent des échanges qui s’ensuivent sur la méthodologie propre aux différentes disciplines et différents domaines d’apprentissage ;
  la connaissance qu’ont les répondants des difficultés, voire de la détresse des familles, les fait décider, de concert avec les partenaires, d’actions propres à la santé des élèves. Les académies les plus touchées par la précarité ont nettement pris cette orientation.

Dans tous les cas, les répondants disent « l’authentique réflexion » qui sous-tend toutes ces actions ; certains explicitent clairement les différentes évolutions du sens pris et donné depuis cinq ans à la coopération utile avec les parents et les partenaires.

Des répondants se réjouissent d’avoir réussi à développer une éthique capable de faire évoluer l’École
  passant de pratiques prescriptives à des compétences d’écoute et de compréhension réciproque,
  passant de constats de distance à des regards nouveaux des adultes les uns sur les autres, et de regards nouveaux des parents sur leurs enfants et leurs compétences ;
  allant vers des pratiques d’auto-évaluation ; celles qui sont engagées induisent une meilleure qualité du climat scolaire, avec un net recul des incivilités, et du nombre de participants aux réunions et/ou élections.

2. Les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 3

Dans la mesure où 76 % des répondants apportent une réponse à la question des obstacles rencontrés, la valeur des actions telles qu’elles sont décrites supra n’en est que plus marquante : malgré l’inconfort et les tensions dans lesquelles les équipes œuvrent à construire une coopération utile avec les familles et les partenaires, l’avancée décrite ci-dessus montre qu’elles ont su contourner et/ou vaincre de sérieux et multiples obstacles. Ceci est encore plus vrai lorsque les réponses cumulent deux ou trois des grandes catégories d’obstacles à surmonter.

2.1 Du côté de l’École

Peuvent être regroupés là l’absence de locaux convenables et adaptés aux rencontres avec les familles et aux cafés des parents ; l’absence d’assistante sociale ; le manque de ressources pédagogiques pour répondre aux besoins précis d’élèves précis ; l’affectation de personnels débutants ou nommés en EP sans être réellement volontaires ; la résistance de quelques personnes au sein des équipes, dont la conception que peut avoir un collègue de son cœur de métier qui ne relèverait pas de la coopération utile avec les parents et les partenaires ; l’inefficacité du carnet de suivi qui rapporte auprès des familles uniquement les incidents, ou bien des évaluations incompréhensibles. Malgré les dynamiques collectives décrites ci-dessus la difficulté de faire réseau et de maintenir la coopération utile avec les familles au-delà du cycle 3 appelle à une vigilance plus particulière sur les familles des élèves du cycle 4. Dans plusieurs réponses il est noté que l’application stricte du plan Vigipirate renforcé dans de nombreux réseaux « ne permet pas de faire entrer les parents dans les établissements ». Des répondants disent souffrir d’un manque de confiance de la part de l’institution : ils perdent leur enthousiasme à se sentir en position de « devoir faire leurs preuves » : c’est une réponse que le pilotage doit prendre en compte puisqu’elle fragilise de façon tout à fait dommageable la bonne volonté des acteurs. Le manque de temps fait défaut à une majorité de répondants. Selon d’autres c’est la formation qui est défaillante et notamment la formation sur la communication avec les familles : des répondants déplorent que ce domaine ne soit pas suffisamment traité par la formation initiale, trop recentrée à leurs yeux sur la formation disciplinaire, conformément à des prescriptions nationales, laissant ainsi aux acteurs la responsabilité de se former à leurs frais à la communication avec les parents ; cet obstacle relève de ce que d’autres répondants appellent « le manque de réalisme des autorités », le « fossé » entre les pilotages nationaux ou académiques et la réalité à laquelle se heurte le pilotage d’un établissement ou d’une circonscription. Il faut aussi entendre le découragement qui gagne des répondants exposés à la complexité croissante de leurs missions – notamment évoquée pour les directeurs d’école, comme au déficit de mixité sociale.

2.2 Du côté des partenaires

Tandis que le mot « parents » est utilisé 367 fois dans la réponse aux trois questions concernant cet axe, le mot « familles » est utilisé 143 fois, le mot partenaire n’est utilisé que 72 fois et encore parfois est-ce pour parler des parents comme premiers partenaires de l’école. La question des partenaires n’est clairement pas une question sur laquelle les répondants voient des évolutions ces dernières années. Cela peut se comprendre puisque la refondation n’a pas du tout insisté sur cet aspect de la politique d’éducation prioritaire, considérant qu’il fallait recentrer le travail enseignant sur les pratiques professionnelles dans la classe. D’une certaine manière on pourrait considérer que cette absence des partenaires dans la réflexion montre que cette perspective du recentrage sur la classe a bien été comprise et mise en œuvre.

Quand ils en parlent, certains répondants disent la difficulté à identifier les partenaires, en raison de leur trop grande multiplicité, quand d’autres déplorent le manque de disponibilité de partenaires trop rares ou bien difficiles à joindre : on reconnaît ici la disparité des moyens selon les académies. La disponibilité fluctuante des partenaires est aussi pointée. Mais surtout, entre l’École et les partenaires se croisent des logiques différentes – de calendriers même, qui peuvent éloigner les uns des autres par manque de cohérence ; l’École entreprend des actions à la fois sociales, culturelles et pédagogiques, quand les partenaires accompagnent plutôt les difficultés socio-culturelles ; il peut selon certaines réponses en résulter des incompréhensions et des regrets sur les objectifs arrêtés par les partenaires dans leurs actions. Quelques réponses mettent le doigt sur la volatilité des moyens dont disposent les partenaires. Une poignée de répondants évoquent leur inconfort du fait de conflits de nature politique entre des communes et des départements.

2.3 Du côté des parents d’élèves

Le frein essentiellement ressenti par les répondants tient à la distance culturelle et parfois même plus simplement à la distance géographique qui éloigne les familles de l’École. Les acteurs ont à juste titre conscience que les parents de l’éducation prioritaire doivent faire face à des interlocuteurs plus nombreux qu’hors EP, ce qui ne fait bien sûr qu’accentuer leur hésitation à se rapprocher de l’école.

Rares sont les répondants qui voient là une mauvaise volonté de la part des parents : ils pointent la méconnaissance des enjeux et des codes de l’école qui explique le manque d’assiduité scolaire consenti aux enfants par les parents mais majoritairement la distance des familles par rapport à l’école est considérée comme la conséquence des difficultés réelles des parents, d’ordre à la fois linguistique et matériel, qui peuvent être évoquées en termes de « détresse » ; les acteurs ont conscience que toutes réunies chez les parents de l’éducation prioritaire elles ne favorisent pas leur disponibilité pour la réussite scolaire de leurs enfants.

En outre le surinvestissement, l’aisance langagière et/ou culturelle de quelques parents semblent dans quelques réponses « autoriser » d’autres familles à moins s’investir.

La pérennité d’actions à juste titre inscrites dans la durée se heurte à la mobilité des familles : il apparaît ainsi que les acteurs ne réussissent pas à évaluer assez globalement l’efficacité de leurs actions.

Les répondants identifient aussi très souvent l’obstacle que constitue le douloureux passé scolaire de certains parents d’élèves.

Une poignée de réponses évoquent enfin l’inadmissible violence de parents d’élèves dont des acteurs de l’école peuvent être victimes : une réponse en explicite de façon très détaillée les effets désastreux sur les dynamiques collectives quand bien même cette violence n’a touché qu’un seul acteur.

3. Quels leviers pour améliorer la situation ?

40 % des répondants n’apportent pas de réponse à la question 3 : s’il faut considérer que ce fort taux de non-réponses évoque des acteurs et/ou réseaux à court d’idées nouvelles pour faire face aux obstacles rencontrés, il importe d’autant plus de mutualiser les leviers que définissent 60 % des répondants : en effet des réponses sur les leviers sont parfaitement susceptibles d’apporter des éclairages à des répondants démunis pour la question 3 – « on est à court d’idées », alors qu’ils identifient clairement leurs obstacles.

Sur le plan des apports souhaités au niveau des moyens humains et matériels, il importe aux répondants que les établissements soient dotés de lieux adaptés aux rencontres avec les familles et que du temps soit spécifiquement dédié aux échanges avec elles : la reconnaissance explicite de ces échanges avec les parents comme partie prenante des missions exercées par les uns ou les autres est souvent attendue. Au regard de leur public spécifique des répondants souhaitent la disponibilité de traducteurs à leurs côtés. L’installation d’ENT parait parfois pouvoir faciliter les démarches d’harmonisation sur l’ensemble d’un réseau. Que l’on améliore les affectations de personnel en EP est un souhait largement partagé.

De nombreux répondants témoignent de ce que la question des moyens, voire des moyens supplémentaires, ne serait pas leur principal levier. Même si plusieurs appellent à ce qu’ils désignent comme de « la bonne volonté », d’autres réponses ouvrent des perspectives qui souvent incarnent une belle confiance des acteurs en eux-mêmes : il revient à tous et à tous les niveaux de pilotage de la percevoir et de l’encourager.
  Bien des réponses recommandent avant tout la poursuite sereine et patiente des actions déjà engagées, en pleine et pertinente conscience du temps nécessaire à leur plus grande efficacité ; parfois il est même envisagé de les « renforcer ». Parce que ce sont les acteurs qui les ont collégialement décidées, au regard des besoins de leurs élèves qu’ils connaissent mieux que tout autre, on ne peut qu’approuver leur détermination à poursuivre dans les actions qu’ils ont définies.
  Est également souhaitée une inflexion de certains projets : par exemple qu’un café des parents déjà mis en œuvre décide lui-même de mieux anticiper les thématiques qui seront abordées, voire de laisser aux parents la responsabilité d’anticiper celles qui répondraient à leurs besoins.
  L’alliance avec les familles réclamant de l’inventivité, la création de nouvelles actions est attendue par quelques répondants, convaincus qu’il faut savoir, dans ce domaine de la coopération comme dans celui des pratiques pédagogiques, se renouveler pour réussir autrement.
  Au niveau de la communication, des vœux de simplification, par exemple des documents à renseigner par les familles, sont formulés. Des réseaux ont déjà décrit dans leurs réponses à la première question des démarches allant dans cette voie d’accompagner les parents dans ce domaine de ce qu’ils appellent « la paperasse ». Parce qu’elles combattent un obstacle majeur à la coopération avec les parents d’élèves, la difficulté de communiquer, il faut faire ici une place aux réponses qui font état de démarches engagées auprès des familles non francophones – cours du soir ou actions FLE. Le recours au CASNAV est présenté comme utile dans ces démarches : il est souhaitable que cette structure institutionnelle soit bien connue de tous les acteurs.
  La question des calendriers demeurant un obstacle à tous les niveaux, il est souhaité une meilleure anticipation des organisations qui devrait permettre des collaborations plus faciles entre personnels de l’École, entre eux et les partenaires, entre eux et les parents ;
  À la question du temps qui manque, une meilleure répartition des actions engagées est envisagée.
  Des répondants signalent la réussite liée aux échanges entre réseaux.
  Plusieurs répondants évoquent l’efficacité des formations déjà conduites sur leurs réseaux « au plus près des besoins » ; au regard des réponses apportées à la question 2, les domaines à explorer pourraient être ceux de la communication ou de la gestion de conflits en EP. Quelques-unes des formations collectives déjà conduites ont trouvé l’expertise de chercheurs associés. Plusieurs répondants ont déjà éprouvé l’efficacité de « personnes compétentes et expertes » associées à leurs cafés des parents, à leurs réunions d’équipes, etc. À certains répondants il semble que des formations conjointes parents-personnels de l’École seraient de bons leviers. Des actions déjà engagées et décrites ci-dessus sont des exemples d’auto-formations et de co-construction de compétences.
  Quelques réponses portent sur la nécessité de structurer et d’évaluer collectivement « l’impact des actions » déjà engagées. Des réseaux se sont dotés d’indicateurs (cf. supra).

Manifestement le questionnaire a fait identifier des leviers qui ne sont pas encore actionnés mais qui paraissent à la réflexion possibles à mettre en œuvre :
  un meilleur appui sur les coordonnateurs de réseau à inviter plus régulièrement dans les rencontres avec les partenaires,
  une extension aux écoles des OEPRE – Ouvrir l’école aux parents pour la réussite des enfants, trop souvent implantés dans le seul collège d’un réseau,
  la liberté d’envisager aussi des « réunions informelles ».

Conclusion

Nul doute que l’axe 3 du référentiel occupe l’immense majorité des répondants. Il est manifeste aussi que d’une académie à l’autre l’engagement dans cet axe semble davantage piloté et plus marqué dans quelques académies : les répondants font ainsi apparaître en faveur de l’axe 3 des démarches fortes et cohérentes d’un réseau à l’autre.

Les réponses relatives à cet axe font toujours apparaître la force des actions entreprises collectivement, malgré les doutes parfois et partout en dépit des obstacles. On ne saurait ignorer qu’en contre-point ces forces collectives mettent en évidence les risques que constitue toute position trop singulière, voire trop assurée, notamment sur ce que serait un « bon » exercice de la parentalité : ce n’est pas le sujet de l’axe 3 du référentiel parce que ce n’est pas le sujet de l’École. Des répondants déplorent eux-mêmes cette orientation vers laquelle voudraient tendre quelques-uns de leurs collègues. On en retiendra toutefois qu’il reste encore à mieux préciser le concept de « coopération utile avec les parents ».

Manifestement la refondation a ouvert la voie à une authentique réflexion sur toutes les formes que peut prendre une coopération utile avec les parents d’élèves. Il est bien naturel que les démarches collectives entreprises en faveur de cette coopération aient surgi des réflexions engagées pour d’autres axes du référentiel ou bien qu’elles aient rejailli sur celles que demandent d’autres axes. Cependant de nombreux répondants, exerçant des missions différentes, en appellent à des formations spécifiquement dédiées à cet axe 3 : le rôle déjà démontré, mais peut-être pas encore assez précisément explicité, que joue l’alliance de l’École avec les parents dans la réussite scolaire des élèves demande d’entendre ce vœu, qui aidera à renforcer le professionnalisme des personnels de l’EP.

Enfin, dans la mesure où les échanges entre les réseaux d’une même académie sont porteurs de confiance et de réussite, il est parfaitement souhaitable que soient favorisées, au niveau national, des pratiques de mutualisation des démarches collectives qui sont reconnues comme constructives au regard des attendus de l’axe 3 du référentiel.

 

NOTE
8. La représentativité de ces réponses est assurée grâce au logiciel d’analyse de textes HYPERBASE qui recueille ces extraits spécifiques à une réponse donnée en s’appuyant sur les spécificités lexicales et en retenant les phrases qui comprennent les spécificités les plus nombreuses et les plus significatives des réponses traitées. Les mots concernés sont donnés en majuscules. On peut en savoir plus sur les subtilités du traitement en lisant le manuel du logiciel http://ancilla.unice.fr/bases/manuel.pdf

 

 

ELEMENT 6

Axe 4 : FAVORISER LE TRAVAIL COLLECTIF DE L’ÉQUIPE ÉDUCATIVE

Q. 4.1 Depuis la refondation de l’éducation prioritaire, le travail collectif s’est-il développé ?
Q. 4.2 Si oui, pour répondre à quels besoins et selon quelles modalités ?
Q. 4.3 Le travail collectif donne lieu à … ? (8 items proposés et 4 niveaux de réponses)
Q. 4.4 Quels obstacles voyez-vous à la mise en place du travail collectif ?
Q. 4.5 Décrivez un ou deux temps de travail collectif qui vous semblent significatifs de ce que vous avez vécu depuis 2014.

Avant de se lancer dans l’analyse, il faut dire que les réponses obtenues sont issues de situations très diverses : 70 % sont le fait d’une personne seule tandis que 20 % proviennent d’un groupe de personnes d’une école ou d’un établissement et seulement 3 % d’un groupe de personnes de plusieurs écoles ou établissements et 7 % de l’équipe de pilotage du réseau. Cela rappelle, s’il en était besoin, que le travail collectif n’est pas systématique lors des réponses aux enquêtes, en éducation prioritaire, et qu’il dépend beaucoup des circonstances locales et du mode de pilotage du réseau. Il apparaît aussi, dans les réponses fournies, que l’école ou l’établissement semblent vécus spontanément comme étant davantage le lieu d’un travail collectif que le réseau.

Rappelons également le fait que la diversité des acteurs qui répondent aux questions a particulièrement une incidence sur leur vision du collectif : principalement des directeurs et des enseignants du premier degré (65 %) ; des coordonnateurs, formateurs et CPC (21 %) ; des enseignants du second degré et des équipes de direction de collège (19 %) ; des IEN, CPE et autres (10 %). Comme on le verra dans le graphique ci-dessous, l’encadrement et les personnels du premier degré considèrent qu’il s’est développé, ce qui est moins le cas des personnels enseignants du second degré. Sans doute cela témoigne-t-il de l’importance que la refondation a donnée au premier degré et du fait que le dispositif « plus de maîtres que de classes » (PDMQDC) y a joué un rôle plus particulier dans le développement de ce travail collectif. Sans doute aussi cela témoigne-t-il du fait que l’encadrement s’est senti investi de l’importance de développer cette perspective du travail collectif.

En outre, les membres de l’OZP sont habitués à observer d’importantes différences entre les académies sur tous les points de cette enquête. Cette question du travail collectif est, comme les autres, sensible à la diversité des modes de pilotage académiques et à la diversité des engagements des pilotes académiques et départementaux. Elle peut être plus ou moins encouragée, plus ou moins pilotée. Toutefois, il est difficile de dire que le fait de parler d’un sujet signifie qu’il est pratiqué et a fortiori qu’il est encouragé ou piloté.

1. Les questions portant explicitement sur le travail collectif

Pour étudier le travail collectif en éducation prioritaire on part de la représentation qu’en donne le discours des enquêtés de l’OZP quand ils répondent aux questions les invitant à dire le positif et le souhaitable, parfois les obstacles. On considère que le jeu de questions qui leur a été proposé est favorable à une auto-évaluation et que c’est de cette auto-évaluation que l’on peut tirer des préconisations utiles pour l’avenir. Ces préconisations consistent à conforter ce qui est jugé positivement et à rassembler ce qui est jugé souhaitable. Ce faisant, on considère les répondants à cette enquête comme des experts de la question dont il s’agit de comprendre les propos. Cela amène à une posture d’évaluateur qui recherche d’abord la compréhension de ce que les acteurs disent de ce qu’ils font. Une manière de pratiquer véritablement la confiance dans leur professionnalisme.

1.1 L’expression du collectif dans les réponses aux questions fermées

Il y a bien, à 60 %, l’idée que le travail collectif s’est développé au cours de la refondation. Le travail collectif devient une référence commune vis-à-vis de laquelle il s’agit pour chacun de définir une position (opinion ou pratique). Mais il faut relativiser cela car ces données de sondage regardées dans le détail donnent à voir que le point de vue des pilotes et coordonnateurs est plus optimiste que celui des directeurs ou enseignants. Il faut rappeler que pilotes et coordonnateurs ont été amenés à s’engager particulièrement dans le développement de ce travail collectif. L’engagement dans le pilotage produit sans doute un effet d’optimisme lié à un sentiment d’efficacité. Pour autant, il apparaît aussi que les pilotes ne sont pas partout reconnus comme favorisant le travail collectif et que le pilotage académique ou national n’y contribue pas toujours suffisamment, notamment ces deux dernières années. Un deuxième effet est produit par le fait que la réponse à l’enquête est, dans quelques cas, elle-même le fruit d’un travail collectif. Dans ces cas le sentiment que le travail collectif s’est développé est davantage partagé.

Il apparaît clairement sur le graphique ci-dessus que le travail collectif est d’abord utilisé pour une analyse partagée des difficultés d’apprentissage des élèves et pour des choix collectifs sur les outils et les activités d’enseignement. Secondairement il se développe dans le cadre de temps collectifs de réflexion didactique, disciplinaire ou interdisciplinaire, des projets pluridisciplinaires, des projets inter-niveaux et inter-cycles.

Ce troisième graphique indique que pour seulement 22 % des répondants les priorités de formation ont été dégagées à travers une élaboration collective. En revanche pour 30 % c’est le cas au moins entre pilotes (auxquels sont, le plus souvent, associés formateurs et coordonnateurs). L’idée que la formation ne devrait pas être établie selon une logique descendante mais en associant les principaux intéressés fait lentement son chemin. Le travail collectif en la matière doit encore se développer.

1.2 Collectif réalisé et collectif souhaitable dans les réponses rédigées

Le mot « collectif » est très fréquemment associé au mot « travail » (dans 83 % des occurrences de « collectif », et dans 16 % des occurrences du mot « travail »). Il rejoint la formulation également souvent utilisée de « travail d’équipe » ou « travail en équipe » dans 12 % des occurrences du mot « travail ». Il est aussi question de travail « commun » ou « en commun », de travail « du réseau » ou « en réseau ». Il est intéressant de voir que les mots les plus employés autour du mot « travail » dans l’ensemble des réponses sont « en équipe », « collectif », « collaboratif », « partenarial » et « priorité ». Cela signale s’il en était besoin que cette question du travail collectif en éducation prioritaire est devenue très importante pour les acteurs et ceci pas seulement parce qu’on leur demande d’en parler. Ils pourraient très bien parler d’autres aspects du travail. C’est d’autant plus vrai que si l’on regarde pour quelles questions ils mobilisent ces notions de collectif (mots « collectif » et « équipe »), il apparaît que presque toutes les questions sont concernées. Sont toutefois plus particulièrement concernées les questions portant sur l’axe 4 du référentiel (questions 4-2,4-4 et 4-5). Mais ce sont surtout les questions 04 et 05 qui sont très ouvertes et portent sur les principes les plus importants – et les plus difficiles - à mettre en œuvre en éducation prioritaire, la question 01 sur les initiatives significatives et la question 7-2 sur ce qui permet d’obtenir des résultats, qui parlent significativement des apports du travail collectif. On confirme ici que le travail collectif est bien perçu comme un apport de la refondation. Le « travail collectif » ou « travail en équipe » est surtout considéré comme une nécessité pour la réussite des élèves.

Que l’on parle du réalisé ou du souhaitable, c’est d’abord le travail qui caractérise la vie d’une équipe, qui mobilise les équipes. Ce travail est celui de « l’équipe éducative » ou « pédagogique », des équipes « enseignantes », exceptionnellement « de direction » ou « de circonscription », curieusement jamais de « pilotage ». Quand on en parle, on aspire très souvent à plus de stabilité et à plus de temps pour réunir l’équipe de manière efficace. On recherche souvent sa « cohésion », sa « cohérence » et la « confiance ». On estime parfois qu’elle doit être « volontaire » et « engagée ».

Les usages de ce travail en équipe sont très délimités ; ils concernent principalement trois thématiques :
  l’élaboration et la conduite de projets,
  la formation et l’accompagnement,
  le diagnostic de besoins.
Si le premier de ces usages est bien installé, les deux autres sont le plus souvent évoqués comme des améliorations souhaitables.

Il y a dans les réponses à diverses questions un appel à davantage de « co-interventions », notamment entre professeurs des écoles mais aussi entre professeurs des écoles et collèges et entre professeurs et AED. Souvent co-intervention et co-enseignement se recouvrent dans leurs usages et on ne distingue pas parfaitement les deux. Toutefois il apparaît que là où ces modalités de travail sont citées c’est soit pour se satisfaire de ce qui est mis en place soit pour en appeler davantage à cette pratique.

Les répondants plébiscitent la concertation ou les concertations. Tout d’abord ils la mentionnent comme un acquis important de la refondation grâce au temps libéré en REP+ notamment. Ils le jugent particulièrement important pour assurer les orientations de l’axe 1 pour mieux travailler sur « lire, écrire, parler » : il faut selon eux allouer encore plus de temps aux travaux partagés sur ces thèmes. Enfin ils insistent très nettement sur la question de l’inter-degrés, considérant pour l’essentiel que c’est un acquis. Pour beaucoup de directeurs d’écoles et d’IEN, l’éducation prioritaire, cela signifie appartenance à un réseau, inter-degrés. Les principaux de collège, surtout ceux qui répondent pour leur réseau et pas seulement pour leur collège, citent le cycle 3, la co-intervention et les observations croisées. Le travail sur l’évaluation, quand il est cité, est associé à une continuité avec le 1er degré. Pour les coordonnateurs, l’inter-degrés fait partie de la définition de leur métier. Presque tous citent inter-degré, cycle 3 et/ou co-intervention, mais dans des rubriques diverses : travail collectif, formation, questions globales.
En évoquant le mot « travail » on a vu qu’il y a un appel à davantage de travail « collaboratif » notamment entre professeurs. S’agissant des enseignants, ce travail collaboratif semble être un préalable au travail collectif et aux co-interventions. Il s’organise dans des rencontres et permet le déploiement d’actions ou de projets nouveaux qui vont reposer sur un travail partagé inscrit dans la durée. Mais la collaboration s’organise aussi et surtout avec les parents et parfois avec les partenaires de l’école.

2. Collectif, dédoublements et Maîtres+

2.1 Rappel de l’histoire récente et contexte de l’analyse

Le dédoublement des CP, puis des CE1, en REP+ puis dans les REP simples, est la principale mesure concernant l’éducation prioritaire prise depuis mai 2017. Les dédoublements sont une mesure qui se traduit par plus de 10 000 postes avant son extension aux grandes sections de maternelle. Ils demanderont un nombre de postes supérieur à ceux de l’éducation prioritaire refondée : pondération du service dans les collèges de REP+, remplacements des Professeurs des écoles pendant les 108 heures de formation et de concertation, et fonctions spécifiques à l’éducation prioritaire (coordonnateurs d’éducation prioritaire, formateurs REP+, référents etc.).
Ces dédoublements ont en conséquence amené la suppression quasi complète des maîtres+ (ou PDMQDC : Plus De Maîtres Que De Classes) qui avait été une mesure phare de la précédente majorité pour les rentrées 2014, 2015, 2016. Ils avaient été créés en priorité dans les REP mais pas seulement. Ils intervenaient en général dans cinq classes, en priorité en CP et CE1, en appui à l’enseignant chargé de la classe. Ce dispositif avait pour objectif de favoriser l’évolution des pratiques pédagogiques par le développement du travail collectif. Un dispositif de suivi, d’appui et formation avait été monté pour accompagner un déploiement maîtrisé, car la tentation était grande de se contenter d’une sorte de dédoublement : quand le maître+ est présent dans une classe, un enseignant prend en charge les élèves les plus faibles, l’autre le reste de la classe. Les maîtres+ introduisaient une grande souplesse dans le fonctionnement des écoles, ils pouvaient être réunis facilement pour la formation et pour le suivi du dispositif. L’évolution de l’organisation et des rôles professionnels pouvait être très progressive à mesure qu’une sorte de collectif professionnel se constituait.

La question posée en 2017 était : cette évolution pourrait-elle se poursuivre ou dépendrait-elle, comme avant, de l’engagement personnel d’une minorité ?
En ce début 2019, au cours de la deuxième année de ce changement, comment les acteurs des réseaux qui ont répondu à l’enquête en ont-ils parlé ?
Dans les 268 réponses à l’enquête toutes les citations des dédoublements ou des maîtres + ont été collectées : 106 questionnaires sur 268 soit 40 % citaient l’un ou l’autre ou les deux, alors qu’aucune question ne portait sur ce sujet du dédoublement ou du PDMQDC. Les citations venaient en réponses à des questions entièrement ouvertes (les questions Q-0) ou à des questions demandant des exemples d’actions menées, de réussites, d’obstacles, principalement les questions Q-1 (lire-écrire-parler), Q-4 (travail collectif), Q-5 (formation), Q-7 (évolution des résultats,) Q-9 (évolution des moyens).
Une grosse moitié des 106 répondants citent les seuls dédoublements, un gros quart ne citant que les PDMQDC, le reste (1/5e) citant les deux.

45 % des réponses provenant des écoles citent l’un ou l’autre. Sans les écoles maternelles, qui ne sont pas toutes identifiées, la proportion est de l’ordre de 48 %. Sept répondants IEN ou CPC sur les 17 identifiés comme tels les ont également cités.
Parmi les 47 coordonnateurs ou formateurs EP (dont les fonctions concernent l’ensemble du réseau), 16 réponses, soit une sur trois citent les dédoublements ou les PDMQDC, et assez souvent les deux dispositifs.
Par contre seules quatre réponses émanant des collèges citent ces dispositifs (une équipe de direction du collège répondant avec son coordonnateur, un CPE, un Principal et deux enseignants, dont un professeur référent).

2.2 Les dédoublements des CP et CE1

Les dédoublements sont cités dans 77 réponses sur 268 (29 %) : dans 28 réponses à la Q-1 ; 30 fois en réponses à la question Q-0 ; 38 fois à l’une et/ou à l’autre. D’après l’intitulé de ces questions, ces réponses sont considérées, au moins implicitement, comme « positives ». Souvent, ce caractère positif est explicité, soit dans la réponse à Q-0 ou Q-1, soit dans une autre réponse aux questions Q-4 (travail collectif), Q-5 (formation) et même Q-7 (évolution des résultats) ou Q-9 (moyens).
Au total, sur 77 réponses citant les dédoublements, on arrive à 54 réponses « positives ». Lorsque le caractère positif du dédoublement est explicité, même très succinctement (parfois dans les réponses sur les « leviers », ou sur les formations réussies, ou reliées au travail collectif ou à l’accompagnement), on trouve 17 citations des progrès des élèves, 17 fois du travail collectif et 11 fois des pratiques ou façons d’enseigner.
Quelques réponses affichent une belle confiance (« alors avec seulement 12 élèves on peut atteindre 100 % de réussite ») ou constatent déjà des progrès aux évaluations. Ce sont essentiellement des réponses de directeurs d’école ou d’IEN. En voici quelques exemples :
  L’accompagnement de terrain sur CP dédoublé est efficace depuis 2 ans. La formation a lieu dans la classe, avec les enseignants. Elles sont conduites par l’IEN et les CP.
  Le dédoublement CP permet une exploitation intense de l’effectif à 12 ; il s’appuie sur une formation intense des enseignants avec une recherche de l’uniformisation des méthodes de lecture et de mathématiques.
  La pratique de la lecture en CP dédoublé, avec un minimum d’élèves, est le climat idéal de la réussite. Le travail en commun avec une progression commune de l’enseignante de maternelle permet de travailler dans la même direction.
  Le plan de formation dans la circonscription concernant les CP dédoublés est conséquent mais très enrichissant et permet aux enseignants une réelle analyse des pratiques de classe. Les formations proposées sont vraiment en adéquation avec les besoins des enseignants.
Certaines réponses, surtout lorsque le dédoublement n’est mentionné qu’en Q.9 (moyens), constatent seulement la variation des moyens ou du nombre d’enseignants dans l’école. Ces 6 réponses sont considérées comme « neutres ».
17 fois, la réponse peut être comprise comme « négative » : 10 fois le dédoublement est cité en obstacle (Q.0-2 et/ou Q.1-2) pour les raisons mentionnées ci-dessous. Six réponses citant les deux dispositifs (en dehors de la question Q.9) sont l’occasion d’une comparaison à l’avantage des PDMQDC. Deux fois la comparaison est en réponse à la question Q.9.
Parmi les réponses négatives, on doit distinguer 15 citations qui regrettent les conséquences du dédoublement sur les autres classes (accroissement des effectifs en CE2, en cycle 3 et même en grande section de maternelle) ou sur la formation continue (seules les classes dédoublées auraient encore accès aux stages) ou sur la disparition des moyens de remplacement. La plupart de ces réponses semblent provenir d’enseignants qui ont subi ces effectifs plus lourds ou de directeurs qui ont dû gérer les conflits en résultant.
Certaines réponses se plaignent de la disparition des remplaçants qui permettaient d’utiliser dans les écoles les 108 heures annuelles de formation, sans faire le lien avec le transfert des postes de remplaçants vers les dédoublements.
Mais quelques-unes émanent de directeurs ou même d’enseignants qui auraient préféré une autre affectation des ressources importantes ainsi créées. Deux fois, on rappelle que ces CP à 12 ont un effectif de 9 ou 10 élèves, et parfois moins, pour suggérer qu’un meilleur usage était possible. L’effectif de douze élèves a été annoncé comme un maximum, ce qui peut conduire à des chiffres très bas : la moyenne est plutôt de dix élèves par CP. Quelques réseaux parlent de CP à 14 ou à 15. Deux directeurs proposent deux autres modalités d’utilisation de ces moyens : soit vingt élèves maximum par classe, soit des CP un peu plus chargés et un PDMQDC pour les autres classes.
Les critiques les plus nombreuses s’expriment à travers le regret de la disparition des PDMQDC et des possibilités qu’offraient les maîtres+ et pas seulement en CP/CE1.

