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Le directeur d’école "a autorité sur l’ensemble des personnes présentes dans l’école pendant le temps scolaire" (JO du 15.08.23). L’analyse du Café. Autres réactions

16 août 2023

Décret n° 2023-777 du 14 août 2023 relatif aux directeurs d’école
NOR : MENH2315039D

[...] « Missions relatives au fonctionnement de l’école

« Art. R. 411-10. - Le directeur d’école veille à la bonne marche de l’école maternelle, élémentaire ou primaire dont il a la charge et au respect de la réglementation qui lui est applicable. Il prend toute disposition utile concernant l’organisation et le bon fonctionnement de l’école pour que celle-ci assure sa fonction de service public. A ce titre, il a autorité sur l’ensemble des personnes présentes dans l’école pendant le temps scolaire. Il réunit et préside le conseil d’école et le conseil des maîtres.

« Art. R. 411-11. - Le directeur d’école procède à l’admission des élèves sur production du certificat d’inscription délivré par le maire et après avis du conseil des maîtres, répartit les élèves dans les classes et les groupes.
« Il organise l’accueil et la surveillance des élèves ainsi que le dialogue avec leurs représentants légaux.
« Il veille à la qualité des relations avec les familles, les représentants légaux des élèves et les représentants élus des parents d’élèves.
« A l’appui du contrôle exercé par chaque enseignant, le directeur assure le suivi de l’assiduité des élèves de l’école qu’il dirige conformément aux dispositions de l’article R. 131-5 et suivants.

« Art. R. 411-12. - Le directeur d’école organise les élections des représentants des parents d’élèves au conseil d’école selon les modalités qu’il fixe après consultation du conseil d’école.
« Il veille au respect du règlement intérieur de l’école par tous les membres de la communauté éducative.

« Art. R. 411-13. - Le directeur d’école répartit les moyens d’enseignement, contribue à l’organisation du service des accompagnants des élèves en situation de handicap affectés dans l’école et fixe les modalités d’utilisation des locaux scolaires pendant les heures et périodes au cours desquelles ils sont utilisés pour les besoins de l’enseignement et de la formation.
« Il arrête, après avis du conseil des maîtres, le service des instituteurs et des professeurs des écoles.

« Art. R. 411-14. - Le directeur d’école organise le travail des agents communaux.
« Dans le cadre du plan particulier de mise en sûreté adopté dans les conditions prévues par les dispositions de l’article L. 411-4, il prend toutes dispositions, en liaison avec les autorités administratives compétentes, pour assurer la sécurité des personnes et des biens, l’hygiène et la salubrité de l’école sur le temps scolaire.

« Sous-section « 2
« Missions relatives au pilotage pédagogique de l’école

« Art. R. 411-15. - Le directeur conduit le projet pédagogique d’école.
« Il s’assure du suivi pédagogique et de la continuité des apprentissages de tous les élèves entre l’école maternelle et l’école élémentaire et entre l’école élémentaire et le collège.
« Il anime et coordonne l’équipe pédagogique. Il assure l’intégration des membres nouvellement nommés dans l’équipe pédagogique. Il organise la coopération entre l’ensemble des professeurs, les autres personnels éducatifs de l’école et les intervenants extérieurs au sein de l’école.
« Il veille à la diffusion des instructions et programmes officiels ainsi qu’au bon déroulement des enseignements.

« Art. R. 411-16. - Le directeur engage des actions, coordonne les projets pédagogiques et soutient les initiatives permettant à l’équipe pédagogique d’améliorer l’efficacité de l’enseignement dans le cadre de la réglementation et des programmes d’enseignement en vigueur.
« Il réunit en tant que de besoin l’équipe éducative prévue à l’article D. 321-16.

« Art. R. 411-17. - Le directeur peut participer à la formation des directeurs d’école.

Extrait de legifrance.gouv.fr du 15.08.23

 

Directeur d’école : Le décret est publié

 » Il a autorité sur l’ensemble des personnes présentes dans l’école pendant le temps scolaire ». Vous entendez le soupir de contentement à droite ? « Autorité », sans adjectif. Après un très long parcours, dont les dernières étapes ont été la loi Blanquer puis la loi Rilhac, il y a une autorité dans chaque école. Concrètement cela ne va rien changer au pouvoir réel du directeur qui reste toujours totalement démuni. Mais idéologiquement, la droite a enfin abattu, grâce à E. Macron, la petite république des professeurs voulue par Jules Ferry.

« On a une institution emprise encore et encore de Jules Ferry et ses préceptes… J’ai l’impression que l’Education nationale est restée dans cette philosophie. Et tant qu’ils y resteront, on n’y arrivera pas ». Les propos du sénateur Les Républicains J Grosperrin, le 4 juillet 2023, résonnent alors que parait, au J.O. du 15 août, le décret relatif aux directeurs d’école.

Le nouveau décret ressemble surtout à l’ancien…

A vrai dire, ce nouveau texte modifie de façon marginale le décret précédent de 1989. Le directeur d’école appartient toujours « au corps des instituteurs ou au corps des professeurs des écoles ». Il est nommé moment par le Dasen. Il peut être révoqué de sa fonction à tout moment. C’est une différence fondamentale avec un vrai personnel de direction.

