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Des élèves d’un collège ZEP parlent de leur avenir

5 décembre 2006

Extrait de « Libération », le 04.12.06 : Vétérinaire ou pilote, et les pieds sur terre

Dans un collège d’une banlieue lyonnaise sensible, les élèves sont souvent plus ancrés dans la réalité.

Mère : « au foyer ». Père : « Je sais pas. » Traduction off d’un enseignant : chômage. Dans ce collège réputé sensible de Vaulx-en-Velin, dans la banlieue de Lyon (Rhône), les enfants, plus qu’ailleurs, semblent ignorer la profession de leurs parents. Souvent sans modèle professionnel, ils sont aussi, du coup, peu nombreux à savoir ce qu’ils veulent faire plus tard. Mais quand ils ont une idée, ils évoquent des métiers bien plus divers que les jeunes issus de milieux plus favorisés. Etrangement, les chanteurs ou danseurs sont ici minoritaires : on parle plus volontiers pour les filles de vétérinaire, médecin, pédiatre, prof de français, coiffeuse, caissière ; pour les garçons d’électricien, chauffeur de taxi ou pilote d’avion. Même si la Fédération française de foot peut trouver, ici encore, de quoi monter plusieurs équipes.

Plus qu’ailleurs aussi, les enfants semblent conscients des difficultés du marché du travail. Samira, Raïd, Kader, Mohamed, Ouafa et leurs petits camarades de 5e et 6e âgés de 10 à 13 ans, sont étonnamment au parfum. Pour trouver un emploi aujourd’hui, « il faut travailler bien à l’école », « se bouger les fesses », « avoir des bacs », « parler bien le français ». Il ne suffit pas de « se claquer les doigts » (Raïd, 11 ans), car, « même avec un diplôme, c’est dur, il n’y a pas assez de place » (Nadia, 10 ans). Sans compter que, des fois, « le patron regarde où tu habites et alors il veut pas t’embaucher » (Ouafa, 12 ans), ou que l’ « on a pas les papiers qu’il faut » (Pierre, 11 ans, au papa congolais fraîchement débarqué).

Il n’empêche, la volonté d’y arriver est plus forte. « Il faut faire de son mieux pour que le patron nous remarque, car c’est lui qui décide » (Samir, 11 ans), « bien travailler même si le patron est méchant » (Samia, 12 ans). Quitte à user de stratégies étonnantes : « Pour ne pas qu’il me vire, je démissionnerais avant » (Ouafa, 12 ans), ou « j’aurais deux travails [sic] comme ça si j’en perds un, je prendrais l’autre » (Samia, 12 ans). Car chômeur est quand même « un métier à risque, ça fait peur » (Raïd, 11 ans). Il faut « lire le journal, passer plein de coups de téléphone, envoyer une lettre avec ton prénom et tout ce que tu sais faire ». Ultime solution : « Tu fais plein d’enfants et après tu as plein d’allocations familiales » (Lilian, 12 ans), car certains « font exprès de pas travailler, et d’être payés par les RMI » (Kader, 11 ans).

Luc Peillon

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