2.3 Les maîtres+ ou Plus de Maîtres que de Classes

Les dispositifs PDMQDC sont cités dans 47 réponses. Dans ces citations, leur image est toujours positive :
 soit on regrette une perte de moyens dont pâtissent le cycle 3 et la grande section : 18 fois, souvent en réponse à la question Q-9 ;
 mais plus souvent, 29 fois, on regrette le travail collectif qu’ils avaient permis et que rien ne favorise dans les classes dédoublées.

Lorsque les deux dispositifs sont cités, c’est parfois comme la succession de deux dispositifs utiles pour le travail collectif, soit le plus souvent pour une comparaison regrettant la disparition des PDMQDC.
  Les PDMQDC ont contribué à un travail en équipe. Les élèves entrés en CP à effectif allégé sont meilleurs lecteurs que les cohortes précédentes.
  Le travail collectif s’est développé seulement en petit collectif (EPI, PDMQDC), quelques préparations communes pour les maîtres de CP/CE1 à 12 rendues obligatoires par la formation des enseignants ce qui implique de regrouper deux classes avec un seul enseignant une à deux fois par mois.
  Les formations départementales mises en œuvre pour les classes dédoublées impactent considérablement les pratiques professionnelles les rendant plus efficaces.
Quelques réponses décrivent et détaillent les avantages qu’avaient les PDMQDC, regrettant qu’ils n’aient pas été évalués.
  Ils permettaient la mise en place de petits groupes de besoin pour agir au plus près des compétences des élèves et ainsi faire progresser tout le monde sans jamais léser personne : élèves en grande difficulté et élèves avec un bon niveau scolaire.
  Le dispositif PDMQDC a été très efficace, même s’il n’a pas été réellement évalué. Il a permis de faire le lien entre les différentes classes et d’assurer un suivi des élèves d’une année sur l’autre. Il a permis d’engager des actions d’équipe dans les domaines où les élèves étaient les plus en difficulté.
  J’ai été maître supplémentaire et j’ai vu les progrès des élèves sur deux années car j’ai pu tous les suivre en intervenant sur les classes de CP, CE1 et CE 2. J’ai pu par exemple instaurer dès le CP un code de correction des productions d’écrits des élèves et continuer à le mettre en place l’année suivante. Et j’ai pu constater une progression des élèves sur la correction de leurs fautes et nos résultats en orthographe s’en sont ressentis. J’ai pu aussi mettre en place des PPRE dès le CP et les poursuivre en CE ; ce qui a permis à des élèves non-lecteurs en fin de CP de continuer le travail d’apprentissage du code dès le début du CE1 et ainsi de déchiffrer beaucoup plus vite. En fin de CE1 tous les élèves déchiffraient (le travail sur la compréhension restant à travailler). Ce dispositif aurait été encore plus efficace si nous avions augmenté le nombre de maîtres supplémentaires sur l’école et si nous leur avions laissé le temps d’agir.
8 réponses regrettent fortement et quelquefois très vivement la suppression des maîtres+ et demandent leur rétablissement. Quelques exemples de ces regrets exprimés en réponse à la question « qu’est-ce qui fait obstacle à … ? » :
  Il n’y a plus de PDMQDC dans les écoles du réseau. Ce dispositif n’a jamais été évalué. Or les collègues regrettent la disparition du PDMQDC.
  La suppression des postes PDMQDC qui assuraient une forme de continuité, une pollinisation, des pratiques efficientes et un double regard sur les élèves. Ils permettaient également, la prise en charge de petits groupes d’élèves.
  La mise en œuvre des CP/CE1 sans obligation de co-intervention et de travail collectif : certains enseignants ont certes l’avantage de n’avoir que 12 élèves mais ne souhaitent pas pour autant modifier leurs pratiques, pratiquer la différenciation ou autre…
Au total, une trentaine de répondants ont saisi l’occasion de ce questionnaire pour exprimer les changements dont les PDMQDC ont été l’occasion, ce qui est beaucoup compte tenu de la forme de ce questionnaire. Plusieurs regrettent ces décisions venues d’en haut. Cela recoupe aussi le regret que le contenu ou les modalités de formation soient décidées sans prendre en compte les besoins des acteurs.
Pour l’avenir, se posent ces deux questions : comment l’éducation prioritaire pourra-t-elle s’approprier les dédoublements de classe ? Comment les pratiques pourront-elles évoluer pour que ce dispositif coûteux réussisse ? Sans doute, si l’on suit les remarques des répondants, serait-il pertinent de développer un accompagnement du dispositif qui favorise la recherche collective de solutions aux problèmes rencontrés.

2.4 Les dédoublements intéressent-ils les collèges des réseaux ?

Les acteurs des collèges sont très minoritaires dans l’ensemble des réponses et ils sont seulement quatre à citer dédoublements ou Maîtres+, quatre citations succinctes. Un personnel de direction et une équipe de direction de réseau citent les dédoublements, comme un exemple de travail collectif. On remarque donc que même les réponses les plus élaborées au questionnaire, lorsqu’elles viennent des collèges, ignorent ces sujets. Donc, on peut se demander : les collèges s’intéressent-ils aux dédoublements ? Et même, pour les pilotes, ce dispositif qui se situe dans le périmètre des REP, est-il un dispositif de la politique d’éducation prioritaire ? Les COPIL sont-ils amenés à en débattre de la mise en œuvre de ce dispositif, qui absorbe des ressources aussi importantes que le reste de l’EP ? Les pilotes ont-ils leur mot à dire dans les actions de formation pour les dédoublements qui ont, selon plusieurs réponses, l’exclusivité du programme de formation ?

3. Le travail collectif et les cycles

3.1 Ce qu’on dit des cycles

Les cycles sont souvent cités et apparaissent nettement comme des lieux-temps de travail collectif. Dans le corpus le terme « cycle » est employé 296 fois au singulier. C’est le plus souvent pour parler du cycle 3 puis du cycle 2 (deux fois moins que du cycle 3), plus rarement du cycle 1 (deux fois moins que du cycle 2) et surtout du cycle 4 qui semble avoir peu d’existence pratique car quand on en parle c’est essentiellement pour dire « du cycle 1 au cycle 4 » et non pour développer un propos explicite sur ce cycle.

Les questions qui amènent les répondants à parler le plus des cycles sont les questions relatives aux projets significatifs du réseau (10 %), aux évolutions positives (10 %), au travail collectif (26 %) et aux exemples de formation (10 %). Les modalités de ce travail collectif sont les conseils et notamment le conseil de cycle 3 aussi désigné comme conseil inter degrés. Les objets de travail de ces conseils sont principalement des harmonisations, des progressions, mais aussi parfois des projets spécifiques comme des « défis lecture » ou « défis mathématiques » ou des approfondissements didactiques.

Il est intéressant de voir quelles formations sont évoquées en relation avec les cycles. On liste ci-dessous à peu près la moitié des exemples donnés :
  Construction d’outils communs pour la résolution de problèmes (numériques) : temps REP +, construits pour cycle 2 et cycle 3, formatrice REP + 1er degré.
  Une formation organisée par l’IEN avec le pôle ressource le vendredi : « Le nombre au Cycle 2 », 2 fois 3heures, avec l’appui d’un professeur de l’IUFM.
  Formation cycle 3, école collège, sur fraction et décimaux, sur la matinée + présentation du jeu atelier des potions (1/2 journée) + 1/2 journée sur le thème de l’enseignement explicite.
  Les difficultés langagières au cycle 3 : présentation de dispositifs intéressants et faciles à mettre en place. Formateurs : CPC, ancien professeur des écoles, professeur de collège.
  Apprentissage de la lecture - écriture au cycle 2 - Une journée réunissant deux REP (tous les enseignants de cycle 2). Formation par un CPD : apprentissage de la lecture - écriture en CP.
  Thème : ”Un enseignement plus explicite : pourquoi ? Comment ?”. Tous les enseignants du réseau ont bénéficié de cette formation, par groupes : enseignants de cycle 1 / enseignants de cycle 2 / enseignants de cycle 3 en inter – degré.
  Formation sur le thème de l’hétérogénéité co-animée par des formateurs du second degré et du premier degré. Cette formation a eu lieu sur deux journées. Une première journée a permis d’échanger sur nos pratiques, de mettre en évidence des liens théoriques.
  Formation en mathématiques : enseigner la proportionnalité aux cycles 3 et 4.
  L’écrit au cycle 3 - une conférence de 3 heures prise sur les 18 heures de formation continue et 2 ateliers de 3 heures pris sur les conseils de cycle 3 (les professeurs du second degré sont eux rémunérés en HSE) au collège puis dans une école.
  Enseigner plus explicitement, une journée de 6 heures, formatrices REP +, entre 15 et 40 enseignants selon le réseau - enseigner explicitement l’oral, une journée de 6 heures, cycle 3, 15 enseignants, formatrice REP +.
  Relation école famille pour le 1er degré (formateurs REP,) 3 demi - journées par an pendant 3 ans.
  Enseigner l’oral au cycle 3 : 2 jours + co - observations de classes (formateurs REP).
  Formation PSC1 : formation aux gestes de premiers secours, lieu : gymnase communal, durée : 9 heures, formateur : Inspectrice Santé et Sécurité au Travail.
  Formation sur la dictée sous toutes ses formes, cycle 2 : 12 heures : 3 heures d’apport théorique, 3 heures d’échanges.
  Comment prendre en charge les élèves atteints de TSA (Trouble du Syndrome Autistique) ou susceptibles de l’être : 3 heures de formation au collège pour le cycle 1.
  Les animations pédagogiques ont été conçues pour développer une dynamique de conseil de cycle accompagnée dans les écoles selon un mode participatif / collaboratif / recherche - action - formation / pragmatique. - Stage école : une semaine, sujet didactique, production de séance, activité de classe filmée, auto confrontation individuelle et collective, mesure de la transformation (recherches sur l’activité humaine de J. Theureau).

3.2 Pour quels besoins et selon quelles modalités le travail collectif s’est-il développé ?

On part ici de réponses représentatives (9) qui permettent de dégager de grandes tendances quant aux modalités mises en œuvre et aux besoins concernés.

1 Logique de réseau et TRAVAIL collaboratif (CONSEIL de CYCLE 3, TEMPS de PONDÉRATION pour les FORMATIONS / CONCERTATIONS, CONSEIL école collège).
2 Échanges de PRATIQUES de classe entre collègues et entre écoles du réseau, LORS de JOURNÉES REP + ou CONSEIL des MAÎTRES pour RÉPONDRE aux DIFFICULTÉS COMMUNES de communication notamment.
3 Besoins de CONTINUITÉ sur les PROGRESSIONS, la MISE en COHÉRENCE des aides, la CRÉATION d’OUTILS COMMUNS et la MISE en place d’actions.
4 Sécurisation des parcours littéraires, culturels et lexicaux LORS de CONSEILS de CYCLE, INTER - CYCLES et CONCERTATIONS REP +.
5 Pour RÉPONDRE à des BESOINS de FORMATIONS, pour CONSTRUIRE des actions COMMUNES au SEIN de l’école, pour CONSTRUIRE de la réflexion.
6 Pour une répartition des tâches LORS d’un projet, d’une PROGRESSION COMMUNE dans les écoles ; LORS des CONSEILS de CYCLE ou CONCERTATIONS.
7 Harmonisation des PRATIQUES PROFESSIONNELLES avec une PROGRESSION COMMUNE pour tous les domaines de la PS à la GS LORS de CONSEILS.
8 Oui, grâce aux 10 à 12 demi - JOURNÉES de formation et CONCERTATION et aux TEMPS de PONDÉRATION pour les P.L.C. Il répond à un BESOIN pour les enseignants de ne pas travailler de façon isolée, de PARTAGER leur DIFFICULTÉ et de poursuivre un objectif COMMUN.
9 Il fallait HARMONISER et faire progresser les PRATIQUES pédagogiques, introduire de l’interdisciplinarité et évaluer COLLECTIVEMENT les acquis de fin de CYCLE. Des TEMPS de CONCERTATION ont été inscrits dans les emplois du TEMPS.
10 Pour permettre de RÉPONDRE aux DIFFICULTÉS d’apprentissage et à la MISE en place de PROJETS COMMUNS, des réunions ont lieu sur le TEMPS du midi, du soir et du mercredi sur la base du volontariat.

Ces quelques réponses représentatives confirment la donnée statistique en la précisant. S’agissant des modalités, les conseils (de maîtres, de cycles, de cycle 3, inter-cycles), les journées d’animation et de formation et les temps de concertation notamment dans le cadre de la pondération REP+, sont largement représentés. Il y a là un acquis à consolider et à faire fructifier.

En ce qui concerne les objets du travail collectif ou collaboratif on voit se dégager des tendances importantes :
  l’idée d’actions ou de projets communs qui s’élaborent en concertation,
  la perspective d’harmonisation de pratiques, de mises en cohérence, de progressions communes,
  l’idée d’analyser les difficultés et de faire progresser les pratiques pédagogiques en sécurisant les parcours.
En outre, l’idée que la réflexion commune vaut mieux que l’isolement est affirmée.

3.3 Descriptions d’un ou deux temps de travail collectifs significatifs

Ici encore on part d’une dizaine de réponses significatives (9) à cette question.

1 Journées REP + : échanges avec les COLLÈGUES d’un même CYCLE sur la MISE en PLACE d’OUTILS COMMUNS.
2 Temps de TRAVAIL des COMMISSIONS dans le cadre du CONSEIL école collège sur la MISE en PLACE des PROGRAMMES du CYCLE 3. Maths, Français, EMC et CESC.
3 Mise en PLACE du PROJET REP avec TEMPS de TRAVAIL partagé pour son écriture. Conseils de CYCLE 3 sur des DOMAINES disciplinaires.
4 Les CONSEILS école / collège, les concertations CYCLE 3, les COMITÉS exécutifs, les réunions de TRAVAIL du réseau sur le TEMPS de MIDI.
5 Stage classe sans note : STAGE, élaboration bulletin, PROGRESSION par équipe disciplinaire, RÉFLEXION compétences et PARTAGE avec les COLLÈGUES qui ne participent pas au STAGE, sondage des COLLÈGUES, MISE en commun.
6 Une après-MIDI banalisée pour la MISE en PLACE des EPI (Enseignements pratiques interdisciplinaires) initié en AMONT et mutualisé avec l’ensemble des COLLÈGUES.
7 la MISE en PLACE d’une animation JEUX de société pour accueillir les familles DURANT une SOIRÉE sur l’école.
8 La MISE au point de notre fichier outil de CYCLE 3 en MATHÉMATIQUES que nous allons modifier et proposer à l’issue de deux années d’EXPÉRIMENTATION à nos COLLÈGUES de 6ème, à PARTIR des PROGRAMMATION communes réalisées en 2015 avec l’ensemble des équipes.
9 La MISE en PLACE d’un cahier de sciences de la PS à la GS qui s’inscrit dans une PROGRAMMATION et des PROGRESSIONS faites en équipe.
10 Stage inter REP (2 REP sur la commune) et inter degrés (CYCLE 3) pour la PROGRAMMATION de CYCLE des nouveaux PROGRAMMES. Durant 2 jours (! ! !) le TRAVAIL mené par les enseignants, à PARTIR du constat élaboré en AMONT et avec l’appui des IEN et IA – IPR.

Il est particulièrement intéressant de voir que ces réponses sont cohérentes avec les raisons et modalités déclarées en réponse à la précédente question. Le cycle 3 et le conseil école-collège sont toutefois bien davantage signalés comme porteurs de travail collectif. Sont également évoqués des comités et commissions, des stages, des réunions de travail sur temps de midi qui contribuent à son développement.

Mais c’est surtout sur les objets de travail que l’on perçoit des acquis intéressants avec des centrations disciplinaires sur les programmations et progressions, avec des travaux construits avec l’appui d’inspecteurs et des perspectives d’expérimentation. Mathématiques, sciences, français et EMC sont cités.

Évidemment, s’agissant d’exemples donnés par les uns et les autres, tout n’est pas réalisé partout, mais les choix faits signalent une bonne centration sur les apprentissages et leurs conditions et modalités dans la plupart des réponses.

3.4 Les obstacles au travail collectif

1 Les réticences de CERTAINS COLLÈGUES à s’INVESTIR dans le TRAVAIL d’équipe. La MULTIPLICATION des TÂCHES de chaque enseignant et le MANQUE de TEMPS.
2 Le TEMPS de TRAVAIL des enseignants du PREMIER DEGRÉ et du SECOND DEGRÉ. Les TEMPS de CONCERTATION sont DIFFICILES à poser.
3 Il y a un MANQUE de TEMPS et pour TROUVER ce TEMPS de CONCERTATION ; il faut ACCEPTER de venir sur des HEURES / jours où on ne travaille pas, CERTAINS COLLÈGUES ne sont pas prêts à le faire.
4 MANQUE de TEMPS de CONCERTATION, équipe très jeune qui MANQUE d’EXPÉRIENCE, et MANQUE de stabilité des équipes.
5 Définir des TEMPS de TRAVAIL communs entre les enseignants du PREMIER et du SECOND DEGRÉ du fait de l’éloignement géographique de CERTAINS établissements.
6 La difficulté à faire TRAVAILLER ensemble enseignants du PREMIER et du SECOND degrés, où font OBSTACLES le MANQUE de TEMPS dédiés bien sûr, mais aussi le peu de VOLONTÉ des pilotes.
7 Pas de formation à ce TRAVAIL, pas de culture du TRAVAIL COLLECTIF, pas de formation concernant la gestion de réunion et un MANQUE de TEMPS crucial.
8 Le TEMPS alloué à ces CONCERTATIONS. En REP +, nous DISPOSONS d’une PONDÉRATION de 10 %, mais c’est loin d’être SUFFISANT.
9 La mise en place d’un TRAVAIL COLLECTIF est toujours compliquée lorsqu’il n’y a pas de TEMPS de CONCERTATION PRÉVU dans l’emploi du TEMPS.
10 Nous avons BESOIN de TEMPS de CONCERTATION ! Nous sommes en avril et j’ai déjà explosé mes 108h00 annuelles (117h00 au 5 / 04 / 2018) ; si je veux TRAVAILLER avec mes COLLÈGUES du SECOND DEGRÉ c’est bénévolement ! ! !

Le mot qui ressort le plus massivement est le mot TEMPS, pour dire son manque. C’est que l’idée du travail collectif sur des temps spécifiques a fait son chemin puisque dans les représentations des acteurs ce qui fait principalement problème, ce sont les conditions de sa mise en place et non son principe. On sent poindre la différence entre REP et REP+ à cet égard. Mais les répondants perçoivent également le rôle des pilotes et la question du manque de volonté de certains personnels de travailler dans cette perspective. En outre sont évoquées les questions de l’expérience et de la formation.

3.5 Le réseau : un lieu du travail collectif encore à consolider

Dans tout ce que nous avons dit du travail collectif on a peu vu émerger le réseau comme le lieu de ce travail et le comité de pilotage est absent des instances évoquées. Le comité de pilotage n’est en effet pratiquement cité que dans les réponses aux questions concernant le pilotage (question 6). Il n’empêche que la notion de « projet de réseau » ou « projet de REP » est bien présente mais c’est dans les représentations des coordonnateurs et pilotes en priorité.

C’est qu’en effet ce mot ou son équivalent « REP » est principalement utilisé dans des réponses qui portent sur le pilotage et les mots les plus fréquemment associés à « réseau » sont « pilotage, projet, coordonnateur, coordonnatrice, pilotes, IEN, référentiel et principal ». C’est dire que le réseau n’est pas complètement perçu comme un lieu spécifique de travail, la réalité professionnelle des acteurs se situant davantage dans la classe, dans la relation école-collège ou au sein de l’école ou du collège. On peut d’une certaine manière lier cela au fait que le travail collectif est très fortement évoqué en contexte de réflexion et projets pédagogiques. Autrement dit plus près de la classe où se jouent les apprentissages.

Conclusion

L’entrée par la pédagogie, amorcée en 1998, confirmée en 2006 avec les Réseaux Ambition Réussite et leurs 1000 postes de professeur référent, est, depuis la refondation, qui a continué sur cette lancée en insistant en particulier sur la formation, une évidence pour beaucoup d’acteurs de terrain, même si ce n’est pas encore le cas dans l’opinion publique et dans le champ politique, qui en restent souvent encore à la seule attribution de moyens supplémentaires pour faire baisser le nombre d’élèves par classe.
Aujourd’hui, on a moins peur d’accueillir un collègue dans sa classe, la co-intervention n’est plus une utopie ; une réflexion commune sur les pratiques est perçue comme une nécessité pour la réussite par beaucoup. Les projets inter degrés, le cycle 3, les observations croisées signifient que les réseaux commencent à acquérir une légitimité qui permet à leurs instances de conduire les évolutions pédagogiques. Cela en retour demanderait, selon les répondants, que le pilotage reconnaisse mieux et accompagne les collectifs professionnels en voie de formation.
Le travail collectif et une de ses modalités importantes, la co-intervention, sont aujourd’hui perçus favorablement. Un appel est lancé pour qu’il y ait davantage de formations afin d’accompagner cette évolution des représentations qui rendra possible des progrès futurs dans la mise en œuvre pratique.

NOTE
9. La représentativité de ces réponses est assurée grâce au logiciel d’analyse de textes HYPERBASE qui recueille ces extraits spécifiques à une réponse donnée en s’appuyant sur les spécificités lexicales et en retenant les phrases qui comprennent les spécificités les plus nombreuses et les plus significatives des réponses traitées. Les mots concernés sont donnés en majuscules. On peut en savoir plus sur les subtilités du traitement en lisant le manuel du logiciel http://ancilla.unice.fr/bases/manuel.pdf

 

 

ELEMENT 7

AXE 5 : Accueillir, accompagner, soutenir les personnels

Q. 5.1 Quelles sont les réussites que vous constatez dans votre réseau concernant l’accueil et la formation des personnels ?
Q. 5.2 : Dans votre réseau, une élaboration collective permet-elle de dégager les priorités de formations ?
Q. 5.3 : Quels obstacles voyez-vous à l’efficacité des formations ?
Q. 5.4 : Dans votre réseau, pouvez-vous décrire une formation qui vous a semblé répondre aux besoins des professionnels et des élèves ?

239 répondants ont renseigné les questions consacrées à l’axe 5 du référentiel.

1. Quelles réussites concernant l’accueil et la formation des personnels ?

30 % ne répondent pas à la question et 7 % des réponses disent qu’il n’y a « aucune réussite » constatée. Par ailleurs, beaucoup de réponses témoignent (plus ou moins explicitement) du fait que la question a été traitée à moitié : les réponses ne portent que sur l’accueil (et non sur la formation).

1.1 L’accueil des nouveaux arrivants

C’est l’accueil des nouveaux arrivants qui a donné lieu à des exemples particulièrement précis de réussites :
  des temps dédiés à la rentrée (très majoritairement cités),
  des formations dédiées,
  des formations inter-degrés dédiées,
  du tutorat en interne ; de l’accompagnement par les pairs ; des observations de cours suivies d’échanges avec les enseignants ; mise en place d’un pôle ressource,
NB : une réponse précise que l’accueil pertinent des nouveaux arrivants ne vient pas de la formation mais de l’équipe et de son action bienveillante envers eux,
  un temps de découverte de l’environnement (le réseau, le quartier, une rencontre avec les partenaires).

Par ailleurs, ont été cités des outils facilitateurs de l’accueil et de l’intégration des collègues arrivant dans le réseau :
  le projet de réseau (à deux reprises),
  un livret de présentation (1 fois).

« Pas d’accueil spécifique des personnels au sein du réseau » reste une réponse que l’on trouve très occasionnellement.
1.2 La formation et la question du temps dédié

Du côté de la formation, présentée comme n’existant pas dans trois réponses et mentionnée sous différentes formes (« temps REP+ », « temps communs » entre les cycles, entre les différents réseaux, « temps inter-degrés », « temps de concertation »), c’est la notion de temps supplémentaire donné qui apparaît clairement comme la réussite principale.

Très souvent les « temps de concertation » sont intégrés aux commentaires concernant les « temps de formation ». Cette confusion ou assimilation est significative : elle dit l’idée que l’on se forme entre pairs, par « l’échange des pratiques » et la « mutualisation », par « la confrontation », par la connaissance que l’on a de ce que fait l’autre. Pourtant, les visites croisées ne sont mentionnées que deux fois.

Les temps de formation sont clairement différenciés de la concertation lorsqu’il y a mention d’« intervenants » :
  les formateurs,
  les chercheurs (mentionnés 2 fois),
  les partenaires associatifs (mentionnés 2 fois),
NB : on notera que, comme intervenant, l’inspecteur n’est jamais mentionné.

Il existe également ce que l’on pourrait nommer la formation informelle :
  le « soutien » de l’équipe de circonscription (CPC, coordonnateur),
  la « solidarité de la salle des professeurs qui donnent des conseils et des trucs ».

2. Quelle élaboration collective pour dégager les priorités de formation ?

Les réponses « je ne peux pas répondre », qui sont nombreuses, peuvent signifier que le travail ne s’est pas fait entre tous les acteurs ; mais cela ne dit pas qu’il n’y a pas eu de concertation entre le pilote, le coordonnateur et le formateur académique éducation prioritaire. On ne peut donc pas assimiler la mention « je ne peux pas répondre » à une totale absence de travail collectif ou à une concertation réduite aux seuls pilotes.
Mais, si on ajoute les réponses « je ne peux pas répondre » (car s’il y avait eu concertation, le répondant le saurait sans doute) et « pas réellement », on constate qu’on est loin de pouvoir dire que la concertation dans le réseau est une pratique établie.
Ces chiffres font ressortir un travail collectif à 56 %, une absence de travail collectif à 44,38 % et un très faible pourcentage de réponses qui disent que le travail se fait uniquement « entre les pilotes ».

3. Quels obstacles à l’efficacité des formations ?

27,2 % n’ont pas répondu à la question portant sur les obstacles à l’efficacité des formations.

3.1 Un consensus autour de trois obstacles

Les trois obstacles qui ressortent massivement sont les suivants :
  Trop de temps passé sur la théorie (« la théorie vampirise la réflexion sur la mise en œuvre ») et son pendant, pas assez d’« aide pratique », entendons par là de constructions de séquences ou de séances, d’exemples d’activités, d’élaboration d’outils. Du point de vue des formateurs, cela se traduit par « les enseignants souhaitent du clé en main ». C’est plus exactement un manque de transposition didactique et pédagogique qui est signalé dans ces réponses – que l’on peut d’ailleurs aisément mettre en corrélation avec ce qui est dit des formations considérées comme réussies.

  Des formations qui ne répondent pas aux besoins exprimés par les équipes, c’est-à-dire aux « difficultés rencontrées » pour faire réussir les élèves, à « la spécificité des élèves de l’EP », aux besoins très variés qui ne sont pas de même nature en fonction des degrés et en fonction des cycles, à « l’accompagnement personnalisé » (l’expression a été employée à deux reprises…) que réclament certains enseignants. Cet obstacle est à corréler avec les 11 % de réponses qui disent que les formations sont imposées « d’en haut » (on désigne alors l’IEN, l’institution, le recteur - une fois -, le « MEN » - une fois - et le ministre par son nom - une fois). Révélatrices de ces réponses, les deux citations suivantes : « les seules formations existantes sont celles qui traitent des sujets établis par le ministère » ; « trop monolithique : maths, français et c’est tout ! On n’en peut plus ! ». Ces réponses laissent percevoir leur appartenance massive au premier degré. Parallèlement, « la prise en compte des besoins du terrain » ressort massivement comme levier jugé efficace avec 31 % des réponses, quand la qualité des intervenants (que l’on souhaite « experts », « variés », « hors éducation nationale », que l’on voudrait voir « se renouveler ») vient en deuxième position avec 8 %. L’écart parle de lui-même.

  Le facteur « temps » qui se décline en plusieurs composantes :
o le manque de lien entre les temps de formations que l’on exprime avec la métaphore du « saupoudrage » - qui revient à deux reprises - ou le terme d’« éparpillement » avec « trop de sujets abordés »,
o le manque de temps pour s’approprier ce qui est vu en formation, le mettre en œuvre et en mesurer les retours,
o le moment où les formations ont lieu : parfois trop tardivement dans l’année ; la plupart du temps trop espacées entre elles quand on les souhaiterait massées,
o le temps de la mémoire du réseau : on ne fait pas en sorte que les avancées permises par les formations se transmettent aux enseignants nouvellement arrivés.
3.2 D’autres obstacles moins souvent mentionnés

Le reste constitue une sorte de petite liste à la Prévert qu’il n’est pas inintéressant de donner car elle témoigne d’évolutions dans certains domaines (le remplacement, par exemple, ou encore l’inter-degrés / le travail collectif) :
  manque de moyens de remplacement (pour 6 % des réponses exprimées),
  trop peu de temps communs ; les formations ne concernent pas tous les enseignants (4 %),
  le manque de coopération et d’implication des enseignants (4 %),
  la qualité, les compétences du formateur ou de l’intervenant (3 %) / le manque de variété des intervenants (2 %),
  le turnover des enseignants (2 %).

4. Quelle formation pour répondre aux besoins des professionnels et des élèves ?

31 % ne présentent aucun exemple et 4 % de réponses disent explicitement qu’il n’y a eu « aucune formation réussie ».

21 % des répondants ont proposé deux exemples. 9 % des réponses font le choix de présenter très explicitement des thèmes traités (lecture, pratiques de l’oral, évaluation bienveillante, dédoublement CP…). Deux réponses mentionnent des formations à destination des nouveaux pilotes et directeurs.

4.1 Des exemples de formations réussies

Les deux citations suivantes illustrent la grande disparité des réponses :
  « Aucune ne me vient en tête alors qu’en étant en REP+, on en a eu un très grand nombre ! »
  « Toutes les formations ont enrichi nos réflexions. Nous sommes très satisfaites. »

La plupart du temps, les réponses présentent uniquement les thèmes et objets d’étude des formations citées en exemple. Deux thèmes ressortent :
  l’enseignement explicite pour 10 % des réponses,
  le CP et CE1 dédoublés pour 10 % (une formation sur PDMQDC a été mentionnée une fois).