Il « veille à la bonne marche de l’école maternelle, élémentaire ou primaire dont il a la charge et au respect de la réglementation qui lui est applicable. Il prend toute disposition utile concernant l’organisation et le bon fonctionnement de l’école pour que celle-ci assure sa fonction de service public ». », c’est mot pour mot ce que disait déjà le texte de 1989.

Le directeur admet les élèves. Il organise l’accueil et la surveillance. Il arrête, après avis du conseil des maîtres, le service des enseignants. Il organise le travail des agents communaux, toutes tâches déjà prévues par le décret précédent. » Il anime et coordonne l’équipe pédagogique. Il assure l’intégration des membres nouvellement nommés dans l’équipe pédagogique. Il organise la coopération entre l’ensemble des professeurs, les autres personnels éducatifs de l’école et les intervenants extérieurs au sein de l’école. Il veille à la diffusion des instructions et programmes officiels ainsi qu’au bon déroulement des enseignements ». Rien de neuf.

En théorie, le directeur d’école doit avoir trois ans d’ancienneté comme instituteur ou professeur des écoles pour être inscrit sur la liste d’aptitude. Mais le décret prévoit les nominations « en cas de vacance d’emplois » d’instituteurs et professeurs des écoles non inscrits sur la liste. Preuve que la fonction est très attirante…

Car, en ce qui concerne la carrière, le décret ne reconnait aux directeurs d’école qu’une bonification d’ancienneté de trois mois chaque année. Là s’arrête le soutien accordé à des personnels qui sont responsables de la bonne marche de leur école. Le régime des décharges n’a été revu que de façon marginale en 2022. Et le décret ne prévoit aucune aide pour des personnels qui croulent sous les tâches administratives.

Le grand changement c’est l’autorité…

Le grand changement apporté par le nouveau décret, c’est l’autorité. « Il a autorité sur l’ensemble des personnes présentes dans l’école pendant le temps scolaire » pour la « bonne marche » de son école.

Il a fallu des années pour que le mot apparaisse dans le décret relatif aux directeurs d’école. Les pères fondateurs de l’école publique avaient jugé que l’école où doivent aller tous les jeunes français doit donner une éducation démocratique. Et que celle-ci passe par un fonctionnement démocratique dans l’école elle-même. C’était vu par Jules Ferry comme la garantie d’une école vraiment républicaine. C’est cette tradition qui a été brisée par la loi Blanquer puis, après son échec, par la loi Rilhac.

Dans la loi Blanquer, un amendement Rilhac prévoit des « écoles publiques des savoirs fondamentaux » dirigées par le principal du collège de rattachement, c’est à dire un vrai personnel de direction, appartenant à un corps spécifique. La résistance des enseignants et des maires fait échouer ce projet. Cela signe l’échec de la transformation des écoles en établissement public, une vieille demande de la droite (F Fillon) et de l’OCDE.

G. Attal (déjà !), C Rilhac et JM Blanquer repartent à l’assaut avec la loi Rilhac. Après plusieurs coups de théâtre, dont un déshabillage complet du projet de loi à l’Assemblée nationale, en mars 2021 le projet de loi, revu par un Sénat majoritairement à droite, prévoit une « autorité fonctionnelle » pour le directeur d’école. Arrive le moment où E Macron promet à Marseille un fonctionnement managérial des écoles, avec un directeur d’école qui nomme les enseignants. Dans la foulée, en octobre 2021, la loi Rilhac est adoptée avec les modifications apportées par le Sénat. Cette loi préfigure la majorité qui se dessine actuellement : un projet voulu par JM Blanquer à travers C. Rilhac, soutenu par la droite et validé par E Macron. La gauche (LFI, PS, PC, écologistes) a voté contre le texte.

Fruit de la division syndicale

Du coté des syndicats enseignants, la mesure divise. En mars 2023, au moment de la consultation sur le projet de décret, les syndicats étaient divisés. » Ces projets évitent des glissements managériaux qui méconnaîtraient la culture professionnelle de l’école et comportent des avancées en particulier en matière de carrière » estimait Stéphane Crochet, secrétaire général du Se-Unsa. » Ces projets de décrets reconnaissent la fonction et les missions du directeur, enfin « , se réjouissait Jean-Marc Marx secrétaire fédéral du Sgen Cfdt. » Cela permet d’introduire la fonction de directeur dans le code de l’éducation alors qu’auparavant elle était implicite « . Mais « pour nous cela ne va pas assez loin, il n’y a pas la liste de délégations de compétences ». « Dans les discussions que nous avons eu avec le Ministère, on voit bien qu’il n’y a pas de garde-fou sur la question de l’autorité hiérarchique », disait Guislaine David, co-secrétaire générale du Snuipp Fsu. « Ils ne veulent pas décliner l’autorité fonctionnelle dans le décret, malgré nos sollicitations. Le manque de clarté sur ce que signifie cette autorité engendrera des interprétations différentes d’un territoire à l’autre, d’un IEN à l’autre. Et lorsque nous demandons que soit clairement inscrit dans le texte que le directeur n’est pas supérieur hiérarchique, le ministère refuse. Quand on lie ce projet de décret au Pacte, on voit bien que tout concourt à donner une autorité ». Pour elle, même si « il y a un risque de transformation de l’organisation de l’école. Cette autorité isolera le directeur du reste de l’équipe ».

