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Début dans Le Café de la publication d’articles de Bernard Devanne sur la lecture en grande section de maternelle en ZEP

10 janvier 2006

Extrait de « L’Expresso » du 09.01.06 : Lettre ouverte au Ministre de l’Education Nationale

Lettre ouverte de Bernard Devanne

Sa "Lettre ouverte au ministre" met en évidence l’absurdité de la dernière circulaire ministérielle sur la lecture. Bien loin de faciliter les apprentissages, elle les remet en question. "Cet instant de grande section montre... que quelques-uns (c’est le cas de F...) peuvent, dès ce moment, avoir l’intuition qu’au-delà de la réalisation phonographique, se pose le problème de la conformité orthographique. Oui, avant Noël de grande section, F... sait déjà tout cela... D’autres le suivent... Parce qu’il s’agit d’H..., de F..., et de tous ceux qui les accompagnent dans les mêmes apprentissages, parce que se pose pour eux - plus que pour d’autres - le problème de la perte de sens de l’année de CP, et qu’ils courent donc le risque d’un "décrochage" dont on connaît les conséquences, j’imagine que vous, Monsieur le Ministre, pas plus que moi, ne pouvez demeurer insensible."
Nous suivrons, avec Bernard Devanne, les progrès et les difficultés de ces enfants, ballottés par une décision absurde. "Dans le contexte actuel, je me ferai un devoir de publier les résultats individuels, avec les réussites et les difficultés, de ces enfants de grande section en ZEP, afin qu’il soit clair pour tous que leur imposer, l’année scolaire suivante, une méthode " purement syllabique " serait une aberration".

Rendez-vous est pris.

Extrait de la lettre

(...)

L’exemple que je prends est celui d’une grande section en ZEP, qui réunit des enfants d’origines turque, marocaine, mahoraise, etc. H... vient de Syrie, F... vient de Mayotte. Parce que les pratiques conduites depuis la petite section, tout simplement conformes aux programmes, font que l’attente suivante n’est pas irréaliste, la maîtresse demande aux enfants les plus régulièrement scolarisés, en décembre (donc ces dernières semaines), d’essayer d’écrire certains mots sans modèle. Pour H..., c’est le mot "chocolat". Après une aide ponctuelle pour faire retrouver, à partir d’écrits connus, la graphie de la première syllabe, la maîtresse s’éloigne ; lorsqu’elle revient près de H..., celui-ci a écrit "chocola". Dès que la maîtresse commente "C’est bien, mais il y a encore une lettre après le a... ", le voisin d’H...., F..., jette un coup d’œil et lance "Ben oui, à chocolat, y a un t à la fin !".
Cet instant de grande section montre la capacité naissante, pour beaucoup des enfants de la classe, à activer et vérifier des liens entre graphèmes et phonèmes en acte d’écriture ; il montre également que quelques-uns (c’est le cas de F...) peuvent, dès ce moment, avoir l’intuition qu’au-delà de la réalisation phonographique, se pose le problème de la conformité orthographique. Oui, avant Noël de grande section, F... sait déjà tout cela, et en donne des preuves tous les jours. Ses compétences à l’identification de mots nouveaux ne nous font pas dire "F... sait lire", même si nous ne sommes pas loin de le penser ; en tout état de cause, et sauf accident, il saura lire en fin de grande section.

D’autres le suivent, et plusieurs sans doute seront arrivés, au mois de juin ou avant, au stade où il en est lui-même en cette fin de premier trimestre. Dans le contexte actuel, je me ferai un devoir de publier les résultats individuels, avec les réussites et les difficultés, de ces enfants de grande section en ZEP, afin qu’il soit clair pour tous que leur imposer, l’année scolaire suivante, une méthode " purement syllabique " serait une aberration. Parce qu’il s’agit d’H..., de F..., et de tous ceux qui les accompagnent dans les mêmes apprentissages, parce que se pose pour eux - plus que pour d’autres - le problème de la perte de sens de l’année de CP, et qu’ils courent donc le risque d’un "décrochage" dont on connaît les conséquences, j’imagine que vous, Monsieur le Ministre, pas plus que moi, ne pouvez demeurer insensible.

Bernard Devanne,
professeur à l’IUFM de Basse-Normandie

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