En lien avec le référentiel, qui n’est cité qu’une seule fois, on trouve, en moindres occurrences, les objets de travail suivants :
  l’évaluation pour 4 % ;
  la relation école/famille (que l’on appelle aussi « communication avec les parents ») pour 3% ;
  le travail personnel de l’élève (dont on mentionne une fois qu’il est à mettre en relation avec « devoirs faits ») pour 3 % également ;
  l’accueil des nouveaux arrivants pour 2 % dont on précise deux objectifs : leur faire découvrir le territoire, les sensibiliser à la question des inégalités scolaires (« via les deux premières priorités du référentiel ») ;
  le climat scolaire pour 1 % ;
  du côté de la maternelle, on trouve des formations consacrées à l’aménagement de l’espace pour 3% ainsi que la scolarisation des moins de trois ans pour 4 %.
Les modalités et le type d’intervenants sont précisés de manière plus ou moins détaillée. Ces réponses permettent de dégager les raisons pour lesquelles ces formations sont données comme des exemples de « formations réussies ». Voici trois citations représentatives de ce que l’on peut lire :

  « ‘Faire écrire les élèves’ : formation demandée en aide négociée, avec des formateurs du GFEN, sur trois jours dans une salle au collège avec 15 enseignants de toutes disciplines, volontaires, qui ont testé trois activités qui ont pu être proposées avec succès ensuite aux élèves et suivi d’une analyse collective. »

  « Formation très efficace sur la classe inversée. Les formateurs ont été très compétents et nous ont aidés à constituer des outils et des séances. Ils ont su être très pragmatiques. C’était d’autant plus intéressant qu’il s’agissait d’enseignants du collège, ce qui permettait de faire le lien avec le secondaire même s’ils n’appartenaient pas à notre réseau. Nous avons pu construire ensemble puis tester dans nos classes puis en reparler avec eux. »

  « Formation à la médiation par les pairs. Ce thème ne faisait pas partie des thèmes proposés par l’académie mais c’était une préoccupation commune à tous les établissements du réseau. Nous avons demandé un financement exceptionnel pour prendre en charge le montant de la formation. Cela a été accepté. 24 collègues des deux degrés se sont retrouvés pour deux jours de formation autour d’un projet commun et concret : constituer des équipes d’adultes référents pour apprendre à former et accompagner les élèves à la médiation par les pairs. Le cahier des charges était très détaillé, les formateurs ont accompagné la mise en place du dispositif dans les établissements, des réunions de suivi ont eu lieu. Ce dispositif a créé une véritable dynamique au sein de chaque établissement. Nous avons l’impression d’une véritable continuité école/collège puisque les médiateurs CM2 arrivant au collège en 6e pourront continuer à être médiateurs. »

4.2 Caractérisation d’une formation réussie

Ce qui caractérise le plus une formation considérée comme réussie - outre ce que nous avons écrit ci-dessus concernant la formation entre pairs -, c’est la capacité des intervenants à répondre aux besoins spécifiques locaux : ils donnent des « idées réalisables et proches des préoccupations du terrain », ils « répondent aux difficultés rencontrées », ils « s’inscrivent explicitement dans un axe/une action du projet de réseau ». Du point de vue (visiblement) d’un membre de l’équipe de pilotage, cela se traduit par le fait que « les formations sont construites à partir du recueil des besoins des équipes repérés par des échanges, des questionnaires et les rendez-vous de carrière ». Dans ce cadre, s’inscrivent les formations qui permettent de concevoir des outils (mentionnées une fois), puis celles qui ouvrent les perspectives sur des actions innovantes (mentionnées une fois).

Suivent en termes de fréquence :
  les formations inter-degrés, quand elles développent une « culture commune de réseau » (mentionnées 5 fois). On mettra en regard les deux réponses qui disent que les « formations inter-degrés » ne sont pas des réussites car elles ne répondent pas aux besoins spécifiques de l’école ;
  les conférences avec apports de savoirs par des universitaires, des chercheurs, des partenaires spécialisés (mentionnées 4 fois) ;
  la formation filée, inscrite dans la durée (mentionnée 1 fois) ; On mettra en regard la réponse qui dit que les temps de formation ne sont pas réussis car ils s’enchaînent de manière juxtaposée, sans suivi.
  les parcours à distance (mentionnés une fois).
Une réponse présente comme une réussite une conséquence non négligeable aux formations et à l’accueil réussis : ils facilitent l’intégration dans l’équipe et l’envie de rester dans l’école. Ils sont des leviers pour lutter contre le turnover.

De l’ensemble des réponses descriptives lues, voici ce que l’on peut dégager comme éléments favorisant la réussite d’une formation :
 compétences et qualité des formateurs et intervenants (dans 8 % des réponses « l’apport de la recherche » est mentionné),
 formation inscrite dans la durée,
 formation « commune », une notion qui apparaît dans 9,62 % des réponses, (inter-degrés, commune à un même degré ou à un même cycle sur plusieurs écoles, commune à une même école…),
 qui permet de construire des outils et des séances,
 qui permet les échanges et la mutualisation entre pairs,
 avec une mise en œuvre dans la classe,
 avec des observations dans les classes, des visites croisées,
 avec un retour réflexif collectif.

4.3 Des formations non réussies

4 % des réponses ne pointent pas les réussites mais disent des frustrations (les différentes difficultés de mise en œuvre, « la seule réussite a été le temps d’accueil des nouveaux arrivants », la formation est « inexistante pour les enseignants arrivants », elle est « inadaptée pour les élèves à besoins particuliers », il y a « trop peu d’intervenants : est-ce parce que l’on est trop loin de la capitale ? », les formations sont « géographiquement éloignées », « les contenus sont trop peu variés » ou inadaptés quand il s’agit de formation de réseau, les temps de formation « vident le collège parfois d’une dizaine de professeurs sur une journée »…) voire de la colère (« très mauvais accueil, formation qui ne nous forme pas et qui reste dans les poncifs d’il y a 30 ans. Aucune remise en question, aucune velléité de se tenir informé des avancées de la science et de s’en servir pour nous donner de nouvelles clés. »). Deux académies ressortent très nettement en termes de critiques et d’expression de la déception voire de la frustration.

Conclusion

Un fort désir des acteurs de l’EP s’exprime d’être davantage « partie prenante » dans la formation, et ce, à plusieurs niveaux :
  ils souhaitent davantage de moments entre pairs sous quelque forme que ce soit (concertation, visites croisées, échanges de pratiques…) car ils estiment que c’est la forme la plus appropriée de formation ;
  ils souhaitent que les formateurs qui les accompagnent soient des professionnels de l’EP ;
  ils montrent combien ils tiennent à l’accueil des nouveaux par les pairs au sein même du réseau ;
  ils répètent la nécessité de construire les formations en partant davantage de leurs besoins exprimés.

Ce fort désir est à corréler avec l’actuel sentiment d’étouffement des équipes enseignantes du premier degré qui se voient imposer les thèmes de formation : ils ont le sentiment de subir plus que d’agir.

Est ainsi mise en évidence une contradiction profonde entre ce qui est aujourd’hui ressenti sur le terrain du fait des nouvelles orientations nationales et « la substantifique moëlle » de la refondation de l’EP, à savoir la nécessité de professionnaliser les équipes enseignantes en les responsabilisant en les outillant car c’est au cœur de la classe que se joue la réussite scolaire des élèves et le traitement de la grande difficulté.

Les réponses-consensus ainsi que les exemples précis qui sont donnés révèlent clairement à qui voudra les entendre les conditions requises pour une formation réussie.
Par ailleurs, en ce qui concerne le travail du réseau, l’expression « cycle 3 » apparaît régulièrement dans les réponses dès que l’on parle d’inter-degrés. Le cycle 3 a une existence, bel et bien réelle, en éducation prioritaire. Il semble un acquis, quelque chose d’inscrit dans le paysage, un objet de travail et de réflexion qui va de soi.

Enfin, concernant l’élaboration des formations du réseau, les données obtenues mettent en avant une évolution significative. Au regard des auto-évaluations réalisées en 2010, on peut tout à fait penser que, si la question avait été posée au moment du bilan des RAR, puis des ECLAIR, les chiffres n’auraient pas été à l’avantage du travail collectif et la réponse « entre les pilotes » aurait largement dominé. Il semble réellement important de pouvoir en faire état car ils disent une avancée : celle non seulement d’un changement d’esprit qui se met en place mais également d’un basculement vers d’autres pratiques.

 

 

ELEMENT 8

AXE 6 : RENFORCER LE PILOTAGE ET L’ANIMATION DES RÉSEAUX

Q. 6.1 Comment le projet de réseau est-il actuellement piloté ? Qui, instances ?
Q. 6.2 Sur quels échanges, observations, données professionnelles le pilotage s’appuie-t-il pour faire évoluer le projet de réseau ?
Q. 6.3 Quelle perception avez-vous de l’articulation entre les différents niveaux de pilotage (local, départemental, académique, national) ?
Q. 6.4 Qu’est-ce qui, selon vous, rend difficile le pilotage efficace du réseau ?
Q. 6.6 Selon vous, qu’est-ce qui pourrait être efficace pour améliorer le pilotage et l’animation du réseau ?

La refondation de l’éducation prioritaire aurait été incomplète si elle n’avait pas traité de sa gouvernance. Le référentiel de l’éducation prioritaire a fait du pilotage du réseau l’un des six axes structurant le travail de l’ensemble des acteurs des REP. Le pilotage est celui d’un réseau et il s’appuie sur un projet de réseau, fruit d’un travail collectif. Ces quatre termes, pilotage, réseau, projet et travail collectif définissent la gouvernance propre à l’éducation prioritaire.
La perception de leur cadre de travail et de leur métier a-t-elle évolué chez les acteurs de l’éducation prioritaire ?
En tant qu’institution naissante, le réseau existe formellement à travers ses pilotes, ses instances et son projet de réseau.

1. Qui sont les pilotes ? Quelles instances ?

Le pilotage d’un réseau est une notion récente. Dans son manifeste de 2006, l’OZP désigne par pilotage l’action d’un délégué national et de délégués académiques à l’éducation prioritaire. On ne parle pas encore de pilotes dans le réseau, mais seulement du rôle du coordonnateur qui pourrait être le « correspondant du délégué académique ». On notera que dans ce même texte l’OZP précise que l’institution du pilotage national ne doit pas se traduire par « une reprise en main hiérarchique ». Il y a bien une tension entre les deux termes hiérarchie et pilotage. Le terme de pilote résonne différemment de celui de chef d’établissement ou de directeur, de même que le comité de pilotage ou COPIL qui a remplacé le comité exécutif de la relance de 2006. Le changement dans les mots appelle un changement dans les représentations et dans les pratiques.
Les termes de pilotes et de pilotage ne sont pas encore devenus familiers aux enseignants. On peut supposer que certains ignorent l’existence même d’un pilotage, comme si le travail des pilotes était purement administratif, sans interférence avec le domaine pédagogique. Cette supposition expliquerait que les mêmes personnes qui ne répondent pas ou donnent des réponses minimales aux questions sur le pilotage, énumèrent, parfois avec fierté, dans des réponses à d’autres questions tout ce qui se fait dans leur réseau ou tous les projets qui leur ont été présentés le jour de la rentrée. Il a bien fallu un pilotage pour finaliser ces projets. Ainsi, la réalité du pilotage se constate autant dans les réponses aux autres questions de l’enquête.
Les nombreuses non-réponses ou les réponses minimales tout comme les réponses plus élaborées soulèvent des questions délicates : qui est pilote ? Le coordonnateur est-il un pilote ? L’IEN est-il pilote du seul premier degré ou de tout le réseau ? L’équipe de direction du collège s’intéresse-t-elle au premier degré ? Le réseau existe-t-il vraiment ? Qu’est-ce qu’un pilote ?

Le pilotage ordinaire, en quelques exemples (Q. 6.1 et 6.2) :
  Équipe de direction de collège : Q. 6.1 : « Par les pilotes du Réseau, CE, IEN, coordonnateur REP+, Conseillère Pédagogique premier degré » – Q. 6.2 : « Conseil école collège, comité de pilotage du réseau. »
  Coordonnateur et équipe de direction collège : « Pilotage concerté Chef d’Établissement, IEN, IA-IPR Référent et coordonnateur de réseau associé. Comité de pilotage qui se réunit deux à trois fois par an. Conseil École-Collège qui se réunit deux fois par an et Conseil de cycle 3 qui se réunit trois fois par an avec un temps de présentation collective et de travail en groupes de réflexion. »
  IEN : « Le projet est actuellement et réellement piloté par la PERDIR et l’IEN. Structure annuelle des instances : CEC1, CC3, stage liaison écoles-collèges, CEC2. Parallèlement les réunions de directeurs, le conseil pédagogique du collège, le GIP PRE, les réunions de pôles ressources, et RASED complètent les instances inter-degrés de part et d’autre. »
  Personnel de direction : « Qui ? Chef d’établissement, C.E. adjoint, IEN, soutenus par la coordonnatrice, le CPC, la formatrice REP. Quelles instances ? COPIL restreint, CEC, CC3, forum REP+, COPIL élargi. Quelles modalités de travail ? en réunion, pendant les heures de classe ou après. »
  Personnel de direction : « Qui ? Trois copilotes + coordonnateur + CPE référent + CPC et référents second degré. Instances : COPIL et dans une moindre mesure, conseil pédagogique et conseil d’école. Réunion des directrices avec le coordonnateur. Modalités : groupe de travail des référents. »
  Directeur, enseignant 1er degré : « Comité de pilotage réuni 3 fois dans l’année - rôle très positif des coordonnateurs REP du réseau - conseil des directeurs du REP avec l’IEN. »
  CPC : « Les comités de pilotage ont bien eu lieu. C’est une instance qui permet de réfléchir et d’acter des perspectives de travail commun. Les Conseils école-collège ont été intégrés aux formations suivis et ont été aussi des temps de travail. Les réunions de pilotes ont peu à peu intégré la coordinatrice et la CPC afin de tenir compte de l’expérience du terrain et de proposer des formations qui ont du sens pour les collègues. Les commissions de liaison en fin de CM2 ne comptaient que des enseignants du premier degré il y a cinq ans mais les professeurs principaux de sixième sont désormais présents lors de ces commissions qui permettent réellement d’assurer le suivi du parcours des élèves. »
  Coordonnateur : « Il est piloté par l’IEN, la principale du collège, l’IA-IPR. Le coordonnateur rend compte de ses actions aux pilotes. Le principal adjoint et les CPC participent également à différentes concertations visant à faire vivre le projet de réseau. »
  Directeur : « Le projet de réseau est piloté par le comité de pilotage, essentiellement le principal du collège qui généralement présente le projet (avec l’IEN et le coordonnateur REP+). On a l’impression que tout part surtout du collège et ruisselle sur l’école élémentaire d’abord (le cycle 3 surtout) et l’école maternelle. Régulièrement, dans le cadre de concertations REP+ au collège (et également dans le cadre du Conseil école-collège), nous rencontrons les professeurs du second degré pour échanger sur les six priorités du référentiel, sur les pratiques pédagogiques (par exemple les évaluations) et sur la place des parents au sein des établissements, ainsi que sur les problématiques communes (comment réduire l’absentéisme par exemple). »
  Directeur : « Notre coordonnatrice REP+ nous réunit en début d’année pour nous présenter les projets : nous nous inscrivons au projet qui nous intéresse. Elle nous met en lien avec le collègue concerné. »

1.1 Qui pilote ?

Pour l’animation du réseau, l’OZP avait pris l’habitude de parler d’un trio : le principal, l’IEN et le coordonnateur. La relance de 2006, créant les RAR, avait fait des coordonnateurs les « secrétaires du comité exécutif » et provoqué un certain effacement de leur rôle. La mise en œuvre de la refondation en 2014 avait attribué un IA-IPR référent à chaque réseau et relancé les coordonnateurs. Ces acteurs animent une instance élargie, se réunissant le plus souvent deux fois par an : le COPIL ou comité de pilotage.
Pour une centaine de répondants du premier degré, dont la plupart des directeurs, deux personnages incarnent le réseau : le coordonnateur et l’IEN (parfois avec les conseillers pédagogiques de circonscription, les CPC).
Le coordonnateur est cité, dans le premier degré 31 fois seul, 14 fois en association avec l’IEN. 49 fois, il est cité en tant que membre du COPIL. 32 fois, il n’est pas cité lorsque seuls l’IEN et le Principal sont identifiés comme pilotes.
Massivement pour les acteurs du premier degré, le coordonnateur est le visage du réseau, l’interlocuteur du quotidien, la cheville ouvrière de la réalisation du projet. Quatre directeurs d’écoles vantent les qualités exceptionnelles ou l’engagement de leur coordonnateur. Par contraste, quelques cas anormaux apparaissent : soit le coordonnateur apparaît inscrit uniquement dans le premier degré, ignoré par le principal, ou au contraire à disposition du principal. Parfois, il est vu comme ayant des fonctions purement administratives. D’autres pensent qu’ils pèsent peu dans les instances de pilotage. Certains directeurs se plaignent de ne pas le connaître : « Les pilotes devraient le présenter ».
Le coordonnateur est-il un pilote ? Les textes ne le situent pas au même niveau que le principal et l’IEN. Mais une forte minorité d’IEN et de principaux (dans des groupes de répondants peu nombreux) le reconnaissent comme pilote, tout comme de nombreux acteurs du premier degré. Un certain pouvoir de décision, inclus dans la définition du pilote, est-il alors reconnu ?
  P.E : « Le coordinateur de réseau est primordial pour développer le dialogue et les projets entre les écoles et le collège de secteur. »
  P.L.C : « Nous avons une coordonnatrice de réseau qui nous présente une ou deux fois dans l’année les projets inter-degrés. »
  P.L.C : « Coordonnatrice très présente sur le terrain dans et hors la classe, c’est notre interlocutrice privilégiée. Elle coordonne entre autres les profs ressources et les assistants pédagogique du réseau (8) répartis sur les écoles REP et le collège. »
  Équipe de direction de collège : « Il est piloté par le Principal et l’IEN en Conseil École collège et au comité de pilotage. Il est porté par le coordonnateur au quotidien. Lien indispensable. »
  P.E : « Une enseignante dispose d’un mi-temps de coordinatrice REP. Sa tâche semble plutôt administrative. »

L’IEN est cité quatre fois sur cinq par les personnels des écoles, soit explicitement, soit implicitement en tant que membre du COPIL. Mais il est absent dans 28 réponses où seul le coordonnateur est cité : faut-il comprendre que, dans ces cas, l’éducation prioritaire n’est pas au centre des missions de l’IEN ? Trois fois, l’IEN n’est pas cité par le principal.
Dans certains réseaux, le principal adjoint et/ou le CPC se consacrent en priorité aux actions spécifiques de l’éducation prioritaire, donnant plus de consistance à l’équipe de pilotage.
Les IA-IPR référents sont cités explicitement 22 fois parmi les pilotes, huit fois dans le premier degré (dont cinq fois en maternelle), trois fois par l’IEN et par un coordonnateur sur quatre, indice de leur participation. Deux académies les citent plus fréquemment. Ils font aussi partie du COPIL, mais il n’est pas sûr que tous les acteurs le sachent.
Des réponses fréquentes citent les organes de pilotage : les deux, ou trois, parfois quatre pilotes et le COPIL et ses deux réunions annuelles. Un répondant sur cinq, surtout les coordonnateurs et les équipes de direction de collège, citent le seul COPIL. Les équipes de direction de collège s’en tiennent souvent à cette description rapide sans préciser comment le pilotage s’exerce.
95 réponses ne citent aucun pilote. 66 parce qu’ils ne savent pas ou ne répondent pas à la question. Plus important, 29 réponses ne citent aucun pilote parce qu’il n’y aurait pas de pilotage ou qu’il y a des conflits. (cf. ci-dessous, 2.2).
Parmi les 160 directeurs et professeurs des écoles répondants, un peu plus d’un quart, surtout les P.E, ne savent pas qui pilote ou bien ne répondent pas à la question. Et près d’une quinzaine citent seulement le COPIL, sans préciser. On trouve les mêmes proportions chez les enseignants de collège, ce qui traduit aussi un faible sentiment d’appartenance au réseau. Les huit non-réponses chez les Principaux, IEN ou coordonnateurs traduisent soit un conflit, soit une nomination récente.

1.2 Quelles instances ?

Le COPIL qui peut rassembler trente personnes et plus se réunit en moyenne deux fois par an, il est alors comme un organisme parlementaire. Il est cité 48 fois : par deux équipes de direction de collège sur trois, par aucun professeur de collège, par un coordonnateur sur quatre et par un personnel du premier degré sur neuf.
Quel fonctionnement du réseau entre ses sessions ? Le cycle 3 et son conseil et le conseil écoles-collège permettent un travail concret avec la participation d’enseignants.

Le conseil écoles-collèges (CEC) est le plus cité : 35 fois, par dix-huit directeurs d’écoles et deux P.E, un IEN et un CPC, sept coordonnateurs, cinq équipes de direction et un CPE. Un directeur mentionne un « CEC élargi ». Trois académies les citent plus fréquemment. Deux coordonnateurs directeurs à mi-temps citent comme pilote l’un, le Conseil école-collège, l’autre, le COPIL.
Le cycle 3 et son conseil sont mentionnés 13 fois dans les réponses sur l’axe 6 : cinq fois par le coordonnateur, par un IEN et par un CPC, 6 fois par des personnels des écoles, mais par personne en collège. Le cycle 3 apparait plus fréquemment dans des réponses à des questions sur d’autres axes de l’enquête.

Quelques réponses mentionnent des aménagements de ces instances : un P.E parle d’un « COPIL large mensuel », un directeur d’un « COPIL élargi », un principal d’un « COPIL restreint », un coordonnateur de « COPIL fréquents », un autre de « réunions informelles ». Six réponses mentionnent des réunions du « trio » : principal, IEN et coordonnateur élargi : au formateur REP, au CPC, ou aux directeurs d’école.

Deux réponses citent les journées de pré-rentrée. Dans un réseau : « tous les enseignants du réseau sont réunis pendant deux jours de pré-rentrée. » L’équipe de direction d’un réseau cite les groupes de travail sur des objectifs du projet, par exemple « le langage oral de la maternelle à la troisième ». Le travail qui peut se faire dans le temps libéré pour la concertation est cité quelquefois comme source d’ajustement du projet.

Comment les écoles et leurs directeurs participent-ils à la vie du réseau ? Ce peut être par l’intermédiaire du coordonnateur ou de l’IEN, par leur participation au CEC et au cycle 3, par les deux COPIL annuels. Si quelques-uns expriment une opinion très négative, une trentaine de réponses peuvent être interprétées comme une demande d’être plus associés ou au moins informés de la vie du réseau.

  P.E : « À part la coordinatrice REP pas de contact » - Q. 0.1 : « Travailler collectivement sur un sujet, partager les pratiques ; l’enseignement de la compréhension ; lien avec les familles. »
  P.E : « Peu de pilotage » - Q. 0.1 : « Action de réseau avec le collège pour un suivi plus prégnant des élèves. Projet européen Erasmus+ pour ouvrir nos élèves aux autres et leur donner des perspectives pour voir qu’il existe d’autres façons de vivre, d’autres lieux. »

Comment s’opère le pilotage quotidien ? Où est « l’exécutif » du réseau ? On devine deux modalités : soit une instance légère avec des réunions mensuelles, soit premier et second degré chacun de leur côté.

Deux exemples où l’on ne sait pas qui pilote, mais où le réseau existe :

  P.E : Q. 6.1 : « Aucune idée » - Q. 0.1 : « réunions et harmonisations école collège, projets Erasmus. »
  P.E maternelle : Q. 6.1 : NR - Q. 0.1 : « Travail d’équipe nécessaire et installé localement en sus du temps de concertation réglementaire. Réunion hebdomadaire d’équipe concernant les actions à mener sur l’année dans le cadre du projet réseau : langage, mathématiques, parentalité. Progression d’école sur le cycle : des outils évolutifs de la petite à la grande section et le cahier de progrès et travail auprès des parents (sens à l’école, rencontres, accompagnement hygiène santé écrans, mise en place des cafés parents mensuels, atelier philosophie pour les parents). Ouverture de l’école maternelle aux parents : les parents dans les classes ; projets financés par le réseau qui permettent une ouverture culturelle aux élèves et aux parents accompagnateurs (théâtre, concert). École invitée à participer au projet réseau depuis 2019 par IEN. Rencontres collège/maternelles et élémentaire du réseau. Mise en commun des ressources et réflexion sur les besoins, les apports. »
Chacun de son côté : une identité purement premier degré dans une école « active » :

  P.E : Q. 6.1 : NR – Q. 6.2 : NR - Q 6.3 : NR – Q. 6.4 : NR - Q. 6.6 : NR - Q. 0.1 : « Formation de très bonne qualité offerte par l’équipe de circonscription - auto-formation - utiliser des méthodes à la pointe de la recherche connues grâce aux formations proposées et à l’auto-formation qui en découle - faire des projets (ex : participation à des concours, présentation de spectacles, de restitutions, le principe étant que les projets font sens pour les élèves et en ce sens, les motivent pour travailler (la motivation étant un problème majeur en REP/REP+), permettent d’investir de nombreux domaines (transversalité) et permettent aussi aux parents de s’investir (l’investissement des familles étant souvent essentiel à la motivation des élèves) - utiliser une pédagogie explicite dans tous les domaines afin de donner du sens à l’effort demandé - travail d’équipe efficace autour d’un projet d’école correspondant bien aux problèmes majeurs connus (parler et lire pour comprendre / susciter la curiosité / créer une communauté éducative). »
  P.E : Q. 6.1 : « Je ne sais pas. » - Q. 0.1 : « Sorties USEP, projet d’école autour du langage et des relations avec les familles, liaison GS-CP. »

1.3 Positions différentes des répondants dans le réseau

Les coordonnateurs et les formateurs EP sont plus critiques. Parfois en porte-à-faux avec leurs pilotes ou témoins de relations difficiles entre le principal et l’IEN, 8 coordonnateurs sur 41 et 3 formateurs EP sur 6 expriment des jugements critiques : soit ils reprochent au principal de se désintéresser du premier degré, soit ils pointent un manque d’engagement ou même de compétence nécessaire en éducation prioritaire, soit ils dénoncent l’absence de pilotage ou des conflits entre principal et IEN. Ainsi, parmi les leviers envisagés, on note : « former les pilotes », « les accompagner », « les recruter sur profil ». Par leurs fonctions les coordonnateurs s’identifient au réseau.
  Formateur REP+ : Q. 6.1 : « Les personnels de direction du collège changent trop souvent pour permettre de développer réellement les projets, ils ne sont pas formés à la direction d’un REP. »
  Formateur REP : Q. 6.4 : « La véritable "foi" de travailler en EP et ça vaut aussi pour les enseignants. » - Q. 6.6 : « Recruter des personnes qui sont convaincus de la réussite de tous. »

Comme leurs pilotes, ils connaissent le pilotage académique ou départemental, souvent pour se plaindre de la verticalité ou des injonctions (mot cité une dizaine de fois dans l’ensemble des réponses). Plus souvent que les autres, ils citent les IA-IPR parmi les pilotes, indice de leur participation et, dans les instances de pilotage le conseil école-collège (CEC) et les conseils de cycle 3, où leurs fonctions peuvent s’exercer pleinement.
Dans trois réponses, des enseignants signalent que cette fonction de coordonnateur a disparu depuis deux ans, et dans deux autres que le coordonnateur est absent parce qu’il se partage sur trop de réseaux.
Les professeurs des écoles, dont les directeurs, se distinguent sur plusieurs plans : ils sont les plus nombreux et de loin à répondre à l’enquête, signe que l’éducation prioritaire fait plus souvent partie de leur identité. Mais en même temps, une forte minorité ne sait pas qui est pilote (ou le terme pilote ne leur dit rien) ; donc le pilotage du réseau, source d’autonomie professionnelle, a peu de réalité. Pour ceux-là, leur monde reste le premier degré. Ceux pour qui le pilote est le coordonnateur, seul ou avec l’IEN, se situent dans le même monde.
Cependant, pour beaucoup, le réseau existe. La demande de réseau ou de plus de réseau se manifeste le plus clairement dans des réponses critiques : demande d’être informés ou d’être partie prenante des décisions. Au moins trente répondants ont pu être identifiés comme étant probablement en écoles maternelles ; ils sont souvent très demandeurs de réseau.
Le pilotage est « peu visible », ou « nous sommes peu informés ». Pour 17 réponses, négatives, soit une sur dix, le réseau n’existe pas, ou il n’y a pas pilotage, ou pas de projet ; deux directrices de maternelle se sentent abandonnées (« Les maternelles sont la cinquième roue du carrosse ! ») Le coordonnateur a des fonctions purement administratives (3 mentions). Trois d’entre eux regrettent que le coordonnateur ait des fonctions purement administratives et ne soit pas un animateur pédagogique.
L’absence de pilotage est souvent associée aux « injonctions » de la hiérarchie, on demande donc aux pilotes de faire vivre l’autonomie du réseau.
Les quelques enseignants de collège en majorité ne répondent pas ou ne savent pas qui pilote. Trois réponses citent comme pilotes le trio, un autre le coordonnateur et le dernier le CEC. Mais plusieurs réponses montrent ou laissent supposer qu’ils participent à des actions inter-degrés et qu’ils sont impliqués personnellement dans l’éducation prioritaire.
Les personnels de direction et les équipes de direction de collège donnent souvent des réponses minimales, citant simplement les acteurs ou le COPIL, un seul cite l’IPR référent, sans doute considéré comme extérieur au réseau, trois oublient l’IEN et quatre ne répondent pas.
Qu’il y ait seulement dans les réponses émanant des collèges deux mentions des dédoublements de classe ou des dispositifs PDMQDC en voie de disparition, amène à poser la question inverse : s’intéressent-ils aux écoles ? Or, on constate que les réponses émanant du second degré à la question ouverte initiale citent massivement des initiatives ou des objectifs inter-degrés. Donc, pour les personnes répondant à l’enquête, le réseau existe.

2. Quel projet ? Quel pilotage ? Quel réseau ?

De nombreuses réponses s’en tiennent à une énumération des pilotes et des organes de pilotage. C’est en croisant avec les réponses aux autres questions que l’on constate, à travers les projets ou actions énumérées, l’existence d’un véritable pilotage.
Parmi les réponses plus élaborées, certaines abordent la question du pilotage par le projet de réseau, les autres critiquent ou constatent un manque de pilotage ou dénoncent un pilotage « vertical ».

2.1 Pilotage et projet de réseau

31 réponses mentionnent positivement le projet de réseau. 10 réponses le citent comme l’objet du travail des pilotes. Six réponses en Q .6.2 citent les indicateurs du projet pour son évaluation. Quatre autres réponses (dans quatre académies différentes) mentionnent son évaluation et sa réécriture. Cinq réponses citent la mise en œuvre du projet. Un IEN cite son actualisation annuelle. Une directrice parle d’une liste d’actions annuelles, inspirée du projet, auxquelles chacun peut s’inscrire en début d’année. Deux autres parlent des axes de travail dégagés chaque année en concertation.
  Coordonnateur : Q. 6.1 : « Le projet de réseau est piloté par l’IEN, le Principal et le coordonnateur qui assiste aux réunions de concertation ensuite descendant vers les P.E/P.L.C et discuté au sein d’un conseil école/collège. »
  Coordonnateur : Q. 6.2 : « Le pilotage s’appuie sur les enquêtes et questionnaire du coordonnateur (analyse des évaluations propres au réseau, analyse de la répartition des élèves dans les différents quartiers et leurs représentations dans le dispositif "école ouverte", séjours proposés par le collège, questionnaire sur des cohortes d’élèves pour justifier une action précise). »

Mais une douzaine de répondants, surtout dans le premier degré, doutent de son existence ou de sa qualité (« un catalogue »). Cinq réponses franchement négatives estiment que le projet est un document qui n’inspire pas l’action quotidienne, (« le projet de réseau n’est pas un outil de travail en soi »), soit parce qu’on n’en parle guère, soit parce que les pilotes ont changé. On regrette alors leur instabilité.
Lorsque ce sont des IEN qui critiquent l’inconsistance du projet, cela révèle un conflit avec le principal (et même une fois avec l’IA-IPR).
Il est quand même étonnant que deux coordonnateurs, même nouvellement nommés, ne connaissent pas le projet de son réseau (ni le référentiel).

