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Éric Debarbieux, L’école face à la violence. Décrire, expliquer, agir, Armand Colin, octobre 2016 : présentation et entretien du Café pédagogique avec l’auteur

20 octobre 2016

Dernier ajout le 14 novembre 2016

Éric Debarbieux, L’école face à la violence. Décrire, expliquer, agir,
Armand Colin, collection U, EAN : 9782200616083, 10/2016

Présentation éditeur

Table des matières

 

Une œuvre de combat

"Ce livre est une œuvre de combat, d’intellectuels engagés contre tous les simplismes et les manipulations interminablement présentes avec le thème de l’insécurité. En ce sens, son projet a évolué : il ne s’agit pas d’un simple « point d’étape » mais d’une présentation de recherches qui entendent éclairer des débats vifs en France, mais aussi ailleurs, dans un contexte de globalisation des populismes et de la xénophobie".

Eric Debarbieux sait de quoi il parle. Chercheur puis délégué ministériel à la violence scolaire sous deux quinquennats, Eric Debarbieux a réussi deux exploits. Le premier a été de faire durer une politique éducative sous deux majorités opposées dans un pays où il n’y a généralement pas de continuité. Le second a été à chaque fois de désamorcer les réactions populistes et de ramener l’action ministérielle sur ce que la recherche montre comme l’essentiel : la lutte contre le harcèlement.

Des pistes d’action
L’ouvrage qu’il publie le 19 octobre réunit les meilleurs spécialistes internationaux pour partager des conclusions. "Le lecteur de cet ouvrage sera frappé par la régularité et la solidité des résultats obtenus, qui se retrouvent peu ou prou dans tous les chapitres, mais mieux éclairés par l’un d’entre eux : nécessité d’une approche systémique et multifactorielle qui tienne compte des contextes externes et internes à l’établissement scolaire (Benbenishty et Astor), fort lien entre violence, harcèlement et discrimination (Dagorn et Rubi), nocivité d’une démarche uniquement répressive et excluante et remise en cause de la « Tolérance Zéro » (Skiba et Losen), prise en compte des souffrances d’où émerge le comportement menaçant (Cornell), stratégies de prévention basée sur le climat scolaire (Blaya et Cohen ; Masson et Montoya), nécessité d’une intervention précoce (Egide Royer) comme d’une formation véritable, si peu mise en place (Beaumont).

C’est en s’appuyant sur cette dimension internationale et un large éventail d’études que l’ouvrage n’hésite pas à s’attaquer à des questions chaudes. Face à la violence scolaire, toujours fortement chargée d’émotion, s’il faut apprendre à gérer les crises, le recours aux caméras et aux portiques est inefficace et même contre productif. Car la violence est d’abord interne et renvoie au fonctionnement pédagogique des établissements. Lutter contre la violence scolaire c’est s’intéresser au climat scolaire c’est à dire par exemple à la justice disciplinaire dans l’établissement.

La nécessité du travail en équipe
Là dessus le chapitre rédigé par E Debarbieux et B Moignard est très éclairant. Il souligne l’inégalité des enseignants devant le risque : un enseignant a 4 fois plus de risque d’être victime de violence dans les établissements défavorisés que dans les plus favorisés. Il évoque les divergences de perception de la violence entre direction d’établissement et enseignants. Il montre comment la façon dont sont appliquées les réformes fragmente les équipes , créent des tensions et augmentent les risques de violence. Pour les adultes des établissements scolaires le grand défi reste de faire équipe alors que le fonctionnement institutionnel et la philosophie dominante de l’Ecole poussent en sens contraire.

Ethnicisation, islamophobie et violences
Deux chapitres travaillent sur un sujet encore plus chaud : le lien entre violence scolaire et notre conception de la laïcité. Hélène Bazex et Jean François Bruneaud par exemple montrent le lien entre ethnicisation en milieu scolaire et risque de radicalisation. " Il apparaît possible de considérer que la laïcité et la victimisation de la population musulmane sont instrumentalisées par les tenants d’un Islam radical. Et que la singularité du modèle français dans ses difficultés à soutenir une véritable dynamique inclusive puisse participer à la construction d’un djihadisme « à la française ». Il apparaît cependant que les vulnérabilités individuelles que présentent les personnes radicalisées sont également impliquées dans leur réceptivité aux principes du djihadisme", écrivent-ils.

Livre de réflexion et d’action, cet ouvrage compte. Il répond aux questions soulevées par la vague d’incidents qui touchent en ce moment les établissements scolaires. Il invite à ne rien céder aux populisme et à faire évoluer l’école. Et d’abord à soigner al bienveillance entre ses adultes.

François Jarraud

Entretien avec Eric Debarbieux
Propos recueillis par François Jarraud
[...]

Le livre tourne autour de l’idée d’améliorer le climat scolaire. Mais que peut faire un professeur ?

On a prévu de publier un ouvrage là dessus l’année prochaine sur les violences dans la classe. Le livre qui parait aujourd’hui traite du collectif. Il y a une réalité criminologique qu’il faut retenir : quand vous êtes seul et que vous n’avez pas un collectif d’adultes pour vous protéger vous n’y arriverez pas. Le travail d’équipe est essentiel.

Or on est encore parfois dans un refus du collectif dans les établissements. Cette année par exemple, je constate que les conflits d’équipe ont fortement augmenté dans les établissements. Les difficultés à travailler ensemble sont encore plus fortes. La notion d’équipe reste controversée dans les écoles en France

Les chefs d’établissement, les CPE et les enseignants ont une vision différente de la violence scolaire. Comment faire pour qu’ils aient une position commune ?

Les points de vue doivent se rapprocher. Il faut commencer par un travail sur la bienveillance entre adultes. C’est quelque chose qui n’a pas été assez pensé dans la refondation. Les modes de gouvernance pyramidaux de l’Education nationale sont extrêmement fragiles. Il y a une grande solitude dans toute la hiérarchie intermédiaire. Ca pose des problèmes importants.

Peut on parler de violence institutionnelle ?

C’est un terme que je n’emploie pas. Mais c’est bien ça. Travailler sur le climat scolaire vis-à-vis des adultes comme des élèves c’est travailler contre la violence institutionnelle. Cela concerne l’exclusion. Mais aussi ce qui est relayé dans le livre et dont le Café a déjà parlé, sur le nombre de répondants adultes qui disent avoir été harcelés par des collègues ou la hiérarchie : 14% ! Ce n’est pas rien. C’est même un chiffre supérieur à celui des élèves !

[...]

Ce dont on a besoin maintenant c’est une évolution de fond dans la philosophie de l’éducation. Sur ce point on n’a pas assez progressé.

Extrait de cafepedagogique.net du 19.10.16 : L’école face à la violence : Agir avec Eric Debarbieux

 

Voir aussi
Journée nationale sur le Harcèlement : Premiers résultats, nouveaux efforts

"Un tabou a été brisé". La Journée contre le harcèlement à l’Ecole, le 3 novembre, est ouverte par N Vallaud Belkacem par un bon chiffre : la baisse du taux de harcèlement dans les écoles françaises. Le ministère ne baisse pas la garde. Il annonce de nouveaux outils et lance un nouveau chantier : celui du cyberharcèlement.

Extrait de cafepedagogique.net du 03.11.16 : Journée nationale sur le Harcèlement : Premiers résultats, nouveaux efforts

 

Consulter touteduc.fr du 14.11.16 : Violences scolaires : l’état de la science (ouvrage collectif)

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