C’est que cette évolution ne correspond en rien à une demande des professeurs des écoles (PE). Un sondage organisé par le Snuipp Fsu en mars 2020 montre que seulement 13% des enseignants du premier degré sont favorables à l’autorité du directeur d’école. 85% sont contre. En 2019, une consultation organisée par le ministère de l’Education nationale établit que seulement 11% des professeurs des écoles sont pour un statut de directeur d’école. 25% sont pour que le directeur évalue les enseignants. L’idée d’un directeur manager n’est soutenue que par 2% des PE.

Ce que montrent ces enquêtes c’est que les directeurs d’école demandent une aide matérielle et pas une autorité. Or , sous le premier quinquennat Macron, les aides administratives ont été supprimées. Il ne reste au directeur d’école que « l’autorité » sans les moyens concrets de l’exercer. Le Pacte leur donne un nouvel outil : l’attribution des missions. Encore celle-ci doit-elle se faire après avis du conseil des maitres.

La revanche sur Jules Ferry

Dans un remarquable travail sur la direction d’école (La direction d’école à l’heure du management, PUF), Cécile Roaux estime que « si la loi Rilhac a le mérite de remettre sur le devant de la scène la question du pilotage de l’école primaire, il est à craindre qu’elle ne modifie pas réellement le quotidien des directions d’école et leur pouvoir d’action… Même avec une autorité fonctionnelle, le directeur devra se débrouiller avec ce dont il dispose, c’est-à-dire pas grand-chose ». Et il serait bien téméraire, sans statut, sans garantie d’emploi, d’entrer en conflit avec son équipe enseignante.

Dans la vie concrète des écoles, le décret n’aura qu’un effet insignifiant. Quatre années après le suicide de Christine Renon, « directrice épuisée« , le décret n’apporte aucune aide significative à la mission de direction. Rien n’est prévu non plus pour améliorer le pilotage des écoles.

Aboutissement d’années de tentatives constantes pour faire avancer les idées du management dans l’éducation, il ne reste à la droite et au gouvernement que cette satisfaction. Ce que Fillon, de Robien et Chatel ont échoué à faire, Emmanuel Macron vient de le réussir. L’exception française d’une école primaire gérée par une petite république des professeurs disparait. C’est la revanche sur Jules Ferry.

François Jarraud

Le décret
Le décret de 1989
Les syndicats divisés sur le décret
C Roaux : Le directeur à l’heure du management
Les textes de 2022 sur les décharges
La loi Rilhac adoptée
Loi Rilhac : le Sénat donne de l’autorité
La loi Brisson veut aller plus loin
La loi BLanquer et l’école du socle

Extrait de cafepedagogique.net du 16.08.23

 

La loi Rilhac est passée, « enfin » ?

La loi Rilhac, on en parle depuis un moment.

Quand une partie des directeurs et directrices y voyaient, avec espoir, la reconnaissance de leur charge de travail et la possibilité de bénéficier de décharges plus justes et réellement soulageantes, de nombreux personnels se sont mobilisés pour lutter contre une nouvelle forme de hiérarchie locale, dont les écoles du 1er degré étaient jusque là exemptes. À coté de cela, certain·es directrices et directeurs se réjouissaient de l’autorité que leur conférerait une telle loi.

Après la promulgation de la loi en décembre 2021, un décret important paraît le 14 août 2023 et confirme les craintes que nous avions :

Quelques passages choisis…

– L’autorité…

– Un lien de subordination exacerbé…

– Des profs des écoles directeurs et directrices aux Perdir (personnels de direction) : pauvres collègues…

– La hiérarchie dans le second degré ou pourquoi l’anti-hiérarchie ?

– Se défendre contre la hiérarchie : la centralité du collectif et de la syndicalisation

Jacqueline Triguel, SUD éducation 78 et collectif Questions de classe(s)

Extraits de questionsdeclasses.org du

 

SUR TWITTER

 

@FSU_SNUipp

📰 "Une évolution qui ne correspond pas à une demande des prof des écoles" Sondage FSU-SNUipp 2020 : 13% des PE fav à l’autorité du dir d’école. 85% sont contre. 2019 consultation du MEN : 11% des PE pour un statut de dir d’école. L’idée d’un dir manager soutenue par 2% des PE.

 

@pauldevin59
Nouveau décret sur l’autorité du directeur.
« Avec son obsession d’instaurer l’autorité comme principe de pilotage, la droite laisse ses intentions idéologiques submerger la réalité concrète de l’école aux dépens des élèves comme des enseignants. »

 

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