2.2 Manque de pilotage ou faible sentiment d’appartenance au réseau

Au-delà des nombreux personnels du premier degré, surtout professeurs des écoles, qui ne répondent pas ou disent qu’ils ne savent pas répondre, ce sont souvent des coordonnateurs ou des formateurs EP qui dénoncent la faiblesse ou l’absence de pilotage. Ils trouvent parfois des excuses aux pilotes « surchargés ». Mais, parfois aussi, ils mettent en cause leur implication dans l’éducation prioritaire, leur compétence ou l’absence d’intérêt de leur principal pour le premier degré.
Trois formateurs EP, en position académique, expriment aussi leur perplexité : ils ne voient pas bien qui pilote et quelle est la consistance du projet.
Deux réponses parlent de « catastrophe », une troisième se résume par : « Bof ! »
Quelquefois est mentionné un rôle positif, pour le coordonnateur ou pour l’ensemble des pilotes.
Onze réponses mentionnent des relations difficiles et même des conflits entre IEN et Principal, neuf autres l’absence de communication dans le réseau.
Cinq enseignants de maternelle se plaignent de ne pas compter dans le réseau.
  Directrice : Q. 6.1 « La maternelle étant la cinquième roue du carrosse, je ne sais pas. »
  Coordonnateur : Q. 6.1 « Manque de pilotage. Le projet de réseau ne répond pas aux difficultés des pilotes. Les coordonnateurs sont un peu livrés à eux-mêmes, faute pour les pilotes de temps. Q. 6.2 : temps de concertation en début d’année et en fin d’année. »
  Formateur éducation prioritaire (impliqué sur plusieurs réseaux) : Q. 6.1 « Je ne vois pas trop de pilotage collectif de la part des trois pilotes de chaque réseau, il y a parfois un comité de pilotage (un ou deux par an sur certains réseaux). Le changement permanent des pilotes - la méconnaissance des spécificités de l’éducation prioritaire des pilotes nouveaux arrivants. »
  Directeur, enseignant 1er degré : Q. 6.1 « Pilotage insuffisamment visible pour les écoles. Coordonnateur de réseau à mi-temps (l’autre mi-temps sur un poste hors réseau). Il consacre une grande partie de ce temps à un pilotage administratif. Il n’y a plus de temps pour la mise en œuvre de nouveaux projets de réseaux, les équipes enseignantes et directeurs ont un sentiment d’appartenance à un réseau qui s’amoindrit. »
  Directeur : Q. 6.1 « À part la coordinatrice REP, pas de contact. De la classe on ne perçoit pas le pilotage et on a du mal à voir la cohérence. »

2.3 Coupure entre premier et second degrés

Cette coupure a pu être repérée dans de nombreuses réponses analysées plus haut. Dans la majorité des réponses émanant des écoles on ne trouve aucune allusion au collège. Plus précisément, elle est citée explicitement dix fois et elle est implicite dans la plupart des réponses sur l’absence de relations ou de communication. La coupure se traduit par le manque d’informations et le besoin d’échanges. Ce sont surtout des directeurs d’école, et encore plus en maternelle, qui se plaignent de ne pas être informés. C’est le signe d’une faible existence du réseau et d’une coupure entre écoles et collèges.
Cette coupure s’exprime chez certains IEN ou principaux en laissant deviner des divergences de fond. Elle est parfois attribuée à l’instabilité des pilotes. La solution proposée pour y remédier est de « demander aux principaux de s’engager pour 5 ans ».

  Coordonnateur : Q. 6.1 « Difficultés de relation entre les pilotes. »
  P.E Maternelle : Q. 6.1 « Le pilotage se situe de façon trop importante au niveau du collège : pouvoir important du principal, davantage que l’IEN. Du coup, la maternelle est peu prise en compte dans les réflexions collectives. »

Plus positivement, « la différence des cultures professionnelles du premier et du second degré », identifie un obstacle de fond contre lequel il est possible lutter : c’est un objectif cité quatre fois par des coordonnateurs. C’est au niveau des cultures professionnelles que la coupure se situe.

Avant la création des Réseaux Ambition Réussite (RAR) en 2006, pour la grande majorité des collèges l’appartenance à l’éducation prioritaire se limitait à la liaison CM2-6ème et à des classes un peu moins chargées. Certes, la liaison inter-degrés a fait partie de la définition des ZEP dès leur création, mais ce sont essentiellement des écoles qui se sont mobilisées autour de leurs projets. La création des professeurs référents et la multiplication des actions inter-degrés a identifié le rapprochement des cultures professionnelles comme un objectif central. Il n’est pas anormal que ce rapprochement soit encore limité.
2.4 Pilotage national, académique, départemental et « verticalité »

On constate beaucoup de non-réponses à la question Q. 6.3, surtout dans le premier degré. Dans ce degré, y compris chez les quelques IEN ou CPC, on voit rarement au-delà du niveau départemental, sauf pour se plaindre des injonctions nationales. A l’inverse, une directrice d’école maternelle pense que le pilotage est purement académique, donc lointain.
Onze réponses dénoncent la verticalité, les injonctions, ou un pilotage « descendant » ou « autoritaire ». Ces termes sont associés à une non-prise en compte des besoins des enseignants. Beaucoup d’acteurs pensent que les directives nationales, les injonctions, sont trop pesantes : « le pilotage est toujours vertical sans qu’on prenne en compte nos besoins » ou « les 18h de formation, c’est 9h de français et 9h de mathématiques. »
  P.E : « Aucune articulation. Si ce n’est des injonctions ministérielles. »
  Coordonnateur : « Je constate que ce qui apparaît comme trop "descendant" auprès des enseignants ne fonctionne pas. C’est le cas des 18h de formation pour lesquelles il a été imposé de faire 9h de français et 9h de maths. »
  P.E : « Le pilotage est toujours vertical du haut (Académie, IEN) vers le bas (acteurs de terrain), sans réel effort de prendre en compte nos besoins et nos demandes. Il faudrait équilibrer les flux ! »
  P.E : « Le pilotage est toujours vertical sans qu’on prenne en compte nos besoins. Qu’on nous laisse travailler ! »
  IEN : « Le pilotage académique est centré sur les contraintes de carte scolaire : dédoublement, remplacements, mais pas sur une cohérence d’axes de formation par exemple qui seraient ensuite déployés dans tous les REP. »
  Personnel de direction : « Il y a un lien entre le local et le départemental, le local et l’académique, mais peu d’articulation entre le départemental et l’académique. Depuis plus d’un an, le pilotage national vise l’allocation de moyens (dédoublement des CP et CE1, prime REP+, etc. »
  Équipe de direction de collège : « Il est clair que le pilotage du réseau se fait au niveau local. Les autres niveaux de pilotage se font de façon descendante, sous la forme de demandes ou d’injonctions pour la mise en œuvre de la politique ministérielle, sans autre prise en compte de la réalité de terrain que l’attribution d’une DGH nous permettant de mener localement notre politique pédagogique. »

3. Quels leviers pour améliorer le pilotage et l’animation du réseau ?

Les réponses à la question Q. 6.6, contiennent des propositions qui pourraient améliorer le pilotage et l’animation du réseau. On peut ajouter à ces propositions les initiatives prises dans les réseaux, citées dans d’autres réponses à l’enquête.
3.1 Le temps

Le temps est la première revendication. Les répondants estiment que davantage de temps serait le levier essentiel.
  Directeur, enseignant premier degré : « Permettre des échanges de pratiques. Donc du temps. »
  IEN : « DU TEMPS. Un coordonnateur avec des missions claires (bien que la lettre existe) et des objectifs atteignables. Des moyens attribués dans la durée (5 ans) et une politique nationale stabilisée. »

Le temps dégagé par la « pondération du service » en REP+ pour la concertation et la formation dans le réseau permet de cerner les besoins des acteurs et qu’ils soient pris en compte par les pilotes du réseau mais aussi par les autres niveaux de pilotage, en particulier pour la formation qui peut accompagner des initiatives précises dans des délais opérationnels.
  Directeur : Q. 6.1 « Le réseau est piloté par : L’IEN, le coordonnateur, les liens avec la municipalité, les liaisons et temps de travail commun entre maternelle / élémentaire / collège. » Q. 6.2 : « Sur des temps de concertation avec le pilote du réseau, sur les indicateurs mis en évidence lors des temps de réflexion et sur l’analyse des résultats des actions mises en place par les membres du réseau. » - Q. 0.1 « Les temps de concertations nous ayant permis de réadapter les programmations et progressions d’école donnant lieu à la mise en place de nouveaux projets. »

Le souhait est qu’en REP+ le temps dégagé dans les écoles et le collège soit un temps commun facilitant le travail inter-degrés. Plusieurs réponses demandent que le temps de concertation soit « formalisé » ou « officialisé » pour permettre ce travail commun. Un principal demande des journées banalisées. Des réseaux ont déjà instauré des plages horaires ou même des après-midis sans cours.
Un directeur propose un stage d’une semaine pour l’ensemble des directeurs d’écoles et les pilotes. Un coordonnateur propose une formation commune « en équipe complète ».
Deux réseaux utilisent déjà la pré-rentrée pour un travail commun à tous les enseignants. D’autres suggestions, moins précises, portent aussi sur cet objectif de rapprochement du premier et du second degré : décloisonner, faire l’unité, faire réseau. Un coordonnateur de REP demande du temps comme en REP+.
3.2 Formation des pilotes, profil et recrutement

Au total seize coordonnateurs et formateurs EP demandent pour les pilotes une formation, ou un choix sur profil ou plus d’accompagnement. Mais dix sur seize de ces demandes sont liées à une critique de leur pilote actuel : « On ne doit pas se trouver pilote par hasard ». Chez certains le reproche semble être que le pilotage du REP n’est pas une mission essentielle aux yeux de leur principal. Trois coordonnateurs de la même académie qui pensent que les pilotes devraient être formés ou être accompagnés. L’accompagnement serait-il une forme douce du pilotage académique ? Un principal qui a bénéficié d’une aide de l’IFE propose que tous les pilotes soient ainsi formés au pilotage. Un IEN aussi est demandeur de plus d’accompagnement. Trois réponses étendent cette demande de profil aux enseignants. Huit demandes, de répondants très divers, mais surtout d’IEN demandent plus de stabilité en particulier pour les principaux, avec un engagement sur cinq ans.
  Coordonnateur : Q 6.6. « Sélection des chefs d’établissements et des IEN qui souhaitent exercer en EP (postes à profil). Formation des chefs d’établissements et IEN nommés en EP. Inscrire le pilotage du réseau dans la lettre de mission des chefs d’établissement et des IEN. »

3.3 Le rôle du coordonnateur

Le souhait est que les coordonnateurs soient à temps plein, et qu’ils soient nommés là où il n’y en a plus. Des directeurs et des coordonnateurs souhaitent que les coordonnateurs ne soient pas limitées dans des fonctions administratives mais soient des animateurs pédagogiques. Un IEN et un principal font des demandes symétriques ; un coordonnateur pour le collège, un autre pour le premier degré !

On souhaite aussi unifier les pilotages académique et départemental. Un CPC propose que le second degré soit géré au niveau départemental comme le premier degré.

3.4 Le contenu du pilotage et du projet

C’est aussi le contenu du projet qui permet de « faire réseau ». L’association des écoles à la vie du réseau sera d’autant plus forte que leurs préoccupations seront prises en compte. Des réponses citent des objectifs communs à l’ensemble du réseau : par exemple, l’évaluation par compétences, assez fréquente dans les écoles, est d’autant plus efficace et acceptée qu’elle se prolonge au collège. Les initiatives en direction des familles gagnent à se généraliser. Ou encore, un objectif pédagogique commun au réseau de la maternelle à la troisième tel que le développement de l’oral ou l’unification du langage mathématique. Ces pratiques et ces objectifs communs demandent des échanges qui ont des effets dans d’autres domaines.
Conclusion

De l’ensemble de ces réponses émergent trois conclusions et trois problèmes.
Une réalité nouvelle émerge : aujourd’hui la majorité des écoles et collèges en éducation prioritaire sont engagés dans la construction de réseaux. Réseaux, Pilotes, projet de réseau, travail collectif, concertation : ces termes sont la marque d’une gouvernance qui commence à se développer en éducation prioritaire. Ils fédèrent écoles et collèges sur la base d’un projet de réseau, élaboré collectivement. Deux pilotes, le principal du collège et l’IEN, souvent un troisième, l’IA-IPR référent, et-parfois un quatrième, le Coordonnateur, assurent le pilotage du réseau en s’appuyant sur le comité de pilotage ou COPIL, réuni deux fois par an et surtout sur le conseil Écoles-Collèges (le CEC) ou le Conseil du Cycle 3.
La fonction de coordonnateur est centrale. Les coordonnateurs apportent aux deux pilotes une indispensable force de travail, d’initiatives et de relations. Ils s’identifient souvent à l’éducation prioritaire, avec des exigences fortes. Ils sont la cheville ouvrière du réseau. Pour les professeurs des écoles et leurs directeurs, ils sont le visage du réseau. Ils devraient être reconnus et recrutés comme animateurs pédagogiques.
L’investissement dans les instances reliant les écoles et le collège (conseil de cycle 3 et conseil écoles collèges) est fréquemment cité dans l’ensemble du questionnaire. Mais la coupure entre les deux degrés reste un problème. Le rapprochement des cultures professionnelles du premier et du second degrés est décisif pour la réussite du public de REP. Il a motivé la création du cycle 3. Le travail commun s’est développé à la charnière des deux degrés. Les professeurs référents, créés en 2006, ou les maîtres+ dans le premier degré, avaient contribué au développement de ce travail collectif qui assure cohérence et continuité dans le parcours des élèves. Les ressources affectées à l’éducation prioritaire pourraient permettre de poursuivre ces missions. L’investissement dans ce secteur est récent. Un acquis à ne pas laisser perdre.
L’évolution récente, depuis la rentrée 2017, pose une question à laquelle l’enquête ne permet pas de répondre : certes les CP et CE 1 ont été dédoublés dans le périmètre de l’éducation prioritaire, mais ce dédoublement est-il pour autant un dispositif de l’éducation prioritaire que les instances et les pilotes du réseau pourraient intégrer au projet de réseau ? En particulier, peuvent-ils y développer un travail collectif ?

Verticalité et injonctions : y-a-t-il une contradiction entre demander un pilotage, à tous les niveaux, et se plaindre de la verticalité ? N’est-ce pas la fable des grenouilles qui demandaient un roi ? Est-ce la légitimité des injonctions ministérielles qui est en cause ? Le fait qu’il n’y ait pas eu d’évaluation de la mise en œuvre de la refondation, de son référentiel, des PDMQDC ? Quelle est la légitimité du contenu des évaluations en début et en cours de CP, des références aux neurosciences non partagées par la communauté scientifique ? L’oubli de la légitimité que confère aux acteurs de terrain leur engagement dans des pratiques collaboratives qui méritent d’être évaluées ?
Comment redéfinir le pilotage pour qu’il prenne en compte les besoins du terrain ? Tous les pilotes de réseau devraient savoir susciter et faire vivre une concertation entre les acteurs de terrain, reconnaître et appuyer la qualité des initiatives prises par des équipes d’enseignants. Pour que le pilotage national et académique ne soit pas seulement « vertical » et ne se traduise pas en « injonctions », les pilotes de réseau devraient aussi pouvoir faire reconnaître la qualité du travail de ces collectifs.
Le profil des personnels et plus particulièrement de l’encadrement : Le choix et la formation comme pilotes d’éducation prioritaire de l’IEN et du Principal sont décisifs. Aucun ne devrait se retrouver par hasard en éducation prioritaire. L’instabilité des pilotes est une des plaies de l’éducation prioritaire. Elle est le signe d’une absence de pilotage académique. Ces pilotes ont aussi besoin d’un accompagnement, car le pilotage d’un réseau est une fonction récente, étrangère à la culture professionnelle dominante dans le système éducatif.

Certes, l’enquête montre le chemin parcouru par rapport aux relances de 1998 et de 2006, ou au lancement de la refondation, elle montre aussi tout le chemin à parcourir par les pilotes de tous niveaux.

Exemple de ce qui se fait dans un réseau engagé de longue date dans un travail collectif

Quelques réseaux engagés de longue date dans ce travail commun donnent une idée de ce qu’il est possible d’y réussir avec la formation de collectifs professionnels : les actions communes à tous les niveaux sur des objectifs pédagogiques, la fréquence des observations croisées, les co-interventions, l’évaluation par compétences généralisée à l’ensemble du réseau etc.
Par exemple, dans un REP+, dont on mesure la réussite aussi bien par le fait qu’il est attractif (il recrute hors secteur) que par des échanges avec des personnels de ce réseau. Il est intéressant de lire l’ensemble de la réponse reçue à l’enquête :
Q 0-1 : Pouvez-vous décrire brièvement les initiatives, actions ou projets les plus significatifs qui vous semblent avoir contribué à améliorer la situation dans votre réseau / école / collège ?
Culture commune prégnante, geste pro, rituels communs
Coopération entre élèves - Explicitation des attendus - Collège sans notes de la 6ème à la 3ème. Travail par compétences. Équipe stable dynamique engagée
Q 0-1bis : Précisez sur quels éléments vous vous fondez pour estimer qu’ils ont contribué à une amélioration.
Pas de décrochage scolaire. Indicateurs vie scolaire en progrès. Climat scolaire apaisé.
Q 0-2 : À l’inverse, quels seraient les événements ou éléments de contexte qui vous semblent avoir contribué à une dégradation de la situation dans votre réseau / école / collège ?
Pas de dégradation de la situation du réseau. Changement de 2 pilotes sur 3.
Temps communs 1er et 2nd degré qui nous manquent.
Q 0-3 : Diriez-vous que ce référentiel vous a été utile dans votre réflexion et votre action professionnelle au sein de votre réseau ? En quoi ?
Oui le référentiel est un apport indéniable, les 6 principes avec la focale pédagogique sont utiles et ne se perdent pas dans des écrits inutiles. Référentiel utile dans notre action professionnelle au sein du réseau puisque l’on a construit notre projet à partir de lui.
Q 0-4 : Quelles sont les priorités et/ou principes qui vous semblent les plus importants pour la réussite des élèves ? Pourquoi ?
Explicitation des attendus, place de l’erreur.
Évaluation bienveillante.
Co intervention et décloisonnement des disciplines, pédagogie de projet.
Tout cela concourt à donner du sens aux apprentissages à nos élèves qui en ont bien besoin.
Q 0-5 : Quels sont ceux qui vous paraissent les plus difficiles à mettre en œuvre ? Pourquoi ?
Coopération avec les parents.
Évaluation. Valorisation du travail et communication.
Q 0-6 : Ce référentiel vous semble-t-il … ?
Par les responsables du réseau : bien connu.
Par les membres du réseau : connu dans ses grandes lignes.
Q 1-1 : Pouvez-vous décrire une évolution positive au regard de l’axe 1 concernant les pratiques de classe et le travail collectif dans votre réseau ?
Développement de l’oral de la maternelle à la 3ème. Place du brouillon (écrire réécrire) et de l’erreur.
Explicitation au cœur des pratiques enseignantes.
Coopération développée entre pairs.
Q 1-2 : Quels sont les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 1 du référentiel qui vous semblent persistants ?
Dimension culturelle et historiques des savoirs dans toutes les disciplines.
Statut du 1er et 2nd degré, pondération différente.
Q 1-3 : Quels sont les leviers qui vous sembleraient efficaces pour améliorer la situation ?
Augmenter encore la co-intervention / la co-présence avec les AED et AP.
Utiliser la pondération pour encore plus de co-intervention.
Q 2-2 : Quels sont les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 2 du référentiel qui vous semblent persistants ?
Temporalité GPDS. Fatigabilité des équipes.
Q 3-1 : Pouvez-vous décrire une évolution positive au regard de l’axe 3 concernant les pratiques de classe et le travail collectif dans votre réseau ?
Collaboration avec les familles : vocable adapté, pas de "convocation" ; remise en mains propres des bulletins, disponibilité des équipes avec divers vecteurs de communication, confiance réciproque jouant sur le climat scolaire.
Collaboration avec les parents.
Q 3-2 : Quels sont les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 3 du référentiel qui vous semblent persistants ?
Formation des enseignants à la communication avec les parents (pour certains).
Locaux ne permettant pas un espace dédié aux parents.
Pas de formation des parents sur le rôle des instances, manque d’implication des parents, liste des parents aux élections.
Q 3-3 : Quels sont les leviers qui vous sembleraient efficaces pour améliorer la situation
Collaboration avec les parents : avoir un espace dédié et réussir à les impliquer notamment pour les élections des représentants, les rassurer.
Q 4-1 : Depuis la refondation de l’éducation prioritaire, le travail collectif s’est-il développé ?
Oui
Q 4-2 : Si oui, pour répondre à quels besoins et selon quelles modalités ?
Pour gagner en cohérence et pour faire culture commune. Heure de concertation hebdomadaire, réunion des directrices et coordonnateur hebdomadaire, réunion des référents second degré hebdomadaire ; + selon emploi du temps heure concertation disciplinaire
Q 4-3 : Le travail collectif donne lieu à … ? (8 items proposés et 4 niveaux de réponses)
Oui, régulièrement (à tous les items)
Q 4-4 : Quels obstacles voyez-vous à la mise en place du travail collectif ?
Statut 1er et 2nd degrés pondérations différentes.
Q 5-1 : Quelles sont les réussites que vous constatez dans votre réseau concernant l’accueil et la formation des personnels ?
Accueil : point fort du réseau, disponibilités des directrices et équipe de direction pour tous les nouveaux arrivants (AED, AP, enseignants...). Sourire, bienveillance !
Q 5-2 : Dans votre réseau, une élaboration collective permet-elle de dégager les priorités de formations ?
Entre les pilotes et le coordonnateur et/ou formateur Éducation Prioritaire (FEP).
Q 5-4 : Dans votre réseau, pouvez-vous décrire une formation qui vous a semblé répondre aux besoins des professionnels et des élèves ?
Écrire réécrire au cycle 3. La numératie. Apport des neurosciences sur les apprentissages.
Q 6-1 : Comment le projet de réseau est-il actuellement piloté ? Qui, instances ?
Qui : 3 copilotes + coordonnateur + CPE référent + CPC et référents second degré.
instances : COPIL et dans une moindre mesure conseil pédagogique et conseil école. Réunion directrice avec coordonnateur.
Modalités : groupe de travail des référents / groupe de travail des enseignants.
Q 6-2 : Sur quels échanges, observations, données professionnelles le pilotage s’appuie-t-il pour faire évoluer le projet de réseau ?
Données socioéconomiques SIG + données P.R.E. diagnostic environnemental.
Travail recherche (Bonnery, Boismare, Goigoux et Cèbe, Bernardin, Connac..., GRD académique.)
Résultats académiques. Diagnostic scolaire, éducatif et sanitaire.
Radar de performance.
Q 6-3 : Quelle perception avez-vous de l’articulation entre les différents niveaux de pilotage (local, départemental, académique, national) ?
Difficile... Pilotage national ???

 

 

ELEMENT 9

TROISIEME PARTIE. LES REPONSES AUX AUTRES QUESTIONS

QUESTIONS 0 : CONTEXTE SCOLAIRE ET CONNAISSANCE DU REFERENTIEL

Q 0.1 Pouvez-vous décrire brièvement les initiatives, actions ou projets les plus significatifs qui vous semblent avoir contribué à améliorer la situation dans votre réseau / école / collège ?
Q 0.1 bis Précisez sur quels éléments vous vous fondez pour estimer qu’ils ont contribué à une amélioration.
Q 0.2 A l’inverse, quels seraient les événements ou éléments de contexte qui vous semblent avoir contribué à une dégradation de la situation dans votre réseau / école / collège ?
Q 0.2 bis Précisez sur quels éléments vous vous fondez pour estimer qu’ils ont contribué à cette dégradation.

Connaissance du référentiel
Q 0.3 Diriez-vous que ce référentiel vous a été utile dans votre réflexion et votre action professionnelle au sein de votre réseau ? En quoi ?
Q 0.4 Quelles sont les priorités et/ou principes qui vous semblent les plus importants pour la réussite des élèves ? Pourquoi ?
Q 0.5 Quels sont ceux qui vous paraissent les plus difficiles à mettre en œuvre ? Pourquoi ?
Q 0.6 Ce référentiel vous semble-t-il bien connu / connu dans ses grandes lignes / peu connu / inconnu / je ne peux pas répondre // par les responsables de votre réseau / par les enseignants de votre réseau ?

Les quatre premières questions sont particulièrement ouvertes et portent sur l’appréciation par les acteurs de ce qui améliore ou dégrade la situation dans le réseau. Elles sont formulées pour induire le moins possible le sens des réponses. On peut donc considérer que les mots utilisés par les répondants représentent bien les catégories de l’analyse à l’œuvre qui constituent le « fond de leur pensée ». A ce titre, on peut considérer que l’usage des mots choisis est significatif de leur conception et en même temps en délimite le champ. Il faut toutefois faire attention aux mots repris à partir de la formulation de la question : « initiatives, actions, projets » qui sont beaucoup plus souvent utilisés dans les réponses à la première question que dans toutes les autres réponses. Du fait qu’ils sont induits par la question, ils ne peuvent donner lieu à une analyse.

1. Évolution du contexte d’enseignement

1.1 Amélioration de la situation

Un marqueur intéressant dans les questions 0.1 et 0.1 bis est l’expression « mise en place » qui permet aux répondants de dire quelles « initiatives, actions ou projets » ont contribué à l’amélioration de l’action du réseau perçue et évoquée. On donne ci-dessous la liste de ce que l’on trouve après ces mots en réponse à la question 0.1 (chaque ligne est une citation d’un répondant). Il s’agit donc de la « mise en place » :
 d’une politique d’orientation choisie et éclairée (progression des taux de passage en seconde générale et en première générale et technologique) ;
 d’un accueil matinal (petit déjeuner) au collège depuis 3 ans ;
 d’un tutorat individualisé pour les élèves multirécidivistes de problèmes disciplinaires, travail du module relais ;
 d’un COPIL directeurs des écoles 1er degré régulièrement réuni par le coordonnateur et l’IEN ;
 des parcours éducatifs ;
 de deux journées thématiques (Art et Science) ;
 de COPIL non descendants c’est à dire au cours duquel tout le monde peut s’exprimer et faire part de son avis et de ses propositions ;
 de projets inter degrés impliquant un très grand nombre de professeurs (dans tous les cycles) durant un temps long ;
 de visites croisées au sein du réseau afin de mutualiser les pratiques du premier et du second degré ;
 d’une évaluation commune à tous les CM2 entrants soit 11 communes permettant ainsi un travail spécifique au sein du REP ;
 d’espaces parents ;
 de débats réglés entre élèves aux premier et second degrés, d’amélioration du cadre scolaire (décoration des locaux) ;
 de la médiation par les pairs (volonté commune à tous les acteurs du réseau) ;
 des outils en commun : cahier - outils, manuels, des parcours ;
 d’école ouverte ;
 de rencontres formelles avec toutes les familles au moins deux fois par an ;
 des projets ambitieux avec pour chacun un axe privilégié autour du vivre ensemble, par exemple, des projets artistiques réunissant plusieurs classes permettant la rencontre des élèves avec des artistes ;
 d’une République scolaire organisée autour d’une Assemblée et de son président ;
 d’un dispositif d’accueil des moins de trois ans, de cafés des parents ;
 du maître sup qui va disparaître ;
 de la formation des parents délégués, du café des parents ;
 d’un accueil de tous les élèves dans les classes ;
 d’actions de remédiation communes ;
 des maîtres supplémentaires dans les écoles du premier degré ;
 des projets et leur suivi dans le temps ;
 du projet ” ” Prise en charge de la dyslexie au Cycle 3 ” ” initié par l’école primaire (CM1 / CM2), qui a été prolongée au collège avec une action de formation des enseignants du premier degré, responsables du projet, vers les professeurs de Français pour se poursuivre vers le cycle 4 ;
 de l’USEP au sein de l’école ; fédération des enseignants de l’élémentaire ;
 des cafés parents mensuels, atelier philosophie pour les parents ;
 d’un projet qui répond au plus près aux besoins des élèves par le co enseignement ;
 d’aides négociées et de réunions de concertation pour échanger des pratiques et intégrer les nouveaux enseignants ;
 d’un tutorat ou d’atelier pour raccrocher à la scolarité les élèves décrocheurs (dispositif DEMAR)
 de projets autour de la violence à l’école, du cartable des compétences sociales, d’événements sportifs ” ;
 des dispositifs moins de 3 ans ;
 de programmations inter degrés, de la meilleure connaissance des enseignants de l’autre degré qui facilite la communication ;
 d’une évaluation positive ;
 de projets impliquant les familles ;
 d’outils et dispositifs pédagogiques communs dans différentes écoles du réseau qui permettent une meilleure analyse des effets, des freins et des leviers ;
 de petits groupes de besoin pour agir au plus près des compétences des élèves et ainsi faire progresser tout le monde sans jamais léser personne : élèves en grande difficulté ou élève avec un bon niveau scolaire ;
 d’espaces collaboratifs de travail commun, comme le groupe de prévention et de suivi de la délinquance, les formations inter – degrés.

Si l’on recherche plus avant sur quoi portent les « initiatives, actions et projets » proposés parce que permettant des améliorations, il est intéressant de voir quels sont les mots davantage utilisés pour répondre à cette question que pour les réponses aux autres questions. On peut alors mettre en évidence les perspectives suivantes :
 Le travail sur les liaisons école-collège avec une importance particulière accordée à la liaison CM2 sixième. Plus largement la question des cycles. Sont en particulier évoqués des « rencontres », des « défis », des « cross », des « rallyes », des « fêtes ».
 Le cours préparatoire avec la question particulière de l’enseignement de la lecture (les « contes » sont signalés) et des « maths » ou « mathématiques ». La relation avec la grande section est considérée. L’anglais, la science, la maternelle et la musique sont signalés.
 On voit apparaître également très significativement le préfixe « co » qui s’inscrit dans les mots « co-enseignement », « co-intervention », « co-construction », « co-animation » et « co-éducation ».

Ce qui frappe, quand on lit la liste des « mises en place » et les mots les plus spécifiques à cette question, c’est la très grande hétérogénéité qui y préside. On confirme ainsi qu’il en est en éducation prioritaire comme ailleurs : c’est localement que se constituent des actions adaptées à la fois aux besoins et ressources du réseau. Par ailleurs on constate une fois de plus que l’on peine à rentrer dans le cœur de la classe et à travailler sur les apprentissages des élèves et sur les pratiques enseignantes quotidiennes qui permettent de faire évoluer les résultats obtenus.

Il est clair que le réel local n’est pas directement en phase avec l’orientation de la refondation sur cet accent à mettre sur les pratiques d’enseignement au cœur de la classe. Cela plaide clairement, s’il en est encore besoin, pour une politique éducative qui responsabilise les équipes locales et les soutient et outille par la formation et le travail collectif. Cela plaide également clairement pour une politique publique qui donne encore davantage de place à la question des pratiques au plan local en s’appuyant plus nettement encore sur les besoins professionnels des équipes.

