> VII- NIVEAUX D’ENSEIGN. de la Maternelle au Lycée. Interdegrés et Socle commun > Collège unique > Un socle commun pour un collège unique (Claude Lelièvre dans Les Cahiers (...)

Voir à gauche les mots-clés liés à cet article

Un socle commun pour un collège unique (Claude Lelièvre dans Les Cahiers pédagogiques)

4 janvier 2006

Un socle commun pour un collège unique

La question du collège commence dès le début de la cinquième République. L’ordonnance du 6 janvier 1959 de Jean Berthoin, ministre d’un gouvernement dirigé par Charles de Gaulle, prolonge la scolarité obligatoire de deux ans et la porte à seize ans révolus pour les enfants qui auront six ans à partir du premier janvier 1959.

La mesure ne sera donc effective qu’à partir seulement de 1967. Et c’est le début des complications et de la confusion car, entre le moment de la décision (qui aurait dû être accompagnée d’une redéfinition de l’instruction obligatoire approfondie que l’on pouvait attendre de cet allongement) et le moment où la prolongation de la scolarité obligatoire devient effective, la réforme Cappelle-Fouchet de 1963 institue un Collège d’enseignement secondaire (le CES) qui réunit « sous le même toit, comme le dit le ministre Fouchet, toutes les formes d’enseignement entre la fin des études élémentaires et la fin de la scolarité obligatoire ».

Une logique de rassemblement des filières en un même établissement, qui a pour but essentiel de faciliter une bonne orientation de tous les bons élèves en vue d’un recrutement élargi des élites, s’est substituée à la priorité de définir pour tous la bonne fin de la scolarité obligatoire allongée, l’instruction renouvelée et approfondie nécessaire à tous.

Le traité de Rome, signé en 1957, vient d’instituer l’Europe communautaire. La mise en orbite par l’Union soviétique, en 1957 également, du premier satellite terrestre – le « Spoutnick » – interpelle l’ensemble des pays de l’Ouest : qu’en est-il de la suprématie scientifico-technologique des uns et des autres, de la « bataille des cerveaux » ? C’est dans ces circonstances que Charles de Gaulle, en bon nationaliste moderne, met en œuvre sa politique prioritaire en matière d’enseignement : le développement volontariste des enseignements supérieurs. De la fin des années cinquante à la fin des années soixante, le nombre d’étudiants est multiplié par 2,5. Le budget du supérieur, en francs constants, fait plus que suivre puisqu’il est multiplié par 4.

Mais il faut alimenter ce recrutement élargi des élites, en mettant au point un dispositif d’orientation qui puisse capter tous les bons élèves ; la déperdition d’élèves capables en fait de poursuivre des études longues en classe fin d’études (dans les écoles communales) ou, en cours complémentaires (dans les CEG. Collèges d’enseignements généraux) doit cesser.

Puisque chaque type d’établissement a tendance à garder ses bons élèves, on crée un seul type d’établissement (le CES) qui regroupe toutes les formes d’enseignement (la voie I, là filière longue des lycées ; la voie II, la filière courte des CEG ; et la vole III dite « transition pratique »). Le collège à filières est né qui est avant tout une gare de triage pour capter tous les bons élèves et les mener vers des études longues.

Le collège va être dominé désormais par la question de l’orientation d’une part, et réglé « idéalement » par la culture requise pour l’élite d’autre part. Nous avons beaucoup de mal à sortir de ces orientations, de cette problématique. Et cela d’autant plus que le recrutement élargi des élites (pour une politique nationale dans une concurrence internationale intensifiée) a pour effet secondaire une certaine « démocratisation » On fait effectivement un bond vers « l’élitisme républicain », « le recrutement socialement élargi des élites » réclamé depuis l’entre-deux-guerres par la mouvance politique radicale-socialiste qui, cherchait à mettre en place une « École, unique ».

C’est le premier sens de la notion de démocratisation. Mais il en existe un autre, apparu plus tard, dans le cadre de la Libération et du mythique Plan Langevin-Wallon de 1947. Comme l’a dit très clairement Wallon dans sa célèbre conférence de Besançon, en 1946, « Il y a deux façons de concevoir l’enseignement démocratique. Il y a d’abord une façon individualiste qui paraît avoir prédominé dans la période de l’entre-deux-guerres : c’est poser que tout homme, tout enfant, quelle que soit son origine sociale, doit pouvoir, s’il en a les mérites, arriver aux plus hautes situations dirigeantes […] C’est une conception qui reste individualiste […]. Aujourd’hui, nous envisageons la réforme démocratique de l’enseignement sous une forme beaucoup plus générale […]. Notre conception démocratique de l’enseignement envisage, elle, une élévation totale de la nation, quelle que soit la situation occupée, ou plutôt quel que soit le travail et quelles que soient les fonctions qu’auront à accomplir tous les individus dans la société ».

Nécessité d’un « savoir commun » [...]

Extrait de cahiers-pedagogiques.com du 04.01.06

Répondre à cet article