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Les mesures sur les ZEP jugées par le SNUipp

17 janvier 2006

Extrait de « Fenêtres sur cours », journal du SNUipp, n°279 : ZEP : réponse en trompe l’œil

Le ministre de l’Education a présenté son plan pour « l’Education prioritaire », le troisième du genre 25 ans après la création des ZEP. Ces mesures applicables dès la rentrée 2006 font piètre figure face aux difficultés scolaires.

Pour leur vingt-cinquième anniversaire, les ZEP ont eu droit à un plan préparé à la hâte en pleine crise des banlieues. En si peu de temps et sans concertation des professionnels qui s’affrontent quotidiennement et depuis des années au problème, le ministre s’en est tenu à ce que l’on sait : les ZEP sont une politique de discrimination positive qui sert normalement à « s’en sortir » et vingt-cinq années n’ont pas totalement réussi à cet égard. Et la « relance » est essentiellement pensée pour le collège. Il n’a retenu qu’une idée : concentrer des moyens en créant trois niveaux. Le premier - EP 1 - concerne les ZEP les plus difficiles qui auront le plus de moyens. EP 2 regroupe la majorité des ZEP actuelles pour qui rien ne changera. Quant à l’EP 3, il s’agit de ZEP dont la sortie du dispositif est prévue sous trois ans.

Le ministre se place ainsi lui-même sur le seul plan des moyens, donnant moins aux derniers pour donner plus aux premiers. A part cela rien de nouveau : « en maternelle, les professeurs des écoles veilleront à faire parler chaque enfant à différents moments de la journée » (sic !) et en élémentaire « les méthodes globales (...) ne seront plus utilisées ». Monsieur de La Palisse n’a qu’à bien se tenir ! Il faudrait plutôt renforcer l’action scolaire là où les difficultés sont cumulées au point d’induire un échec quasiment assuré comme le réclament depuis des années les professionnels de ces secteurs et travailler sur les conditions d’exercice du métier et les moyens à mettre à la disposition des équipes pour réussir au lieu de s’installer dans l’échec (voir par exemple les propositions du directeur de l’OZP en page 29). Le ministre préfère à cela l’annonce : 250 collèges et leurs écoles, les plus sensibles, d’un niveau EP1 se verront rebaptisées « ambition réussite ». La liste des collèges devraient être rendu public à la fin du mois. Ces établissements devraient bénéficier de moyens concentrés sans pour autant que le ministère ne dégage de fonds supplémentaires.

Selon le ministre, cette réforme serait relativement coûteuse. Mais elle n’est pas inscrite au budget 2006 et devra donc se faire par redéploiements ! Les autres écoles non intégrées en EP1 se retrouveront en EP2 et devront se contenter du même « saupoudrage » que dénonce le ministre en parlant de la situation actuelle. Enfin, les écoles EP3 sont appelées à sortir du dispositif d’Education Prioritaire d’ici trois ans.

Une fois de plus, et dans la précipitation, le ministère fait fi des expériences et des études menées ces dernières années : par exemple il a refusé de s’interroger sur la scolarisation des deux ans reconnue par tous comme un des leviers pour aider les enfants des milieux les moins favorisés. L’organisation en équipe pour prendre en charge collectivement, avec des points de vue divers, les difficultés des élèves est évoquée en passant, sans la moindre idée du travail et du temps de concertation que cela nécessite. Question d’autant plus sensible que depuis des années les postes retirés lors des cartes scolaires n’ont pas permis aux équipes de mettre en oeuvre des expériences de diversification des pratiques. Il y a là pourtant à creuser, comme sur la question de l’importance des réductions d’effectifs qui a fait l’objet de multiples controverses.

Même constat au sujet de la formation et de la stabilité des enseignants. Ces écoles de milieux très populaires ont besoin des professionnels expérimentés, engagés dans une dynamique de projets et d’actions. Les mesures ministérielles basées avant tout sur la valorisation individuelle, telles que les inspections régulières, le profilage de postes avec des bonifications de points, risquent à terme d’être contre productives. Elles font l’impasse sur le maître surnuméraire, sur l’équipe et sa capacité à travailler ensemble autour de projets, sa nécessité d’accompagnement avec une formation répondant aux besoins de terrain. Enfin le ministre, si prompt à voir dans la méthode de lecture la grande responsable de l’échec scolaire, est beaucoup moins loquace lorsqu’il s’agit de la situation économique et sociale des quartiers défavorisés et de ses habitants. Ce silence hypothèquerait-il toute politique en direction des territoires ? Il est en effet impossible d’ignorer ce qui se passe autour de l’école.

Sébastien Sihr

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