La question suivante (0.1 bis) demande aux intéressés de préciser sur quels éléments ils se fondent pour estimer l’amélioration évoquée. On peut utiliser deux marqueurs pour mettre en évidence ce qui évolue positivement : les mots « amélioration » et l’adjectif « meilleur » dans ses différentes formes. Voici les items sur lesquels une « amélioration » est pointée dans les réponses à cette question (on retrouve quelques éléments comparables dans les autres questions). On y voit sur quels indicateurs les professionnels se fondent pour estimer l’amélioration (chaque ligne correspond à un répondant) :
 du climat scolaire ;
 radicale du climat scolaire, ainsi que des résultats trimestriels et au DNB des élèves ; - des compétences linguistiques des élèves ; support de communication du réseau envers les familles ; - des échanges entre enseignants ;
 du climat scolaire (écoles et EPLE) ;
 sensible des résultats (taux de réussite au DNB) ; - du climat scolaire ;
 des acquis par les élèves ;
 du climat scolaire, une baisse significative des incidents ;
 des compétences en lecture des élèves qui ont participé au Coup de Pouce Clé ;
 du niveau des élèves dans les domaines travaillés (langage, écrit, problèmes), des capacités méthodologiques des élèves ;
 du langage et du vivre ensemble
 du climat scolaire ;
 des résultats ;
 des résultats de ma classe en lecture et en mathématiques au fil des années, à mesure que j’investissais ces méthodes (diminution du nombre d’élèves petits ou non lecteurs / diminution voire disparition du nombre d’élèves ” perdus ” dans les apprentissages) et à mesure que je recevais une formation de qualité ; - du niveau de lecture ;
 du rapport aux mathématiques (motivation des élèves) ; - de la compréhension, réinvestissement en lecture à voix haute ;
 de la relation avec les parents ;
 du climat scolaire : diminution du nombre de conflits ;
 des résultats des élèves, baisse de l’absentéisme ; - des situations d’apprentissages ;
 du climat scolaire ;
 des connaissances sur les dangers domestiques (des écrans …) et des différentes structures de quartier (centre social, travailleur social, PMI, CMP, CMPP, associations diverses …), développement dans le quartier de la culture artistique, connaissance des diverses activités et projets de l’équipe pédagogique au service des enfants ;
 des résultats aux items de lecture aux évaluations nationales et internes ;
 des acquisitions par une plus grande disponibilité pour les temps de manipulation, de différenciation et de remédiation en CP ;
 des résultats en lecture, une plus grande pratique de la manipulation en mathématiques qui contribue à l’amélioration des résultats ; - du climat général de l’école ;
 des liaisons, acceptation des accompagnements, relations plus sereines avec les parents.

Il ne faut toutefois pas manquer d’indiquer que quelques personnes précisent en réponse à cette question qu’elles ne peuvent donner d’indications à cet égard du fait soit qu’il n’y a pas eu d’amélioration, soit qu’il n’y a pas d’indicateurs permettant de le dire :
  comme dit précédemment pas de projet donc pas d’amélioration ;
  le travail en réseau d’éducation prioritaire est trop lointain pour des collègues de cycle 1 et 2.
  je ne vois pas d’amélioration. J’ai 13 ans d’expérience ;
  nous n’avons pas encore d’indicateurs nous permettant d’observer une amélioration des résultats des évaluations (je suis dans l’établissement depuis un an et demi) ;
  nous n’avons fait que nous gêner mutuellement pendant cette année scolaire ne donnant aucune amélioration des résultats des élèves par rapport aux années précédentes voire même une dégradation. Un dispositif pareil se doit d’être évalué au niveau des besoins en enseignants ce qui n’a pas été fait et par conséquent, nos supérieurs hiérarchiques se sont aperçus à la rentrée qu’il n’y avait pas assez d’enseignants sur l’académie pour assurer le dispositif.

Il reste intéressant de voir que, là où il y a des améliorations (ce qui est largement majoritaire), les principales données évoquées pour justifier des résultats en situation d’amélioration sont :
  les résultats des élèves (amélioration, résultats, évaluations, progrès, acquis, compétences, connaissances) ;
  le climat scolaire (conflits, incidents, vivre ensemble) ; des pratiques (liaisons, situations d’apprentissage, relation avec les parents, échanges entre enseignants).

On peut remarquer que la notion de « climat scolaire » a pris une grande importance dans les raisonnements et explications des professionnels. On peut noter également que la question des moyens ne semble pas concernée par les améliorations qui sont attribuées principalement aux dispositifs et pratiques mis en œuvre.

1.2 Dégradation de la situation

Avec les questions 0.2 et 0.2 bis, lorsque l’on demande aux acteurs de l’éducation prioritaire ce qui selon eux a contribué à la dégradation de la situation de leur réseau, à part le mot « dégradation » repris de la question (21 occurrences), les mots pour le dire sont principalement « manque » (87), « augmentation » (32), « absence » (20), « changement » (18), « disparition » (9), « suppression » (9). Là où il y a des difficultés ainsi repérées on peut les rassembler en fonction du mot concerné.

Quand « dégradation » est utilisé, c’est d’abord pour dire qu’il n’y en a pas (6 cas). Dans 6 cas il est fait état de pertes de moyens ou de « dégradation des conditions de travail ». Dans 6 cas il est fait état de problèmes sociaux (paupérisation notamment) qui s’aggravent. Dans 3 cas il est fait état de la question de moyens et comme il y a parfois plusieurs causes données à un même constat, sont également évoqués plus ponctuellement le manque de reconnaissance du métier, la situation du comportement des élèves, le turnover des personnels, la fermeture d’un collège.

Là où il y a « manque », il s’agit d’abord du manque qualifié de « flagrant » de « remplacements » mais aussi du manque de « temps » notamment pour la formation et la concertation. On a vu que les réponses à d’autres questions permettent de confirmer cette attente importante des acteurs de l’éducation prioritaire et que cela conforte clairement l’accroissement de l’importance du travail collectif dans les pratiques mises en œuvre et considérées comme souhaitables.

Puis viennent le manque de « personnel » ou de « postes » ou de « moyens » et notamment « d’AVS ». Est aussi évoqué le manque de « formation » (notamment par manque de remplaçants) et de « soutien » (notamment de la hiérarchie en cas de difficulté). Les répondants sont aussi préoccupés par les élèves dont des manques sont indiqués : « règles », « concentration », « motivation ».

Là où il y a « augmentation », on donne les réponses détaillées afin que chacun puisse se faire précisément une idée ; il s’agit d’augmentation :
 du nombre d’effectifs élèves et enseignants dans l’école primaire ;
 des EANA (Élèves allophones nouveaux arrivants) ;
 des situations d’élèves en difficulté ;
 des difficultés sociales ;
 de la capacité d’accueil ;
 du nombre d’élèves et d’enseignants ;
 du nombre d’élèves dans les classes de cycle 3 ;
 du nombre d’élèves en difficulté profonde, que ce soit d’ordre purement scolaire ou social ou comportemental, induisant des prises en charge de plus en plus lourdes ;
 des effectifs du CE2 au CM2 et des cours doubles qui rendent difficiles la continuité des projets avec le collège, ainsi que la prise en charge de tous les élèves (27 élèves en CE2 et CM1, 28 élèves en CM2) ;
 des effectifs dans certains niveaux ce qui nuit à une bonne prise en compte des besoins de chacun ;
 du nombre d’élèves et de la réduction d’effectifs des personnels ainsi que de la précarisation du métier (contractuels non formés, professeurs sur plusieurs établissements …) qui participent à la détérioration du climat scolaire ;
 des effectifs ces dernières années, « mais toujours 1,5 postes de CPE pour un collège de presque 700 élèves en REP » ;
 du nombre d’élèves dans les classes et d’un nombre trop important d’élèves aux parcours aménagés (ULIS / UPE2A, en particulier Non Scolarisés Antérieurement / SEGPA) par rapport au nombre d’élèves du parcours classique ;
 énorme / exponentielle augmentation de réalisation de tâches et de la multiplicité des partenaires ;
 du nombre d’élèves par classe, seuil des 25 élèves systématiquement dépassé en dehors du dispositif ;
 du nombre d’enfants souffrant de handicap ;
 des demandes de la hiérarchie ;
 du temps passé dans les familles devant les écrans ;
 de la charge de travail des directeurs d’école ;
 du nombre de familles bénéficiant des fonds sociaux ;
 du retard scolaire à l’entrée en 6ème ;
 de la violence ;
 des plaintes des élèves sur le climat pendant la longue pause méridienne ;
 du nombre d’élèves en difficulté ;
 du nombre d’équipes éducatives et de rendez- vous avec les parents ;
 des conflits impliquant des adultes (parents entre eux ou parents avec enseignants) en lien avec des problèmes au départ extérieurs à l’établissement ;
 des jeux de bagarre « alors qu’il y a 4 ans, aucun souci de cet ordre » ;
 des incidents divers et variés ;
 du nombre d’Informations préoccupantes ou de signalements au procureur ;
 d’accidents dans les écoles concernées ;
 des places en SEGPA, d’ouvertures d’ULIS, de formations pour les dyslexies ;
 des élèves à profils particuliers.

On trouve aussi derrière le mot « absence » une série de remarques qui rejoignent celles que l’on perçoit avec les propositions déjà analysées ; une absence :
 de temps de rencontre pour partager les analyses des résultats du réseau : trop peu de temps institué ;
 le temps des enseignants du premier degré qui n’est pas assez identifié et qui entraîne une forte absence lors des instances ou des formations ;
 de professionnels de la santé sur le territoire ;
 d’enseignants formés et expérimentés ;
 de l’accès à Internet dans les classes qui limite aussi l’ergonomie des enseignements ;
 « d’engagement des IEN de la circonscription dans le pilotage du réseau depuis maintenant deux ans pour des raisons diverses, ce qui laisse les équipes se débrouiller, sans programmation des conseils école / collège ; heureusement que nous ne les avons pas attendus pour travailler ensemble » ;
 de formation à la direction en REP ;
 …

Quand il est question de « changement » c’est surtout pour regretter, d’une part les changements fréquents des personnels et notamment de l’encadrement, d’autre part pour déplorer les changements de directives. Là où il est évoqué des « suppressions » ou « disparitions », c’est principalement pour regretter les maîtres supplémentaires.

Au total, si l’évolution de la situation sociale du quartier du réseau est relativement peu évoquée, celle d’un accroissement de la difficulté rencontrée avec des élèves est présente soit par le constat de l’augmentation du nombre d’élèves reconnus en situation de handicap ou d’allophones arrivants, soit par l’augmentation des problématiques comportementales tant du côté des enfants que des adultes.

Mais les problèmes évoqués par les répondants sont surtout identifiés du côté de l’institution qui ne parvient pas à réaliser ce que pourtant elle porte : la formation (dont l’existence est reconnue mais dont la qualité est discutée), le remplacement (dont la difficulté à des incidences sur la formation), le nombre d’élèves par classe en dehors des classes dédoublées, le travail d’équipe qui reste difficile faute de conceptions adaptées de l’encadrement et le turnover des personnels qui a des incidences négatives sur la continuité de l’action. Des demandes en direction des collectivités se font jour également en ce qui concerne des moyens financiers, des transports, des matériels.

Là encore la grande hétérogénéité des réponses montre l’importance des choix locaux, de la qualité des pilotages, de l’effectivité de pratiques collectives et de la façon dont ils sont perçus par les répondants.

2. Connaissance du référentiel

2.1 Connaissance déclarée (Q 0.3 – 0.4 – 0.5)

• Utilité du référentiel - les réponses positives

Sur les 268 répondants, 26 n’ont pas renseigné la question Q 0.3 (soit 10 %). Les réponses positives (le référentiel est « utile » ou « plus ou moins utile »), qui représentent 74 % des réponses exprimées, utilisent très souvent les mêmes termes. Les commentaires expliquant en quoi le référentiel est utile peuvent être regroupés en cinq catégories.

La réponse le plus souvent proposée fait référence au projet de réseau (dans les citations qui suivent, certaines identités professionnelles sont mentionnées, d’autres pas ; les répondants n’étaient pas tenus de la renseigner) :
  projet de réseau établi en fonction du référentiel ;
  le référentiel a été un outil de réflexion. Il a surtout été pris en compte lors des premières années de sa mise en place. Le projet de réseau a été écrit au regard du référentiel.

Du coup, le référentiel est associé au pilotage du réseau :
  support essentiel au pilotage (personnel de direction) ;
  la directrice s’est appuyée sur le référentiel pour mener les différentes réunions de l’équipe éducative (P.E) ;
  c’est un document sur lequel le comité de pilotage s’appuie en permanence. Il donne de la cohérence à toutes nos actions (CPC).

Mais le référentiel est utile au quotidien, il est le ciment du collectif, soutient la réflexion et donne de la cohérence aux actions :
  référence commune ;
  oui, il est commun à tous ;
  c’est une référence pour construire les actions du réseau et établir des priorités ;
  il cible des objets de travail commun, des leviers d’action ;
  c’est un cadre sérieux et clair. Heureusement qu’il existe. C’est une référence (IEN) ;
  très utile, véritable cadre de travail, ce référentiel est précis, précieux, et permet de toujours rester dans le cadre qu’il fixe. C’est un outil clair, précis, efficace pour harmoniser les pratiques de la maternelle au cycle 4 ;
  oui pour la concertation entre enseignants ;
  outil indispensable qui permet d’avoir une langue commune, de ne pas parler seulement d’actions, qui est pertinent au regard des items, des problématiques qui participent à la réalité du terrain.

Le référentiel est un outil de régulation :
  il est important de le connaître pour lier toutes les actions entreprises par l’équipe enseignante et s’efforcer d’entreprendre sur les axes moins travaillés ;
  oui, un guide à quoi se référer … cela permet de s’auto réguler.

Il est également un outil de formation :
  il donne un fil conducteur des éléments à favoriser pour la réussite des élèves et donne des repères communs. Il est très utile pour l’accueil des nouveaux collègues qui n’auraient jamais enseigné en REP (Directrice) ;
  oui, cela m’a permis d’évoluer dans mes pratiques pédagogiques. Il a permis aussi au réseau d’avoir une unité pédagogique (enseignant premier degré) ;
  nous avons été initiateurs de ce référentiel, il était censé valider nos pratiques et rassembler les partis pris pédagogiques et les méthodes efficientes. Il a donc surtout été utile aux nouveaux arrivants en REP (Directrice, premier degré, autre) ;
  à titre personnel, oui. Car je suis arrivé sur mon poste sans jamais avoir préalablement travaillé en éducation prioritaire. Collectivement, il est une boussole, notamment parce que les pilotes du réseau s’y réfèrent dans la plupart de leurs actions de formation et de communication envers les personnels. » (Personnel de direction) ;
  il a permis de préciser le cadre que l’on intègre quand on arrive en REP (P.E).

Trois réponses développées rendent compte de la teneur générale de l’ensemble des réponses :
  Un référentiel très clair qui a permis de poser un cadre lors de l’élaboration du projet de réseau et qui a permis de dénouer les incompréhensions face aux obstacles rencontrés par les élèves. Il a aussi permis d’impulser des mises en réflexion collectives et des échanges plus fréquents et plus nourris sur les pratiques de classe dans le but de conforter certaines pratiques ou de remettre en question certaines autres dans un souci de continuité. (CPC + enseignant premier degré)
  Oui, très utile ! Un document précieux à conserver. Une feuille de route, un repère constant pour ne pas se perdre et éviter de refaire les erreurs du passé : faire des projets dans tous les sens qui traiteraient de sujets non spécifiques et importants pour les élèves de l’éducation prioritaire. Feuille de route essentielle pour le pilotage. Sa légitimité (car issu des IG, profs et recherche) a été l’un des facteurs importants pour sa prise en compte. (Coordonnateur)
  Oui, le référentiel a constitué un cadre de travail très utile. Il a permis de doter les enseignants et les pilotes des mêmes références didactiques et pédagogiques et a permis que les actions ne se délitent pas dans tous les sens. Il constitue en ce sens un outil permettant de développer une culture professionnelle (outil de diagnostic, boussole pour le travail à mener, bilan plus objectif. (Coordonnateur)

• Que révèlent les jugements négatifs ?

26 % des répondants ont jugé de façon négative l’utilité du référentiel, ce qui pourrait être très alertant si on n’analysait pas de plus près ces réponses. Elles révèlent en effet un grave problème de formation qui implique tous les acteurs, dont les enseignants eux-mêmes, et un manquement des cadres dans la transmission.

Combien de répondants disent pourquoi le référentiel est inutile ? Quatre très exactement. Pour deux d’entre eux, il ne répond pas à leurs attentes :
  Non pas vraiment car il enfonce des portes ouvertes et n’énonce que des principes généraux. De plus il ne nous donne pas de clés pour y parvenir ni vraiment de moyens (ex : comment fait-on pour travailler avec les acteurs sociaux alors que rien n’est institutionnalisé (fréquence et plannings des réunions, membres y participant, teneur des dispositifs à mettre en place) ? (Directrice)
  Sans commentaire, on veut du pratique. (Directrice)
Un troisième répond :
  Non, il n’y a pas de travail en équipe et encore moins de réseau mis en place où je travaille.
De fait, s’il n’y a pas de collectif de travail, le référentiel devient inutile. On peut ajouter à ces trois réponses négatives une quatrième, même si elle dit elle-même qu’elle reste dans le registre de la supposition :
  Non, car je n’en avais pas connaissance avant aujourd’hui. Après l’avoir rapidement survolé, je peux supposer qu’il ne me sera pas utile : soit qu’il énonce des évidences, soit qu’il énonce des principes impossibles à mettre en place sur le terrain. (Enseignante collège)

On relève 21 autres réponses, non explicitées (« Non », « Aucunement », « Pas du tout »). Ce sont donc au total 25 répondants (soit 12 % des réponses exprimées) qui jugent le référentiel inutile.

Que révèlent donc les 15 % d’autres réponses négatives ? Le « non » révèle d’abord le fait que le référentiel n’est pas connu : 10 répondants (4 %) accompagnent leur réponse d’un commentaire du genre « non, parce que je ne le connais pas », « parce qu’il n’est pas connu », « nous n’en avions pas connaissance », « parce qu’il est très peu connu des enseignants », ou encore sous une forme lapidaire « pas lu, pas vu ». Forcément, le référentiel ne peut pas être utile à ceux qui ne le connaissent pas.

Deux autres réponses ne permettent pas une analyse aussi tranchée, le référentiel n’étant pas utilisé sans qu’on puisse affirmer qu’il n’est pas connu : « je ne m’y suis jamais référé » et « je n’ai pas lu le référentiel ».

Cette réponse, « je n’ai pas lu le référentiel », révèle de façon explicite que des acteurs du premier degré, dont des directeurs / directrices, et du second degré ont connu le référentiel grâce à l’enquête de l’OZP. Outre les cinq répondants qui signalent que le lien indiqué dans le questionnaire ne fonctionne pas (cette réponse commentée vaut d’être citée : « Page indisponible quand je clique sur ce lien. En effet cela confirme que je ne l’ai pas lu précédemment. »), six réponses indiquent clairement que l’enquête fait découvrir le référentiel :
  non, je n’ai appris son existence qu’au cours de cette année scolaire (Premier degré) ;
  aucunement, je n’en avais pas connaissance avant ce jour ;
  je n’ai pas lu le référentiel, je l’ai découvert avec cette question (Second degré) ;
  inutile car j’en apprends l’existence, cette dernière me m’ayant pas été signalée ;
  il semble que le référentiel ne soit pas un outil très utilisé dans ce réseau. A-t-il été présenté lors de sa sortie ? Est-il un document d’appui ? Je ne le pense pas même si nous l’avons envoyé à toutes les écoles en novembre 2018 lorsque nous avons fait ce constat.
Il est sans aucun doute davantage utilisé en REP + (plus de temps pour s’en imprégner en équipe) (IEN) ;
  je suis arrivée dans le réseau après 2014, je n’ai pas eu le référentiel. Cependant j’ai pris les projets en cours au sein du réseau dans lequel j’étais.

Se pose ainsi la question de l’accueil des nouveaux entrants dans un REP ou REP+ : comment expliquer qu’un acteur d’une école ou d’un collège d’éducation prioritaire ne soit pas informé, lors de sa prise de fonction, de l’existence du référentiel, et de son sens ? Que font les cadres (personnel de direction, IEN, CPC ?), que font les pairs dans ces quelques cas heureusement minoritaires ?

Les réponses négatives témoignent également d’une incompréhension sur la nature du référentiel : pour trois d’entre elles, le référentiel est utile aux pilotes du réseau seulement :
  non, le projet de réseau est fait par l’IEN et le proviseur (sic) du collège, les P.E. ne sont pas conviés à l’élaboration. Il appartenait aux écoles de faire coller leur projet d’école avec celui du réseau (Premier degré) ;
  orientations imposées et déclinées ;
  peu utile car pas expliqué aux enseignants.
On peut mettre en regard de ces réponses deux autres traduisant la même incompréhension du public destinataire du référentiel, même si ces deux réponses sont, elles, positives :
  j’ai connu ce référentiel très récemment. Il a eu une influence sur les formateurs et leurs offres de formation. Le référentiel est sinon très intéressant ;
  à titre personnel, en tant que professeure je n’ai pas eu connaissance de ce texte. Après lecture, il semble que ces propositions soient appliquées par mon principal.

Pour cinq autres, et c’est encore plus regrettable sans doute, l’existence du référentiel est connue, mais il est assimilé à un ensemble de documents qu’on n’a pas le temps de lire ou dans lequel on se perd :
  pas de temps pour le lire (Directrice) ;
  non car nous n’avons pas eu le temps de le lire. Nous étions trop occupés à faire face aux besoins immédiats de nos classes et nous avons dû faire face aussi à des informations contradictoires de notre équipe de circonscription qui nous a avoué ne pas savoir ce qu’on attendait de ce dispositif (P.E) ;
  je n’ai pas le temps de lire ce type de documentation, je suis directrice ET enseignante de trois niveaux en maternelle et je dois constamment être disponible pour ma classe puisque je n’ai plus de secrétaire...
  en tant que nouveau directeur cette année, je n’ai pas eu le temps de prendre connaissance de ce référentiel.
  trop de référentiels ! Livre orange, évaluations … trop de projets (académique, de REP, d’école …) difficile de ne pas se perdre dans toutes ces réflexions.

Alors que le référentiel semble à la grande majorité des répondants (74 %) être justement ce qui aide, guide, permet de savoir où on en est, permet la réflexion collective, on constate que des répondants se privent d’un outil fait pour eux.

Certes, cinq répondants qui s’en privent eux-mêmes et trois autres qui pensent le référentiel réservé à l’usage des pilotes pour rédiger le projet de réseau, c’est peu au final (4 %). Mais ce chiffre suffit à s’interroger non seulement sur l’accueil des nouveaux entrants mais également sur la formation initiale : la dernière citation, qui exprime le désarroi devant la somme des documents à lire, traduit probablement le flou dans lequel les nouveaux enseignants se trouvent si on ne les aide pas à la fois à hiérarchiser la nature des documents à disposition (essais didactiques et pédagogiques, textes réglementaires, manuels scolaires, ressources ministérielles ou associatives, articles de presse professionnelles, etc.) et l’urgence dans laquelle ils se trouvent. Pour illustrer cette urgence, un témoignage déjà cité et un deuxième, d’une identité professionnelle différente, témoignages positifs ceux-là :
  À titre personnel, oui. Car je suis arrivé sur mon poste sans jamais avoir préalablement travaillé en éducation prioritaire. Collectivement, il est une boussole, notamment parce que les pilotes du réseau s’y réfèrent dans la plupart de leurs actions de formation et de communication envers les personnels. (Personnel de direction)
  Il a permis de préciser le cadre que l’on intègre quand on arrive en REP. (P.E)

Globalement, c’est la question de la formation continue qui est posée : certes, former coûte cher, en moyens financiers comme en moyens humains, mais comment penser améliorer la situation de l’éducation prioritaire si le ministère ne se donne pas les moyens de faire connaître à tous les acteurs les outils de leur travail ?

• Priorités jugées les plus importantes / les plus difficiles à mettre en œuvre

Un dépouillement mécanique des réponses aux questions Q 0.4 et Q 0.5 est impossible, parce qu’elles prennent des formes variées. Dans bien des réponses, c’est « ce qui est le plus important » qui est exprimé et non spécifiquement la « priorité la plus importante ». Par exemple,
  le cœur du métier, la pédagogie, celle qui innove dont découle la pédagogie différenciée ;
  écoute de chaque enfant dans la diversité de ses difficultés ;
  (en une seule réponse) l’enseignement explicite - La réflexion et les échanges entre élèves sur les procédures et méthodes dans toutes les disciplines. - La réflexion collective et la continuité pédagogique - La co-intervention en classe - La confiance dans la réflexion et les mises en œuvre des équipes - Le suivi dans le temps long des pratiques impulsées lors des formations - L’instauration d’un climat scolaire de qualité.

Il en est de même pour ce qui est le plus difficile à mettre en œuvre, avec parfois un effet d’écho entre les deux questions, par exemple
  le même, pas assez de temps pour le temps de cette écoute.

Ce qui empêche également un relevé mécanique, c’est que les questions 0.4 et 0.5 ne fonctionnent pas, comme dans les questions concernant les autres axes du référentiel, en opposition (quelle amélioration, quel acquis ? versus quelle difficulté persistante, quel obstacle ?) Il faut donc souvent lire en même temps les réponses aux deux questions et comprendre comment elles sont articulées.

Il arrive que la même priorité soit évoquée en réponse aux deux questions en même temps :
  priorité la plus importante, « lire – écrire – parler pour apprendre », priorité la plus difficile à mettre en œuvre, « lire – écrire – parler : développer le lexique »,
  priorité la plus importante, « langage (langue maternelle autre que le français ou pauvre) et Bien-être », la plus difficile à mettre en œuvre, « langage, trop d’élèves par classe ».

Ce phénomène se rencontre pour deux priorités, l’axe 1 comme on le voit ci-dessus et l’axe 3 :
  la plus importante, « favoriser le contact avec les parents », la plus difficile à mettre en œuvre, « coopération avec les partenaires, par manque de temps ».

Dans le détail de ce qui est numériquement repérable à propos des priorités les plus importantes, l’axe 1 est cité le plus souvent (33 fois) soit seul, soit, par ordre décroissant de nombre de mentions, associé à l’axe 2 (bienveillance et exigence), à l’axe 3 (parents – partenaires), à l’axe 5 (formation) ; mais il est également cité en association avec l’axe 2 et 3, avec l’axe 2 et 4, avec l’axe 4 et 5, et même avec les axes 2, 3, 4, 5.

L’axe 2 est cité 20 fois, l’axe 3, 14 fois, l’axe 4, 8 fois, seuls ou associés à d’autres. On note que l’axe 6 n’est pas mentionné, comme l’axe 5 qui ne l’est pratiquement pas.

Dans les priorités les plus difficiles à mettre en œuvre, c’est l’axe 6 (pilotage) qui est mentionné le plus grand nombre de fois, 17 fois, seul ou associé avec d’autres axes (en particulier à l’axe 5, formation). L’axe 3 est mentionné 15 fois, l’axe 5, 11 fois, l’axe 4, 10 fois. Les axes 1 et 2 sont mentionnés marginalement.

La réponse d’un coordonnateur donne une vision synthétique et juste de l’ensemble des réponses :
  Q 0.4 (les plus importantes) « les priorités 1 et 2 sont celles qui sont au plus près de la pratique enseignante et du quotidien de la classe » ;
  Q 0.5 (les plus difficiles à mettre en œuvre) « les priorités 5 et 6 car elles concernent le pilotage du réseau ».

Il est intéressant de noter que l’axe 3 (parents – partenaires) est mentionné à la fois parmi les priorités les plus importantes et parmi les priorités les plus difficiles à mettre en œuvre (cf. analyse des réponses concernant l’axe 3 p. 52).

2.2 Connaissance constatée, appropriation et transmission du référentiel

Le référentiel, comme cela est rappelé dans l’introduction (voir p. 13), n’est pas une circulaire ou un texte de cadrage de l’acte pédagogique parmi d’autres. Il est le fruit d’un long travail d’élaboration croisant les acquis de la recherche, les analyses institutionnelles, et les remontées du terrain. Pour que le référentiel continue à soutenir la réflexion des équipes éducatives, il est nécessaire de faire participer les nouveaux entrants à cette élaboration : il y a l’histoire d’un processus à connaître, il y a de nouveaux apports de la recherche comme de l’expérience du terrain à connaître et à mutualiser, il y a un temps d’appropriation à offrir afin que les équipes se transmettent, en leur sein, cette mémoire et la revivifient en en faisant une lecture critique.

Car il s’agit bien de la « revivifier ». Même si l’analyse des réponses aux questions concernant les six axes du référentiel témoigne d’une très majoritaire connaissance du référentiel, il n’est pas évident qu’il soit connu et compris dans tous ses éléments. Mais on parle d’évaluation en oubliant la réflexion essentielle sur le statut de l’erreur, on oublie une sous-partie entière (travail sur les organisations pédagogiques), on n’interroge pas l’articulation entre les deux notions de bienveillance et d’exigence, or c’est bien la conjonction de la bienveillance et de l’exigence qui est centrale pour favoriser la réussite scolaire. Quant à la priorité 1, la mieux connue sans doute puisqu’elle est la plus ancrée dans le quotidien pédagogique, on ne peut que se réjouir de voir le travail sur l’oral et sur la production écrite prendre une place nouvelle dans la mise en œuvre du « lire – écrire – parler », mais qui relit le référentiel s’aperçoit que pas un répondant n’a évoqué un terme se référant à la phrase « l’organisation des enseignements, principalement dans l’emploi du temps du collège, adapte la durée des séquences aux objectifs pédagogiques », pas un non plus le laisse supposer que cette autre attente est bien inscrite dans la réflexion, « dans les différentes matières, le travail en groupe des élèves est organisé dans des groupes hétérogènes pour favoriser les confrontations des démarches intellectuelles. »

Il n’est pas évident non plus de garder à l’esprit la logique d’ensemble des six priorités, ni la logique interne de chacune. La citation rapportée ci-dessus de ce répondant qui écrit qu’il est arrivé dans le réseau après 2014, que les projets étaient lancés et qu’il les a pris en route sans lire le référentiel est à ce titre révélatrice d’un risque : ne plus considérer que le projet en oubliant la réflexion qui l’a fait émerger. On peut poursuivre d’année en année un projet « contes de tous les pays » et oublier qu’il visait à la fois le « lire – écrire – parler » de la priorité 1, la bienveillance envers l’élève et sa famille en accueillant des cultures étrangères de la priorité 3, ou l’évaluation des réussites de la priorité 2…

Tout acteur arrivant en éducation prioritaire doit pouvoir bénéficier d’un temps réel de formation consacré au référentiel, pour qu’il ne lui apparaisse pas comme un document parmi d’autres, à lire une fois et à ranger ensuite dans sa documentation, mais comme une référence collective qui porte la dynamique du travail quotidien et aide à définir le cap à prendre.

Des assises, comme celles de 2013-2014, pour que les équipes se posent, discutent, s’approprient ou se réapproprient une mémoire collective et actualisent le référentiel de 2014 ? Ce serait idéal. A minima, dans l’accueil des nouveaux collègues, dans la préparation à la prise de fonction en éducation prioritaire, la transmission (et non la simple présentation) du référentiel est une nécessité et un devoir.


QUESTION 7 : LES RÉSULTATS DES ÉLÈVES

Q 7.1 Pouvez-vous caractériser l’évolution des résultats et des parcours des élèves dans votre réseau depuis 2014, au niveau de l’école ou du collège ?
Q 7.2 Si vous évoquez une évolution positive des résultats ou des parcours, quelles en sont les principales raisons selon vous ?
Q 7.3 Si vous évoquez une évolution négative ou nulle, quelles en sont les principales raisons selon vous ?

1. Les évolutions jugées positives ou négatives

1.1 Analyse numérique des réponses

On compte 152 répondants à cette question soit dans 64 % des questionnaires dépouillés.

30 réponses ne permettent pas de construire une analyse :
  1 réponse « Oui », 6 réponses « Non » ou « Je ne sais pas » sans autre indication ;
  5 réponses « Ne peux dire car manque d’information ou de données » ;
  19 réponses (12 % de l’ensemble des réponses exprimées) disent n’avoir pas assez de recul ou d’ancienneté dans le poste ou le réseau pour pouvoir répondre.

Ce sont donc 30 répondants (20 %) qui disent ne pas pouvoir répondre alors que les répondants au questionnaire sont sans doute parmi les acteurs les plus impliqués dans la politique d’EP. Ce constat pose les questions de disponibilité, de circulation, de mise en mémoire des informations et données concernant les résultats et parcours des élèves.

5 répondants regrettent le changement des instruments d’évaluation ou des procédures d’évaluation du DNB, en disant soit que cela les empêche de répondre, soit que cela rend les résultats évoqués insuffisamment fiables.

8 réponses sont hors sujet (ne font pas allusion aux résultats ou parcours des élèves, ni donc à leur évolution).

Restent donc pour cette question un peu plus de 110 réponses que l’on peut donc analyser, réponses qui peuvent être composites (d’où le fait que la somme des effectifs des catégories listées ci-dessous dépasse le total de 110).

1.2 Caractérisation des évolutions

• 61 d’entre eux (plus de 55 %) font état d’une évolution positive (plus un qui évoque des résultats plutôt bons, sans référence à leur évolution). 8 répondants font état de progrès « importants, sensibles, remarquables », d’amélioration « globale, continue », d’évolution « très positive » ; 4 d’entre eux les attribuent dès cette question aux classes dédoublées, un cinquième en attend une amélioration sensible. 4 qualifient à l’inverse l’amélioration de « faible, timide, légère ». Les autres réponses ne sont pas modalisées, et ne qualifient pas les évolutions positives évoquées. Quelques réponses (moins d’une dizaine) font le lien entre les améliorations évoquées, qui concernent souvent une ou des disciplines ou compétences, et les actions et projets mis en œuvre dans l’école, le collège ou le réseau. 3 évoquent des résultats plus faibles, négatifs ou « variables » en mathématiques (par rapport à la maîtrise de la langue) en raison de la formation davantage littéraire des enseignants du premier degré ou d’une politique qui privilégie la maîtrise de la langue.

• 12 répondants font état d’une évolution négative (14 %), plus 3 évoquant des résultats mauvais, sans rien dire de leur évolution. 4 réponses parmi les 12 font état d’évolution très négative, de baisse « importante, brutale », de résultats « de plus en plus mauvais ».

2 disent que les résultats sont décevants au regard des efforts ou du travail fournis, sans préciser si leur évolution est positive ou négative.

10 répondants contrastent leur réponse en précisant les domaines où ils font état d’évolution positive ou négative (ou stable).

21 répondants (19 %) disent que les résultats sont demeurés stables, que les écarts ne se sont pas creusés, qu’il n’y a pas eu de réel changement…

13 (12 %) disent ne pas pouvoir qualifier l’évolution parce que les données sont trop variables ou instables, soit entre disciplines, soit entre écoles ou établissements, soit (ce sont les plus nombreux) d’une année sur l’autre (effet de cohorte), auxquels on pourrait ajouter les 3 qui affirment qu’il leur est difficile de répondre à la question parce que la population scolaire est trop changeante, ce qui ferait un total de 11 %.

• Référence à des indicateurs

Ces réponses sont parfois très rapides et allusives, sans indication, ni même allusion à des données ou indicateurs précis. 6 répondants utilisent une formule (du type « il me semble, j’ai le sentiment, l’impression, je dirais… ») indiquant le caractère incertain de leur appréciation. D’autres sont moins imprécises, voire plus détaillées, et évoquent différentes disciplines, voire différents items ou compétences, ou certains indicateurs objectifs.

21 réponses (moins de 20 %) évoquent plusieurs indicateurs qui semblent quantifiés, dont les plus fréquemment cités sont les taux de réussite au DNB et les évaluations nationales, les taux d’évitement ou de dérogation et de décrochage étant également parfois cités ou évoqués.

En revanche, les réponses faisant état d’une amélioration du climat scolaire ou de l’image de soi, de l’ambition scolaire des élèves (ou des familles) ne sont jamais référées à des indicateurs.

2. Explications des évolutions positives

89 répondants ont renseigné cette question (81 %), soit un nombre plus élevé que celui qui ont répondu à la question précédente de manière clairement positive. Leurs réponses sont très souvent composites et entrent dans plusieurs des catégories évoquées ci-dessous (dont les effectifs totalisés dépassent donc ce nombre de 89). Les réponses sont assez diverses et dispersées, et peuvent se répartir en une vingtaine de catégories, certaines d’entre elles étant très représentées, d’autres étant beaucoup plus marginales, et donc non significatives. Deux réponses sont hors sujet ou peu compréhensibles. Un répondant dit ne pas savoir répondre.

• Viennent en tête :
 le travail collectif, le travail d’équipe, la concertation : 16 répondants, soit 18 % ;
 la mobilisation, la motivation, l’implication, l’investissement (voire le surinvestissement) des équipes, des enseignants et personnels : 16 répondants, soit 18 % ;
 la stabilité des équipes et des personnels : 12 répondants, soit 14 % ;
 la cohérence des équipes et de leur travail, de l’harmonisation des pratiques, de l’usage d’outils communs, le co-enseignement : 12 répondants, soit 14 % ;
 le travail en réseau, intra- et inter-degrés, la liaison école-collège : 8 répondants ;
 la baisse des effectifs et l’amélioration des taux d’encadrement : 8 répondants, auxquels on pourrait ajouter les 3 qui évoquent les classes dédoublées ;
 les formations : 7 répondants, auxquels on pourrait (peut-être) ajouter les 2 qui évoquent la mise en œuvre du référentiel ou l’enseignement explicite ;
 l’accompagnement et le suivi individuel des élèves (7 répondants, auxquels on pourrait ajouter celui qui évoque les dispositifs de remédiation).

• Viennent ensuite :
 mention du RASED, de l’enseignement spécialisé (maître E), des personnels de santé et social : 5 répondants ;
 le travail avec des partenaires hors éducation nationale (PMI, animateurs municipaux, personnels médico-sociaux…) : 5 répondants ;
 la bienveillance (sans autre précision) : 5 répondants ;
 le climat scolaire (sans autre précision) : 5 répondants ;
 le maintien des exigences (sans autre précision) : 4 répondants ;
 le dispositif PDMQDC : 4 répondants ;
 les projets et actions mis en œuvre par les écoles/établissements ou le réseau : 4 répondants (dont 3 sans autre précision) ;
 la réflexion sur les difficultés des élèves et leur analyse : 3 répondants ;
 le travail avec les familles : 3 répondants.

Des raisons sont évoquées une ou deux fois seulement : changement des caractéristiques ou attitudes des élèves (2), des familles (1) ; mise en place du travail par compétences (1) ; « du temps pour les enseignants » (1) ; devoirs sur table réguliers (1) ; « notre dévotion » (1).

3. Explications des évolutions négatives ou nulles

63 répondants ont renseigné cette question (57 %), soit moins que concernant les évolutions jugées positives, mais néanmoins beaucoup plus que le nombre de répondants ayant répondu de manière clairement négative à la question 7.1. Leurs réponses sont elles aussi souvent composites et émargent à plusieurs critères ou catégories. L’éventail des raisons évoquées est encore plus large et moins hiérarchisé que concernant les raisons des évolutions positives. Deux réponses sont hors sujet ou peu compréhensibles. On note une réponse « NSP » et une autre : « je préfère ne pas émettre d’hypothèse ».

Viennent en tête :
 l’évocation du milieu et des difficultés sociales, de la paupérisation-précarisation des familles et des quartiers : 9 répondants, auxquels on peut ajouter les 5 qui évoquent l’absence ou la quasi absence de mixité sociale, et les 3 qui évoquent la concentration d’élèves en difficulté, ce qui ferait un total de 27 %. ;
 la formation insuffisante des enseignants et des personnels, parfois évoquée en rapport avec des catégories d’élèves spécifiques (allophones, élèves à besoins particuliers…), ou d’enseignants (débutants, contractuels…) : 8 répondants, soit 13 % ;
 les pratiques et choix pédagogiques, qui ne changeraient pas ou changeraient de manière inadaptée ou au risque d’effets pervers : 8 répondants (13 %), dont 5 évoquent de possibles effets pervers de la focalisation sur certaines disciplines (les « fondamentaux ») sur les autres, ou des classes dédoublées sur la surcharge des niveaux supérieurs ;
 les comportements et les attitudes des élèves (manque de travail, d’investissement, d’ambition…) : 7 répondants ;
 l’instabilité de la population scolaire, caractérisée comme « mouvante », et les arrivées importantes d’élèves en cours d’année ou de cycle : 6 répondants.

Viennent ensuite :
 le turnover des enseignants : 4 répondants
 les phénomènes de fuite, d’évitement (« fuite des cerveaux vers le privé ») : 4 répondants ;
 le climat scolaire (sans autre précision) : 4 répondants (dont un déplore vivement le laxisme dans la gestion de son établissement) ;
 les fréquents changements d’orientation ou de directives ministérielles ou administratives : 3 répondants, auxquels on peut ajouter celui qui déplore la lourdeur bureaucratique ;
 les effectifs, le nombre élevé d’élèves par classe, la taille des écoles : 3 répondants, auxquels on peut ajouter les 2 qui évoquent la dégradation des conditions d’exercice (précarisation du métier, surcharge de travail) ;
 l’insuffisance du travail école-collège : 3 répondants ;
 le manque d’aide et de disponibilité de la part des partenaires extérieurs que sont les structures de soin et de suivi des élèves à besoins particuliers : 3 répondants, auxquels on peut ajouter les 2 qui font référence aux difficultés de prise en charge de ce type d’élèves ;
 le manque d’implication, de repères, de codes… des familles : 3 répondants ;
 le manque de soutien et de pilotage interne à l’éducation nationale : 2 répondants.

Des raisons sont évoquées une seule fois : la mise en œuvre de la réforme du collège ; l’épuisement et le découragement des collègues.

QUESTIONS 8 ET 9 : ÉTAT DES LIEUX 2014 – 2019 - ÉVOLUTION DES MOYENS HUMAINS

Q 8.1 Avez-vous le sentiment qu’entre 2014 et aujourd’hui les difficultés sociales dans votre réseau / votre école / votre collège se sont : accrues / réduites / sans changement notable / je ne peux pas répondre ?
Q 8. 2 Quels sont les éléments sur lesquels vous fondez votre réponse ?

Évolution enseignants PREMIER DEGRÉ
Q 8.3 Quel est approximativement le pourcentage de néo-titulaires ?
Q 8.3 bis Ce pourcentage est en baisse / stable : en augmentation / je ne peux pas répondre
Q 8.4 Quel est approximativement le pourcentage de personnels affectés dans votre réseau depuis moins de deux ans (première ou deuxième année dans votre réseau) ?
Q 8.4 bis Ce pourcentage est en baisse / stable : en augmentation / je ne peux pas répondre
Q 8.5 Quel est approximativement le pourcentage de contractuels ou vacataires ?
Q 8.5 bis Ce pourcentage est en baisse / stable : en augmentation / je ne peux pas répondre

Évolution enseignants SECOND DEGRÉ
Q 8.6 Quel est approximativement le pourcentage de néo-titulaires ?
Q 8.6 bis Ce pourcentage est en baisse / stable : en augmentation / je ne peux pas répondre
Q 8.7 Quel est approximativement le pourcentage de personnels affectés dans votre réseau depuis moins de deux ans (première ou deuxième année dans votre réseau) ?
Q 8.7 bis Ce pourcentage est en baisse / stable : en augmentation / je ne peux pas répondre
Q 8.8 Quel est approximativement le pourcentage de contractuels ou vacataires ?
Q 8.8 bis Ce pourcentage est en baisse / stable : en augmentation / je ne peux pas répondre

Q 8.9 Depuis 2014, combien de fois ces fonctions ont-elles été occupées par des personnes différentes ?
Adjoint.e du collège ou directeur.trice de SEGPA
Chef d’établissement du collège
Coordonnateur.trice
Formateur.trice REP
IA-IPR référent.e
IEN

Q 9 Quelle évolution des moyens humains constatez-vous ces dernières années ?

1. La situation sociale des écoles, collèges ou réseaux (questions 8.1 - 8.2)

Une question interroge sur la situation sociale des écoles, collèges ou réseaux (les difficultés sociales ont-elles évolué, et comment ?). 253 répondants se sont exprimés. Elle est complétée par une question qui leur demande de préciser les éléments sur lesquels ils se fondent pour le dire.

Les réponses à cette question montrent s’il en était besoin que les situations locales sont variées en éducation prioritaire car les quartiers changent du fait d’une part à des travaux conduits, notamment par l’ANRU, relativement au bâti et d’autre part ont leur vie propre en fonction de leur positionnement dans l’ensemble d’une offre de logement au plan local. L’avis de la majorité des répondants rejoint l’analyse portée par des organismes comme l’observatoire des inégalités qui montre que les inégalités se sont accrues dans notre pays (10).

10. https://inegalités.fr/Rapport-sur-les-inégalités-en-France-edition-2019

Une grande moitié des répondants voit une évolution négative de la situation sociale, tandis qu’un gros quart ne voit pas de changement.

Il est particulièrement intéressant de voir ce que les 16 répondants (6 %) qui voient une difficulté sociale réduite utilisent comme indicateurs. Cinq d’entre eux ne précisent rien. Les onze autres évoquent essentiellement une amélioration du climat scolaire, des résultats scolaires et une réduction du décrochage scolaire. Aucun n’indique d’indicateurs sociaux. Aussi on peut considérer que de fait personne n’évoque vraiment d’amélioration des situations sociales des quartiers. Les évolutions positives indiquées par ces répondants sont davantage le fait du travail des professionnels en charge qu’un fait social.

On peut craindre que cela signifie que les opérations relatives à l’urbanisme, notamment conduites par l’ANRU dans bon nombre de réseaux, et les opérations relatives à la mixité sociale, notamment conduites par les conseils départementaux aient pour l’instant peu d’effet vraiment lisibles à partir du prisme scolaire. Il y aurait matière à d’autres évaluations sur ce point.

Les autres répondants montrent clairement que certains indicateurs sociaux sont devenus monnaie courante en éducation prioritaire. On donne ci-dessous quelques réponses très significatives de l’ensemble des réponses qui montrent clairement comment les professionnels de l’éducation prioritaire sont désormais bien informés des indicateurs à suivre afin de mieux estimer l’effet réel du travail réalisé (rappelons que ces extraits présentent en majuscules les mots les plus employés dans les réponses à cette question 8-2). On verra toutefois que le nouvel outil élaboré par la DEPP : « l’indice de position sociale » n’est encore que peu utilisé et il y aurait un enjeu important à le faire mieux connaître car il devient une référence incontournable dans l’analyse des situations scolaires locales. On trouvera ci-dessous des réponses significatives obtenues avec le logiciel Hyperbase qui met en majuscule les mots les plus utilisés sur lesquels repose la significativité de chaque réponse :

 Le NOMBRE de BOURSIERS au TAUX 3, les INTERVENTIONS du FONDS SOCIAL de plus en plus NOMBREUSES. La MOINDRE qualité de l’habitat est à l’ORIGINE d’un TURNOVER IMPORTANT des FAMILLES.
 EMPLOI, TAUX de parents en détention, TAUX d’ENFANTS en grave DIFFICULTÉ scolaire, NOMBRE d’équipes éducatives.
 AUGMENTATION du TAUX de BOURSIERS au collège, AUGMENTATION des PCS DÉFAVORISÉES, diminution de l’indice de position SOCIALE.
 Le TAUX de BOURSIERS, la progression de l’utilisation des FONDS SOCIAUX, la croissance massive de la part des FAMILLES relevant de PCS DÉFAVORISÉES. Notre collège est extrêmement ségrégué, SITUATION qui s’aggrave depuis plusieurs ANNÉES.
 AUGMENTATION des DIFFICULTÉS SOCIALES (trafic de drogue dans le QUARTIER, punaises de lit, NOMBRE de demandeurs d’asiles en AUGMENTATION)
 Plus de CHÔMAGE dans les FAMILLES, un GRAND NOMBRE de FAMILLES monoparentales, de NOMBREUX DÉMÉNAGEMENTS, VILLE considérée comme la troisième plus pauvre du Pas de Calais, fermeture de NOMBREUX commerces dans la VILLE.

2. État des lieux relatif aux « ressources humaines » (questions 8.3 - 8.9 et 9)

La question des « ressources humaines » est traitée par les répondants principalement par réponse aux questions fermées ici travaillées. Toutefois, le problème est souvent évoqué parmi les obstacles au bon fonctionnement de l’éducation prioritaire dans les diverses autres questions de l’enquête.

2.1 Enseignants du premier degré

Les réponses données à ces questions montrent tout d’abord que même si les répondants à l’enquête sont principalement issus du premier degré, nombreux sont ceux qui sont peu informés des statuts des personnels : dès la première des questions, il y a 55 personnes qui ne répondent pas à la question et 68 qui disent qu’elles ne peuvent pas répondre (soit 32 % des 213 répondants à cette question) La situation est comparable pour la question suivante mais encore plus marquée pour la troisième question posée concernant les vacataires ou contractuels :

Globalement dans les réponses ce qui domine c’est l’idée de la stabilité avec dans certains cas davantage d’augmentations que de baisses. Autrement dit les politiques conduites pour faire en sorte que les enseignants les plus qualifiés exercent en éducation prioritaire n’atteignent pas leur but. En outre la stabilité des personnels enseignants ne s’améliore pas. Il serait particulièrement intéressant de voir quelles sont les raisons de l’amélioration des situations quand elles existent car on peut penser qu’il y a d’autres motifs que les indemnités qui permettent à des équipes de se stabiliser dans certains réseaux.

2.1 Enseignants du second degré

S’agissant des personnels du second degré, les informations disponibles dans les réseaux relativement aux statuts et stabilité des personnels sont encore moins connues. Cela tient sans aucun doute au fait que les répondants du second degré sont beaucoup moins nombreux que ceux du premier degré mais on pourrait s’attendre à ce que dans les réseaux les deux degrés travaillant ensemble, les informations soient bien partagées. Ce n’est manifestement pas le cas puisque très peu de répondants à l’enquête traitent ces questions.

Compte tenu des faibles taux de réponses à ces questions, il faut être très prudent, toutefois on constate que là encore (à part un petit frémissement de la baisse des nombres de néo-titulaires), la situation est principalement à la stabilité ou à une possible augmentation dans certains réseaux. Là encore il serait intéressant de pouvoir aller plus loin en se donnant les moyens de comprendre comment se stabilisent certaines équipes.

2.2 Encadrement, formateurs et coordonnateurs

La situation de l’encadrement, des formateurs (FEP et CPC) et des coordonnateurs est un peu mieux connue des répondants à l’enquête. Il apparaît clairement que la profession jugée la plus stable dans les réseaux est celle des coordonnateurs. Cela est souvent mentionné dans les réponses aux autres questions et notamment dans les réponses concernant le pilotage. Ce sont les adjoints du second degré qui par ailleurs tournent le plus vite. Il est clair que la rapidité des changements est considérée comme préjudiciable à la continuité d’une politique locale.

IMAGE QUESTION 8-9

Il est très intéressant de voir que les répondants, dont on rappelle qu’ils sont principalement du premier degré, ne répondent pas ou disent qu’ils ne savent pas à des taux assez élevés. C’est le cas à 70 % d’entre eux s’agissant des formateurs EP. Cela s’explique de deux manières : d’une part parce que cette profession est nouvelle, d’autre part parce qu’elle n’est présente le plus souvent que dans les réseaux REP+ et non dans les REP. Pour les IA-IPR le taux est également élevé à 60 % : cela s’explique par le fait que c’est souvent une fonction nouvelle qui n’existait initialement que dans les anciens Réseaux Ambition Réussite, mais aussi parce que l’IA-IPR référent n’est pas parfaitement identifié dans le premier degré. Les taux de changement des personnes en charge des fonctions d’adjoint de collège ou directeur de SEGPA ne sont connus qu’à 56 % et ceux des conseillers pédagogiques du premier degré qu’à 45 %. Cette dernière information est plus étonnante concernant des répondants principalement issus du premier degré. En revanche les taux concernant les principaux (38 %), les coordonnateurs (32 %) et les IEN (27 %) sont beaucoup plus compréhensibles car des personnes récemment arrivées dans le réseau qui répondent au questionnaire ne sont pas en mesure de dire ce qu’il en était depuis 2014.

Si depuis 2014 il semble normal qu’il n’y ait pas eu de changement ou qu’il y ait eu un changement de professionnels sur la période, en revanche les cas où il y a deux ou trois changements sont beaucoup plus ennuyeux pour la continuité de l’action. La profession la plus stable est celle des coordonnateurs dont on a pu dire qu’ils étaient les chevilles ouvrières des réseaux d’éducation prioritaire.

2.3 Évolutions des ressources humaines

À cette question il n’y a que 143 répondants soit une grosse moitié des répondants à l’enquête. Cela montre encore une fois que les informations sur les questions générales sont inégalement partagées par les personnels de l’éducation prioritaire.

L’analyse des réponses permet de voir que ceux qui répondent ont des idées précises de la situation de leur réseau. Pour en rendre compte, on préfère donner les réponses les plus significatives (rappelons que les mots en majuscules sont les mots significativement utilisés dans les réponses à cette question par rapport à toutes les autres questions. C’est sur la base de leur fréquence que les réponses retenues ici sont considérées comme représentatives des 143 réponses – les termes en majuscules italiques font normalement partie des réponses et ne sont pas comptabilisés).

 Création puis SUPPRESSION des PDMQDC, DÉDOUBLEMENT des CP, ARRIVÉE de vacataires dès la RENTRÉE de SEPTEMBRE.
 1er DEGRÉ, AUGMENTATION du NOMBRE d’enseignants du fait des CP DÉDOUBLÉS. Moins de MOYENS HUMAINS au niveau des ATSEM. 
 au PREMIER DEGRÉ DISPARITION des 2 Professeurs référents et des 3 PDMQDC, CRÉATION des CP puis des CE1 DÉDOUBLÉS au cours des trois DERNIÈRES ANNÉES
 Moyens HUMAINS dans le SECONDAIRE STABLES en valeur absolue et donc en AUGMENTATION RELATIVE compte tenu d’une BAISSE des EFFECTIFS élèves entre 2014 et 2018 – 2019.
 difficulté à pourvoir les POSTES SPÉCIALISÉS (2 POSTES ULIS pourvus par des enseignants non SPÉCIALISÉS, POSTE de MAÎTRE G non POURVU).
 dégradation des MOYENS HUMAINS au profit d’une AUGMENTATION des demandes ADMINISTRATIVES destinées à se justifier, à contrôler, à évaluer, à camoufler, à faire valoir … Ces remarques concernent le PREMIER DEGRÉ.
 Aucune évolution dans notre petite école de REP (pas de MAÎTRE SUPPLÉMENTAIRE, pas de RASED, pas de DÉDOUBLEMENT de nos CP CE1 …)
 la BAISSE radicale de MOYENS HUMAINS concernant l’encadrement des élèves handicapés ou des élèves en difficulté relevant du RASED.
 Une BAISSE des MOYENS : plus de SECRÉTAIRE, plus d’assistant informatique et BCD, plus de MAÎTRES SUPPLÉMENTAIRES, pas de MAÎTRE G dans notre école.
 AUGMENTATION du NOMBRE de professeurs des écoles (politique des CLASSES DÉDOUBLÉES : CP en SEPTEMBRE 2018, CE1 en 2019)
 Dans le 1er DEGRÉ SUPPRESSION des PDMQDC à la RENTRÉE 2017 au profit des CP à EFFECTIFS allégés, mise en place à la RENTRÉE 2018 des CE1 à EFFECTIFS allégés
 PERSONNELS arrivés sur le 2nd DEGRÉ sur 1er POSTE non demandé en AUGMENTATION DEPUIS 5 ans. Les enseignants hors académie arrivent par DÉFAUT sur le DÉPARTEMENT et cherchent dès la première année à rejoindre le DÉPARTEMENT visé au départ.
 la DISPARITION des AIDES ADMINISTRATIVES a eu des conséquences négatives sur la disponibilité des directeurs (point de vue coordonnateur) dans le PREMIER DEGRÉ
 Baisse de l’effectif du RASED, SUPPRESSION du POSTE PDMQDC et du POSTE d’EVS, augmentation du NOMBRE de P.E dû au dispositif ” CP et CE1 à 12 ”.
 Il y a une dégradation alarmante des MOYENS HUMAINS, malgré le DÉDOUBLEMENT des CP - CE1 que la mairie ne peut assumer par manque de locaux et de finances.
 1er DEGRÉ : fin des secrétaires et fin des contrats AIDÉS dans les écoles (agents), fin des interventions MAÎTRE E.
 une BAISSE au collège, avec parfois un sous-effectif au secrétariat ou la vie scolaire, et RÉDUCTION des POSTES dans certaines matières (DEPUIS 2015)
 Plus de PERSONNELS enseignants TITULAIRES ou CONTRACTUELS affectés au collège par DÉFAUT, sans avoir fait le choix de l’EP.

Ces analyses mettent en évidence les augmentations de moyens humains du dispositif des CP et CE1 dédoublés. Mais ils insistent aussi sur les suppressions des secrétariats de directeurs (ou aides administratives) dans les écoles, ainsi que sur les manques de maîtres spécialisés. Ils évoquent également la difficulté de voir nommer des personnes volontaires pour rester sur le réseau.

3. La question des ressources humaines dans l’ensemble de l’enquête

Dans les réponses aux autres questions de l’enquête, le mot « humain » est assez peu utilisé et exclusivement pour parler de « moyens humains », le plus souvent en termes de « manque ». Par deux fois il est évoqué l’importance de relations humaines de qualité pour permettre à une école de bien fonctionner. Les mots « ressources humaines » ne sont utilisés qu’une fois, montrant s’il en était besoin que ce langage technocratique n’a pas prise dans le langage des enseignants.

Pour parler des autres intervenants dans les écoles et collèges des réseaux, nos répondants utilisent le mot « collègues » presque toujours au pluriel (161 occurrences). Ceci pour dire l’importance de « l’accueil des nouveaux », des « échanges constructifs ou conviviaux » avec d’autres, de l’intérêt des « stages » qui favorisent la sensibilisation à de nouvelles possibilités, les travaux en commun.

Quand les répondants parlent des « enseignants » (700 occurrences de ce mot au pluriel), c’est pour parler de la formation, de l’accueil des nouveaux dans le réseau, du remplacement. Il apparaît assez nettement que la question du remplacement est un des sujets de préoccupation car il ne fonctionne pas de façon optimale, gênant en cela les processus de concertation dans le premier degré pourtant prévus par les textes relatifs aux REP+.

Ce qui frappe le plus c’est l’importance de la problématique du « temps » (886 occurrences de ce mot) et de son manque pour la concertation. Il y a un appel vibrant à plus de temps institutionnel pour des échanges dédiés au travail partagé, aux travaux en commun.


QUESTIONS 10 ET 11 : RÉACTIONS DES RÉPONDANTS

Q. 10 Souhaitez-vous ajouter une remarque, un commentaire à ce questionnaire ?

57 répondants ont ajouté des commentaires à leur envoi (18%), qui se répartissent ainsi :
  15 commentent le questionnaire, 5 pour regretter sa lourdeur, 5 pour remercier d’avoir donné cette occasion de s’exprimer :
o Par exemple, « merci beaucoup, il nous a permis également de faire le point sur l’ensemble de nos actions effectuées et encore à mettre en place. » (Directrice)
  7 expriment leur adhésion profonde à la refondation, parfois avec des regrets :
o Par exemple, « La refondation était un magnifique projet, le référentiel de l’EP également - avoir formé des FEP / FA REP + par l’IFE et l’ESEN était innovant. La proximité avec la recherche une avancée phénoménale. Les formats de formation ont beaucoup évolué, les animations pédagogiques sont souvent abandonnées. Malheureusement les pilotes n’ont peut-être pas été suffisamment parties prenantes dans ces changements, pas assez formés. Les directeurs également ». (Formateur REP)
o Par exemple, « j’ai constaté globalement une prise de conscience accrue de nos enseignants, et même de nos pilotes, de ce qu’est un réseau d’éducation prioritaire, nous pensons que pour les prochaines années nous serons à même, forts de cette expérience, d’orienter autrement nos actions. » (Coordonnateur)
  6 font la synthèse ou récapitulent leurs réponses précédentes :
o Par exemple, « la mise en place des 9 jours de formation concertation a été un élément très positif pour les équipes du premier degré. Les temps de pondération au collège ne sont pas toujours efficients. Cela participe d’une forme de clivage entre premier et second degrés. L’inter-degrés n’est toujours pas une réussite. » (Coordonnateur)
o Par exemple, « enseigner en REP + apporte tout son sens à la mission d’un enseignant. Même si cela n’est pas toujours évident face aux incivilités ou agressions de certains élèves, en général, dans l’ensemble, travailler avec les élèves est très gratifiant.
Néanmoins, pour que les choses évoluent vraiment, il ne suffit pas juste de donner de l’argent (en en retirant par ailleurs à d’autres établissements) mais il faut changer les mentalités et cesser le #pasdevague. » (P.L.C)
  5 reviennent sur la question de l’engagement en éducation prioritaire, et sur la politique des ressources humaines : deux pour regretter le manque d’engagement de leurs collègues ou des pilotes, trois pour rappeler un engagement collectif fort.
o Par exemple, « travailler en éducation prioritaire est une véritable vocation. Cela demande un engagement professionnel mais aussi personnel qui est loin d’être reconnu par notre institution. Cela entraine un découragement des personnels et favorise donc le turnover et l’affectation de jeunes PE sur des postes difficiles. » (Directeur)
  4 pointent la situation globale de l’éducation nationale ou la conjoncture politique
o Par exemple, « les professeurs ont besoin de plus de soutiens, de considérations, et besoin d’être écoutés. » (P.L.C)
o Par exemple, « nous ne sommes pas des pions et nous enseignons à des personnes. » (P.E)
  4 demandent l’alignement des REP sur les REP+, notamment pour bénéficier de la pondération :
o Par exemple, « les REP devraient bénéficier des mêmes moyens car j’ai constaté que leur réflexion était beaucoup moins avancée que les enseignants de REP+, ce qui est lié aux nombreux temps de pondération inexistants chez eux et très profitables en REP+. » (CPC)
  3 reviennent sur les conséquences du dédoublement des CP/CE1 et demandent le rétablissement des maîtres+.
  2 dénoncent la marginalisation de l’école maternelle en éducation prioritaire.
o Par exemple, « à l’école maternelle nous n’avons aucun moyen humain supplémentaire. Nous sommes le parent pauvre de l’éducation nationale. Pas de moyens pour accueillir les enfants allophones, pas de RASED ou tellement peu d’interventions que c’est ridicule. Nous sommes les premiers trop souvent à pointer le handicap et à amener les parents à en prendre conscience. Les directeurs d’école du 1er degré ont trop de casquettes, beaucoup moins pour les chefs d’établissement du second degré. » (P.E)
On relève enfin un ensemble de commentaires divers exprimant :
  le regret de n’avoir pu convaincre sa directrice et ses collègues de répondre collectivement,
  le besoin de pilotes stables (2),
  le besoin de préserver la mission des coordonnateurs (2),
  le besoin de soutien et d’accompagnement des enseignants en EP,
  les incertitudes sur les intentions ministérielles sur le cycle 3,
  une réflexion sur les indemnités,
  une interrogation sur les critères d’entrée et sortie d’EP,
  la situation particulière du répondant (« nouvellement arrivée », « ancienne coordonnatrice ») (2).

Q 11 Accepteriez-vous d’être recontacté dans le cadre de cette enquête ?
Si oui, indiquez un nom ou un prénom, ainsi qu’un mail ou un numéro de téléphone pour que nous puissions vous contacter.

86 répondants ont accepté d’être recontactés (soit 32%). Dans le détail, ils se répartissent ainsi (chaque chiffre est mis en regard du nombre total de réponses reçues dans chaque catégorie professionnelle) :

  Premier degré : 49 accords (soit 28 % des répondants du premier degré)
o 31 Directeurs sur 92,
o 12 P.E sur 63,
o 4 IEN sur 15,
o 2 CPC sur 2.

  Second degré : 20 accords (soit 41 % des répondants du second degré), précisément
o 14 Personnels de direction sur 26,
o 5 P.L.C sur 15,
o 1 CPE sur 1.

  Coordonnateurs : 16 accords (soit 39 % des coordonnateurs répondants).

  Autres : 1 accord sur 7.

Ces chiffres témoignent de la confiance que les répondants ont accordée à l’enquête et de leur engagement dans la réflexion à poursuivre sur la refondation de l’éducation prioritaire.

NOTE

 

 

ELEMENT 10

QUATRIÈME PARTIE : QUESTIONS EN DÉBATS

Évaluation des élèves, évaluation du réseau

Ce que dit l’enquête

Il est intéressant de voir comment les propos se partagent très égalitairement entre d’une part un discours sur « les évaluations » (157 mentions) et d’autre part un discours sur « l’évaluation » (153 mentions). L’usage du singulier et du pluriel distingue deux façons d’aborder la question de l’évaluation très différentes.

Dans le cas du pluriel, il s’agit des évaluations nationales ou d’autres évaluations de masse établies localement notamment au niveau des départements. Selon les répondants, ces évaluations donnent lieu à des « analyses » par les enseignants ; le plus souvent elles sont décrites comme devant être « diagnostiques » pour améliorer les choix pédagogiques de l’aide aux élèves. Elles apparaissent, au premier abord, comme étrangères au processus d’enseignement, mais y sont raccrochées par l’idée qu’elles doivent permettre un diagnostic d’une part, et une observation de l’évolution des résultats du réseau, d’autre part. En comparant leurs résultats dans le temps, certains répondants pensent possible de dire quelque chose de leur évolution et en conséquence des effets du projet de réseau. C’est la raison pour laquelle ces « évaluations » sont surtout évoquées en réponse aux questions relatives au pilotage (axe 6) et comme information permettant de justifier de pouvoir parler d’amélioration de la situation du réseau (question 0-1bis : Précisez sur quels éléments vous vous fondez pour estimer qu’ils ont contribué à une amélioration).

Dans le cas du singulier, c’est de l’évaluation en classe dans le cadre du processus d’enseignement qu’il est question. C’est une évaluation par « compétences » dont on pense qu’elle remplace progressivement une évaluation « chiffrée », ce qui en fait une évaluation plus « positive » qui favorise la bienveillance. Cette évaluation est conduite selon diverses modalités notamment relatives à chacune des matières enseignées. Il en est particulièrement question dans les réponses aux questions portant sur l’axe 2 du référentiel car la réflexion est portée sur l’articulation entre l’exigence et la bienveillance dans la double perspective d’un meilleur climat scolaire et d’apprentissages mieux réussis. Souvent la question est reliée à celle de l’inclusion et de la différenciation, l’évaluation en question devant faciliter ces mises en œuvre.

Ces éléments permettent d’ouvrir quelques questions sur l’intérêt et l’importance de l’évaluation dans la classe et dans le réseau.

Évaluation des élèves : comprendre les difficultés rencontrées, faciliter les apprentissages, encourager l’explicitation

L’idée d’une évaluation dite positive, que les répondants expriment sous l’appellation « évaluation par compétences », a une justification essentielle : elle doit donner du pouvoir à l’élève sur ses apprentissages, elle doit donner du pouvoir à l’enseignant sur son enseignement (avoir des marges de souplesse par rapport à des normes rigides, par exemple). Pour cela, elle ne saurait être uniquement un constat. Elle doit déboucher, pour tout professionnel de l’enseignement, sur une interprétation des observations conduites pour permettre la compréhension de ce qui fait difficulté pour l’élève. Dans les réponses à notre enquête, le mot « erreur » n’est utilisé que seize fois (11 fois au singulier et 5 fois au pluriel), toujours pour parler du statut de l’erreur dans l’enseignement et des erreurs des élèves. Ceci témoigne du fait que la préoccupation de l’évaluation des élèves au travail n’est sans doute pas encore assez développée. L’évaluation apparaît essentiellement comme un constat d’écarts et le fait que la question du statut de l’erreur soit peu traitée par les répondants à l’enquête de l’OZP doit nous alerter. Il semble qu’on soit encore loin d’une évaluation qui devrait être conçue pour faciliter les apprentissages des élèves et la qualité de l’enseignement des professeurs. Au-delà des constats, il s’agit de mener l’enquête en y associant les élèves afin qu’ils puissent exposer le raisonnement qui les a amenés aux choix qu’ils ont faits. Il s’agit de s’appuyer sur les erreurs pour permettre aux élèves de les comprendre d’abord, pour pouvoir en tirer parti et les dépasser. Il s’agit de pouvoir mieux expliciter les processus intellectuels qui amènent à la réussite et à l’erreur. Ce faisant on peut contribuer à réorienter le travail intellectuel de l’élève vers les processus les plus à même de permettre les apprentissages.

Cette évaluation-compréhension a un autre objectif essentiel : permettre à chaque enseignant de réorienter son enseignement en fonction des besoins de ses élèves et notamment permettre en amont des cours, sachant quelles difficultés vont rencontrer les élèves des milieux populaires, d’ajuster l’enseignement en permettant notamment aux plus en difficulté de prendre des temps d’avance dans la perspective de l’introduction d’une notion nouvelle. Il ne s’agit pas d’en rabattre sur l’exigence, bien au contraire, il s’agit par cette manière de faire de maintenir un haut niveau d’exigence tout en fournissant aux élèves, dont on sait qu’ils risquent de rencontrer des difficultés, des étayages leur permettant de rattraper les autres élèves.

Évaluation du réseau : comprendre les effets de l’action menée et faciliter les orientations ou réorientations du projet

Cette dimension est très peu présente dans l’enquête même si elle est parfois évoquée lorsqu’il est question du pilotage. Ce qui caractérise principalement le réseau, c’est son lien avec le référentiel qui a servi de base à son écriture, c’est qu’il donne lieu à un projet, c’est son importance pour le pilotage et les personnes qui en sont chargées : pilotes, coordonnateurs, ou les instances notamment le comité de pilotage. Mais l’évaluation du projet de réseau n’est que très rarement mentionnée. On en donne trois citations significatives :

 « Le projet de réseau est en cours d’évaluation pour réécriture. Pour cela, nous bénéficions de l’accompagnement et de l’aide de deux chercheurs de l’IFé (éducation prioritaire). »
 « L’évaluation du projet de réseau et des résultats des élèves depuis 2014 est tout juste amorcée. »
 « Le pilotage s’appuie sur des observations quotidiennes du coordonnateur, mais également sur des évaluations nationales afin d’établir des actions en lien au projet. »

Dans ce qui suit nous faisons quelques propositions inspirées d’un travail conduit au bureau de l’éducation prioritaire en 2015 et utilisé lors des formations de coordonnateurs réalisées à l’ESENESR (devenu depuis IHEEF). Évaluer le projet de réseau :
 C’est se donner les moyens de regarder avec attention ce que l’on veut voir évoluer ; il s’agit d’observer, de mesurer l’évolution des résultats des élèves.
 C’est suivre la mise en œuvre de ce que l’on a décidé de faire et donc l’évolution des pratiques et des actions.
 C’est également observer le contexte dans lequel le projet prend place : évolue-t-il et comment ?
 C’est aussi régulièrement analyser, interroger le projet lui-même, que l’on a pensé, que l’on est en train de réaliser, sa pertinence, sa cohérence.
L’évaluation ne doit pas être ponctuelle mais conçue comme un processus continu d’observations, d’interrogations, d’analyses qui permet d’éclairer les acteurs pour avancer, ajuster, réorienter, poursuivre…

Il est important de tenir un tableau de bord rassemblant des indicateurs organisés autour de ces dimensions. Leur analyse permet de dépasser le constat pour s’interroger, problématiser l’action en cours. Un processus de réflexion collective autour de ce tableau de bord permettra de nourrir le projet en continu, de le réorienter au besoin.

Utiliser les évaluations nationales pour évaluer les élèves et le réseau : à quelles conditions ?

Les évaluations nationales, quelles que soient leurs faiblesses liées aux orientations nationales qui les portent actuellement, doivent permettre d’analyser les besoins des élèves et de mettre en évidence les évolutions du réseau.

Ces évaluations posent, en effet la question majeure de savoir quel est leur but premier : savoir les difficultés des élèves (fonction aval, le professeur doit interpréter les résultats pour comprendre que faire pour répondre aux difficultés rencontrées par les élèves) ou orienter les enseignants vers des compétences à enseigner en priorité (fonction amont : le professeur doit davantage préparer ses élèves sur les compétences évaluées par les tests proposés). Ces évaluations sont mises en œuvre par la DEPP mais définies par la DGESCO et le conseil scientifique. Leur rapport aux circulaires produites récemment par le ministère est instructif. Elles ont, par exemple, été conçues en français davantage pour faire passer les conceptions relatives à la lecture, au lexique et à la grammaire des notes du ministre, pour les imposer aux enseignants comme références indiscutables, que pour permettre aux enseignants de véritablement explorer les besoins des élèves. Il y a là matière à discuter la manière dont on peut véritablement comprendre les difficultés des élèves. Pour cela il ne faut pas prendre en compte qu’un résultat, il faut pouvoir voir l’élève au travail, comprendre sa démarche. Il y a, à cet égard, matière à discuter le développement d’évaluations à support numérique qui risquent de faire perdre en qualité d’information si les hésitations et révisions de l’élève ne peuvent être prises en compte comme peut le faire un enseignant qui observe ses élèves au travail.

C’est aussi en sommant les résultats par école, par collège et pour l’ensemble du réseau, que l’on peut suivre année après année l’évolution des résultats des élèves. Il ne s’agit pas tant de comparer les résultats d’évaluations différentes d’une année sur l’autre (ce ne serait pas pertinent) que de comparer les écarts observés entre le réseau et le niveau académique ou national en fonction des repères diffusés. Avec prudence du fait que les données obtenues sont souvent le fruit de passations diversement réalisées, on peut envisager de tenter de répondre aux questions suivantes : les écarts s’accroissent-ils, régressent-ils, sont-ils stables ? Sur quelles connaissances et compétences ? Ceci doit permettre de réorienter certains objectifs du projet de réseau et éventuellement permettre de décider de mettre en place de nouvelles formes d’action pédagogique dans les classes, de nouvelles formations pour répondre aux besoins ainsi mis en évidence.

Travailler le cœur des apprentissages en milieu populaire : il faut de la continuité dans le pilotage national

Dans les réponses à cette enquête les manières de parler de l’évaluation restent très générales et même si la question de « l’évaluation positive » permet de commencer à parler des pratiques de classe, on reste loin des gestes professionnels mis en œuvre. Le mot « erreur » n’est utilisé que 16 fois dans l’ensemble des réponses et on ne peut percevoir précisément en quoi consiste son traitement dans la pédagogie pratiquée. On voit trop peu encore l’erreur comme une étape dans l’apprentissage.

Le travail pédagogique concret en classe à partir des évaluations nationales n’est presque jamais évoqué et la proposition du référentiel de développer du travail collectif pour assurer les corrections et penser le travail pédagogique nécessaire n’est manifestement pas suivie (« correction » apparaît 3 fois). En outre, la nécessaire discussion sur les usages des évaluations à des fins pédagogiques n’est pas vraiment ouverte, même si l’on a beaucoup progressé depuis quelques années en évoquant une évaluation plus positive et des livrets de suivi. Pour autant, les évaluations diagnostiques, discréditées aujourd’hui par leur usage ministériel à des fins de communication grand public, restent de bons outils, les enseignants ayant besoin de confronter leurs attentes, leurs observations empiriques et les résultats réels à ces évaluations.

Il est important de parler dans les réseaux des analyses qui permettent de comprendre où sont et ce que sont les difficultés des élèves de milieu populaire. Il faut pour cela compléter les constats des évaluations nationales par d’autres évaluations et par des observations des élèves au travail. C’est notamment important pour approcher l’évaluation de l’oral absent des évaluations nationales standardisées.

Les évaluations peuvent être utilisées comme le prévoit le ministère pour développer la différenciation grâce à des remédiations qui viennent après coup. On doit aussi penser qu’il est au moins aussi important, sinon plus, de travailler sur la conception des enseignements dans une optique préventive sachant les types de difficultés que ces élèves vont rencontrer. On privilégie dans ce cas la prévention (citée seulement 13 fois) dont on sait qu’elle est plus efficace que la remédiation.

Pour pouvoir développer les gestes professionnels appropriés à ces perspectives, encore faut-il que le pilotage national soit continu et cohérent avec les perspectives pédagogiques reconnues comme efficaces. On ne peut se contenter de faire baisser le nombre d’élèves par classe si l’on veut véritablement obtenir des évolutions positives des résultats en milieu populaire.

 

Projet et pratiques de classes

Ce que dit l’enquête

Le terme « projet(s) » est bien évidemment très fréquent dans les réponses aux questions de l’enquête (685 occurrences). « Pratique(s) » apparaît deux fois moins avec 313 occurrences. Le mot « projet » est principalement utilisé pour parler des réussites et difficultés (questions 0-1 à 0-2is), il est également très utilisé pour dire l’utilité du référentiel (question 03), l’importance du travail collectif (questions 4-2 et 4-5) et le pilotage (questions 6-1 et 6-2). Le mot « pratique » est utilisé pour évoquer les axes 1, 2 et 5 du référentiel. Il y est question des apprentissages scolaires, de la bienveillance et de l’exigence et surtout de la formation.

Le terme de « projet » est polysémique et le concept flou et très hétérogène. LE projet (au singulier), est évoqué dans sa dimension institutionnelle : LE projet académique, d’école, d’établissement, de réseau, et même de loi ou de territoire. Pour que soit regrettée la complexité d’un mille-feuille administratif peu opérant et qui participe à faire du projet un passage obligé, sans lien véritable avec le quotidien du métier et sans véritable sens pour les enseignants, dans leurs pratiques de classes. « Multiplication des projets : projet REP, projet d’école, projet d’établissement : un seul projet devrait exister ». En témoigne sans doute le fait que dans les réponses des enseignants (premier et second degrés confondus), le terme de « projet » apparait significativement moins souvent que dans celles des directeurs d’école ou pilotes du réseau (IEN, personnel de direction, coordonnateur).

« Les projets » au pluriel se confondent avec « les actions » du réseau :
  Ils sont parfois qualifiés d’innovants, d’ambitieux ou de projet d’ampleur. Ils peuvent être des projets touchant tous les domaines dans une liste très éclectique (projet mathématiques, voile, langue, culturel, jardinage, citoyen, handball, correspondance…).
  Leur rôle peut être de fédérer, de faire du commun, d’être motivants (pour les élèves comme pour les personnels). Ils donnent à voir le réseau, souhaitent le cimenter, lui donner une réalité concrète et visible au risque d’être des vitrines chronophages (ainsi, « les enseignants nouvellement nommés dans une école ou un collège en REP sont "noyés" dans la multitude des projets. Toujours se réunir pour participer aux projets, sont autant d’heures qui pèsent. ») Le projet de réseau peut apparaître de plus en plus comme une « vitrine ».
  Certains projets sont ressentis comme éloignés du collectif enseignants, extérieurs, venus d’en haut (du ministère, de l’Europe... ou des pilotes), des partenaires (la politique de la ville, la municipalité), ou émanant d’une seule personne (ainsi, « aucune priorité n’est définie dans le réseau, le projet est un catalogue d’actions qui se réalisaient plus ou moins au moment de l’écriture du projet. Certaines actions ont été abandonnées car elles reposaient sur une personne qui a quitté le réseau »).
  Les projets en eux-mêmes ne travaillent pas forcément directement les préconisations du référentiel (par exemple enseigner plus explicitement) mais poursuivent l’ambition d’être une porte d’entrée pour les travailler, dans une sorte de « pédagogie du détour ». Ils semblent plutôt « prétextes à », ou « support pour ». Projets et pratiques quotidiennes n’arrivent donc pas toujours à se rejoindre. »
  Certains répondants sont conscients du risque de différencier projet et pratiques pédagogiques et l’expriment : « il faudrait un réel travail de programmation et de projets d’apprentissages basés sur les difficultés de nos élèves. »

Si on peut regretter à partir de ce constat que le projet soit encore trop souvent associé à des actions qui ne permettent pas toujours de toucher l’essentiel, à savoir les apprentissages scolaires ordinaires dans les classes, l’analyse, dans les réponses, des termes associés au mot « pratique » est, elle, très encourageante.

Ces termes témoignent du travail :
  pour fabriquer du commun et de la continuité (harmonisation /généralisation / développement / renforcement),
  pour connaître les pratiques des collègues (échanger /mutualiser/ connaître/ discuter)
  pour réfléchir, s’enrichir/analyser/prendre du recul,
  pour ajuster/améliorer/changer/ modifier/ bouger par l’observation/la confrontation,
  pour gagner en efficacité/conforter.

Et pour certains la synthèse est faite, le projet c’est le cœur de la classe : « la notion de bienveillance est au cœur de notre projet. L’évaluation est repensée. L’exigence est toujours présente », « Beaucoup de travail d’équipe, notamment avec le projet PDMQDC et le développement de l’enseignement explicite ».

Le référentiel et le développement de la formation jouent un rôle essentiel. Ils vont permettre à certains, encore très centrés sur des actions, de cerner ce qui doit faire l’objet de la vigilance pédagogique des équipes, ou de convaincre que le travail sur les pratiques quotidiennes est le projet.
Cette prise de conscience n’est pas simple : dans les réseaux le personnel se renouvelle vite, qu’il s’agisse des pilotes, des enseignants. La compréhension de ce qui est essentiel est de ce fait mouvante, fluctuante, tourmentée par le turnover. L’esprit de la refondation n’est pas passé partout. Ou bien passé et reparti… Certaines réponses sont éclairantes, le réseau « catalogue d’actions plus ou moins périphériques » est encore vivace, une réalité allant de pair sans doute avec la méconnaissance du référentiel, mais qui coexiste avec, chez d’autres, la conscience aiguë que Le projet c’est le travail dans la classe, au cœur de pratiques quotidiennes pour les apprentissages… dans le travail d’équipes et dans la formation.

Des constats aux questions

• Le concept même de projet fait insuffisamment l’objet d’une explicitation collective entre professionnels : à quoi sert-il ? A qui sert-il ? Quel est son rôle principal ? Quelles différences/relations entre « donner du sens aux apprentissages », « explicitation des apprentissages », « pédagogie de projet » ? Ces questions non traitées explicitement par des collectifs de professionnels hétérogènes laissent le champ encore trop libre à des conceptions obsolètes mais encore très vivaces du travail à mener en éducation prioritaire.

• Les conditions de l’articulation de la politique d’éducation prioritaire avec la politique de la ville sont à nouveau à interroger avec la création des cités éducatives et la volonté réitérer d’ajuster les deux zonages. Comment, au-delà d’une articulation et une complémentarité nécessaires et de bon sens, ne pas laisser le travail collectif sur les pratiques et les apprentissages être supplanté par des projets partenariaux qui poursuivent d’autres objectifs ? Projets en partie menés dans le temps scolaire (où les élèves sont captifs) sources de financements, voire d’emplois. Le mot « utilement » de l’axe 3 du référentiel appelle à la vigilance et pour les pilotes à la résistance. Résister pour ne pas laisser l’École et ses acteurs se détourner de ses propres objets de travail. Cette résistance nécessaire pose une fois de plus la question de la formation et plus particulièrement celle des pilotes.

• Trop souvent encore le projet de réseau se réduit à la déclinaison d’actions singulières portées par quelques enseignants dynamiques. Trop souvent encore, la tentation est forte, pour des pilotes et notamment les principaux de collège qui ne se sentent pas d’une grande légitimité pédagogique, d’accepter les sollicitations de partenaires sur des thèmes périphériques à la classe. Il est donc nécessaire de réaffirmer les deux principes suivants :
  Le projet de réseau constitue le cadre général de référence pédagogique et éducative. Il faut veiller à son appropriation collective et à sa consolidation.
  Les projets portés par les cycles constituent la matrice pédagogique du projet de réseau.

 

Autonomie pédagogique et prescriptions pédagogiques

Ce que dit l’enquête

Quelques répondants ont jugé le référentiel inutile, car à leurs yeux il ne faisait qu’énoncer des grands principes, qu’ils ont le sentiment d’appliquer d’ores et déjà. Ils lui reprochent de ne pas donner d’outils concrets. De fait, le référentiel n’a pas vocation à cela, mais dans ce jugement négatif se lit le besoin de disposer d’outils « concrets ».

D’autres répondants, plus nombreux, ont exprimé le besoin d’outils dont l’efficacité est avérée. D’autres encore ont regretté que les formations proposées ne répondent pas à leurs besoins et soient imposées et trop théoriques. Ils insistent en particulier sur la question de la disponibilité et qualité de formateurs durablement attentifs aux besoins de leur public. Parfois ils réclament qu’ils soient plus proches du terrain. D’une manière générale, ils demandent une consultation plus large des enseignants quant à leurs besoins de formation.

Certains répondants interrogent également souvent la question de la formation des formateurs et des pilotes qui ne leur est pas connue ou leur paraît absente ou lacunaire.

Enjeux de la question

Faut-il juger négativement ces demandes et ces regrets ? Face au discours (discours qui devient facilement refrain ou rengaine lorsque le ministère peine à former et accompagner les acteurs) qui prône de faire confiance au terrain pour trouver les solutions aux difficultés rencontrées, de laisser les équipes libres de leur choix au nom du respect de la liberté pédagogique, faut-il souhaiter une livraison d’outils « clé en main », de prescriptions d’outils validés par la science ?

Ces remarques montrent que les répondants s’inscrivent là dans des dilemmes inévitables dans la relation entre praticiens, prescripteurs et formateurs.

La question est d’une actualité brûlante, précisément en 2019 – 2020 avec l’imposition, dénoncée par nombre de répondants, de formations uniquement en français et en mathématiques dans le premier degré et de tests d’évaluation très formatés auxquels ordre est donné de préparer les élèves.

Faut-il pour autant préférer un discours qui prône de faire confiance au terrain pour trouver les solutions aux difficultés rencontrées, de laisser les équipes libres de leur choix au nom du respect de la liberté pédagogique et de la créativité des équipes ?

Faut-il souhaiter une livraison d’outils « clé en main », de prescriptions de pratiques et d’outils validés par la science ?

L’innovation, potion magique ?

Dans le récent ouvrage Pratiques pédagogiques et éducation prioritaire (11), des chercheurs posent la question des effets et des tensions que peut engendrer l’absence de prescriptions pédagogiques, qui va de pair avec l’affirmation que des dispositifs et des outils innovants vont réduire les inégalités scolaires liées au contexte social. Ce positionnement fait courir le risque d’un décentrage des apprentissages fondant la réussite scolaire, d’une pédagogie implicite et invisible, et donne un poids important en éducation prioritaire aux représentations que chacun a des attentes curriculaires, des compétences des élèves, du rôle des familles, et de sa propre pédagogie. Ainsi les résultats décevants de la politique d’éducation prioritaire sont-ils imputés à un défaut de pilotage pédagogique et de mise à disposition d’outils à l’efficacité reconnue. D’où le souhait d’accentuer les prescriptions pédagogiques validées par la recherche, par exemple, la nécessité de mettre en place une pédagogie explicite (tous les élèves n’étant pas égaux dans la capacité à faire le lien entre réussir une tâche et comprendre / construire des savoirs).

Faire de l’innovation et de la créativité des acteurs la clé de la réussite en éducation prioritaire est paradoxal puisque les enseignants néo-titulaires et vacataires y sont nombreux, que les personnels spécialisés dans telle ou telle aide pédagogique manquent, et que les formations peinent à répondre aux attentes. Outiller les acteurs, les doter des instruments disponibles à l’exercice de leur mission est donc un devoir de l’institution.

Pour autant faut-il le faire dans une logique impositive avec des leçons clé en main ? Depuis, le socle commun et des programmes davantage curriculaires ont mis l’accent sur les objectifs à atteindre et ont en conséquence renforcé la responsabilité des professionnels de l’enseignement (devenus corps de catégorie A de la fonction publique) dans la conception et la mise en œuvre de leur enseignement. Il s’agit donc de trouver des voies nouvelles qui donnent toute leur place :
  aux orientations nationales du socle commun comme obligation commune,
  au respect de la responsabilité personnelle de la qualité de son enseignement par chaque enseignant, la liberté pédagogique ayant pour corolaire une obligation de moyens,
  au nécessaire processus collectif d’amélioration des pratiques permettant d’atteindre les objectifs nationaux dans les réseaux d’éducation prioritaire

Il est clair que pour y parvenir il faut engager une réorganisation des responsabilités de chacun des acteurs qui donne sens et force à l’action collective pour la réussite en milieu populaire.

Quelle collaboration entre institution, chercheurs, formateurs et acteurs de terrain ?

L’institution, par le biais de l’encadrement local et académique, est là pour veiller à ce que l’école soit effectivement bienveillante et exigeante, en garantissant l’équilibre entre qualité du climat scolaire, estime de soi, et respect des curricula. Le rôle de la recherche est, pour les membres de l’OZP, de valider les résultats obtenus avec la mise en œuvre d’une méthode, d’un dispositif et de chercher à quelles conditions un dispositif, une méthode, est transférable à grande échelle. Les formateurs n’ont pas à « transmettre » une vérité venue du haut ou d’ailleurs, mais, parce qu’ils sont en contact avec les acteurs, ont à favoriser le diagnostic partagé de la difficulté ou des difficultés d’enseignement qu’on cherche à résoudre, permettre les échanges d’expérience entre les participants à la formation, assurer la présentation et le croisement des différents apports théoriques et des mises en œuvre déjà réalisées, enfin faciliter et accompagner la co-construction, entre pairs, du projet précis qui sera défini pour tel réseau dans tel calendrier conduisant à telle évaluation collective. Ils ont également à rendre les enseignants plus lucides quant à ce qu’ils font vraiment qualitativement et quantitativement. En effet, beaucoup d’enseignants disent « on le fait déjà » quand on évoque avec eux certaines approches, ce qui n’est pas faux, mais n’est vrai qu’occasionnellement, alors que l’efficacité tient à la récurrence : ils savent et peuvent le faire, ce dont il faut leur donner acte, ils doivent le faire de façon récurrente, à quoi il faut les encourager.

Schéma théorique ? Utopie ? Non, si la politique de réduction des inégalités scolaires liées aux inégalités sociales est dotée des moyens nécessaires en temps : temps du formateur, formé lui-même et professionnalisé, temps des formés, qui est toujours un temps long, le processus de formation requérant des allers et retours entre moments réflexifs et moments de pratique au quotidien, temps de l’encadrement, qui permet à un inspecteur d’accompagner réellement un réseau sur la durée, temps des chercheurs, auxquels il est illusoire de demander de mesurer les effets d’un dispositif, d’un outil, d’une méthode quelques mois après leur mise en œuvre pour servir un discours politique.

Pour une prescription pédagogique co-construite

On comprend les répondants qui jugent sévèrement certaines formations auxquelles ils ont participé. Face à l’urgence que vivent des enseignants non aguerris, face au découragement qui peut gagner les enseignants expérimentés qui mettent toute leur énergie à faire réussir les élèves et voient peu l’amélioration des résultats de leur réseau, il n’est pas étonnant que le temps nécessaire à tout processus de formation (analyse de la question / apports théoriques / temps d’acculturation et d’expérimentation / retour sur le discours de formation et confrontation / appropriation et mise en œuvre dans de nouvelles procédures en classe) fasse obstacle. En particulier, la déconnexion apparente entre le propos du formateur, si le temps de la formation est court, et les formés, surtout s’ils n’ont pas la possibilité de « se dire », de partager avec les pairs leur vécu professionnel, conduit à rejeter la formation théorique et à idéaliser la seule formation par les pairs.

L’accompagnement par la recherche ne peut pas se limiter à la présence d’un chercheur reconnu dans un réseau, vu le nombre de chercheurs et l’étendue des besoins. On peut compter sur les « passeurs » des acquis de la recherche qui existent (formateurs éducation prioritaire, conseillers pédagogiques, inspecteurs), à deux conditions : que ces « passeurs » soient effectivement eux-mêmes formés, dans des formations professionnalisantes, et que le temps nécessaire à tout processus de formation soit octroyé aux équipes pour pouvoir découvrir, comprendre, analyser, s’approprier, tester ensemble les outils proposés, en faire l’analyse critique qui permet de les adapter à chaque contexte de réseau. Car s’il y a des généralités à connaître dans les méthodes et les outils proposés tant par la recherche que par l’institution, il y a nécessairement confrontation et adaptation aux réalités spécifiques du lieu d’enseignement où les mettre en œuvre. Cette confrontation et adaptation revient au collectif professionnel que forment les acteurs des réseaux.

On ne voit pas comment on peut imposer une méthode, un outil, un dispositif sans faire adhérer les acteurs aux prescriptions. Il est donc nécessaire de co-construire en formation les pédagogies qui semblent les plus efficaces au-delà des prescriptions de l’institution et de garantir la liberté pédagogique du choix des actions à mettre en œuvre pour répondre aux objectifs institutionnels. Il est également nécessaire que les équipes construisent ensemble leur pédagogie : c’est la convergence des pratiques cohérentes qui permet aux élèves de progresser.

 

Politique nationale / politiques académiques

Ce que dit l’enquête

L’enquête n’aborde pas expressément la question de la division du travail entre les divers niveaux du ministère de l’éducation nationale, entre lesquels se distribuent les décisions concernant l’Éducation prioritaire : le niveau central, le niveau des académies (recteur, DSDEN) et, bien sûr, le niveau local (réseau, écoles et établissements, sans oublier les équipes encadrant une division particulière en collège, et les enseignants conduisant individuellement leurs classes). Mais il n’est pas un répondant qui n’en parle peu ou prou, et toutes les séries de questions s’y prêtent. En effet, la « refondation » de 2014 a voulu remanier la politique en la matière en renforçant l’offre et les directives émanant du niveau central du ministère (le bureau de l’éducation prioritaire) vis-à-vis du niveau académique, alors que ce dernier avait été le principal niveau d’impulsion sollicité lors des relances des années 2000, et qu’auparavant c’étaient plutôt les niveaux départemental et local qui avaient été privilégiés.
En pratique, cependant, la division entre ce qui est imputé par les répondants (en positif ou en négatif) au niveau central et ce qui l’est aux niveaux académique ou local n’est pas toujours facile à reconstituer à partir des réponses. L’opposition binaire entre « l’institution » (qui, supposément, impose du haut et méconnaît la réalité) et le « terrain » (qui se confronte à cette réalité et n’est pas aidé pour le faire) se lit ici ou là dans les réponses. Or cette vieille opposition, issue des luttes syndicales passées des enseignants, obère une saisie fine des responsabilités et des enjeux au sein de l’organisation scolaire. Notons toutefois qu’elle laisse souvent la place dans l’enquête à une vision des choses plus sensible à ce que font concrètement les différents acteurs que les répondants identifient.

Montée en puissance de la politique nationale

La visée de la refondation a été de stimuler, non pas ponctuellement mais sur la durée, les dynamiques locales autour de l’amélioration des apprentissages des élèves de l’éducation prioritaire. Il s’agissait de répondre au grand défi de la politique de l’éducation prioritaire, à savoir faire diminuer les inégalités entre élèves de l’éducation prioritaire et ceux hors éducation prioritaire. L’objectif concret était de réduire l’écart entre les résultats des élèves de l’éducation prioritaire et les autres. Cette réduction des inégalités REP/hors REP est le pari et l’objectif de la politique d’éducation prioritaire conçue comme géographie spécifiée, et ce depuis son lancement en 1981. Or jusqu’ici les résultats n’ont pas été au rendez-vous, malgré certaines réussites locales temporaires. Plutôt que d’abandonner cette politique (hypothèse défendue dans le débat public), la refondation de 2014 a consisté à la renforcer en impliquant l’échelon central du ministère comme jamais auparavant sur ce qui apparaît comme le nœud du problème : ce qui se passe dans les classes, la relation pédagogique, l’effectuation des apprentissages scolaires.
Le bureau compétent de la DGESCO a d’abord travaillé à une révision de la carte qui a permis de s’assurer de l’usage des mêmes indicateurs sur tout le territoire et de réduire le plus possible les éventuels arrangements locaux. Il a ensuite diffusé des outils destinés à orienter et soutenir une action pédagogique cohérente adaptée aux besoins des élèves dans les écoles et établissements de l’éducation prioritaire. Ils ont été élaborés avec l’appui des équipes de terrain lors d’assises régionales de l’éducation prioritaire et de groupes d’experts constitués au ministère (12).

En tirant parti des rapports de l’inspection générale (Rapports Moisan-Simon de 1997, Armand-Gilles de 2006) et de travaux de recherche disponibles, notamment ceux de l’équipe ESCOL sur le rôle des pédagogies invisibles ou implicites dans la production de l’inégalité scolaire. Voir Jacques Crinon et Jean-Yves Rochex, dir., La construction des inégalités scolaires. Au cœur des pratiques et des dispositifs d’enseignement, PUR, 2011.
Il s’agit notamment des préconisations précises adressées aux enseignants (explicitées dans le « référentiel pour l’éducation prioritaire » - janvier 2014), mais aussi de l’octroi aux enseignants d’un allègement de leur temps face aux élèves au profit de la concertation et du travail d’équipe (modulation horaire), du principe d’un temps spécifique de formation sur le temps de travail, du renforcement de l’intégration des réseaux et de leur pilotage. La refondation reprend également des principes anciens de l’éducation prioritaire, comme le partenariat avec les acteurs sociaux et culturels hors école et le travail avec les parents, tout en précisant les conditions pour les rendre opératoires, « utiles ». Pour favoriser le développement des pratiques pertinentes proposées par le référentiel de l’éducation prioritaire, le bureau a aussi conduit avec l’appui des inspections générales, du centre Alain Savary et de plusieurs universitaires des formations de formateurs dédiées à l’éducation prioritaire.

Pression sur le niveau académique

Les lignes d’action ainsi fixées par l’échelon central du ministère dépendaient pour une bonne part de l’échelon académique pour leur mise en œuvre sur le terrain. Pour la priorité 1, « Garantir l’acquisition du lire, écrire, parler (etc.) », des formations devaient être dispensées sur site, un vivier de formateurs compétents mobilisé, des conventions passées au besoin avec les ESPE, etc., toutes choses dépendant de l’échelon académique. Ainsi de suite pour les six « priorités » du référentiel. La refondation faisait porter une forte pression sur l’échelon académique, dont dépendaient a priori la formation et l’accompagnement des professionnels, ainsi que la désignation et l’accompagnement des équipes de pilotage des réseaux, – réseaux qui étaient considérés dans la refondation comme des lieux cruciaux de la cohérence locale de l’action.
Les six axes de l’enquête épousent les six priorités du référentiel. Les réponses montrent que, globalement, l’intervention de l’échelon central pour relancer la politique d’éducation prioritaire en la rendant plus opérationnelle a été perçue et bien perçue. Le référentiel n’est pas unanimement plébiscité, mais il est largement apprécié quand il est connu, ce qui est inégalement le cas selon les catégories de répondants à l’enquête. C’est une « boussole », dit-on, il donne des caps pour l’action professionnelle et permet aux diverses catégories d’acteurs locaux de penser leurs interactions, ce qui témoigne en creux du manque de cap pratique précédemment. Il donne aussi un lexique commun, comme « enseigner plus explicitement » (priorité 1), « exigence et bienveillance » (priorité 2), même si ce lexique n’est pas toujours désambigüisé professionnellement. On l’a relevé dans l’analyse des réponses, la bienveillance est parfois comprise de façon morale, alors que le référentiel souligne qu’il s’agit de concevoir des organisations pédagogiques et de mener l’évaluation des élèves (13).
L’échelon central est tout de même parfois mis en cause, par exemple pour le maintien des affectations au barème dans l’éducation prioritaire, ou pour diverses décisions prises dans la période récente, comme l’arrêt de l’expérience du dispositif PDMQDC à partir de 2017, sans qu’elle ait été évaluée ; ou encore pour la focalisation imposée plus récemment des stages sur le français et les maths. Mais l’échelon académique est clairement l’échelon le plus souvent interpellé. On lui reproche l’affectation de pilotes qui ne donnent pas satisfaction, qui ne sont pas formés, qui se désintéressent du sort du réseau. Des erreurs de casting en quelque sorte : la gestion des ressources humaines à l’échelle académique est mise en cause. On lui reproche aussi un planning et des contenus des temps de formation inadaptés, des formations décidées « d’en haut », éloignées de « la réalité », une mise en œuvre des dédoublements qui complique la tâche des autres niveaux (là encore, il s’agit d’une prescription intervenue postérieurement à la refondation). Par rapport à l’intensité de la mobilisation théoriquement requise de l’échelon académique pour cette refondation, l’enquête (qui exprime l’expérience d’acteurs des réseaux) semble dire qu’il y a eu à cet endroit une défaillance. Il est possible que, tel qu’il est organisé aujourd’hui, l’échelon académique, avec son tandem rectorat-DSDEN, soit trop peu étoffé pour les missions qui lui échoient dans le cadre de la refondation de l’éducation prioritaire, ou en tout cas insuffisamment organisé à cette fin, – sauf exception.
Mais l’analyse des obstacles déplorés par les répondants renvoie aussi à une autre défaillance du système éducatif, défaillance qui n’est pas directement mentionnée dans l’enquête bien qu’elle ait par hypothèse un fort pouvoir explicatif : la carence de la formation initiale des professionnels.

La carence de la formation pédagogique initiale

La formation dont il est question dans l’enquête est la formation continue (ou en-service) des personnels affectés dans les écoles et établissements de l’éducation prioritaire, ce dont la refondation a fait l’un de ses piliers. Mais la formation en-service n’a pu parvenir à des avancées significatives que dans une minorité de réseaux et souvent, dans ces réseaux pour une minorité d’enseignants.

A la lecture des réponses, on peut penser que les reproches qui sont adressés à la formation REP ou REP+ renvoient en réalité pour beaucoup à des carences de la formation initiale des enseignants, spécifiquement à l’absence d’une formation pédagogique initiale consistante. Cette cause des insuffisances de la politique d’éducation prioritaire se situe donc à l’extérieur du système d’action de l’éducation prioritaire et en amont de ce système. La formation pédagogique initiale des personnels relève pour l’essentiel de politiques nationales, comme la définition des contenus des concours de recrutement, ou l’organisation des institutions en charge de la formation initiale (les INSPE aujourd’hui) et les schèmes imposés à leurs maquettes par le ministère.

Il est beaucoup question dans l’enquête, dans la foulée du référentiel, de besoins mal satisfaits relatifs à l’analyse des difficultés des élèves, au travail en équipe, à l’exercice de la liberté pédagogique dans un esprit de responsabilité, à la combinaison de l’exigence et de la bienveillance à l’égard des élèves, à la construction professionnelle des relations entre l’école et les familles, ou encore à la négociation de projets avec des partenaires, etc. Ces dimensions du travail en éducation prioritaire ne sont pas spécifiques à l’éducation prioritaire. Et les compétences requises ne peuvent pas s’acquérir sur le court terme. Elles requièrent un travail de formation long, un processus de formation, impliquant que les formés acquièrent des connaissances, mais aussi modifient des façons d’être et rôdent des façons de faire qui fonctionnent en pratique (on reconnaît le triptyque : savoirs, savoir-être, savoir-faire, déterminant dans la professionnalisation des enseignants). Ces changements à la fois personnels et techniques exigent de la durée et de la disponibilité mentale, ils sont très difficiles à déclencher et mettre en place dans le cadre de formations en-service, forcément brèves, auxquelles les agents participent en étant talonnés par les urgences de l’action.

Typiquement, les formations en-service peuvent ajuster ces dispositions et savoirs pratiques aux nécessités et ressources de terrains spécifiques de l’éducation prioritaire, mais sûrement pas les créer à partir des dispositions et pratiques différentes (et pour certaines contraires) qui constituent les cultures professionnelles. Or la formation initiale en la matière est aujourd’hui embryonnaire et fragile, elle ne résiste pas longtemps aux routines collectives ambiantes, sauf exception (14).
Là est sans doute le véritable talon d’Achille de la refondation. Cette politique table, pour sa réussite, sur des prérequis pédagogiques (cognitifs, éthiques, pratiques) qui n’ont pas (ou insuffisamment) été mis en place lors de la formation initiale. Précisons qu’il ne s’agit pas ici de dénigrer le travail parfois remarquable de certaines équipes d’IUFM, puis ESPE, désormais INSPE. La lacune que nous déplorons est structurelle, elle résulte mécaniquement de l’absence de contrôle de ces compétences dans les concours de recrutement . A défaut, on retrouve ici ou là dans l’enquête les tendances bien connues à attribuer la difficulté aux élèves et aux quartiers, comme des évidences. La catégorisation sociale persiste sous la générosité. L’isolement aussi, même quand on parle d’équipe. Comment en serait-il autrement lorsqu’on n’a pas eu l’occasion, en formation initiale, de suivre concrètement des élèves particuliers (qu’ils soient ou non de milieu défavorisé) et de pénétrer dans la complexité de leurs difficultés d’apprentissage ; lorsqu’on n’a pas travaillé l’éthique professionnelle à partir de l’analyse et la discussion de cas réels ; lorsqu’on n’a pas appris à expliciter ses choix pédagogiques et à les offrir à la discussion ; lorsqu’on n’a pas appris à se positionner en adulte dans un groupe au travail, etc. Autant de réquisits portés par le référentiel de l’éducation prioritaire, mais qui ne sont nullement spécifiques à l’éducation prioritaire. Tous les futurs enseignants devraient être dotés de ces compétences, sauf à devenir de simples exécutants. C’est en tout cas, de longue date, la position des mouvements pédagogiques complémentaires de l’Éducation nationale.
De même que ces compétences ne sont pas spécifiques à l’éducation prioritaire, la politique d’éducation prioritaire n’a pas non plus la possibilité spécifique de les mettre en place, qu’on l’envisage à son échelon national, à son échelon académique, ou encore à son échelon terminal : les réseaux. La refondation a visé à les mettre en œuvre dans les contextes particuliers de l’éducation prioritaire, ce qui n’est pas la même chose. Les contextes de l’éducation prioritaire requièrent des mises en œuvre spécifiques de ces compétences, avec une élaboration collective plus poussée qu’ailleurs. C’était bien le but de la formation en-service ménagée par la refondation que de permettre les ajustements de compétences professionnelles nécessaires et de les accompagner. Nombre de réseaux ont fait en sorte que la formation « en-service » ne soit justement plus ponctuelle ni brève, mais qu’elle s’inscrive dans la durée, de manière filée, avec des allers-retours entre le théorique, la pratique et l’analyse réflexive. L’apport de la recherche a été important pour le développement de cette méthodologie, de même les impulsions au niveau central du bureau de l’éducation prioritaire à la DGESCO à partir de septembre 2016.
Ce que suggère l’enquête, c’est que cette dimension majeure de la refondation a achoppé sur l’insuffisance massive de la professionnalisation initiale des enseignants. Ce constat souligne à quel point la politique de l’éducation prioritaire n’est qu’une parmi d’autres, au sein des politiques de l’éducation nationale. La refondation avait amélioré son rang parmi les autres politiques nationales, mais elle a régressé depuis 2017. Et le référentiel pédagogique, outil de la refondation, est resté circonscrit à l’éducation prioritaire, sans incidence claire dans la formation professionnelle initiale et encore moins dans les concours de recrutement.

 


Cités éducatives, partenariat et cœur de la classe

Ce que dit l’enquête

La terminologie nouvelle de « Cités éducatives » n’est jamais citée par les répondants, le mot « alliance éducative » n’est utilisé qu’une fois. En revanche la question du partenariat est évoquée car elle constitue un fonds ancien et solide en éducation prioritaire (33 mentions de « partenariat » et 154 de « partenaire(s) »). Au nombre des partenaires sont évoqués les services municipaux (dont particulièrement le programme de réussite éducative, PRE), le tissu associatif, les services sociaux et de santé, les institutions culturelles… On voit toutefois que le quartier n’est pas mentionné comme une ressource, comme il pouvait l’être dans les années quatre-vingt-dix. Pour les répondants, la question du partenariat apparaît comme une évidence de leur quotidien. Elle n’apparaît pas, en revanche, comme un acquis de la refondation car celle-ci n’a pas insisté sur cette question mais davantage porté l’idée de l’importance du travail enseignant pour la réussite des élèves. Les motivations actuelles du partenariat ne sont pas interrogées, en revanche sa qualité est posée comme une nécessité.

Une nouvelle orientation pour 80 quartiers
Les ministres de l’Éducation nationale et de la Ville ont présenté le 2 mai 2019 le projet des Cités éducatives. Ce nouveau dispositif interministériel ambitionne de « construire une grande alliance éducative » des acteurs travaillant dans les quartiers prioritaires de la politique de la Ville : services de l’État, des collectivités, associations, habitants. L’objectif politique est ambitieux : rassembler à partir du collège et des écoles des quartiers prioritaires tous les acteurs partageant les valeurs républicaines afin de mieux coordonner et renforcer les dispositifs existants.
Le terme même de Cités éducatives renvoie à une exigence politique forte. Il ne s’agit pas de se contenter d’une simple coexistence d’origines, de cultures, de situations sociales mais de faire ensemble société. C’est l’État, dans la tradition politique française, qui est le garant de l’effectivité de cette appartenance citoyenne. Faire ensemble société doit donc constituer un projet politique porté au plus haut niveau de l’État, bénéficiant de moyens significatifs, et d’autre part articulé avec la connaissance fine des réalités de terrain et les projets portés depuis des années par les acteurs locaux.
Ce nouveau dispositif interpelle directement l’éducation prioritaire. L’école, présentée comme « le creuset de la République », est souvent le dernier service public présent dans ces quartiers et les établissements scolaires concernés par le dispositif appartiennent en très grande partie à l’éducation prioritaire. Est-ce nouveau ? Non, la politique éducative territoriale ne date pas d’aujourd’hui. En 1981/1982, la création des Zones d’Éducation Prioritaire reposait à la fois sur une volonté d’amélioration de la scolarité des élèves et sur la construction ou le renforcement de partenariats avec les autres acteurs locaux (il y avait alors une autre vision des quartiers que la vision qui tend à prévaloir aujourd’hui : espace de ressources et non de seuls problèmes). Quelques années plus tard, la première relance de la politique de l’éducation prioritaire, en 1990, s’inscrivait dans le cadre de la toute nouvelle politique de la Ville.

Intérêt et interrogations face à cette nouvelle initiative gouvernementale
En préalable, il est nécessaire de rappeler que la dégradation des conditions de vie voire la ghettoïsation de certains quartiers ne relèvent pas de la responsabilité de l’institution scolaire : problèmes d’emploi, de transports, d’habitats ségrégués, de regroupements de populations très défavorisées, de sous-équipements médicaux-sociaux, de désertification des services publics… L’école ne saurait prendre en charge ces abandons de politiques publiques qui remontent à loin même si l’ensemble de ces réalités constitue son cadre quotidien d’action.

Une fois de plus, l’initiative interministérielle a été engagée dans la précipitation, bousculant les projets déjà engagés et contraignant les équipes à postuler dans la précipitation. Une fois encore, aucune référence n’a été faite aux politiques éducatives territoriales conduites en France depuis quarante ans. Se priver de l’histoire n’est pas de bon augure pour la réussite du nouveau projet.

Cette question de la mémoire est pourtant déterminante pour qui veut clarifier les rapports entre l’éducation prioritaire et le projet éducatif partenarial. Tout au long de l’histoire de l’éducation prioritaire, en France, depuis 1981, trois conceptions de cette politique sont apparues successivement, se superposant parfois selon les périodes. La conception originelle portée par Alain Savary concevait le projet de zone comme fédérant les actions de l’ensemble des acteurs éducatifs d’un territoire donné. Cette conception n’exonérait pas l’école de ses responsabilités propres dans l’amélioration des apprentissages mais soulignait qu’atteindre cet objectif nécessitait de prendre en compte la vie et l’environnement extrascolaire des élèves. Elle a pu donner lieu à des dérives qui amenaient à oublier l’objectif central de réussite scolaire au profit d’un vivre ensemble construit sur des bases minimalistes. A la fin des années 90, a prévalu une conception davantage centrée sur les apprentissages scolaires et faisant reposer le projet sur les actions au sein des écoles et des collèges. Enfin, au fil des années 2000, a été abandonnée toute perspective de transformation sociale, et a prévalu, dans les textes et discours officiels, une conception individuelle de la réussite scolaire (cf. les modifications apportées au Code de l’éducation par la loi Fillon en 2005).

Ce rappel est nécessaire car le projet des Cités éducatives souffre d’une double ambiguïté : vise-t-on une émancipation collective par l’école, dans l’école et autour de l’école en favorisant l’exercice d’une citoyenneté active pour tous, ou bien veut-on favoriser la singularité et l’épanouissement de chacun dans sa trajectoire individuelle en lui proposant une palette élargie de services ?

A quelles conditions le projet de Cités éducatives peut-il vraiment contribuer à la réussite scolaire de tous ?

Ce projet ministériel passe sous silence la refondation de l’éducation prioritaire engagée depuis 2014. A partir des différents axes du référentiel, les équipes ont défini un projet de réseau qui repose, partout, en premier lieu, sur la volonté d’amélioration des apprentissages scolaires fondamentaux, sur la cohérence et la continuité pédagogiques tout au long de la scolarité obligatoire, sur la transformation des pratiques enseignantes dans le cadre de collectifs professionnels. Ces perspectives doivent être le cœur du nouveau projet.

L’école ne peut être considérée comme un acteur lambda de l’action éducative territoriale. Elle occupe une place centrale et il ne saurait être question de transférer hors l’école la résolution de situations de difficultés qui relèvent de sa responsabilité. La prise en compte de la refondation de l’éducation prioritaire et la nécessité de son évaluation publique avec et pour les acteurs des réseaux constituent une condition impérative à la construction d’une politique partenariale qui ne se réduise pas à un simple affichage ou une collection d’initiatives locales. Sur la base de l’analyse des partenariats existants, notamment concernant la réussite éducative, l’enfance en danger et plus largement tout le secteur médico-social, il y a matière à une réflexion collective pour consolider des pratiques indispensables à la qualité de l’accueil et aux apprentissages.

Le réseau d’éducation prioritaire peut présenter une véritable ressource en termes de pilotage, de coordination et d’évaluation des situations locales. L’expérience de constitution en collectif professionnel peut permettre de dynamiser les actions partenariales dans un souci de coopération horizontale, loin des injonctions administratives qui ne peuvent que nuire à un projet émancipateur. Il faudra donc un pilotage respectueux des acteurs, de leur histoire et de leur projet.

 

L’éducation prioritaire et ses personnels

Ce que dit l’enquête de la question

Le premier constat est que la question n’est pas traitée par les répondants avec les termes « ressources humaines », qui apparaissent extérieurs à leur conception du travail enseignant et de ses conditions. Le second, c’est la relative méconnaissance qu’ont les acteurs de la situation statutaire des personnels, comme cela apparaît en réponse aux questions 8-3 à 8-9. Enfin trois questions dominent les préoccupations des acteurs de l’éducation prioritaire relativement à ce qui est traité par d’autres comme « ressources humaines » : la disponibilité pérenne de ressources (PDMQDC, professeurs référents, RASED, personnels chargés du remplacement notamment), la disponibilité de temps pour l’échange professionnel, les conditions du travail collectif.
L’enquête fait entendre une interrogation latente sur la question du recrutement, qui est au cœur de la gestion des ressources humaines : quand on souhaite que les pilote soient formés, c’est qu’ils ne le sont pas toujours ; quand on souhaite que les membres de l’équipe éducative soient informés des caractéristiques de l’exercice du métier en éducation prioritaire, c’est qu’ils peuvent ne pas l’être, c’est-à-dire ne pas savoir que le travail collectif y est essentiel, qu’il est piloté par un projet, que la formation continue partagée y est indispensable (si on souhaite qu’elle soit obligatoire pour tous les membres du réseau, c’est que certains n’y participent pas).
L’enquête témoigne également de la difficulté dans laquelle les équipes se trouvent lorsque s’y affirment des logiques ou des modes de faire qui s’exercent à l’encontre des valeurs de l’éducation prioritaire ou lorsque les conditions sont telles que les nécessaires controverses en matière de choix didactiques ou pédagogiques se figent en oppositions néfastes au travail collectif.

Les termes du débat pour l’avenir de l’éducation prioritaire
La mise en œuvre de la refondation de l’éducation prioritaire ne saurait s’apparenter à une expérimentation organisationnelle et pédagogique menée à l’initiative d’une association de militants volontaires et bénévoles. Elle ne saurait se situer en périphérie mais bien au centre de l’action et des priorités de l’institution scolaire. A ce titre les questions regroupées sous l’intitulé « Gestion des ressources humaines » doivent être abordées et discutées comme des questions centrales pour la réussite de l’éducation prioritaire. La GRH est l’objet principal du pilotage académique (recrutement des personnes et maintien des fonctions spécifiques) et du pilotage national.
Légitimité des acteurs - continuité du projet - sanctuarisation des moyens - développement et renforcement des collectifs professionnels - reconnaissances de l’engagement professionnel : autant de questions qui s’emboîtent les unes dans les autres.

Légitimité des acteurs
La situation professionnelle de l’ensemble des personnels exerçant en éducation prioritaire traduit, qu’on le veuille ou non, la prise en compte de cette politique prioritaire par les différentes instances de l’Éducation nationale. Ainsi, le taux de personnels néo-titulaires, contractuels ou vacataires, le turnover des personnels ne sont pas sans incidence sur la vie et les projets des réseaux et fragilisent la légitimité des personnels auprès des familles et des partenaires de l’école.
L’institution scolaire a su créer au fil des années différentes fonctions pour répondre aux besoins qu’elle avait repérés : coordonnateurs de zones puis de réseaux, professeurs référents, préfets des études, formateurs REP+. Pour mener à bien leurs missions, ces personnels ont besoin d’être reconnus par l’institution : profils de postes et appels publics à candidatures, procédures claires de candidature et de choix, lettres de mission ou circulaires qui précisent les contours de ce qui est attendu, formation à la fonction, constitution de collectifs spécifiques départementaux et académiques, reconnaissance de la fonction exercée dans le déroulé de carrière.

Continuité du projet
Le temps de l’éducation prioritaire relève du temps long. Il repose sur la cohérence et la continuité du projet de réseau et des pratiques éducatives et pédagogiques engagées. Cela requiert à la fois une adhésion aux valeurs portées par le projet et une stabilité de l’ensemble des acteurs.
L’éducation prioritaire repose sur le principe de l’éducabilité de tous et la volonté de conduire à la réussite l’ensemble des élèves. Ces principes sont mis en œuvre dans le cadre d’une démarche professionnelle collective qui se traduit par un projet de réseau. Ceci constitue donc une culture professionnelle partagée qui doit être requise pour pouvoir exercer dans le réseau. Il est donc nécessaire de prendre connaissance de ce projet pour candidater à un poste du réseau.
Dans le cadre d’une politique définissant une durée de quatre ans pour un projet de réseau, cette durée d’exercice est souhaitable pour l’ensemble des personnels en particulier les pilotes et le coordonnateur.

Sanctuarisation des ressources des réseaux
La réalisation du projet de réseau requiert la stabilité des ressources supplémentaires accordées à l’éducation prioritaire. Ces ressources concernent à la fois les taux d’encadrement plus favorables, un meilleur accueil des enfants de moins de trois ans, le maintien de tous les postes spécifiques du réseau : coordonnateur, enseignants supplémentaires, formateur REP+, remplaçants pour assurer les temps libérés pour le travail collectif, la formation et les relations avec les parents.
L’éducation prioritaire doit occuper une place… prioritaire dans les choix de gestion des recteurs et des DASEN notamment en termes de dispositifs de formation, de nominations et d’octroi de personnels de remplacement.
Développement et renforcement des collectifs professionnels
Le travail des réseaux s’appuie sur des collectifs professionnels regroupant des personnels des écoles et des collèges. Le bon développement de ces collectifs requiert une impulsion et un accompagnement particulier de la part des responsables académiques de l’institution et des pilotes des réseaux. Il est nécessaire d’accorder une grande attention aux besoins exprimés dans les réseaux en termes de :
  Formation : stages de formation sur site en partant des thématiques exprimées par les personnels du réseau sur la base de leur analyse (si possible partagée avec un formateur) des besoins des élèves.
  Concertation : développer le temps de concertation dans les REP et faire en sorte que la pondération du temps de service en collège soit effectivement utilisée pour les actions définies dans le projet de réseau.
  Accompagnement des nouveaux enseignants : un accueil dédié serait systématiquement organisé ; il pourrait se décliner en des temps différents (à la rentrée scolaire puis après quelques semaines d’exercice). Un enseignant référent pourrait être proposé à chaque nouvel enseignant.
  Prises en compte des néo-titulaires : ils ne devraient pas, sauf s’ils sont volontaires être nommés pour leur premier poste en éducation prioritaire. Le devoir de l’encadrement, de proximité (IEN, Principal, coordonnateur) comme académique, est de doter les nouveaux personnels des outils et des références nécessaires au bon exercice de leur fonction.
Le collectif professionnel, à travers ses instances de réseau, est en charge de la réalisation des objectifs définis dans le projet de réseau et validés par les autorités académiques. A ce titre, il définit l’utilisation des moyens supplémentaires accordés pour la durée du projet : postes, crédits. Ces choix font l’objet d’un accompagnement des autorités académiques.
Reconnaissance de l’engagement professionnel
L’ensemble des acteurs du réseau, partageant les valeurs de l’éducation prioritaire, s’engagent professionnellement pour au moins la durée de projet du réseau. a reconnaissance de l’engagement professionnel relève de réponses multiples (accueil dans le réseau, accompagnement au sein de celui-ci, accès prioritaire aux dispositifs de formation…). Au terme du contrat du projet, l’institution scolaire valorise l’engagement des personnels en termes d’amélioration de carrière, de bonifications indiciaires mais aussi de validation de compétences spécifiques développées.
Tous les personnels nommés sur des fonctions spécifiques doivent être volontaires. Ils doivent bénéficier d’une clarification stabilisée de leurs missions, d’une formation initiale spécifique à leur métier et d’un accompagnement personnalisé. L’institution doit mettre en place aux niveaux académique et départemental des collectifs de travail regroupant ces personnels.

 

NOTES
11. Sous la direction de B. Fouquet-Chauprade et A. Soussi, coll. exploration – recherches en sciences de l’éducation, éd. Peter Lang, 2019.
12. En tirant parti des rapports de l’inspection générale (Rapports Moisan-Simon de 1997, Armand-Gilles de 2006) et de travaux de recherche disponibles, notamment ceux de l’équipe ESCOL sur le rôle des pédagogies invisibles ou implicites dans la production de l’inégalité scolaire. Voir Jacques Crinon et Jean-Yves Rochex, dir., La construction des inégalités scolaires. Au cœur des pratiques et des dispositifs d’enseignement, PUR, 2011
13. Voir aussi « Bienveillants et exigeants », Les Cahiers pédagogiques n° 542, janvier 2018, coord. Danielle Manesse et Jean-Michel Zakhartchouk.
14. Voir l’étude faite par Sylvain Broccolichi et ses collègues de l’INSPE d’Artois, sur les néo-titulaires qu’ils ont suivis dans leur démarrage : Sylvain Broccolichi, Christophe Joigneaux et Stéphan Mierzejewski, Le parcours du débutant. Enquêtes sur les premières années d’enseignement à l’école primaire, Artois Presses Université, 2018.
Seule la filière d’EPS offre une formation initiale – et un concours – plus orientés sur la professionnalisation

 

INDEX DES SIGLES

ANRU Agence nationale pour la rénovation urbaine
AP Accompagnement personnalisé
ASH Adaptation scolaire et scolarisation des élèves handicapés
ATSEM Agent territorial spécialisé des écoles maternelles
AVS Auxiliaire de vie scolaire
BCD Bibliothèque centre de documentation
CAF Caisse d’allocations familiales
CAFIPEMF
Certificat d’Aptitude aux Fonctions d’Instituteur ou de Professeur des Écoles Maître Formateur
CASNAV Centre Académique pour la Scolarisation des Nouveaux Arrivants et des enfants du Voyage
CC3 Conseil de cycle 3
CEC Conseil Écoles – Collège
CE1/CE2 Cours élémentaire première / deuxième année
CM1/CM2 Cours moyen première / deuxième année
CNESCO Centre national d’étude des systèmes scolaires
COPIL Comité de pilotage
CP Cours préparatoire
CPE Conseiller principal d’éducation
CRESAS Centre de recherche de l’éducation spécialisée et de l’adaptation scolaire
DEPP Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance
DGESCO Direction générale de l’enseignement scolaire
DNB Diplôme national du brevet
DSDEN Direction des services départementaux de l’Éducation nationale
« Maître E » Enseignant (membre du RASED) chargé des aides spécialisées à dominante pédagogique
EANA Élèves allophones nouveaux arrivants
EMC Enseignement moral et civique
ENT Environnement numérique de travail
EP Éducation prioritaire
EPI Enseignements pratiques interdisciplinaires
ESPE École supérieure du professorat et de l’éducation
FEP Formateur Éducation prioritaire
« Maître G » Enseignant (membre du RASED) chargé des aides spécialisées à dominante rééducative
GPDS Groupe de prévention contre le décrochage scolaire
GS Grande section (de maternelle)
IA-IPR Inspecteur d’académie - Inspecteur pédagogique régional
IEN Inspecteur de l’Éducation nationale
IFE Institut français de l’éducation
IG Inspecteur général
INSPE Institut national supérieur du professorat et de l’éducation
IUFM Institut universitaire de formation des maîtres
LEC Liaison École- Collège
LSU Livret scolaire unique
OEPRE Ouvrir l’école aux parents pour la réussite des enfants
OZP Observatoire des zones prioritaires
PDMQDC Plus de maîtres que de classes
PLC Professeur de lycée et collège
PMI Protection maternelle et infantile
PPRE Programme personnalisé de réussite éducative
PRE Programme de réussite éducative
RASED Réseau d’aides spécialisées aux élèves en difficulté
REP Réseau d’éducation prioritaire
REP + Réseau d’éducation prioritaire renforcé
SEGPA Section d’enseignement général et professionnel adapté
ULIS Unité localisée pour l’inclusion scolaire
UPE2A Unité pédagogique pour élèves allophones arrivants

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